Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : JP c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 704

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : J. P.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (474631) datée du 19 mai 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Sylvie Charron
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 20 juin 2022
Personnes présentes à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 21 juillet 2022
Numéro de dossier : GE-22-1774

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal de la sécurité sociale n’est pas d’accord avec l’appelante.

[2] La Commission de l’assurance-emploi a prouvé que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite (c’est-à-dire parce qu’elle a fait quelque chose qui lui a fait perdre son emploi). Par conséquent, l’appelante est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploiNote de bas page 1.

Aperçu

[3] L’appelante a perdu son emploi. Son employeur a affirmé l’avoir congédiée parce qu’elle a volé de l’argent à une collègue.

[4] L’appelante ne conteste pas ce qui s’est passé. Elle affirme que l’employeur l’a congédiée en fait parce que son geste a brisé sa relation de travail.

[5] L’appelante dit qu’elle avait des problèmes de santé mentale à ce moment-là, et c’est ce qui l’a amenée à prendre l’argent dans le sac à main de sa collègue.

[6] La Commission a accepté la raison du congédiement que l’employeur a fournie. Elle a conclu que l’appelante a perdu son emploi en raison de son inconduite. Elle l’a donc exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Question en litige

[7] L’appelante a-t-elle perdu son emploi en raison d’une inconduite?

Analyse

[8] Pour décider si l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite, je dois éclaircir deux choses. D’abord, je dois décider pour quelle raison elle a perdu son emploi. Ensuite, je dois décider si la loi considère cette raison comme une inconduite.

Pourquoi l’appelante a-t-elle perdu son emploi?

[9] J’estime que l’appelante a perdu son emploi parce qu’elle a été filmée en train de voler de l’argent dans le sac à main d’une collègue.

[10] L’appelante et la Commission s’entendent sur la raison de la perte d’emploi.

[11] L’appelante a témoigné qu’elle a pris 40,00 $ dans le sac à main de l’employée. Elle a posé ce geste sur un coup de tête. Elle se demande encore pourquoi elle a pris cet argent dont elle n’avait pas besoin.

[12] Elle a affirmé être entrée dans le bureau pour collecter le recyclage, puisque c’était la tâche dont elle était responsable. Elle n’avait aucune intention de prendre l’argent. Elle n’est jamais allée dans ce bureau avec l’idée de prendre autre chose que les déchets recyclables.

[13] L’appelante précise qu’au moment de l’incident, elle vivait une période très stressante qui lui causait des problèmes de santé mentale. Depuis, elle a été traitée pour sa dépression, son état de tristesse et son anxiété. Elle admet qu’aucune raison médicale ne pourrait expliquer son vol.

[14] L’appelante ajoute que la GRC a été appelée et qu’elle s’est fait interroger. Elle a avoué tout de suite avoir volé les 40,00 $ dans le sac à main de sa collègue. Elle devra maintenant comparaître en justice.

[15] Au bout du compte, l’appelante dit avoir eu une bonne leçon et avoir fait du mal à sa famille. Elle a admis le vol dès le début et n’a jamais tenté de le cacher. Elle sait que son geste était inapproprié et elle le regrette. L’appelante travaillait à cet endroit depuis 18 ans sans problème. Elle trouve que le traitement qu’elle subit est injuste, car elle n’avait jamais eu d’embuche au travail auparavant.

[16] Au moment de l’audience, l’appelante a un nouvel emploi qu’elle aime. Ses collègues lui font confiance et la traitent bien. Un grief a été déposé à son dernier emploi pour qu’elle puisse retrouver ses fonctions, mais je n’ai pas eu de nouvelles à ce sujet.

[17] Interrogé par la Commission, l’employeur a confirmé la séquence des événements. Il a expliqué que le geste de l’appelante est incompatible avec les valeurs de l’entreprise et que ce comportement a brisé sa relation de travail de façon irréversible.

[18] L’employeur a déclaré qu’il n’était au courant d’aucun problème de santé mentale que l’appelante aurait pu avoir au moment de l’incident. À cause de la gravité de la situation, la seule option était le congédiement, même si l’entreprise n’a pas de politique officielle relative à ce type de situation.

[19] J’estime que l’appelante a été congédiée parce qu’elle a volé de l’argent dans le sac à main de sa collègue. L’appelante ne l’a jamais nié. Je reconnais donc que c’est un fait avéré.

La raison du congédiement de l’appelante est-elle une inconduite selon la loi?

[20] Selon la loi, la raison du congédiement de l’appelante est une inconduite.

[21] Pour constituer une inconduite selon la loi, la conduite doit être délibérée, c’est-à-dire consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas page 2. Une inconduite peut aussi se présenter comme une conduite à ce point insouciante qu’elle frôle le caractère délibéréNote de bas page 3. Pour qu’il y ait inconduite au sens de la loi, il ne faut pas nécessairement avoir une intention coupable (c’est-à-dire vouloir faire quelque chose de mal)Note de bas page 4.

[22] Il y a inconduite si l’appelante savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait l’empêcher de remplir ses obligations envers son employeur et qu’il était réellement possible qu’elle soit congédiée pour cette raisonNote de bas page 5.

[23] La Commission doit prouver que l’appelante a perdu son emploi en raison de son inconduite, selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que l’appelante a perdu son emploi en raison de son inconduiteNote de bas page 6.

[24] La Commission affirme qu’il y a eu inconduite parce que le vol d’argent dans le sac à main de l’employée est un geste répréhensible commis de façon délibérée ou intentionnelle. Il en résulte un bris irréversible de la confiance de l’employeur envers l’appelante en tant qu’employée.

[25] Selon l’appelante, ce n’était pas un cas d’inconduite parce qu’elle traversait une période très stressante sur le plan personnel, et elle ne sait pas ce qui l’a poussée à poser un tel geste. Sa conduite n’était pas délibérée.

[26] J’estime que la Commission a prouvé qu’il y a eu inconduite pour les raisons suivantes.

[27] La preuve est claire : l’appelante a pris de l’argent dans le sac à main de sa collègue. L’employeur a déclaré clairement que ce geste a brisé la confiance entre l’appelante et lui, et que c’était irrémédiable. Rien ne garantit que ça ne se reproduirait pas.

[28] L’appelante assure que sa conduite n’était pas délibérée; elle ne sait pas ce qui l’a amenée à faire ça. Du point de vue de l’appelante, c’est probablement vrai. Mais j’estime que c’était tout de même une conduite à ce point insouciante qu’elle peut être considérée comme délibéréeNote de bas page 7. Cette conduite a entraîné le bris du contrat de l’appelante. Ainsi, je considère qu’il s’agit d’une inconduite selon la loi.

[29] Je reconnais que l’appelante a des remords et comprend que son geste est condamnable. Je suis sensible à sa situation. Cependant, je ne peux pas changer la loi.

Alors, l’appelante a-t-elle perdu son emploi en raison d’une inconduite?

[30] Selon mes conclusions précédentes, je suis d’avis que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite.

Conclusion

[31] La Commission a prouvé que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite. C’est pourquoi elle est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[32] L’appel est rejeté.

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