Assurance-emploi (AE)

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Citation : CO c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1066

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : C. O.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (469437) datée du 3 mai 2022 rendue par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Josée Langlois
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 20 octobre 2022
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 26 octobre 2022
Numéro de dossier : GE-22-1880

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Décision

[1] L’appel est accueilli. L’appelant n’a pas volontairement pris un congé.

Aperçu

[2] L’appelant travaille à la buanderie de l’Hôtel X. Il a cessé d’occuper son emploi le 1er janvier 2022 parce qu’il a refusé de fournir une attestation de vaccination contre la Covid-19 conformément à la politique adoptée par l’employeur.

[3] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a accepté les explications fournies par l’employeur sur le premier relevé d’emploi. Elle a conclu que l’appelant a pris volontairement un congé autorisé et elle ne lui a pas versé de prestations.

[4] L’appelant n’est pas d’accord avec la décision de la Commission. Il admet qu'il n'a pas fourni une attestation de vaccination contre la Covid-19 à son employeur, mais il explique qu’il n’a pas pris un congé volontairement. Au contraire, il explique qu’il était disponible pour travailler, mais que l’employeur qui l’a mis en congé. De plus, il fait valoir que certains de ses collègues, placés dans la même situation que lui, ont reçu des prestations alors que ce n’est pas le cas pour lui.

[5] Je dois déterminer si l’appelant était en congé autorisé.

Questions en litige

[6] L’appelant a-t-il volontairement pris un congé à compter du 1er janvier 2022 ?

[7] Si oui, prendre un congé était-il la seule solution raisonnable pour l’appelant ?

Analyse

L’appelant a-t-il volontairement pris un congé ?

[8] L’employé qui prend volontairement une période de congé sans justification n’est pas admissible au bénéfice des prestations si la période de congé a été autorisée par l’employeur et si l’employé et l’employeur ont convenu de la date à laquelle l’employé reprendra son emploi.Note de bas page 1

[9] Les faits au dossier démontrent que l’employeur a transmis à la Commission un premier relevé d’emploi indiquant que l’appelant était en congé. Il a par la suite transmis un deuxième relevé d’emploi indiquant qu’il avait plutôt cessé d’occuper son emploi en raison d’un manque de travail.

[10] L’appelant explique qu’un employé de la Commission lui aurait dit que la modification du relevé d’emploi par l’employeur faisait le rendait automatiquement admissible à recevoir des prestations. L’appelant ne comprend pas pourquoi il ne reçoit pas de prestations alors que d’autres collègues, placés dans la même situation que lui, ont reçu des prestations.

[11] Il explique que l’employeur a adopté une politique de vaccination contre la Covid-19 et que l’employeur l’a informé à plusieurs reprises de l’application de cette politique. L’appelant savait qu’il devait fournir une attestation de vaccination contre la Covid-19 au plus tard le 1er janvier 2022 et que s’il ne se conformait pas à la politique, il y aurait des conséquences. L’employeur l’avait avisé qu’il serait mis en congé sans solde.

[12] Lors de l’audience, l’appelant a expliqué que plusieurs réunions ont été organisées par sa superviseure à ce sujet. Pendant la dernière semaine de décembre, elle l’a aussi contacté par téléphone pour savoir s’il allait transmettre son attestation de vaccination contre la Covid-19.

[13] L’appelant admet donc qu’il a été informé de la politique de vaccination de l’employeur ainsi que des conséquences s’il ne s’y conformait pas. En ce sens, il mentionne que toutes les semaines, sa superviseure rencontrait les employés pour leur fournir des explications et les encourager à se faire vacciner.Note de bas page 2

[14] Cependant, l’appelant n’avait pas l’intention de se faire vacciner. Il explique qu’il est en bonne santé et qu’il n’est pas à risque.

[15] Le 1er janvier 2022, l’appelant n’avait toujours pas transmis une preuve de vaccination et il a été mis en congé sans solde à l’initiative de l’employeur.Note de bas page 3

[16] La Commission a conclu que l’appelant avait pris un congé autorisé au sens de l’article 32 de la Loi. Lorsqu’elle a transmis ses argumentations, elle indique que l’appelant a été suspendu de son emploi selon l’article 31. Elle soutient que l’appelant a commis une inconduite en ne présentant pas à l’employeur une attestation de vaccination contre la Covid-19.

[17] Je suis en partie d’accord avec la Commission. Seulement, conformément à l’article 113 de la Loi, je suis compétente pour entendre un appel d’une décision révisée. La décision révisée par la Commission et rendue le 3 mai 2022 indique « (…) nous ne pouvons pas vous verser des prestations à partir du 3 janvier 2022 au 11 mars 2022 (sic) parce que vous avez volontairement pris une période de congé autorisé par X (…) ».

[18] En transmettant des arguments qui font valoir que l’appelant a été suspendu de ses fonctions, la Commission admet que l’appelant n’a pas pris un congé autorisé. Elle fait valoir qu’il a été suspendu par l’employeur.

[19] Cependant, je dois statuer sur la décision qu’a rendue la Commission et je ne peux statuer sur un autre article de la Loi pour statuer sur le litige au fond. Il a d’ailleurs été confirmé plusieurs fois par la Cour fédérale que la juridiction d’un Tribunal, comme celui qu’est le Tribunal de la sécurité sociale du Canada, se restreint à la décision rendue par la Commission. Cependant, dans l’affaire Easson, la Cour indique que lorsque deux notions distinctes sont traitées dans un même article de Loi (ce qui est le cas à l’article 30 pour le départ volontaire et l’inconduite), il n’y a pas de faute à conclure selon l’intention générale de la disposition.Note de bas page 4

[20] Cependant, le congé autorisé et la suspension sont déterminés par deux articles différents de la Loi. Néanmoins, la suspension se traite, selon l’esprit de la jurisprudence en vigueur, comme l’inconduite (article 30 de la Loi).

[21] Dans son argumentation transmise au Tribunal le 13 juin 2022, la Commission indique qu’il aurait été préférable de traiter le dossier de l’appelant sous l’angle de la suspension pour inconduite plutôt que sous l’angle d’un congé autorisé puisque la cessation d’emploi est survenue à l’initiative de l’employeur.

[22] Je suis d’accord et j’accorde à la Commission que l’appelant a cessé d’occuper son emploi parce qu’il a refusé de se conformer à la politique de vaccination de l’employeur. Conformément à cette politique, il devait fournir une preuve de vaccination contre la Covid-19 à l’employeur au plus tard le 1er janvier 2022 et il a refusé de le faire.

[23] Cependant, l’appelant souhaitait continuer à travailler. Il n’a pas demandé un congé à l’employeur et l’employeur l’a mis en congé sans solde sans prévoir une date de retour. L’employeur a suspendu l’appelant parce qu’il n’a pas fourni une attestation de vaccination contre la Covid-19 comme l’exigeait sa politique de vaccination.

[24] Dans ce cas, la Commission a rendu une décision considérant que l’appelant avait pris volontairement un congé et, comme expliqué plus haut, je suis compétente pour statuer sur la décision révisée par la Commission. Je ne pourrai déterminer si l’appelant a cessé d’occuper son emploi en raison de son inconduite d’autant plus que l’appelant n’est pas d’accord qu’il aurait commis une inconduite.Note de bas page 5

[25] En ce sens, les déclarations écrites par deux témoins de l’appelant laissent sous-entendre que, pour au moins un de ces employés, la Commission a rendu une décision initiale portant sur l’inconduite.Note de bas page 6 Lors de l’audience, l’appelant fait valoir l’audience que l’employeur a transmis un deuxième relevé d’emploi modifiant la raison de la cessation d’emploi (comme étant un manque de travail) aussi pour ses deux collègues et que, contrairement à lui, les relevés d’emploi avec la nouvelle mention de l’employeur auraient été acceptés tel quel par la Commission et que ses deux collègues ont pu recevoir des prestations.Note de bas page 7

[26] Chaque dossier doit être déterminé au cas par cas et je ne peux me prononcer sur les dossiers des collègues de l’appelant pour lesquels je ne suis pas saisie du dossier. Cependant, je précise à l’appelant que ce n’est pas parce que l’employeur a transmis un deuxième relevé d’emploi modifiant la raison de la cessation d’emploi qu’il avait initialement déclarée que la Commission doit nécessairement l’accepter tel quel. Il est de la responsabilité de l’employeur de transmettre un relevé d’emploi qui reflète la réalité. Si la Commission avait rendu une décision considérant que l’appelant avait cessé d’occuper son emploi en raison d’une suspension, j’aurais déterminé si c’était en raison de l’inconduite de l’appelant. Mais ce n’est pas le cas.

[27] La question à laquelle je dois répondre en l’espèce est : est-ce que l’employé avait le choix de prendre un congé ou nonNote de bas page 8 ?

[28] La réponse est non. L’appelant n’a pas eu le choix de prendre ou non un congé. Il a été « mis en congé sans solde » parce que son comportement n’était pas en conformité avec la politique de vaccination de l’employeur.

[29] Les faits au dossier sont clairs et la Commission est également d’accord que l’appelant a cessé d’occuper son emploi en raison d’une initiative de l’employeur. L’appelant n’a pas demandé un congé autorisé et il n’a pas pris volontairement un congé.

[30] Puisque ce n’est pas volontairement que l’appelant a pris un congé, il n’a pas à démontrer qu’il était fondé de le prendre ou que prendre ce congé constituait la seule solution raisonnable dans ce cas.

Conclusion

[31] L’appel est accueilli.

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