Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : PR c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 873

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante (prestataire) : P. R.
Partie intimée (Commission) : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (461778) datée du 13 avril 2022 rendue par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Gerry McCarthy
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 27 juillet 2022
Personne présente à l’audience : Partie appelante
Date de la décision : Le 8 août 2022
Numéro de dossier : GE-22-1539

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Décision

[1] L’appel est accueilli.

[2] Le prestataire a démontré qu’il était fondé à quitter son emploi (c’est-à-dire qu’il avait une raison acceptable selon la loi de le faire) quand il l’a fait. Le prestataire était fondé à quitter son emploi parce qu’il s’agissait de la seule solution raisonnable dans son cas. Par conséquent, le prestataire n’est pas exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[3] À la mi-décembre 2018, le prestataire a avisé son employeur (X) qu’il quittait son emploi et lui a donné un préavis de 90 jours. Le prestataire a quitté son emploi le 14 février 2019. Il a fait une demande de prestations d’assurance-emploi le 3 avril 2019. Sa période de prestations commençait le 31 mars 2019. Le prestataire a fait une nouvelle demande de prestations d’assurance-emploi le 16 octobre 2019, pour laquelle la période de prestations commençait le 13 octobre 2019. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a examiné les raisons pour lesquelles le prestataire avait quitté son emploi, puis elle a jugé qu’il avait quitté volontairement son emploi (c’est-à-dire qu’il a choisi de quitter son emploi) sans justification. Par conséquent, la Commission a conclu qu’elle ne pouvait pas lui verser des prestations.

[4] Je dois décider si le prestataire a prouvé que quitter son emploi était la seule solution raisonnable dans son cas.

[5] La Commission affirme que le prestataire aurait pu conserver son emploi pendant qu’il cherchait un autre travail plus convenable, plutôt que de le quitter quand il l’a fait.

[6] Le prestataire n’est pas d’accord et affirme qu’il a quitté son emploi parce qu’il estimait que les conditions de travail étaient dangereuses pour sa santé. Il précise que les conditions de travail de l’employeur avaient des répercussions sur sa santé physique et mentale.

Question en litige

[7] Le prestataire est-il exclu du bénéfice des prestations parce qu’il a quitté volontairement son emploi sans justification?

[8] Pour répondre à cette question, je dois d’abord aborder le point du départ volontaire du prestataire. Je dois ensuite décider s’il était fondé à quitter son emploi.

Analyse

Les parties sont d’accord sur le fait que le prestataire a quitté volontairement son emploi

[9] J’accepte le fait que le prestataire a quitté volontairement son emploi. Le prestataire reconnaît qu’il a quitté son emploi le 14 février 2019. Je n’ai aucune preuve du contraire.

Les parties ne sont pas d’accord sur le fait que le prestataire était fondé à quitter volontairement son emploi

[10] Les parties ne sont pas d’accord sur le fait que le prestataire était fondé à quitter volontairement son emploi quand il l’a fait.

[11] La loi prévoit qu’une personne est exclue du bénéfice des prestations si elle quitte volontairement son emploi sans justificationNote de bas page 1. Il ne suffit pas d’avoir une bonne raison de quitter un emploi pour prouver que le départ est fondé.

[12] La loi explique ce que veut dire « être fondé à ». Elle dit qu’une personne est fondée à quitter son emploi si son départ est la seule solution raisonnable, compte tenu de toutes les circonstancesNote de bas page 2.

[13] Le prestataire est responsable de prouver que son départ était fondé. Il doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que quitter son emploi était la seule solution raisonnableNote de bas page 3.

[14] Pour prendre une décision, je dois examiner toutes les circonstances présentes au moment où le prestataire a quitté son emploi. La loi énonce des circonstances que je dois prendre en considérationNote de bas page 4.

[15] Une fois que j’aurai déterminé les circonstances qui s’appliquent au prestataire, celui-ci devra démontrer que la seule solution raisonnable était de quitter son emploi à ce moment-làNote de bas page 5.

Circonstances présentes au moment où le prestataire a quitté son emploi

[16] Le prestataire affirme que l’une des circonstances énoncées dans la loi s’applique à son cas. Plus précisément, il affirme que les conditions de travail de l’employeur étaient dangereuses pour sa santé.

[17] Lors de son témoignage, le prestataire a affirmé qu’il avait occupé le poste de directeur d’entrepôt pour l’employeur de la mi-juin 2018 jusqu’à son départ. Il a expliqué que les conditions de travail n’étaient pas bonnes. Par exemple, le taux de roulement du personnel était élevé, des vols étaient commis à l’interne et certains membres du personnel avaient des problèmes de consommation excessive de drogues et d’alcool sur le lieu de travail. Il a également déclaré que, lorsqu’il a donné son avis de démission à la mi-décembre 2018, ces mauvaises conditions persistaient depuis juillet 2018.

[18] Le prestataire a aussi affirmé que les conditions de travail de l’employeur avaient des répercussions sur sa santé physique et mentale. Plus précisément, le prestataire a expliqué qu’il avait subi un stress important. Il a également affirmé avoir reçu un diagnostic de zona au début de janvier 2019, mais il présentait des symptômes depuis décembre 2018.

[19] J’accepte le témoignage du prestataire sur les conditions de l’employeur, car ses explications étaient détaillées et cohérentes. J’accepte aussi le fait que les conditions de travail de l’employeur aient eu des répercussions sur la santé du prestataire, car les explications qu’il a données étaient détaillées et plausibles.

[20] En résumé, les conditions de travail de l’employeur, soit les circonstances présentes au moment où le prestataire a quitté son emploi, étaient dangereuses pour la santé du prestataire.

Le prestataire n’avait aucune autre solution raisonnable

[21] Je dois maintenant décider si le prestataire n’avait en effet aucune autre solution raisonnable que celle de quitter son emploi quand il l’a fait.

[22] Le prestataire affirme qu’il n’avait aucune autre solution raisonnable, car les conditions de travail de l’employeur avaient de graves répercussions sur sa santé mentale et physique.

[23] La Commission n’est pas d’accord. Elle soutient que le prestataire aurait pu continuer de travailler pour son employeur, prendre un congé autorisé ou demander des mesures d’adaptation en milieu de travail avant de quitter son poste, sans avoir préalablement trouvé un autre emploi.

[24] Je conclus que le prestataire n’avait aucune autre solution raisonnable que celle de quitter son emploi pour les raisons suivantes :

[25] Premièrement, les conditions de travail de l’employeur ont eu d’importantes répercussions sur la santé du prestataire. Plus précisément, le prestataire a subi du stress parce qu’il a dû composer avec un taux de roulement du personnel élevé, des vols commis à l’interne ainsi qu’avec certains membres du personnel ayant des problèmes de consommation excessive de drogues et d’alcool sur le lieu de travail. Je comprends que la Commission a fait valoir que le prestataire aurait pu demander un congé autorisé. Cependant, le prestataire ne s’est jamais fait offrir cette option lorsqu’il a donné son préavis de 90 jours à l’employeur à la mi-décembre 2018. De plus, j’accepte les explications fournies par le prestataire selon lesquelles il ne savait pas qu’un congé autorisé était une option à ce moment-là.

[26] Deuxièmement, pendant les sept mois au cours desquels le prestataire a travaillé pour l’employeur, les conditions de travail ne se sont pas améliorées. Je reconnais que la Commission a soutenu que le prestataire aurait pu demander des mesures d’adaptation en milieu de travail avant de quitter son emploi. Cela dit, le prestataire a donné un préavis de 90 jours à l’employeur et il avait l’intention de trouver un nouvel emploi avant la mi-février 2019. Cependant, il a reçu un diagnostic de zona en janvier 2019, et ce problème de santé a nui à sa capacité de trouver un autre emploi.

Observations supplémentaires de la Commission

[27] Je reconnais que la Commission a soutenu que le prestataire n’avait pas fourni de renseignements justificatifs prouvant que de continuer à occuper son emploi n’était pas une solution raisonnable. Cependant, le prestataire a fourni un certificat médical qui confirme le diagnostic de zona qu’il a reçu en janvier 2019 (voir la page GD3-55 du dossier d’appel). De plus, j’ai jugé que le témoignage du prestataire selon lequel les conditions de travail de l’employeur avaient des répercussions sur sa santé était crédible, étant donné qu’il a présenté des explications franches et détaillées.

[28] Compte tenu des circonstances présentes au moment où le prestataire a quitté son emploi et pour les raisons mentionnées précédemment, il s’agissait de la seule solution raisonnable dans son cas.

[29] Par conséquent, le prestataire était fondé à quitter son emploi.

Conclusion

[30] Je conclus que le prestataire n’est pas exclu du bénéfice des prestations.

[31] Ainsi, l’appel est accueilli.

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