Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : JB c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 992

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de permission de faire appel

Partie demanderesse : J. B.
Représentante ou représentant : Christopher Justice
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel :

Décision de la division générale datée du 7 septembre 2022

(GE-22-1165)

Membre du Tribunal : Pierre Lafontaine
Date de la décision : Le 7 octobre 2022
Numéro de dossier : AD-22-681

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Décision

[1] La permission de faire appel est refusée. Cela signifie que l’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] La demanderesse (la prestataire) a été placée en congé sans solde parce qu’elle n’a pas respecté la politique de vaccination contre la COVID-19 de l’employeur. Par la suite, elle a demandé des prestations régulières d’assurance-emploi.

[3] La partie défenderesse (la Commission) a établi que la prestataire avait volontairement pris congé de son emploi sans justification. Après avoir fait une révision, la Commission a maintenu sa décision initiale. La prestataire a fait appel de la décision découlant d’une révision à la division générale.

[4] La division générale a conclu que l’employeur avait imposé un congé sans solde obligatoire à la prestataire parce qu’elle n’avait pas respecté sa politique. Elle a conclu qu’aucune preuve ne portait à croire que la prestataire avait volontairement choisi de prendre un congé. La division générale a conclu que la prestataire avait été suspendue après avoir refusé de se conformer à la politique de l’employeur. Elle a aussi conclu que la prestataire savait que, dans les circonstances, l’employeur allait probablement la suspendre. La division générale a conclu que le non-respect de la politique était la cause de sa suspension. Elle a conclu que la prestataire avait été suspendue de son emploi en raison d’une inconduite.

[5] La prestataire demande la permission de faire appel de la décision de la division générale devant la division d’appel. Elle soutient que le Tribunal a accordé des prestations à un homme après qu’il a refusé de recevoir les vaccins parce qu’il avait des problèmes de santé. Elle soutient qu’elle a exactement les mêmes préoccupations. Elle soutient que le refus de lui accorder des prestations est illégal et que cela enfreint ses droits constitutionnels.

[6] Je dois décider si la prestataire a invoqué une erreur révisable que la division générale aurait commise et qui pourrait conférer à l’appel une chance de succès.

[7] Je refuse la permission de faire appel puisque l’appel de la prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Question en litige

[8] La prestataire soulève-t-elle une erreur révisable que la division générale aurait commise et qui pourrait donner à l’appel une chance de succès?

Analyse

[9] L’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social prévoit les seuls moyens d’appel d’une décision de la division générale. Il s’agit des erreurs révisables que voici :

  1. 1. La procédure de la division générale était inéquitable d’une façon ou d’une autre.
  2. 2. La division générale n’a pas décidé d’une question qu’elle aurait dû trancher ou elle a décidé d’une question qu’elle n’avait pas le pouvoir de trancher.
  3. 3. La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.
  4. 4. La division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droit.

[10] La demande de permission de faire appel est une étape préliminaire à l’examen sur le fond. C’est une première étape que la prestataire doit franchir, mais où la barre est moins haute que celle qu’il faut franchir durant l’instruction de l’appel sur le fond. À l’étape de la permission de faire appel, la prestataire n’a pas à prouver ses prétentions. Elle doit plutôt établir que l’appel a une chance raisonnable de succès en raison d’une erreur révisable. En d’autres termes, elle doit démontrer la possibilité de soutenir qu’il y a eu une erreur révisable pouvant faire que l’appel soit accueilli.

[11] Par conséquent, pour accorder la permission, je dois être convaincu que les motifs de l’appel correspondent à l’un ou l’autre des moyens d’appel mentionnés plus haut et qu’au moins un des motifs a une chance raisonnable de succès.

La prestataire soulève-t-elle une erreur révisable que la division générale aurait commise et qui pourrait donner à l’appel une chance de succès?

[12] La prestataire soutient que le Tribunal a accordé des prestations à un homme après qu’il a refusé de recevoir les vaccins parce qu’il avait des préoccupations en matière de santé au sujet de son hypertension et qu’il a signalé que certaines personnes avaient eu des caillots sanguins après avoir reçu les vaccins. Elle soutient qu’elle a exactement les mêmes préoccupations. Elle soutient que le refus de lui accorder des prestations est illégal et que cela enfreint ses droits constitutionnels.

[13] La preuve montre que la prestataire travaillait dans un club de golf. Celui-ci est ouvert toute l’année, en été pour le golf et en hiver pour le curling. Elle travaillait dans la partie principale du club comme réceptionniste et effectuait des tâches administratives. La prestataire a été placée en congé sans solde à compter du 24 septembre 2021. L’employeur a mis en place une politique visant à protéger la santé et la sécurité de tous les membres de son personnel contre les risques liés à la COVID-19. L’employeur n’a pas approuvé les demandes d’exemption de la prestataire. La prestataire a refusé de se conformer à la politique. L’employeur l’a donc suspendue.

[14] La division générale devait décider si la prestataire avait été suspendue en raison de son inconduite.

[15] La notion d’inconduite ne veut pas nécessairement dire que le comportement fautif résulte d’une intention coupable. Il suffit que l’inconduite soit consciente, voulue ou intentionnelle. Autrement dit, pour qu’il y ait inconduite, l’acte reproché doit avoir été délibéré ou, à tout le moins, être d’une telle insouciance ou négligence que l’on pourrait dire que la personne a volontairement décidé d’ignorer les répercussions de ses actes sur son rendement au travail.

[16] Le rôle de la division générale n’est pas de juger de la sévérité de la sanction imposée par l’employeur ni de décider si celui-ci s’est rendu coupable d’inconduite en suspendant la prestataire de telle manière que sa suspension était injustifiée. Son rôle est plutôt de décider si la prestataire était coupable d’inconduite et si l’inconduite a entraîné sa suspensionNote de bas de page 1.

[17] À la lumière de la preuve dont elle disposait, la division générale a établi que la prestataire n’avait pas volontairement pris congé de son emploi. Elle a conclu que la prestataire avait été suspendue du travail. Cette conclusion est appuyée par la preuve.

[18] La prestataire a reçu un courriel de l’employeur l’informant que la vaccination était obligatoire. Elle a rencontré l’employeur au sujet de l’exigence de vaccination. La prestataire ne voulait pas fournir de preuve de vaccination, mais voulait continuer à travailler pour l’employeur. Elle a été placée en congé sans solde pour ne pas avoir respecté la politique. Cette preuve démontre clairement que ce n’est pas la prestataire qui a amorcé l’interruption de travail.

[19] La division générale a conclu que la prestataire avait été suspendue (empêchée de travailler) parce qu’elle refusait de respecter la politique de l’employeur. L’employeur avait refusé ses demandes d’exemption. La prestataire avait été informée de la politique de l’employeur et on lui avait donné le temps de s’y conformer. Le refus de la prestataire était intentionnel. C’était un refus délibéré et il s’agit de la cause directe de sa suspension. La division générale a conclu que la prestataire savait que son refus de suivre la politique pouvait entraîner sa suspension.

[20] La division générale a conclu que la preuve prépondérante démontrait que le comportement de la prestataire constituait une inconduite.

[21] Il est bien établi qu’une violation délibérée de la politique de l’employeur est considérée comme une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 2.

[22] La prestataire a fait valoir à la division générale que l’employeur n’avait pas pris de mesures d’adaptation à son égard, qu’il avait fait preuve de discrimination à son égard et qu’il avait enfreint ses droits constitutionnels. Cette question relève d’une autre autorité. Ce tribunal n’est pas le bon endroit pour obtenir la réparation que la prestataire demandeNote de bas de page 3.

[23] Comme je l’ai mentionné plus haut, la question soumise à la division générale n’était pas de savoir si l’employeur s’est rendu coupable d’inconduite quand il a suspendu la prestataire, ce qui aurait rendu la suspension injuste. La question était plutôt de savoir si la prestataire était coupable d’inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi et si l’inconduite avait entraîné sa suspension.

[24] La preuve prépondérante présentée à la division générale démontre que la prestataire, après s’être vu refuser une exemption, a fait le choix personnel et délibéré de ne pas respecter la politique de l’employeur en réponse aux circonstances exceptionnelles créées par la pandémie, ce qui a entraîné sa suspension du travail.

[25] Je ne vois pas en quoi la division générale aurait fait une erreur susceptible de révision lorsqu’elle a expliqué qu’elle devait trancher la question de l’inconduite uniquement d’après les paramètres établis par la Cour d’appel fédérale, qui a défini l’inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 4.

[26] La prestataire soutient que le Tribunal a accordé des prestations à un homme après qu’il a refusé de recevoir le vaccin parce qu’il avait des préoccupations en matière de santé au sujet de son hypertension et qu’il a signalé que certaines personnes avaient eu des caillots sanguins après avoir reçu les vaccins. Elle soutient qu’elle a exactement les mêmes préoccupationsNote de bas de page 5.

[27] Je remarque que, dans cette affaire, la division générale a conclu que le prestataire n’avait pas perdu son emploi en raison d’une inconduite parce que l’employeur ne lui avait pas donné suffisamment de temps pour se conformer à la politique verbale de l’employeur ou pour demander une exemption. Le prestataire n’avait pas non plus été informé qu’il serait congédié de son emploi s’il ne respectait pas la politique. Les faits dans l’affaire qui nous occupe sont différents et n’appuient pas une telle conclusion.

[28] Je suis pleinement conscient que la prestataire peut demander réparation devant une autre autorité, si l’existence d’une violation est établieNote de bas de page 6. Cela ne change rien au fait qu’aux termes de la Loi sur l’assurance-emploi, la Commission a prouvé selon la prépondérance des probabilités que la prestataire a été suspendue et congédiée en raison de son inconduite.

[29] Dans sa demande de permission de faire appel, la prestataire n’a relevé aucune erreur susceptible de révision comme la compétence de la division générale ou le non-respect d’un principe de justice naturelle. En ce qui a trait à l’inconduite, elle n’a cerné aucune erreur de droit dont la décision serait entachée ni de conclusion de fait erronée, que la division générale aurait pu tirer de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[30] Après avoir révisé le dossier d’appel et la décision de la division générale et compte tenu des arguments que la prestataire a présentés pour appuyer sa demande de permission de faire appel, je conclus que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[31] La permission de faire appel est refusée. Cela signifie que l’appel n’ira pas de l’avant.

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