Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : LK c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 923

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : L. K.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant d’une révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (456691) datée du 17 février 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Teresa M. Day
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 20 juin 2022
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 21 juin 2022
Numéro de dossier : GE-22-1104

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] Le prestataire a reçu un trop-payé de PAEUNote de bas page 1 d'une somme de 2 000 $, et il doit rembourser ces fonds.

Aperçu

[3] Le prestataire (qui est l’appelant dans la présente affaire) a demandé des prestations régulières d’assurance-emploi le 24 mars 2020Note de bas page 2. L’intimée (la Commission) a approuvé sa demande et, selon les mesures d’intervention d’urgence liées à la pandémie de COVID-19 en place à ce moment-là, elle l’a traitée comme une demande de PAEUNote de bas page 3.

[4] Le 6 avril 2020, le prestataire a reçu un versement initial de 2 000 $. Il a également demandé et reçu des prestations de la PAEU pendant quatre semaines, de la semaine du 22 mars 2020 à la semaine du 18 avril 2020. Il n’a plus demandé de prestations de la PAEU par la suite.

[5] Le 1er juin 2020, il est retourné au travail à temps pleinNote de bas page 4.

[6] Le 27 novembre 2021, il a reçu un avis de dette pour le versement initial de 2 000 $Note de bas page 5. La Commission a expliqué que le montant initial de 2 000 $ était un versement anticipé de quatre semaines de prestations de la PAEUNote de bas page 6. Étant donné que le prestataire n’a pas demandé de prestations de la PAEU après le 18 avril 2020 et qu’il est retourné au travail le 1er juin 2020, la Commission n’a pas été en mesure de récupérer le paiement anticipé des semaines subséquentes de prestations de la PAEU qui lui ont été versées. Il devait donc rembourser les 2 000 $.

[7] Le prestataire a demandé à la Commission de réviser sa décision. Il a accusé réception de l’argent, mais croyait qu’il recevait des prestations d’un programme différent. Il a dit à la Commission qu’il avait été absent du travail jusqu’au 1er juin 2020, mais qu’il avait seulement demandé quatre semaines de prestations de la PAEU (du 22 mars 2020 au 18 avril 2020). Il a soutenu qu’il devrait pouvoir conserver le paiement anticipé de 2 000 $ pour les semaines pendant lesquelles il n’a pas travaillé et n’a pas reçu de prestationsNote de bas page 7.    

[8] La Commission a soutenu qu’il avait reçu 2 000 $ en prestations de la PAEU auxquelles il n’avait pas droit et qu’il doit rembourser cet argent. Le prestataire a fait appel de cette décision au Tribunal de la sécurité sociale.

Question en litige

[9] Le prestataire est-il tenu de rembourser l’avance de 2 000 $ en prestations de la PAEU?

Analyse

[10] Afin de verser plus rapidement la PAEU à la population canadienne, le gouvernement du Canada a modifié la Loi sur l’assurance-emploi afin que la Commission puisse accorder aux parties prestataires une avance de prestationsNote de bas page 8. Le paiement anticipé équivalait à quatre semaines de prestations de la PAEU, soit 2 000 $Note de bas page 9. Normalement, la Commission récupérerait cette avance en ne versant pas de prestations pendant deux semaines après les 12e et 17e semaines de la période de prestations.

[11] La Commission peut réviser toute demande de prestations dans les 36 mois suivant le versement des prestationsNote de bas page 10. Si la Commission décide qu’une partie prestataire a reçu des prestations de la PAEU auxquelles elle n’avait pas droit, elle doit calculer le montant d’argent qui a été versé en trop et en aviser la partie prestataireNote de bas page 11.

Question en litige no 1 : À quel type de prestations le prestataire était‑il admissible?

[12] Le prestataire ne pouvait pas recevoir de prestations régulières d’assurance-emploi. Il devait recevoir des prestations de la PAEU.

[13] Le prestataire affirme qu’il a demandé des prestations régulières d’assurance-emploi et que c’est ce qu’il aurait dû recevoir. Il dit qu’il n’a pas demandé la PAEU et qu’il ne savait même pas de quoi il s’agissait. Lorsqu’il s’est rendu compte qu’il ne recevait pas des prestations régulières d’assurance-emploi, il a pensé qu’il recevait la PCU dans le cadre d’un autre programme complètement. Il estime qu’il devrait recevoir des prestations régulières d’assurance-emploi pour la période où il était au chômage.     

[14] Au moment où le prestataire a demandé des prestations d’assurance-emploi, la loi stipulait que toutes les demandes de prestations régulières d’assurance-emploi établies entre le 15 mars 2020 et le 26 septembre 2020 devaient être traitées comme des demandes de PAEUNote de bas page 12.

[15] Cela a rendu obligatoire le versement de la PAEU pour les demandes d’assurance-emploi qui ont commencé pendant cette période. Il n’y avait aucune disposition dans la loi qui permettait au prestataire de choisir entre les prestations régulières d’assurance-emploi et la PAEU. La loi ne donnait pas non plus à la Commission le pouvoir discrétionnaire de verser des prestations régulières d’assurance-emploi plutôt que la PAEU.

[16] Le prestataire a demandé des prestations d’assurance-emploi le 24 mars 2020. Selon sa demande et son relevé d’emploi, son dernier jour de travail était le 20 mars 2020. Il a reçu des prestations à compter de la semaine du 22 mars 2020Note de bas page 13.

[17] Il ne fait aucun doute que sa demande a été établie au cours de la période de la PAEU entre le 15 mars 2020 et le 26 septembre 2020. Cela signifie qu’il fallait lui verser des prestations de la PAEU.

[18] J’estime que le prestataire n’était pas admissible aux prestations régulières d’assurance-emploi pour la demande qu’il a présentée le 24 mars 2020. La Commission a déterminé à juste titre qu’il était admissible à la PAEU.

Question en litige no 2 : À combien de semaines de prestations de la PAEU le prestataire avait-il droit?

[19] Selon la Loi sur l’assurance-emploi,des prestations sont payables à toute partie prestataire qui y est admissible et qui fait une demande de prestationsNote de bas page 14.

[20] Les parties prestataires qui étaient admissibles à la PAEU et qui ont produit leurs déclarations bimensuelles avaient droit à 500 $ pour chaque semaine de chômage réclaméeNote de bas page 15.

[21] La preuve montre que le prestataire était admissible à quatre semaines de chômage entre le 22 mars 2020 et le 18 avril 2020 et qu’il a fait une demande de prestationsNote de bas page 16. Cela signifie qu’il avait le droit de recevoir des prestations de la PAEU pour ces quatre semainesNote de bas page 17.

[22] Je conclus donc que le prestataire a prouvé qu’il avait droit aux 2 000 $ (4 x 500 $) qu’il a reçus pour les quatre semaines comprises entre le 22 mars 2020 et le 18 avril 2020.

[23] Je conclus également que le prestataire n’avait plus le droit de recevoir des prestations de la PAEU après son retour au travail à temps plein le 1er juin 2020.

[24] Cela laisse la période de six semaines entre la dernière semaine pour laquelle le prestataire a été payé et la semaine de son retour au travail, à savoir les semaines suivantes :

  1. Du 19 au 25 avril 2020
  2. Du 26 avril au 2 mai 2020
  3. Du 3 au 9 mai 2020
  4. Du 10 au 16 mai 2020
  5. Du 17 au 23 mai 2020
  6. Du 24 au 30 mai 2020

[25] Il ne fait aucun doute que le prestataire était admissible à la PAEU pendant ces six semaines. Cependant, il a omis de produire ses déclarations pour demander des prestations de la PAEU pour ces six semaines. Cela signifie qu’il n’a pas droit aux prestations de la PAEU pour ces semaines.

[26] Le prestataire a déclaré qu’il ne savait pas qu’il devait produire des déclarations. Il ne comprenait pas pourquoi il avait reçu le montant forfaitaire de 2 000 $ après avoir demandé des prestations régulières d’assurance-emploi et il croyait qu’il s’agissait d’un autre type de prestations d’urgence. Il a dit que, puisqu’il était au chômage entre le 22 mars 2020 et le 1er juin 2020, il était logique qu’il conserve le versement anticipé de 2 000 $ comme compensation, surtout qu’il lui manquerait encore ce qu’il aurait dû recevoir pendant toute la période où il était au chômageNote de bas page 18.  

[27] Malheureusement pour le prestataire, on ne peut lui accorder la compensation qu’il demande.

[28] Cela est dû au fait qu’il est trop tard pour qu’il présente ses déclarations pour les six semaines de prestations de la PAEU. La loi donnait aux parties prestataires une date limite du 2 décembre 2020 pour demander toute PAEU qui leur était dueNote de bas page 19, et cette date limite est maintenant passée. Bien que je sois sensible à la situation du prestataire, je ne peux pas ignorer la loi ou refuser de l’appliquerNote de bas page 20. 

[29] Cela signifie que le prestataire a seulement prouvé qu’il avait droit à quatre semaines de prestations de la PAEU.

Question en litige no 2 : Combien de semaines de prestations de la PAEU le prestataire a‑t‑il reçues?

[30] Le prestataire a reçu le versement anticipé de 2 000 $ de la PAEU, ce qui signifie qu’il a reçu l’équivalent de quatre semaines de prestations de la PAEU.

[31] Il a également reçu 500 $ en prestations de la PAEU pour chacune des quatre semaines suivantesNote de bas page 21 :

  1. Du 22 au 28 mars 2020
  2. Du 29 mars au 4 avril 2020
  3. Du 5 au 11 avril 2020
  4. Du 12 au 18 avril 2020

[32] En raison du versement anticipé de 2 000 $, le prestataire a en fait reçu 4 000 $, ce qui représente un total de huit semaines de prestations de la PAEU.

[33] Cela signifie qu’il a reçu 2 000 $ (ou 4 semaines) de plus que ce à quoi il avait droit. 

Question en litige no 3 : Le prestataire doit‑il rembourser les semaines de prestations de la PAEU qu’il a reçues, mais auxquelles il n’avait pas droit?

[34] Oui.

[35] La Commission affirme que, normalement, lorsqu’une partie prestataire reçoit la totalité des versements de la PAEU, elle finit par rembourser le versement anticipé en étant exclue du bénéfice des prestations pour les deux semaines après la 12e semaine et la 17e semaine, respectivement. Toutefois, le prestataire a cessé de produire ses déclarations après quatre semaines de prestations de la PAEU et est retourné au travail six semaines plus tard, soit le 1er juin 2020. Cela signifie qu’il n’était pas admissible à la PAEU à la 12e ou à la 17e semaine, et la Commission n’a pas eu l’occasion d’imposer ces inadmissibilités et de récupérer le montant versé sous forme de versement anticipé. Voilà pourquoi un avis de dette de 2 000 $ a été émis au prestataire.

[36] La Commission comprend la situation du prestataire, mais dit qu’il doit rembourser les prestations de la PAEU qu’il a reçues, mais auxquelles il n’avait pas droit.  

[37] Le prestataire a reçu le versement anticipé de 2 000 $ et comprend qu’il représente quatre semaines de prestations de la PAEU. Il admet également avoir reçu les quatre semaines supplémentaires de prestations de la PAEU. Par contre, il soutient qu’il ne devrait pas y avoir de trop-payé lié à sa demande.

[38] Le prestataire a déclaré ce qui suit :

  • Le gouvernement l’a harcelé et [traduction] et lui a « fait du chantage » de diverses façons. Il considère que cette situation liée à l’assurance-emploi n’est qu’une autre chose qu’on lui reproche.
  • Il a demandé des prestations régulières d’assurance-emploi.
  • Lorsqu’il a reçu le montant forfaitaire initial de 2 000 $, il s’est rendu compte qu’il ne s’agissait pas de prestations régulières d’assurance-emploi.
  • Il n’avait aucune idée qu’il recevait la PAEU; il croyait recevoir (l’autre) PCU.
  • Il a reçu un total de 4 000 $. À 500 $ par semaine, cela représente huit semaines de prestations. Il s’est absenté du travail pendant environ huit semaines, alors il se fichait que les paiements cessent.
  • On ne lui a jamais expliqué le fonctionnement de la PAEU.
  • On ne lui a jamais dit que les 2 000 $ étaient un versement anticipé qui serait récupéré plus tard.
  • On ne lui a jamais dit qu’il devait produire des déclarations ou qu’il avait jusqu’au 2 décembre 2020 pour le faire.
  • Le gouvernement s’est organisé pour le confondre de façon à ce qu’il « s’exclue automatiquement » des prestations auxquelles il avait droit.
  • Cela fait partie de la campagne de [traduction] « modification du comportement » du gouvernement pour [traduction] « tromper les gens en les confondant ».
  • Dans son cas, ils ont semé la confusion dans son esprit et maintenant, ils lui font du [traduction] « chantage » pour qu’il leur donne 2 000 $.
  • C’est comme ça que le gouvernement s’en tire en versant aux gens moins que ce à quoi ils ont droit.
  • Il n’a plus droit à six semaines de prestations d’assurance-emploi.
  • Le gouvernement doit corriger la situation en lui permettant de conserver le versement anticipé de 2 000 $ pour compenser les prestations qu’il aurait dû recevoir.

[39] Je comprends la frustration du prestataire par rapport à la situation dans laquelle il se trouve maintenant. Mais je dois convenir avec la Commission qu’il est responsable du trop-payé de PAEU de 2 000 $ qu’il a reçu.

[40] La loi est claire : la Commission a été autorisée et enjointe à verser immédiatement 2 000 $ à titre de versement anticipé de la PAEU à toute partie prestataire ayant fait une demande de prestations d’assurance-emploi entre le 15 mars 2020 et le 26 septembre 2020.

[41] De plus, la PAEU était seulement accessible aux personnes qui ont produit leurs déclarations pour les semaines pendant lesquelles elles étaient au chômage.  

[42] Le prestataire a commencé à faire sa demande de PAEU le 22 mars 2020, mais il a seulement produit des déclarations pour recevoir des prestations pour les quatre semaines allant du 22 mars 2020 au 18 avril 2020. Il est retourné au travail à temps plein le 1er juin 2020, soit six semaines après avoir arrêté de produire ses déclarations. Il a eu la chance que sa période de chômage ait seulement duré dix semaines. Mais comme il n’a pas été en chômage pendant les deux semaines suivant la 12e et la 17e semaine de sa période de prestations potentielle, il n’a pas eu droit au paiement anticipé de PAEU qu’il a reçu pour ces semaines.

[43] Aussi, comme il est trop tard pour présenter une demande de PAEU pour les six semaines de chômage pour lesquelles il n’a pas produit de déclaration (du 18 avril 2020 au 30 mai 2020), il n’a plus droit à d’autres prestations de la PAEU. Cela signifie qu’il ne peut pas conserver comme compensation le versement anticipé de 2 000 $ pour les semaines durant lesquelles il n’a pas reçu de prestations de la PAEU.

[44] Cela signifie également qu’il doit rembourser le versement anticipé de 2 000 $ qu’il a reçu.  

[45] Le prestataire n’est pas en faute dans ce cas-ci. Il n’a rien à voir avec la création de ce trop-payé. Cependant, je ne peux accepter son argument de compensation pour éliminer le trop-payé de sa demande.

[46] Je ne peux pas changer la loi. La loi ne confère tout simplement pas au Tribunal le pouvoir de dégager le prestataire de toute responsabilité à l’égard du trop-payéNote de bas page 22, et je ne peux pas ignorer la loi, même si le résultat semble dur ou injusteNote de bas page 23. Cela signifie que je ne peux pas réduire ou annuler le trop-payé de 2 000 $ lié à sa demande.

[47] Le prestataire soutient qu’il était confus au sujet du programme de PAEU et que la Commission l’a mal informé au sujet de ses droits et de ses obligations. Je suis sensible à son argument, comme je l’ai entendu de la part de nombreuses parties prestataires dans des circonstances semblables. Toutefois, comme il est mentionné au paragraphe 46 ci-dessus, je ne peux ignorer la loi ni faire une exception pour le prestataire.

[48] Le prestataire a deux options :

  1. a) Il peut demander à la Commission d’envisager de radier la dette en raison d’un préjudice abusifNote de bas page 24. S’il n’est pas satisfait de la réponse de la Commission, il peut déposer un avis de demande de contrôle judiciaire auprès de la Cour fédérale du CanadaNote de bas page 25, mais il y a un délai de 30 jours pour faire appel à la Cour fédérale, et le prestataire pourrait avoir à expliquer pourquoi sa demande est en retard.
    ou
  2. b) Il peut téléphoner au Centre d’appels et de la gestion des créances de l’ARC au 1-866-864-5823 et poser des questions sur l’allègement de la dette en raison de difficultés financièresNote de bas page 26. Il devra fournir des renseignements sur sa situation financière aux fins d’examen. 

Conclusion

[49] Le prestataire était admissible à la PAEU et non à des prestations régulières d’assurance-emploi.

[50] Cependant, il n’avait pas droit au versement anticipé de 2 000 $ qu’il a reçu. Cela est dû au fait qu’il a arrêté de produire ses déclarations après quatre semaines, qu’il est retourné au travail six semaines plus tard, et qu’il n’a pas été en chômage pendant les semaines pour lesquelles ce montant forfaitaire lui a été versé.

[51] Cela signifie qu’il doit rembourser le versement anticipé de 2 000 $ qu’il a reçu.

[52] L’appel est rejeté.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.