Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : AD c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1033

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : A. D.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (468940) datée du 5 mai 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Glenn Betteridge
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 27 septembre 2022
Personnes présentes à l’audience :

Partie appelante
Témoin de la partie appelante

Date de la décision : Le 12 octobre 2022
Numéro de dossier : GE-22-1975

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Décision

[1] L’appel est accueilli. Le Tribunal est d’accord avec le prestataire.

[2] Le prestataire n’a pas quitté volontairement son emploi. Par conséquent, il n’est pas exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[3] En septembre 2021, le prestataire s’est rendu à une réunion d’embauche organisée par une compagnie d’autobus scolaires. Il avait déjà travaillé pour cette même compagnie dans le passé. Le prestataire s’est fait offrir un trajet pour la nouvelle année scolaire, mais il affirme ne pas avoir accepté cette offre.

[4] En septembre 2021, le prestataire recevait des prestations régulières d’assurance-emploi.

[5] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a eu connaissance de cet emploi de chauffeur d’autobus plusieurs mois plus tard. Elle a donc conclu que le prestataire avait quitté volontairement son emploi (c’est-à-dire qu’il a choisi de quitter son emploi) sans justification prévue par la loi. Par conséquent, la Commission l’a exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi et lui a demandé de rembourser une partie des prestations qu’il a reçues.

[6] Le prestataire n’est pas d’accord avec la Commission. Il affirme qu’il n’a jamais accepté cet emploi de chauffeur d’autobus et qu’il n’a jamais effectué le trajet qu’on lui a offert. Donc, il n’a pas quitté volontairement son emploi puisqu’il n’a jamais eu cet emploi.

Question en litige

[7] Le prestataire est-il exclu du bénéfice des prestations pour avoir quitté volontairement son emploi sans justification?

[8] Pour répondre à cette question, je dois d’abord décider si le prestataire a quitté volontairement son emploi. Si c’est le cas, je dois décider s’il a démontré qu’il n’avait aucune autre solution raisonnable que de démissionner.

Analyse

Les parties ne sont pas d’accord sur le fait que le prestataire a quitté volontairement son emploi

[9] Je conclus que le prestataire n’a pas quitté volontairement son emploi. La Commission n’a pas démontré qu’il était plus probable qu’improbable qu’il a choisi de quitter son emploi.

Ce que la loi précise sur les départs volontaires

[10] Le critère juridique pour décider si une personne a quitté volontairement son emploi est celui qui consiste à savoir si elle avait le choix de conserver ou de quitter son emploiNote de bas de page 1.

[11] La Commission doit démontrer qu’il était plus probable qu’improbable que le prestataire a choisi de quitter son emploi.

Éléments présentés par la Commission et par le prestataire

[12] La Commission a tenu compte du code que l’employeur a inscrit sur le relevé d’emploi du prestataire (code E – Départ volontaire) ainsi que des renseignements qu’il lui a transmisNote de bas de page 2. La Commission affirme donc que le prestataire a quitté volontairement son emploi.

[13] Lors de son témoignage, le prestataire a déclaré qu’il n’avait jamais été embauché par la compagnie d’autobus scolaires. Au début de l’année scolaire, le prestataire s’est rendu à une réunion d’embauche organisée par la compagnie d’autobus scolaires, pendant laquelle la compagnie proposait des trajets à des chauffeuses et chauffeurs potentiels. Son ami, qui était présent à l’audience à titre de témoin, l’avait informé de cette réunion.

[14] Son ami, qui occupe un emploi de chauffeur d’autobus scolaires, a expliqué qu’il s’agit de la façon dont cette compagnie procède pour embaucher des chauffeuses et des chauffeurs au début d’une année scolaire.

[15] Le prestataire a déclaré qu’il n’avait pas accepté le trajet offert, car il n’aurait pas travaillé un nombre suffisant d’heures. Cet emploi ne lui aurait pas permis de gagner assez d’argent pour subvenir à ses besoins.

[16] Il soutient qu’il s’est présenté à la réunion seulement. Il n’a pas accepté cet emploi et n’a jamais effectué le trajet offert. Par conséquent, il n’a pas quitté volontairement son emploi.

Le prestataire n’a pas quitté volontairement son emploi

[17] Je conclus que la Commission n’a pas prouvé qu’il était plus probable qu’improbable que le prestataire a quitté volontairement son emploi. En fait, j’estime qu’il n’a pas accepté l’emploi offert par la compagnie d’autobus scolaires. Par conséquent, il n’a pas quitté volontairement son emploi puisqu’il n’occupait pas d’emploiNote de bas de page 3.

[18] J’accepte le témoignage du prestataire pour quatre raisons.

[19] Premièrement, il s’en est tenu à sa version des faits. Je lui ai posé bon nombre de questions sur cette affaire. Bien que l’audience lui ait causé un stress, il s’en est tenu au point suivant : il n’a pas quitté l’emploi en question, puisqu’il ne l’a jamais accepté. Par conséquent, il n’a pas pu quitter un emploi qu’il n’occupait pas.

[20] Deuxièmement, les explications du témoin sur la façon dont les chauffeurs et les chauffeuses d’autobus sont embauchés concordent avec celles du prestataire. Aucune preuve ne contredit leur témoignage à ce sujet. Je n’ai aucune raison de douter de leur témoignage.

[21] Troisièmement, les documents sur lesquels se fonde la Commission appuient le témoignage du prestataire. Son relevé d’emploi indique qu’il a reçu une rémunération pour quatre heures de travail. Le prestataire a expliqué que la rémunération avait été versée dans le cadre de la réunion d’embauche. L’employeur n’a jamais dit à la Commission que le prestataire avait quitté son emploi après avoir effectué le trajet offert.

[22] Quatrièmement, j’estime qu’il est plus probable qu’improbable que le prestataire n’avait pas compris la question de droit qui était en jeu (quitter volontairement son emploi sans justification) avant son audience. C’est pour cette raison qu’il a soulevé pour la première fois pendant l’audience l’argument selon lequel il n’avait jamais accepté l’offre d’emploi, donc qu’il n’avait pas quitté son emploi. Il n’a fait valoir cet argument ni auprès de la Commission, ni dans sa demande de révision, ni dans son avis d’appel.

[23] Normalement, lorsqu’une personne change sa version des faits au moment de l’audience, cela nous porte à douter de la véracité de leur témoignage. Cependant, dans le cadre de cette affaire, je n’ai aucun doute compte tenu des circonstances :

  • Le prestataire est un homme plus âgé, dont la langue maternelle n’est ni l’anglais ni le français.
  • La Commission et le prestataire se sont parlé deux fois. À chaque fois, le prestataire a fait appel à son ami pour traduireNote de bas de page 4.
  • Dans son avis d’appel, il n’aborde pas la question du départ volontaire. Il soutient que la Commission a fait une erreur. Il affirme aussi qu’il est malade et qu’il n’a pas les moyens de rembourser le trop-payéNote de bas de page 5.
  • J’ai interrompu l’audience pendant 35 minutes pour que le prestataire et son ami puissent examiner les documents présentés par la Commission. Étant donné que les courriels acheminés par le Tribunal sont en anglais, le prestataire ne savait pas qu’il devait réviser les documents présentés par la Commission (également en anglais) avant l’audience.
  • À l’audience, nous avons fait appel à un interprète professionnel. Donc, une fois que le prestataire a compris la question de droit en jeu, il a été en mesure de fournir des explications. Il a également pu répondre aux questions que je lui ai posées concernant le départ volontaire.

[24] Compte tenu des circonstances, j’estime qu’il est plausible que le prestataire ait mentionné pour la première fois à son audience qu’il n’avait pas pu quitter son emploi puisqu’il n’avait jamais accepté l’emploi.

[25] Après avoir examiné tous les éléments de preuve (documents et témoignages), je conclus que la Commission n’a pas prouvé qu’il était plus probable qu’improbable que le prestataire a quitté volontairement son emploi.

[26] Puisque le prestataire n’a pas quitté volontairement son emploi, je n’ai pas à juger s’il a démontré qu’il était fondé à quitter volontairement son emploi.

Conclusion

[27] Je conclus que le prestataire n’est pas exclu du bénéfice des prestations.

[28] Par conséquent, l’appel est accueilli.

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