Assurance-emploi (AE)

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Citation : SA c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1213

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : S. A.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (458113) datée du 2 mars 2022 rendue par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Josée Langlois
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 7 septembre 2022
Personne présente à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 8 septembre 2022
Numéro de dossier : GE-22-1425

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a prouvé que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite (c’est-à-dire parce qu’elle a fait quelque chose qui lui a fait perdre son emploi). Par conséquent, elle est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.Note de bas de page 1

Aperçu

[3] Le 19 novembre 2021, l’appelante a cessé d’occuper son emploi au X parce qu’elle a refusé de se conformer à une directive de vaccination obligatoire contre la Covid-19.

[4] L’appelante n’est pas d’accord. Elle affirme qu’elle n’a pas commis une inconduite et qu’il est injuste de perdre son emploi parce qu’elle refuse de se faire vacciner. Elle affirme qu’elle aimait son travail et qu’elle le faisait bien.

[5] La Commission a accepté la raison du congédiement que l’employeur a fournie. Elle a conclu que l’appelante a perdu son emploi en raison de son inconduite. Elle l’a donc exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Question en litige

[6] L’appelante a-t-elle perdu son emploi en raison d’une inconduite ?

Analyse

[7] Pour décider si l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite, je dois décider deux choses. D’abord, je dois décider pour quelle raison l’appelante a perdu son emploi. Ensuite, je dois décider si la Loi considère cette raison comme une inconduite.

Pourquoi l’appelante a-t-elle perdu son emploi ?

[8] J’estime que l’appelante a perdu son emploi parce qu’elle a refusé de se conformer à la directive de l’employeur. L’appelante devait fournir une preuve de vaccination contre la Covid-19 à l’employeur au plus tard le 19 novembre 2021 et elle a refusé de le faire.

[9] La Commission et l’appelante s’entendent sur la raison pour laquelle cette dernière a perdu son emploi.

[10] L’employeur a déclaré à la Commission qu’à compter du 4 octobre 2021, le gouvernement du Nouveau-Brunswick exigeait que tous les employés travaillant dans le domaine de la santé soient vaccinés contre la Covid-19.

[11] L’employeur a appliqué la politique de vaccination imposée par le gouvernement. Le 6 octobre 2021, il a informé l’appelante qu’une attestation de vaccination est obligatoire pour travailler dans le domaine de la santé conformément à la Directive en matière de vaccination contre la Covid-19-Foyers de soins et établissements résidentiels pour adultes.Note de bas de page 2 Un délai a été accordé au 19 novembre 2021 pour présenter la preuve de la vaccination démontrant que l’employé avait reçu une première dose du vaccin.Note de bas de page 3

[12] Conformément à cette directive, l’employeur a demandé une preuve de vaccination à l’appelante. L’appelante a refusé de fournir cette preuve parce qu’elle ne voulait pas se faire vacciner.

[13] Le 19 novembre 2021, l’employeur a suspendu l’appelante.

[14] L’appelante admet avoir refusé de se conformer à la directive de l’employeur exigeant de présenter une preuve de vaccination. Je conclus qu’elle a posé les gestes reprochés par l’employeur qui ont d’abord mené à une suspension avant qu’elle soit congédiée.

La raison du congédiement de l’appelante est-elle une inconduite selon la Loi ?

[15] Selon la Loi, la raison du congédiement de l’appelante est une inconduite. Un travailleur qui est congédié en raison de son inconduite ne peut recevoir des prestations d’assurance-emploi.

[16] Pour être considérée comme une inconduite selon la Loi, la façon d’agir doit être délibérée. Cela signifie qu’elle était consciente, voulue ou intentionnelle.Note de bas de page 4 Une inconduite comprend aussi une conduite qui est tellement insouciante qu’elle est presque délibérée.Note de bas de page 5 Pour qu’il y ait inconduite au sens de la Loi, il n’est pas nécessaire que l’appelante ait eu une intention coupableNote de bas de page 6 (c’est-à-dire qu’elle ait voulu faire quelque chose de mal).

[17] Il y a inconduite si l’appelante savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait l’empêcher de remplir ses obligations envers son employeur et qu’il était réellement possible qu’elle soit congédiée pour cette raison.Note de bas de page 7

[18] La Commission doit prouver, selon la prépondérance des probabilités, que l’appelante a perdu son emploi en raison de son inconduite. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que l’appelante a perdu son emploi en raison de son inconduite.Note de bas de page 8

[19] L’employeur, X, a transmis à la Commission la directive de vaccination obligatoire ainsi que la directive en matière de vaccination pour les établissements de soins de longue durée émis par le gouvernement du Nouveau-Brunswick.Note de bas de page 9

[20] Le 6 octobre 2021, l’employeur a avisé tous les employés, incluant l’appelante, de l’obligation de recevoir deux doses du vaccin pour la Covid-19 pour pouvoir continuer à travailler.

[21] Un délai a été accordé pour présenter l’attestation de vaccination des deux doses du vaccin. Les employés devaient présenter la preuve de la vaccination de la première dose le 19 novembre 2021 et la preuve de la vaccination de la deuxième dose le 21 décembre 2021.

[22] L’appelante a refusé de présenter l’attestation de vaccination de la première dose le 19 novembre 2021. Elle n’a pas demandé une exemption pour des raisons médicales ou religieuses. En refusant de se conformer à la directive de l’employeur, elle savait qu’il était possible qu’elle soit congédiée.

[23] Le 11 janvier 2022, elle a déclaré à la Commission qu’elle était au courant des exigences imposées par le gouvernement, mais qu’elle n’était pas d’accord et qu’elle a refusé de se conformer à cette politique de vaccination parce que c’était contre ses valeurs.

[24] L’appelante fait valoir qu’elle a été congédiée en raison de son refus de se faire vacciner et non parce qu’elle ne faisait pas bien son travail. Elle affirme qu’elle n’a pas commis d’inconduite. Elle est en désaccord avec la décision de la Commission parce qu’elle ne croit pas que l’employeur pouvait la forcer à se faire vacciner et que cette pratique est discriminatoire.

[25] L’appelante affirme également qu’elle n’a pas contracté la Covid-19 même si elle n’était pas vaccinée et qu’elle est en santé. Elle ne comprend pas pourquoi elle aurait commis une inconduite en refusant de se faire vacciner parce que son employeur a appliqué une politique du gouvernement. Elle soutient que la politique ne venait pas directement de l’employeur, mais du gouvernement. En ce sens, elle fait valoir que son employeur l’a rappelé pour travailler lorsque cette restriction a été levée et qu’il comprend les raisons de son refus de se faire vacciner. Elle a recommencé à travailler au X depuis environ 2 mois puisque l’attestation vaccinale n’est plus requise.

[26] La Commission fait valoir que l’appelante savait que le non-respect de la politique de vaccination pouvait entraîner son congédiement.

[27] Je suis d’accord avec la Commission lorsqu’elle affirme que le Tribunal n’est pas compétent pour se prononcer sur l’efficacité des vaccins ou déterminer si la politique de l’employeur était raisonnable.Note de bas de page 10

[28] Bien que je comprenne les prétentions de l’appelante, lorsqu’un employé ne respecte pas une directive de l’employeur de façon volontaire, cette attitude et ce comportement l’empêchent de remplir ses obligations envers son employeur.

[29] Même si l’employeur a appliqué cette directive suite à celle imposée par le gouvernement, en ne se conformant pas à la directive de l’employeur, l’appelante ne respecte pas ses obligations envers l’employeur.

[30] En ce sens, j’ai bien entendu les raisons pour lesquelles l’appelante a refusé de se faire vacciner. Je comprends que pour des raisons personnelles, elle a fait choisi de ne pas se faire vacciner contre la Covid-19.

[31] Cependant, pour statuer si le refus de l’appelante constitue une inconduite au sens de la Loi, je n’ai pas à déterminer si la suspension/congédiement était une mesure appropriée, mais bien si les gestes que l’appelante a posés constituent une inconduite.

[32] L’appelante savait que le gouvernement du Nouveau-Brunswick imposait, à compter du 19 novembre 2021, la vaccination pour la Covid-19 aux employés travaillant dans le domaine de la santé. Elle savait que cette exigence s’appliquait à elle puisqu’elle travaillait au X. Elle savait que son employeur devait appliquer la directive imposée par le gouvernement. Elle a volontairement décidé de ne pas s’y conformer.

[33] Pour conclure à une inconduite, l’intention coupable n’a pas à être démontrer. C’est-à-dire que je n’ai pas à déterminer si l’appelante a fait quelque chose de mal. Je comprends les explications de l’appelante et je suis persuadée qu’elle n’a pas voulue faire quelque chose de mal. Je comprends également que cette situation lui a causé des soucis financiers et qu’elle craint également de perdre de nouveau son emploi si une telle politique de vaccination est encore appliquée.

[34] L’appelante a été congédiée par son employeur parce qu’elle n’a pas respecté les règles émises par l’employeur; elle a refusé de se conformer à la politique de vaccination obligatoire pour tous les employés (à moins de présenter une exemption médicale ou pour des motifs religieux). Même si cette directive est survenue en cours de mandat et non au moment de l’embauche, en refusant de s’y conformer, l’appelante ne satisfait pas aux règles émises par l’employeur. L’appelante l’admet elle-même lorsqu’elle dit que son employeur était obligé d’imposer cette politique.

[35] Même si je comprends le questionnement de l’appelante parce que l’employeur a appliqué la directive de la vaccination obligatoire le 19 novembre 2021 et que maintenant, étant donné que la directive n’est plus en vigueur, elle a été réembauchée chez le même employeur, le 19 novembre 2021, l’appelante ne respectait pas la directive imposée. Je suis d’accord avec l’appelante qu’elle n’a pas perdu son emploi parce qu’elle ne faisait pas bien son travail. Elle a perdu son emploi parce qu’elle a refusé de se conformer à la directive de vaccination de l’employeur.

[36] L’appelante admet avoir reçu des directives claires de l’employeur le 6 octobre 2021 concernant la directive de vaccination. Le 19 novembre 2021, elle a refusé de présenter une preuve de vaccination comme l’exigeait cette directive. L’appelante connaissait les règles et elle a décidé de ne pas s’y conformer. Ce geste volontaire constitue une inconduite.

Alors, l’appelante a-t-elle perdu son emploi en raison d’une inconduite?

[37] L’appelante ne peut recevoir des prestations régulières si elle est congédiée pour une inconduite qu’elle a commise. Lorsqu’un employé ne respecte pas les règles de son employeur, il peut présumer qu’il sera congédié.

[38] Comme mentionné, je n’ai pas à déterminer si le congédiement était une sanction appropriée, je précise cependant que la possibilité d’obtenir des prestations s’évalue de la même manière pour une période de suspension ou suite à un congédiement. En l’espèce, je dois déterminer si l’appelant a posé les gestes que l’employeur lui reproche et si ces gestes constituent une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi.

[39] Selon mes conclusions précédentes, je suis d’avis que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite. L’appelante a posé les gestes reprochés par l’employeur et le fait d’avoir refusé de se conformer à la directive de vaccination obligatoire de l’employeur constitue une inconduite au sens de la Loi.

Conclusion

[40] La Commission a prouvé que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite. C’est pourquoi elle est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[41] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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