Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : VM c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1006

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Partie appelante : V. M.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentant : Gilles-Luc Bélanger

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 10 février 2022 (GE-21-2527)

Membre du Tribunal : Janet Lew
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 2 août 2022
Personnes présentes à l’audience : Appelant
Représentant de l’intimée 
Date de la décision : Le 11 octobre 2022
Numéro de dossier : AD-22-149

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Décision

[1] L’appel est rejeté. La division générale n’a pas commis d’erreur en concluant que le prestataire n’avait pas accumulé assez d’heures d’emploi assurable pour être admissible aux prestations de maladie de l’assurance-emploi.

Aperçu

[2] Il s’agit d’un appel de la décision de la division générale.

[3] La division générale a conclu que l’appelant, V. M. (prestataire), n’avait pas accumulé assez d’heures de travail pour être admissible aux prestations de maladie de l’assurance-emploi. Il a accumulé 122 heures d’emploi assurable, alors qu’il en avait besoin de 420 pour y être admissibleNote de bas de page 1.

[4] Le prestataire soutient que la division générale a commis des erreurs de droit et de fait. Il dit que la division générale aurait dû accepter qu’il avait droit au crédit unique de 480 heures prévu par les mesures d’aide temporaires ajoutées à la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 2. Il affirme qu’il aurait dû obtenir le crédit unique d’heures parce qu’il a présenté sa demande le 24 septembre 2021 (après cette date, le crédit n’était plus disponibleNote de bas de page 3). S’il obtient le crédit unique, il a accumulé assez d’heures pour être admissible aux prestations.

[5] Le prestataire demande à la division d’appel d’accueillir son appel et de rendre la décision qu’il estime que la division générale aurait dû rendre. Il soutient que la division générale a commis une erreur de droit en appliquant rétroactivement la loi. Il demande à la division d’appel de conclure qu’il avait droit au crédit unique de 480 heures.

[6] L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, soutient que la division générale n’a commis aucune erreur. Elle affirme que le prestataire n’a soulevé aucun moyen d’appel parce qu’il n’avait pas droit au crédit d’impôt unique. La Commission demande à la division d’appel de rejeter l’appel du prestataire.

Questions en litige

[7] Les questions en litige sont les suivantes :

  1. a) La division générale a-t-elle commis une erreur de fait au sujet du moment où l’arrêt de rémunération du prestataire est survenu?
  2. b) La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en appliquant rétroactivement ou rétrospectivement la loi?

Analyse

[8] La division d’appel peut modifier les décisions de la division générale si elles contiennent des erreurs de compétence, de procédure, de droit ou certains types d’erreurs de faitNote de bas de page 4.

Contexte général

[9] Le prestataire a demandé des prestations de maladie de l’assurance-emploi le 4 septembre 2021.

[10] Le prestataire affirme que son dernier jour de travail était le 24 septembre 2021. La Commission soutient que son dernier jour de travail était le 25 septembre 2021Note de bas de page 5. Le relevé d’emploi du prestataire indique que le dernier jour pour lequel il a été payé était le 25 septembre 2021Note de bas de page 6.

[11] Le prestataire a accumulé 122 heures d’emploi assurable du 7 au 25 septembre 2021.

[12] La Commission a dit au prestataire qu’elle ne pouvait pas lui verser de prestations. Elle a jugé qu’il n’avait pas accumulé assez d’heures d’emploi assurable au cours de sa période de référence pour être admissible aux prestation. La période de référence est la période au cours de laquelle une partie prestataire doit accumuler assez d’heures d’emploi assurable pour établir une période de prestations.

[13] La Commission a expliqué au prestataire qu’il devait accumuler au moins 420 heures d’emploi assurable entre le 27 septembre 2020 et le 25 septembre 2021 pour être admissible aux prestationsNote de bas de page 7.

[14] Le prestataire affirme qu’il avait droit au crédit unique de 480 heures prévu par les mesures d’aide temporaire énoncées dans la Loi sur l’assurance-emploi. En ajoutant ce crédit d’impôt unique à ses propres heures d’emploi assurable, il aurait eu assez d’heures de travail pour être admissible aux prestations.

Loi sur l’assurance-emploi

[15] La Commission donne dans ses observations un aperçu de la législationNote de bas de page 8. Elle souligne que le gouvernement du Canada a modifié la Loi sur l’assurance-emploi en prenant des arrêtés d’urgence afin d’offrir un soutien d’urgence pendant la pandémie de COVID-19.

[16] La Commission note également que le gouvernement du Canada a instauré des mesures temporaires. Ces mesures, énoncées à la partie VIII.5 de la Loi sur l’assurance-emploi, facilitaient l’accès aux prestations d’assurance-emploi. Cela comprend l’article 153.17, qui, selon la Commission, visait à aider les personnes à remplir les conditions requises pour recevoir des prestations avec un minimum de 120 heures de travail.

[17] Le prestataire s’appuie sur l’article 153.17(1)(a) de la Loi sur l’assurance-emploi qui prévoit qu’une partie prestataire peut obtenir un crédit unique d’heures d’emploi assurable. Cet article se lit comme suit :

153.17(1) Prestations visées à la partie I – Le prestataire qui présente une demande initiale de prestations à l’égard de prestations visées à la partie I le 27 septembre 2020 ou après cette date, ou à l’égard d’un arrêt de rémunération qui survient à cette date ou par la suite, est réputé avoir, au cours de sa période de référence :

  1. a) si la demande initiale de prestations est présentée à l’égard de prestations visées à l’un des articles 21 à 23.3, 480 heures additionnelles d’emploi assurable;

[18] La Commission affirme que les mesures temporaires ont cessé de s’appliquer le 25 septembre 2021Note de bas de page 9. Elle soutient donc que le prestataire ne peut invoquer l’article pour majorer ses heures d’emploi assurable afin d’être admissible aux prestations.

[19] L’article 153.196(1) de la Loi sur l’assurance-emploi se lit comme suit :

153.196 (1) 25 septembre 2021 ou abrogation – Sous réserve des paragraphes (2) et (3), la présente partie cesse d’avoir effet le 25 septembre 2021 ou, si elle est antérieure, à la date d’abrogation de l’Arrêté provisoire no 8 modifiant la Loi sur l’ assurance-emploi (accès facilité aux prestations)Note de bas de page 10.

[20] « La présente partie » renvoie à la partie VIII.5 - Mesures temporaires pour faciliter l’accès aux prestations (articles 153.15 à 153.196), qui comprend l’article 153.17(1) qui prévoyait la majoration des heures d’emploi assurable.

[21] La première des deux dates mentionnées à l’article 153.196(1) est le 25 septembre 2021. Ainsi, les mesures temporaires énoncées à la partie VIII.5 ont cessé de s’appliquer à cette date.

[22] Cela ne change rien aux arguments du prestataire. Le prestataire ne conteste pas l’argument de la Commission selon lequel les mesures temporaires ont cessé de s’appliquer le 25 septembre 2021. Il soutient cependant que l’article n’est pas pertinent dans son cas parce qu’il a demandé des prestations avant cette date. Comme il a demandé des prestations le 24 septembre 2021, avant la date limite, il dit qu’il aurait dû recevoir le crédit unique.

Décision de la division générale

[23] La division générale a abordé chacun des arguments du prestataire. Elle a écrit ce qui suit :

Premièrement, le budget de 2021 a été mis en œuvre le 19 avril 2021 et il comprenait un certain nombre de mesures temporaires qui sont entrées en vigueur le 26 septembre 2021. Le budget dit que toutes les parties prestataires qui présentent une demande de prestations du 26 septembre 2021 au 24 septembre 2022 doivent maintenant avoir accumulé 420 heures d’emploi assurable. Cela signifie que l’ancien crédit d’heures ne s’applique plus.

Deuxièmement, même si le prestataire a demandé des prestations de maladie le vendredi 24 septembre 2021, sa demande n’a pris effet que le dimanche 26 septembre 2021. La Commission n’a pas fait d’erreur à cet égard. La loi prévoit qu’une période de prestations débute, selon le cas, le dimanche de la semaine au cours de laquelle survient l’arrêt de rémunération. [citation omise]

Troisièmement, il n’y a pas eu d’arrêt de rémunération avant le 24 septembre 2021, ce qui aurait pu permettre au prestataire de faire en sorte que sa demande prenne effet plus tôtNote de bas de page 11. Le prestataire a dit qu’il a travaillé de façon continue du 7 septembre 2021 au 24 septembre 2021Note de bas de page 12.

Enfin, la loi ne me donne pas le pouvoir discrétionnaire d’accorder des prestations au prestataire, même pour des motifs de compassion compte tenu de son état cardiaque.

[24] La division générale a conclu que puisque le prestataire ne pouvait pas obtenir le crédit unique de 420 heures, il n’avait pas accumulé assez d’heures pour être admissible aux prestations.

La division générale a-t-elle commis une erreur de fait au sujet du moment où l’arrêt de rémunération du prestataire est survenu?

Arguments des parties

[25] Le prestataire soutient que la division générale a commis une erreur de fait au sujet du moment où son arrêt de rémunération est survenu.

[26] Le prestataire soutient que son dernier jour de travail était le 24 septembre 2021. Il nie avoir travaillé le 25 septembre 2021 ou que son employeur avait même prévu qu’il travaille ce jour-là. Il affirme avoir subi un arrêt de rémunération le 25 septembre 2021Note de bas de page 13.

[27] La Commission a conclu que le dernier jour de travail du prestataire était le 25 septembre 2021Note de bas de page 14. Elle convient avec lui que l’arrêt de rémunération a eu lieu le 25 septembre 2021Note de bas de page 15.

[28] Je remarque que la Commission a également déclaré dans ses observations à la division générale que le prestataire n’avait pas produit d’éléments de preuve laissant entendre qu’il avait subi l’arrêt de rémunération dans la semaine du 19 septembre 2021Note de bas de page 16. Pourtant, la semaine du 19 septembre 2021 comprend le samedi 25 septembre 2021. Cela signifie que l’arrêt de la rémunération n’aurait pas pu avoir lieu le 25 septembre 2021. La Commission n’a pas concilié ses deux positions apparemment contradictoires.

Pourquoi l’arrêt de rémunération est important

[29] Le prestataire ne dit pas pourquoi une erreur concernant l’arrêt de rémunération est importante pour son appel. Cependant, le moment où survient un arrêt de rémunération est important pour les raisons suivantes :

  • ce moment peut déterminer le début de la période de prestations et de la période de référence;
  • plus important encore, tant qu’il n’y a pas d’arrêt de rémunération provenant de son emploi, une partie prestataire n’est pas admissible aux prestations d’assurance-emploi.

[30] En plus d’avoir accumulé un nombre suffisant d’heures au cours de sa période de référence, le prestataire doit également subir un arrêt de rémunération provenant de son emploiNote de bas de page 17.

La Loi sur l’assurance-emploi définit le moment où survient un arrêt de rémunération

[31] Un « arrêt de rémunération » a un sens précis selon la Loi sur l’assurance-emploi lorsqu’il s’agit d’une personne qui cesse de travailler en raison d’une maladie ou d’une blessure.

[32] L’article 2(1) de la Loi sur l’assurance-emploi définit un arrêt de rémunération comme l’arrêt de la rémunération d’une personne assurée qui se produit dans les cas déterminés par règlement.

[33] La Commission a fait référence aux articles 14(1) et (2) du Règlement sur l’assurance-emploi. Ces articles définissent quand un arrêt de rémunération survient dans le scénario où une personne cesse de travailler en raison d’une maladie ou d’une blessure.

[34] Les articles 14(1) et (2) du Règlement sur l’assurance-emploi précisent ce qui suit :

14 (1) […] un arrêt de rémunération se produit lorsque, après une période d’emploi, l’assuré est licencié ou cesse d’être au service de son employeur et se trouve à ne pas travailler pour cet employeur durant une période d’au moins sept jours consécutifs, à l’égard de laquelle aucune rémunération provenant de cet emploi […] ne lui est payable ni attribuée.

(2) L’arrêt de la rémunération provenant d’un emploi se produit au début de la semaine où l’assuré subit une réduction de rémunération représentant plus de quarante pour cent de sa rémunération hebdomadaire normale du fait qu’il cesse d’exercer cet emploi en raison d’une maladie, d’une blessure ou d’une mise en quarantaine […]

[non souligné dans l’original]

[35] Ainsi, lorsqu’une partie prestataire demande des prestations spéciales comme des prestations de maladie, un arrêt de rémunération survient lorsque sa rémunération hebdomadaire normale diminue de plus de 40 %. C’est la rémunération hebdomadaire et non la rémunération quotidienne qui doit avoir diminué.

Éléments de preuve concernant l’arrêt de rémunération du prestataire

[36] Dans son formulaire de demande de prestations d’assurance-emploi, le prestataire a indiqué que son dernier jour de travail était le 24 septembre 2021Note de bas de page 18. Son employeur a fourni un relevé d’emploi qui mentionne que le prestataire a été payé pour la dernière fois le 25 septembre 2021Note de bas de page 19.

Conclusions de la division générale sur l’arrêt de rémunération du prestataire

[37] La division générale a noté l’élément de preuve du prestataire selon lequel son dernier jour de travail était le 24 septembre 2021Note de bas de page 20.

[38] La division générale n’a tiré aucune conclusion directe quant au moment où le prestataire a travaillé pour la dernière fois ou quant au moment où son arrêt de rémunération est survenu. Cependant, elle a conclu qu’il n’y avait « pas eu d’arrêt de rémunération avant le 24 septembre 2021Note de bas de page 21 ».

[39] La division générale a également conclu que la période de prestations du prestataire avait débuté « selon le cas, le dimanche de la semaine au cours de laquelle survient l’arrêt de rémunérationNote de bas de page 22 ». De toute évidence, la division générale a voulu dire que la période de prestations du prestataire avait débuté le dimanche de la semaine au cours de laquelle l’arrêt de rémunération est survenuNote de bas de page 23.

[40] La division générale a estimé que la période de référence du prestataire allait du 27 septembre 2020 au 25 septembre 2021Note de bas de page 24. La période de référence est la période de 52 semaines qui précède le début de la période de prestationsNote de bas de page 25. Cela signifie que la division générale a conclu que la période de prestations du prestataire a débuté le 26 septembre 2021.

[41] Si la division générale a jugé que la période de prestations du prestataire a débuté le dimanche de la semaine au cours de laquelle l’arrêt de rémunération est survenu, cela signifie en fait qu’elle a conclu que l’arrêt de rémunération a eu lieu au début de la semaine du 26 septembre 2021.

Arrêt de rémunération du prestataire

[42] Dans la présente affaire, il importait donc peu que le prestataire ait cessé de travailler le 24 septembre 2021 ou le 25 septembre 2021. Conformément à l’article 14(2) du Règlement sur l’assurance-emploi, le prestataire devait démontrer que sa rémunération hebdomadaire normale a diminué de plus de 40 % pour qu’il y ait un arrêt de rémunération.

[43] Comme l’a noté la Commission, le prestataire n’a présenté aucun élément de preuve montrant qu’il avait subi un arrêt de rémunération au sens du Règlement sur l’assurance-emploi au cours de la semaine du 19 septembre 2021Note de bas de page 26. La rémunération du prestataire n’a pas diminué de 40 % cette semaine-là.

[44] Autrement dit, le prestataire a subi un arrêt de rémunération au début de la semaine du 26 septembre 2021, parce que sa rémunération hebdomadaire normale a diminué de plus de 40 % cette semaine-là.

[45] Par conséquent, la division générale n’a pas commis d’erreur de fait quant au moment où l’arrêt de rémunération du prestataire a eu lieu.

La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en appliquant rétroactivement ou rétrospectivement la loi?

[46] Le prestataire soutient que la division générale a commis une erreur de droit en concluant que le budget de 2021 s’appliquait dans son cas. Il affirme que le budget de 2021 ne s’applique pas parce qu’il est entré en vigueur le 26 septembre 2021, soit deux jours après qu’il avait présenté sa demande de prestations.

[47] La division générale a souligné que, dans le cadre du budget de 2021, les prestataires qui ont établi une période de prestations du 26 septembre 2021 au 24 septembre 2022 ne pouvaient plus recevoir du crédit précédent d’heures d’emploi assurable.

[48] Le prestataire soutient que la division générale a commis une erreur en appliquant rétroactivement ou rétrospectivement les dispositions de 2021 à une demande qu’il a présentée avant même l’entrée en vigueur du budget. Il dit que la loi en vigueur au 24 septembre 2021 lorsqu’il a fait sa demande devrait s’appliquer. Il affirme qu’il a présenté sa demande à temps et qu’il pouvait donc encore obtenir le crédit unique.

[49] Le prestataire soutient qu’il existe une présomption générale contre les lois rétrospectives en raison du besoin de certitude.

[50] Dans la décision ElguindyNote de bas de page 27, la Cour d’appel fédérale a examiné si une nouvelle loi pouvait s’appliquer rétrospectivement. La juge Dawson a écrit ce qui suit :

[11] S’agissant de l’argument du demandeur voulant que le paragraphe 5(3) soit une disposition législative à effet rétroactif inadmissible, j’estime, à l’instar de la professeure Ruth Sullivan, que [TRADUCTION] « en matière de droit fiscal ou de droit à des prestations périodiques notamment, il est peu probable qu’un motif convaincant permettrait de présumer que le législateur ne comptait pas faire appliquer rétroactivement une nouvelle loi de façon à modifier le régime fiscal ou de prestations pour l’avenir. » (Ruth Sullivan, Sullivan on the Construction of Statutes, 6e éd., Markham (Ont.) : LexisNexis, 2014, p. 768).

[51] Le prestataire n’a fourni aucun élément de preuve portant à croire que le législateur n’avait pas ou ne pouvait pas avoir l’intention que le budget 2021 ne s’applique pas rétrospectivement. Sans de tels éléments de preuve, je ne vois pas pourquoi une loi ne devrait pas ou ne pourrait pas être appliquée rétroactivement lorsque son libellé est précis quant à l’étendue de son champ d’application.

Le prestataire n’avait pas de droit acquis

[52] Toutefois, même si le budget de 2021 ne s’appliquait pas rétrospectivement comme le prétend le prestataire, le simple fait qu’il ait demandé des prestations le 24 septembre 2021 ne l’aide finalement pas. Le prestataire devait établir qu’il avait un droit acquis lorsqu’il a demandé des prestations.

[53] Dans la décision R. c PuskasNote de bas de page 28, le juge en chef Lamer s’est demandé si un demandeur avait un droit acquis :

[…] Un droit ne peut être considéré comme « acquis » que lorsque son titulaire peut vraiment l’exercer. Le mot anglais « accrue » est simplement une façon passive d’exprimer le même concept (une personne « acquiert » un droit; un droit est « acquis » à une personne). De même, quelque chose ne peut être considéré comme « accruing » que si, en bout de ligne, son acquisition est certaine et non tributaire d’événements futurs [citation omise]. En d’autres mots, un droit ne peut pas être acquis tant que toutes les conditions préalables à son exercice n’ont pas été remplies.

(non souligné dans l’original)

[54] Comme je l’ai mentionné plus haut, pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi, il faut satisfaire à certaines exigences. En plus d’avoir accumulé un nombre suffisant d’heures au cours de sa période de référence, une partie prestataire doit également subir un arrêt de rémunération provenant de son emploiNote de bas de page 29.

[55] Lorsque le prestataire a demandé des prestations le 24 septembre 2021, il n’avait pas encore subi d’arrêt de rémunération au sens du Règlement sur l’assurance-emploi.

[56] Comme le prestataire n’avait pas rempli toutes les conditions pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi, il n’avait pas acquis le droit de les recevoir. Il n’était donc pas admissible aux prestations. Cela semble être une réponse complète à l’appel du prestataire.

Interprétation de l’article 153.17(1)(a) de la Loi sur l’assurance-emploi

[57] Enfin, je note que mes collègues ont bien interprété l’article 153.17(1)(a) de la Loi sur l’assurance-emploi, bien qu’ils l’aient fait dans le contexte de demandes de prestations régulièresNote de bas de page 30.

[58] La décision PG concernait huit prestataires qui ont travaillé jusqu’au 22 septembre 2021Note de bas de page 31. Ils ont demandé des prestations régulières d’assurance-emploi le 23 septembre 2021. Ils ont fait valoir qu’ils devraient obtenir le crédit unique de 300 heures parce qu’ils ont demandé des prestations avant le 25 septembre 2021. De cette façon, ils auraient suffisamment d’heures d’emploi assurable pour être admissibles aux prestations. La division d’appel a conclu que les prestataires n’avaient pas droit au crédit. Les heures additionnelles n’étaient offertes qu’aux personnes dont la période de prestations a débuté entre le 27 septembre 2020 et le 25 septembre 2021.

[59] Dans la décision PG, la division d’appel a examiné ce que signifie l’expression « demande initiale de prestations » figurant à l’article 153.17(1) de la Loi sur l’assurance-emploi. La division d’appel a conclu qu’aux termes de la Loi, l’expression « demande initiale de prestations » ne désigne pas la date où une personne demande des prestations.

[60] Une « demande initiale de prestations » est plutôt une « demande formulée aux fins d’établir une période de prestations au profit du prestataire », comme le définit l’article 6(1) de la Loi sur l’assurance-emploi. Après avoir examiné le texte, le contexte et l’objet de la disposition, la division d’appel a décidé qu’une demande initiale se rapporte à une période de prestations précise.

[61] J’adopte les principes généraux et les conclusions auxquels sont parvenus mes collègues dans leurs décisions respectives, à savoir que, pour une demande initiale faite après le 25 septembre 2021, une personne ne peut pas obtenir le crédit unique. Les heures additionnelles ne sont disponibles que pour les périodes de prestations ayant débuté entre le 25 septembre 2021 au 25 septembre 2021.

[62] Dans le cas qui m’occupe, la période de prestations du prestataire a débuté le dimanche 26 septembre 2021, puisqu’il s’agit du dimanche de la semaine au cours de laquelle l’arrêt de rémunération est survenu. Étant donné que le crédit unique n’est offert que pour les périodes de prestations ayant débuté entre le 27 septembre 2020 et le 25 septembre 2021, le prestataire ne peut pas obtenir le crédit unique.

Si la période de prestations du prestataire a débuté le 19 septembre 2021

[63] La Commission est prête à laisser le prestataire [traduction] « choisir le régime qui lui convient le mieuxNote de bas de page 32 ». Cela signifie donc que le prestataire peut obtenir le crédit unique, mais seulement si sa période de prestations a débuté avant le dimanche 26 septembre 2021.

[64] Toutefois, même si la période de prestations du prestataire avait débuté le dimanche 19 septembre 2021, il n’aurait toujours pas accumulé suffisamment d’heures admissibles. En effet, il ne pourrait pas compter sur les heures d’emploi assurable qu’il a accumulées entre le 19 septembre 2021 et le 25 septembre 2021. Ces heures ne font pas partie de sa période de référence.

[65] Même s’il avait reçu le crédit unique de 480 heures, il n’aurait pas accumulé les 600 heures nécessaires pour être admissible aux prestations de maladieNote de bas de page 33.

[66] Comme le fait valoir la Commission, bien que le prestataire puisse choisir la période de référence et de prestations qui lui convient le mieux, il ne peut pas chevaucher les deux régimes et recevoir des prestations des deux sans satisfaire aux exigences pour être admissible à ces prestations.

[67] D’une façon ou d’une autre, que la période de prestations du prestataire commence le 19 septembre 2021 ou le 26 septembre 2021, il n’a pas assez d’heures d’emploi assurable.

Résumé

[68] J’ai décidé que la période de prestations du prestataire a débuté le 26 septembre 2021. Pour une période de prestations débutant le dimanche 26 septembre 2021, le prestataire doit avoir accumulé 420 heures d’emploi assurable pour être admissible aux prestations de maladie. Toutefois, le prestataire n’a pas droit au crédit unique de 480 heures, car il n’était offert que jusqu’au 25 septembre 2021.

[69] Si la période de prestations du prestataire avait débuté le dimanche 19 septembre 2021, le prestataire aurait pu recevoir le crédit unique de 480 heures. Cependant, il aurait eu besoin de 600 heures d’emploi assurable pour être admissible aux prestations de maladie. Il n’a pas assez d’heures, car il ne peut pas compter sur les heures qu’il a accumulées entre le 19 septembre 2021 et le 25 septembre 2021. Ces heures ne font pas partie de sa période de référence.

[70] De plus, le prestataire n’a subi un arrêt de rémunération qu’au début de la semaine du 26 septembre 2021. Il devait en avoir subi un pour être admissible aux prestations lorsqu’il a présenté sa demande. Comme il n’y avait pas eu d’arrêt de rémunération à ce moment-là, il n’était pas admissible aux prestations.

Conclusion

[71] L’appel est rejeté. La division générale n’a pas commis d’erreur en concluant que le prestataire n’était pas admissible aux prestations de maladie de l’assurance-emploi.

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