Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : RC c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1009

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante (prestataire) : R. C.
Partie intimée (Commission) : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (453151) datée du 8 février 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Gerry McCarthy
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 21 avril 2022
Personne présente à l’audience : Appelante
Témoin
Date de la décision : Le 22 avril 2022
Numéro de dossier : GE-22-800

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Décision

[1] L’appel est accueilli.

[2] La prestataire a démontré qu’elle était disponible pour travailler pendant qu’elle était aux études. Par conséquent, elle n’est pas inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance‑emploi. Il est donc possible qu’elle ait droit à des prestations.

Aperçu

[3] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé que la prestataire était inadmissible au bénéfice des prestations régulières d’assurance‑emploi du 6 septembre 2021 au 8 avril 2022, parce qu’elle n’était pas disponible pour travailler. Pour recevoir des prestations régulières d’assurance‑emploi, la partie prestataire doit être disponible pour travailler. La disponibilité est une exigence continue. Cela signifie que la partie prestataire doit être à la recherche d’un emploi.

[4] Je dois décider si la prestataire a prouvé qu’elle était disponible pour travailler. La prestataire doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’elle était disponible pour travailler.

[5] La Commission affirme que la prestataire n’était pas disponible parce qu’elle était aux études à temps plein.

[6] La prestataire n’est pas d’accord et affirme qu’elle était disponible pour travailler pendant qu’elle était aux études et qu’elle a fait des démarches pour communiquer avec des employeurs éventuels pour s’enquérir des emplois disponibles.

Question en litige

[7] La prestataire était-elle disponible pour travailler pendant qu’elle était aux études?

Analyse

[8] Deux articles de loi différents exigent que la partie prestataire démontre qu’elle est disponible pour travailler. La Commission a décidé que la prestataire était inadmissible selon ces deux articles. Cette dernière doit donc répondre aux critères des deux articles pour recevoir des prestations.

[9] Premièrement, la Loi sur l’assurance-emploi dit qu’une partie prestataire doit prouver qu’elle fait des « démarches habituelles et raisonnables » pour trouver un emploi convenableNote de bas page 1. Le Règlement sur l’assurance-emploi présente des critères qui aident à expliquer ce que signifie « démarches habituelles et raisonnablesNote de bas page 2 ». Je vais examiner ces critères ci-dessous.

[10] Deuxièmement, la Loi sur l’assurance-emploi prévoit aussi que la partie prestataire doit prouver qu’elle est « capable de travailler et disponible à cette fin », mais qu’elle est incapable d’obtenir un emploi convenableNote de bas page 3. La jurisprudence énonce trois éléments que la partie prestataire doit prouver pour démontrer qu’elle est « disponible » en ce sensNote de bas page 4. Je vais examiner ces éléments plus loin.

[11] La Commission a établi que la prestataire était inadmissible aux prestations parce qu’elle n’était pas disponible pour travailler selon ces deux articles de loi.

[12] De plus, la Cour d’appel fédérale a déclaré que les parties prestataires qui sont aux études à temps plein sont présumées ne pas être disponibles pour travaillerNote de bas page 5. C’est ce qu’on appelle la « présomption de non-disponibilité ». Cela signifie que l’on considère que les personnes qui sont aux études ne sont probablement pas disponibles pour travailler quand la preuve montre qu’elles sont aux études à temps plein.

[13] Je vais d’abord voir si je peux présumer que la prestataire n’était pas disponible pour travailler. J’examinerai ensuite les deux articles de loi portant sur la disponibilité

Présumer que les personnes qui étudient à temps plein ne sont pas disponibles pour travailler

[14] La présomption de non-disponibilité s’applique uniquement aux personnes qui étudient à temps plein.

La prestataire ne conteste pas son statut d’étudiante à temps plein

[15] La prestataire reconnaît qu’elle étudie à temps plein, et il n’y a aucune preuve indiquant que ce n’est pas le cas. J’accepte donc le fait que la prestataire est aux études à temps plein.

[16] La présomption s’applique à la prestataire.

La prestataire est étudiante à temps plein

[17] La prestataire étudie à temps plein. Par contre, la présomption selon laquelle les personnes qui étudient à temps plein ne sont pas disponibles pour travailler peut être réfutée (c’est‑à‑dire qu’on peut montrer qu’elle ne s’applique pas). Si la présomption est réfutée, elle ne s’applique pas.

[18] La prestataire peut réfuter cette présomption de deux façons. Elle peut démontrer qu’elle a l’habitude de travailler à temps plein tout en étant aux étudesNote de bas page 6. Sinon, elle peut démontrer qu’il existe des circonstances exceptionnelles dans son casNote de bas page 7.

[19] La prestataire affirme que pendant ses études secondaires (avant de commencer l’université en septembre 2021), elle a fait du bénévolat à X. La prestataire ajoute qu’elle a coordonné bénévolement des parties de basketball communautaires tout en faisant ses études secondaires.

[20] La Commission affirme que la prestataire n’a pas réfuté la présomption de non-disponibilité tout en suivant un programme d’études à temps plein, parce qu’elle était seulement disposée à travailler en tenant compte de son horaire scolaire.

[21] J’estime que la prestataire a démontré par le passé qu’elle a l’habitude d’exercer des activités parascolaires à l’extérieur de l’école. Plus précisément, son bénévolat à l’hôpital pendant ses études démontrerait des circonstances exceptionnelles dont il faut tenir compte.

[22] En résumé, la prestataire a réfuté la présomption selon laquelle elle n’est pas disponible pour travailler.

La présomption est réfutée

[23] Le fait de réfuter la présomption signifie seulement qu’on ne présume pas que la prestataire n’est pas disponible. Je dois cependant encore examiner les deux articles de loi applicables et décider si la prestataire est réellement disponible.

Démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi

[24] Le premier article de loi que je vais examiner prévoit qu’une partie prestataire doit prouver que les démarches qu’elle a faites pour trouver un emploi étaient habituelles et raisonnablesNote de bas page 8.

[25] Le droit énonce les critères que je dois prendre en considération pour décider si les démarches de la prestataire étaient habituelles et raisonnablesNote de bas page 9. Je dois décider si ces démarches étaient soutenues et si elles visaient à trouver un emploi convenable. Autrement dit, la prestataire doit avoir continué à chercher un emploi convenable.

[26] Je dois aussi évaluer les démarches de la prestataire pour se trouver un emploi. Le Règlement sur l’assurance‑emploi présente une liste de neuf activités de recherche d’emploi dont je dois tenir compte, commeNote de bas page 10 :

  • évaluer les possibilités d’emploi;
  • communiquer avec des employeurs éventuels;
  • présenter des demandes d’emploi.

[27] La Commission affirme que les démarches de la prestataire n’étaient pas suffisantes pour trouver un emploi. Plus précisément, la Commission dit que la prestataire n’a pas fourni de recherche d’emploi qui confirmait qu’elle cherchait activement un emploi.

[28] La prestataire n’est pas d’accord. Elle affirme qu’elle a rédigé un curriculum vitae, évalué des possibilités d’emploi et présenté des demandes à de nombreux employeurs, notamment : X, X, X, X et X. La prestataire affirme que ses démarches suffisaient à prouver qu’elle était disponible pour travailler.

[29] Je conclus que la prestataire faisait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi pour les raisons décrites ci-dessous.

[30] Premièrement : la prestataire a fourni des détails sur les employeurs avec qui elle a communiqué concernant des emplois. À titre d’exemple, elle a donné les noms des médecins à qui elle s’est adressée au sujet d’emplois éventuels au X Regional Hospital [hôpital régional X] (y compris le Dr Brake, la Dre Lobo et le Dr Kagedan). Je comprends que la Commission a soutenu que la prestataire n’avait pas fourni de recherche d’emploi confirmant qu’elle cherchait activement du travail. Cependant, je considère que les renseignements de recherche d’emploi fournis par la prestataire sont crédibles parce que ses déclarations étaient détaillées, franches et confirmées par une témoin.

[31] Deuxièmement : la prestataire a déclaré qu’elle avait évalué les possibilités d’emploi et communiqué à nouveau avec des employeurs éventuels concernant des emplois. Je considère que le témoignage de la prestataire à ce sujet est crédible parce que ses déclarations étaient détaillées, franches et confirmées par celles d’une témoin.

[32] La prestataire a démontré que les démarches qu’elle a faites pour trouver un emploi étaient habituelles et raisonnables.

Capable de travailler et disponible pour le faire

[33] La jurisprudence établit trois éléments à examiner quand je dois décider si la prestataire était capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenableNote de bas page 11. La prestataire doit prouver les trois éléments suivantsNote de bas page 12 :

  1. a) montrer qu’elle veut retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui est offert;
  2. b) faire des démarches pour trouver un emploi convenable;
  3. c) éviter d’établir des conditions personnelles qui limiteraient indûment (c’est‑à‑dire limiteraient trop) ses chances de retourner travailler.

[34] Au moment d’examiner chacun de ces éléments, je dois prendre en considération l’attitude et la conduite de la prestataireNote de bas page 13.

Vouloir retourner travailler

[35] La prestataire a montré qu’elle voulait retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui serait offert, car elle a fourni une recherche d’emploi détaillée. Je comprends que la Commission a fait valoir que la prestataire n’avait pas fourni de recherche d’emploi confirmant son intention de réintégrer le marché du travail dès que possible. Néanmoins, la prestataire a maintenant fourni une recherche d’emploi détaillée qui montre qu’elle voulait retourner travailler.

Faire des démarches pour trouver un emploi convenable

[36] La prestataire a fait des démarches suffisantes pour trouver un emploi convenable.

[37] Pour m’aider à tirer une conclusion sur ce deuxième élément, j’ai examiné les activités de recherche d’emploi mentionnées ci‑dessus. Ces activités me servent seulement de points de repère pour rendre une décision sur cet élémentNote de bas page 14.

[38] Les démarches que la prestataire a faites pour trouver un nouvel emploi comprenaient entre autres rédiger un curriculum vitae, évaluer les possibilités d’emploi et postuler des emplois précis. J’ai expliqué ces raisons plus tôt lorsque j’ai examiné la question de savoir si la prestataire a fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi.

[39] Ces démarches étaient suffisantes pour satisfaire aux exigences liées à ce deuxième élément parce que la prestataire a donné les noms précis des employeurs avec lesquels elle a communiqué (et avec qui elle a communiqué à nouveau) à propos d’emplois.

Limiter indûment ses chances de retourner travailler

[40] La prestataire n’a pas établi des conditions personnelles qui auraient pu limiter indûment ses chances de retourner travailler.

[41] La prestataire affirme qu’elle ne l’a pas fait parce qu’elle était disponible les lundis et mardi soir, toute la journée les mercredis, les jeudis et vendredi soir et les fins de semaine. La prestataire a également déclaré que certains de ses cours étaient en ligne, ce qui donnait plus de flexibilité pour le travail.

[42] La Commission affirme que la prestataire était en classe toute la journée le lundi, le mardi, le jeudi et le vendredi.

[43] J’estime que la prestataire n’a pas limité indûment ses chances de retourner travailler pour les raisons décrites ci-dessous.

[44] Premièrement : certains des cours de la prestataire étaient en ligne, ce qui lui donnait plus de flexibilité pour se présenter au travail pendant la journée. Je comprends que certains des laboratoires auxquels la prestataire assistait au cours de la journée étaient obligatoires. Elle était tout de même disponible les soirs, toute la journée les mercredis et les fins de semaine.

[45] Deuxièmement : Je considère que l’affirmation de la prestataire, selon laquelle elle allait ajuster son horaire pour pouvoir travailler, est crédible parce que ses déclarations étaient plausibles et franches.

Alors, la prestataire était-elle capable de travailler et disponible pour le faire?

[46] Selon mes conclusions sur les trois éléments, je conclus que la prestataire a démontré qu’elle était capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenable.

Conclusion

[47] La prestataire a démontré qu’elle était disponible pour travailler au sens de la loi. C’est pourquoi je conclus qu’elle n’est pas inadmissible au bénéfice des prestations. Il est donc possible que la prestataire ait droit à des prestations.

[48] Par conséquent, l’appel est accueilli.

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