Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : TD c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 973

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Parties appelante : T. D.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentante : Anick Dumoulin

Décision portée en appel : Décision rendue par la division générale le 14 juillet 2022 (GE-22-1319)

Membre du Tribunal : Pierre Lafontaine
Mode d’audience : Sur la foi du dossier
Date de la décision : Le 4 octobre 2022
Numéro de dossier : AD-22-489

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Décision

[1] L’appel est accueilli. Je renvoie l’affaire à la division générale pour un réexamen.

Aperçu

[2] L’appelante (prestataire) travaillait comme infirmière. À la suite d’une ordonnance émise par la santé publique provinciale, son employeur a exigé que tout le personnel soit vacciné contre la COVID-19 au plus tard le 25 octobre 2021. La prestataire ne s’est pas fait vacciner avant la date limite fixée par l’employeur. Il l’a donc suspendue, puis congédiée le 19 novembre 2021.

[3] Lorsque la prestataire a demandé des prestations d’assurance-emploi, l’intimée (Commission) a refusé de lui en verser, car la prestataire avait perdu son emploi en raison d’une inconduite. Après avoir fait une révision, la Commission a maintenu sa décision initiale. Les prestataires ont porté la décision de révision en appel à la division générale.

[4] La division générale a conclu que l’appel de la prestataire n’avait aucune chance raisonnable de succès. Elle a rejeté l’appel de façon sommaire. Elle a jugé que la prestataire avait délibérément enfreint la politique de vaccination de l’employeur, qu’elle savait qu’elle perdrait son emploi et qu’elle avait perdu son emploi parce qu’elle avait refusé le vaccin. Elle a conclu que la prestataire avait perdu son emploi en raison d’une inconduite.

[5] La prestataire fait valoir qu’elle s’attendait à ce qu’une audience permette de déterminer les circonstances pertinentes de l’affaire et de recueillir les éléments de preuve nécessaires. Elle avance que prendre une décision médicale pour elle-même n’est pas une inconduite au sens de la loi. Elle explique qu’elle n’a pas eu l’occasion de demander une exemption pour des raisons religieuses. La prestataire affirme que la Commission doit démontrer que la politique est valide et légale puisqu’elle constitue le fondement de son congédiement.

[6] Je dois décider si la division générale a fait une erreur lorsqu’elle a rejeté l’appel de la prestataire de façon sommaire.

[7] J’accueille l’appel et je renvoie l’affaire à la division générale pour réexamen.

Question en litige

[8] La division générale a-t-elle fait une erreur en rejetant de façon sommaire l’appel de la prestataire?

Analyse

Le mandat de la division d’appel

[9] La Cour d’appel fédérale a établi que, lorsque la division d’appel instruit des appels par application de l’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, le mandat de la division d’appel lui est conféré par les articles 55 à 69 de la LoiNote de bas page 1.

[10] La division d’appel agit à titre de tribunal administratif d’appel pour les décisions rendues par la division générale. Elle n’exerce pas un pouvoir de surveillance de la nature de celui exercé par une cour supérieureNote de bas page 2.

[11] Par conséquent, à moins que la division générale ait omis d’observer un principe de justice naturelle, qu’elle ait commis une erreur de droit ou qu’elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, je n’ai d’autre choix que de rejeter l’appel.

La division générale a-t-elle fait une erreur en décidant de rejeter de façon sommaire l’appel de la prestataire?

[12] Je dois décider si la division générale a fait une erreur lorsqu’elle a rejeté de façon sommaire l’appel de la prestataire.

[13] La division d’appel a déjà établi que le bon critère à appliquer en cas de rejet sommaire est le suivant :

  • L’appel est-il manifestement dénué de fondement et clairement voué à l’échecNote de bas page 3?

[14] Pour clarifier les choses, la question est de savoir si l’échec de l’appel est inévitable, peu importe les éléments de preuve ou les arguments qui pourraient être présentés à l’audience. Le critère qui permet de rejeter un appel de façon sommaire est rigoureux.

[15] On a considéré que les appels suivants étaient de toute évidence voués à l’échec :

  • la personne ne remplit pas les conditions requises pour recevoir des prestations;
  • la personne n’a pas accumulé un nombre suffisant d’heures d’emploi assurable et le Tribunal n’a pas la compétence nécessaire pour décider de ce nombre;
  • personne ne conteste la rémunération et, après sa répartition, la personne doit rembourser les prestations;
  • la personne a reçu des prestations de maladie pour le nombre maximal de semaines.

[16] Ces exemples ne laissent aucun doute sur les circonstances dans lesquelles un appel est manifestement voué à l’échec et les situations où l’échec de l’appel est inévitable.

[17] Je remarque que le Parlement a adopté un cadre législatif et réglementaire qui n’autorise pas la section de l’assurance-emploi de la division générale à rendre des décisions sur la foi du dossier. La règle générale veut que les parties appelantes aient la possibilité de se faire entendre. On ne peut pas élargir le rejet sommaire pour se dérober à cette intention.

[18] Dans le contexte du rejet sommaire, il n’est donc pas approprié d’examiner l’affaire sur le fond en l’absence des parties, puis de conclure que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

[19] Dans l’avis d’appel qu’elle a déposé à la division générale, la prestataire a fait valoir, entre autres choses, que prendre la décision éclairée de refuser le traitement ne constitue pas une inconduite au sens de la loi. Elle avance qu’elle était prête à se soumettre régulièrement à des tests rapides. Elle fait valoir que l’employeur n’avait aucune politique. Elle ne pouvait donc pas enfreindre une politique de vaccination. Elle affirme avoir déposé un grief concernant son congédiement et être en train d’attendre l’arbitrage.

[20] Je suis d’avis que, même si la division générale avait de sérieux doutes au sujet des arguments de la prestataire, elle ne pouvait pas conclure à juste titre que l’appel était manifestement voué à l’échec, peu importe les éléments de preuve ou les arguments qui pouvaient être présentés dans le cadre d’une audience.

[21] Je juge que la division générale a tranché l’affaire sur le fond en l’absence des parties, puis qu’elle a décidé que l’appel n’avait aucune chance raisonnable de succès. Il s’agit d’une erreur de droit.

[22] Mon intervention est donc justifiée.

Réparation

[23] Comme la division générale a fait une erreur en décidant du bien-fondé de l’affaire en l’absence des parties, j’accueille l’appel.

[24] Dans de telles circonstances, il convient de renvoyer l’affaire à la division générale pour réexamen.

Conclusion

[25] L’appel est accueilli. Je renvoie l’affaire à la division générale pour un réexamen.

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