Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : MZ c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 956

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : M. Z.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (459871) datée du 28 février 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Audrey Mitchell
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 3 mai 2022
Personne présente à l’audience : Prestataire
Date de la décision : Le 17 mai 2022
Numéro de dossier : GE-22-908

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal de la sécurité sociale n’est pas d’accord avec le prestataire.

[2] Le prestataire n’a pas démontré qu’il est disponible pour travailler pendant qu’il est aux études. Par conséquent, il ne peut pas recevoir de prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[3] La Commission de l’assurance-emploi a décidé que le prestataire est inadmissible au bénéfice des prestations régulières d’assurance-emploi à partir du 3 janvier 2022, parce qu’il n’était pas disponible pour travailler. Pour recevoir des prestations régulières d’assurance-emploi, la partie prestataire doit être disponible pour travailler. La disponibilité est une exigence continue. Cela signifie que la partie prestataire doit être à la recherche d’un emploi.

[4] Je dois décider si le prestataire a prouvé qu’il est disponible pour travailler. Il doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’il est disponible pour travailler.

[5] La Commission affirme que le prestataire n’est pas disponible parce qu’il était aux études à temps plein.

[6] Le prestataire n’est pas d’accord. Il affirme que ses cours sont offerts en ligne et ne nuisent pas à sa recherche d’emploi.

Question en litige

[7] Le prestataire est-il disponible pour travailler pendant qu’il est aux études?

Analyse

[8] Deux articles de loi différents exigent que la partie prestataire démontre qu’elle est disponible pour travailler. La Commission a décidé que le prestataire était inadmissible selon ces deux articles. Il doit donc répondre aux critères des deux articles pour recevoir des prestations.

[9] Premièrement, la Loi sur l’assurance-emploi dit qu’une partie prestataire doit prouver qu’elle fait des « démarches habituelles et raisonnables » pour trouver un emploi convenableNote de bas page 1. Le Règlement sur l’assurance-emploi présente des critères qui aident à expliquer ce que signifie « démarches habituelles et raisonnablesNote de bas page 2 ». Je vais examiner ces critères ci-dessous.

[10] Deuxièmement, la Loi sur l’assurance‑emploi prévoit que la partie prestataire doit prouver qu’elle est « capable de travailler et disponible à cette fin », mais qu’elle est incapable d’obtenir un emploi convenableNote de bas page 3. La jurisprudence énonce trois éléments que la partie prestataire doit prouver pour démontrer qu’elle est « disponible » en ce sensNote de bas page 4. Je vais examiner ces éléments plus loin.

[11] La Commission a établi que le prestataire était inadmissible aux prestations parce qu’il n’était pas disponible pour travailler selon ces deux articles de loi.

[12] De plus, la Cour d’appel fédérale a déclaré que les parties prestataires qui sont aux études à temps plein sont présumées ne pas être disponibles pour travaillerNote de bas page 5. C’est ce qu’on appelle la « présomption de non-disponibilité ». Cela signifie qu’on considère que les personnes qui sont aux études ne sont probablement pas disponibles pour travailler quand la preuve montre qu’elles sont aux études à temps plein.

[13] Je vais d’abord voir si je peux présumer que le prestataire n’était pas disponible pour travailler. J’examinerai ensuite les deux articles de loi portant sur la disponibilité.

Présumer que les personnes qui étudient à temps plein ne sont pas disponibles pour travailler

[14] La présomption de non-disponibilité s’applique uniquement aux personnes qui étudient à temps plein.

Le prestataire ne conteste pas son statut d’étudiant à temps plein

[15] Le prestataire reconnaît qu’il étudie à temps plein, et rien ne démontre que ce n’est pas le cas. J’accepte donc le fait que le prestataire est aux études à temps plein.

[16] La présomption s’applique au prestataire.

Le prestataire est étudiant à temps plein

[17] Le prestataire étudie à temps plein. Par contre, la présomption selon laquelle les personnes qui étudient à temps plein ne sont pas disponibles pour travailler peut être réfutée (c’est-à-dire qu’on peut montrer qu’elle ne s’applique pas). Si la présomption est réfutée, elle ne s’applique pas.

[18] Le prestataire peut réfuter cette présomption de deux façons. Il peut démontrer qu’il a l’habitude de travailler à temps plein tout en étant aux étudesNote de bas page 6. Sinon, il peut démontrer qu’il existe des circonstances exceptionnelles dans son casNote de bas page 7.

[19] Le prestataire affirme que ses cours étaient en ligne, alors il était disponible pour travailler.

[20] La Commission dit que le prestataire a investi beaucoup d’argent dans ses études et qu’il passe plus de 25 heures par semaine à étudier.

[21] J’estime que le prestataire a réfuté la présomption de non-disponibilité.

[22] Le prestataire a déclaré qu’il étudie en comptabilité. Il a envoyé son horaire de cours à la Commission. Certains cours avaient lieu pendant les heures normales de travail, tandis que d’autres n’étaient pas à heure fixe. La Commission a demandé au prestataire s’il devait assister à certains cours à des heures précises. Il a répondu que oui, mais les cours étaient offerts à plusieurs moments dans la semaine, et il s’y connectait de façon autonome.

[23] J’ai interrogé le prestataire au sujet de son horaire de cours. Je lui ai également posé une question sur la déclaration qu’il a faite dans sa demande de prestations, à savoir que s’il trouvait un emploi à temps plein qui entrait en conflit avec son programme, il préférerait terminer ses études. Il dit que ses cours sont tous en ligne et ne nuisent pas du tout à son horaire de travail. Il ajoute qu’il n’est pas tenu d’assister aux cours aux heures prévues puisqu’ils sont tous enregistrés. Il avait la possibilité d’assister aux cours magistraux ou de les écouter plus tard à son propre rythme.

[24] J’accorde plus de poids au témoignage du prestataire sur ses cours qu’à ce qu’il a dit à la Commission. En fait, je trouve que sa déclaration consignée dans les notes de la Commission n’est pas claire. Je remarque aussi que la Commission reconnaît la souplesse de l’horaire de cours du prestataire. J’accepte donc le témoignage du prestataire comme un fait et j’estime qu’il pouvait écouter ses cours enregistrés à son propre rythme.

[25] J’ai interrogé le prestataire sur ses examens. Il a dit qu’ils étaient tous effectués en ligne et s’échelonnaient sur une période de plus d’un jour. Le prestataire a affirmé qu’il pouvait passer les examens à n’importe quel moment au cours de la période prévue. D’après ce témoignage, j’estime que les examens du prestataire n’auraient pas nui à sa disponibilité pour le travail.

[26] Le prestataire a déclaré qu’il avait commencé ses études en janvier 2018. Depuis 2013, il a travaillé à temps plein, sauf pendant une période de huit mois où il a touché des prestations d’assurance-emploi. Je n’ai aucune raison de douter de ce témoignage. J’estime alors qu’il a eu l’habitude de travailler à temps plein tout en étant aux études pendant près de quatre ans.

[27] Je suis d’avis que la souplesse des cours du prestataire est une circonstance exceptionnelle qui lui permet de réfuter la présomption de non-disponibilité. Son habitude de travail à temps plein pendant ses études est une autre façon pour lui de réfuter la présomption.

[28] Le prestataire a réfuté la présomption selon laquelle il n’est pas disponible pour travailler.

La présomption est réfutée

[29] Le fait de réfuter la présomption signifie seulement qu’on ne présume pas que le prestataire n’est pas disponible. Je dois cependant encore examiner les deux articles de loi applicables et décider si le prestataire est réellement disponible.

Démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi

[30] Le premier article de loi que je vais examiner prévoit qu’une partie prestataire doit prouver que les démarches qu’elle a faites pour trouver un emploi sont habituelles et raisonnablesNote de bas page 8.

[31] Le droit énonce les critères que je dois prendre en considération pour décider si les démarches du prestataire sont habituelles et raisonnablesNote de bas page 9. Je dois décider si ces démarches sont soutenues et si elles visent à trouver un emploi convenable. Autrement dit, le prestataire doit avoir continué à chercher un emploi convenable.

[32] Je dois aussi évaluer les démarches du prestataire pour se trouver un emploi. Le Règlement sur l’assurance-emploi présente une liste de neuf activités de recherche d’emploi dont je dois tenir compte, commeNote de bas page 10 :

  • évaluer les possibilités d’emploi;
  • communiquer avec des employeurs éventuels;
  • présenter des demandes d’emploi.

[33] La Commission estime que les démarches du prestataire ne sont pas suffisantes pour trouver un emploi.

[34] Le prestataire n’est pas d’accord. Il dit avoir présenté des demandes d’emploi au moyen d’une agence de placement, de sites Web d’emplois et en personne. Le prestataire estime que ses démarches démontrent qu’il est disponible pour travailler.

[35] Je conclus que le prestataire n’a pas démontré que ses démarches sont soutenues. Pour cette raison, j’estime qu’il n’a pas prouvé que ses démarches de recherche d’emploi sont habituelles et raisonnables.

[36] Dans le dossier de recherche d’emploi que le prestataire a envoyé à la Commission, il a énuméré les noms de cinq entreprises où il a présenté une demande d’emploi entre le 18 décembre 2021 et le 2 février 2022. L’entreprise où le prestataire a postulé le 2 février est une agence de placement. Le prestataire a dit que cette liste s’ajoutait aux demandes d’emploi qu’il a présentées en personne.

[37] J’ai demandé au prestataire ce qu’il avait fait pour trouver du travail, en gardant à l’esprit les exemples d’activités de recherche d’emploi énumérés dans sa demande de prestations. Le prestataire a déclaré qu’il a postulé sur divers sites Web d’emplois, en particulier sur celui de l’établissement où il étudiait. Il a ajouté qu’il a postulé à des emplois par l’entremise d’une agence de placement et en personne.

[38] Selon la Commission, le prestataire n’a pas démontré qu’il a fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi parce qu’en près de deux mois, il a postulé seulement à quatre emplois et a fait une demande auprès d’une agence de placement. J’ai interrogé le prestataire à ce sujet. Il a dit qu’il ne voyait pas l’utilité de postuler à plus d’un emploi au sein de l’agence, parce que celle-ci est [traduction] « un point central ».

[39] J’ai demandé au prestataire s’il a postulé à d’autres emplois que ceux qui figurent dans le dossier qu’il a envoyé à la Commission. Il a dit que oui, alors je lui ai donné l’occasion de compléter sa liste après l’audience.

[40] Le prestataire a envoyé un document après l’audience, lequel confirmait 12 demandes d’emploi. Le dossier comprenait la demande à l’agence de placement et les demandes à deux autres entreprises figurant sur la liste qu’il avait envoyée à la Commission. Le prestataire a postulé à ces 12 emplois entre le 15 décembre 2021 et le 28 février 2022.

[41] Le 6 mai 2022, le Tribunal a envoyé une lettre de suivi au prestataire. On lui demandait s’il avait présenté une demande d’emploi en mars et avril 2022 et, si ce n’était pas le cas, s’il avait fait des démarches jusqu’à la date de l’audience pour trouver un emploi. À ce jour, le prestataire n’a pas répondu à la lettre.

[42] Je suis convaincue que le prestataire a fait certaines démarches pour trouver du travail. Cependant, rien ne me prouve qu’il ait fait quoi que ce soit depuis le 28 février 2022. Pour cette raison, je trouve que ses démarches ne sont pas soutenues. Même si le prestataire a dit qu’il a postulé à certains emplois en personne, il n’a pas donné d’information sur ces demandes. Il ne m’a donc pas renseignée suffisamment pour prouver que ses démarches de recherche d’emploi sont habituelles et raisonnables.

Capable de travailler et disponible pour le faire

[43] La jurisprudence établit trois éléments à examiner quand je dois décider si le prestataire est capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenableNote de bas page 11. Le prestataire doit prouver les trois éléments suivantsNote de bas page 12 :

  1. a) Il veut retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui est offert.
  2. b) Il a fait des démarches pour trouver un emploi convenable.
  3. c) Il a évité d’établir des conditions personnelles qui limiteraient indûment (c’est-à-dire limiteraient trop) ses chances de retourner travailler.

[44] Quand j’examine chacun de ces éléments, je dois prendre en considération l’attitude et la conduite du prestataireNote de bas page 13.

Vouloir retourner travailler

[45] Le prestataire n’a pas démontré qu’il veut retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui est offert.

[46] Selon la Commission, le prestataire n’a pas démontré le désir de retourner travailler, car il a postulé à seulement quatre emplois en près de deux ans.

[47] Le prestataire soutient que ses études ne l’ont pas empêché d’être disponible pour travailler. Je suis d’accord avec lui. Toutefois, sa conduite pendant sa recherche d’emploi ne montre pas en général qu’il voulait retourner travailler.

[48] Comme je l’ai mentionné plus haut, le prestataire n’a pas répondu à la lettre du Tribunal qui demandait des preuves et des explications à propos de ses démarches de recherche d’emploi après le 28 février 2022. Comme je n’ai aucune preuve de démarches après cette date, j’estime que sa conduite n’est pas celle d’une personne qui veut retourner travailler.

[49] Avant l’audience, le prestataire a demandé un ajournement. Dans sa demande, il a dit qu’il devait être [traduction] « à [son] lieu de travail » en même temps que l’audience. Il a toutefois assisté à l’audience comme prévu. Il n’en a pas dit davantage sur ce travail.

[50] Je n’ai pas assez d’information sur ce « lieu de travail » pour conclure que le prestataire souhaite retourner travailler. Je ne sais pas, par exemple, s’il s’agit d’un emploi à temps plein ou à temps partiel, ou encore, temporaire ou permanent. Je ne sais pas non plus s’il s’agit d’un poste bénévole ou rémunéré. Comme je n’ai pas cette information et malgré ce que le prestataire a mentionné dans sa demande d’ajournement, j’estime qu’il n’a pas démontré qu’il voulait retourner travailler.

Faire des démarches pour trouver un emploi convenable

[51] Le prestataire n’a pas fait de démarches suffisantes pour trouver un emploi convenable.

[52] Pour m’aider à tirer une conclusion sur ce deuxième élément, j’ai examiné les activités de recherche d’emploi mentionnées ci-dessus. Elles me servent seulement de points de repère pour rendre une décisionNote de bas page 14.

[53] Pour trouver un emploi, le prestataire a fait des recherches sur des sites Web d’emplois, a présenté des demandes d’emploi en ligne et en personne, et a postulé auprès d’une agence de placement. J’ai expliqué cette situation plus haut quand j’ai examiné si le prestataire avait fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi.

[54] Ces démarches ne sont pas suffisantes pour satisfaire aux exigences du deuxième élément. Comme je l’ai mentionné ci-dessus, le prestataire a fourni une preuve de 12 demandes d’emploi du 15 décembre 2021 au 28 février 2022. Toutefois, il n’a pas répondu à la question posée après l’audience au sujet des démarches qu’il a faites pour trouver du travail après le 28 février 2022.

[55] Le prestataire doit prouver qu’il fait des démarches pour trouver un emploi convenable. J’estime qu’il a fait certaines démarches comme celles énumérées dans la loi. Malgré ces démarches, et même s’il a dit qu’il devait se trouver dans un lieu de travail en même temps que l’audience, je n’ai pas assez d’information pour conclure que le prestataire fait des démarches convenables pour trouver un emploi.

Limiter indûment ses chances de retourner travailler

[56] Le prestataire n’a pas établi de conditions personnelles qui pourraient limiter indûment ses chances de retourner travailler.

[57] La Commission n’a pas fait d’observations sur cet élément. Comme je l’ai mentionné ci-dessus, les études du prestataire lui offrent une certaine souplesse.

[58] Je conclus que, même si le prestataire est étudiant à temps plein, il a réfuté la présomption de non-disponibilité. Je ne pense pas qu’il ait établi de conditions personnelles qui pourraient limiter ses chances de retourner travailler.

Alors, le prestataire est-il capable de travailler et disponible pour le faire?

[59] Selon mes conclusions sur les trois éléments, je suis d’avis que le prestataire n’a pas démontré qu’il est capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenable.

Conclusion

[60] Le prestataire n’a pas démontré qu’il est disponible pour travailler au sens de la loi. C’est pourquoi je conclus qu’il ne peut pas recevoir de prestations d’assurance-emploi.

[61] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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