Assurance-emploi (AE)

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Citation : DA c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1117

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : D. A.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (475790) datée du 20 mai 2022 rendue par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Charline Bourque
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 8 septembre 2022
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 12 septembre 2022
Numéro de dossier : GE-22-2094

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Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] Le prestataire a présenté sa demande de révision tardivement et la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire de manière judiciaire lorsqu’elle a refusé de prolonger le délai prévu pour demander une révision.

Aperçu

[3] Le 20 octobre 2017, la Commission informe le prestataire du fait qu’elle a réexaminé sa demande de prestations d’assurance-emploi qui débutait le 16 août 2017. La Commission détermine alors que le prestataire a volontairement quitté son emploi sans motif valable. De plus, elle apporte des ajustements aux déclarations du prestataire en lien avec sa rémunération pour la période du 28 août 2016 au 30 juillet 2017. La Commission détermine alors que le prestataire a fait 5 fausses déclarations et lui impose une pénalité en plus d’émettre un avis de violation.

[4] Le 20 avril 2022, le prestataire demande à la Commission de réviser la décision rendue le 20 octobre 2017.  La Commission indique alors avoir étudié les raisons fournies par le prestataire concernant son retard à demander la révision de sa décision. Néanmoins, elle est d’avis que le prestataire ne satisfait pas aux exigences et refuse par conséquent de procéder à la révision de la décision.

[5] Selon la Loi, un prestataire peut demander la révision d’une décision de la Commission dans les 30 jours suivant la date à laquelle la décision lui a été communiquée. La Commission peut néanmoins décider d’accorder une prolongation du délai pour demander la révision. Il s’agit alors d’un pouvoir discrétionnaire de la Commission.

[6] Par conséquent, je ne peux intervenir dans la décision que si la Commission n’a pas exercé ce pouvoir discrétionnaire de manière judiciaire.

Question en litige

[7] Est-ce que la demande de révision a été présentée au-delà du délai de 30 jours prévu par la Loi ?

[8] La Commission a-t-elle exercé son pouvoir discrétionnaire de manière judiciaire en refusant de réviser la décision du prestataire ?

Analyse

[9] Comme expliqué au prestataire, la seule question en litige dans le présent appel est celle du délai de révision. En effet, comme la Commission n’a pas révisé la décision rendue en octobre 2017 sur les questions du départ volontaire, de la rémunération, de la pénalité et de l’avis de violation, je ne peux rendre de décision à leur sujet.

Question en litige no 1 : Est-ce que la demande de révision a été présentée au-delà du délai de 30 jours prévu par la Loi ?

[10] Je conclus que la demande de révision a été présentée dans un délai dépassant les 30 jours prévus par la Loi sur l’assurance-emploi. De plus, le délai dépasse les 365 jours.

[11] Un prestataire peut demander la révision d’une décision dans les 30 jours suivant la date où la décision lui a été communiquée ou dans le délai supplémentaire que la Commission peut accorder selon les modalités du Règlement sur les demandes de révisionNote de bas page 1.

[12] Le 20 octobre 2017, la Commission a rendu une décision relative à un départ volontaire, aux déclarations du prestataire en lien avec sa rémunération pour la période du 28 août 2016 au 30 juillet 2017, une pénalité et un avis de violationNote de bas page 2.

[13] La demande de révision du prestataire datée du 20 avril 2022 a été reçue au centre Service Canada de Causapscal le même jourNote de bas page 3. Le prestataire a donc déposé sa demande de révision avec un retard de 1613 jours.

Question en litige no 2 : La Commission a-t-elle exercé son pouvoir discrétionnaire de manière judiciaire en refusant de réviser la décision du prestataire ?

[14] Je suis d’avis que la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire de manière judiciaire puisqu’elle a agi de bonne foi, a tenu compte de toutes les circonstances pertinentes au dossier, tout en ne tenant pas compte des éléments non pertinents lorsqu’elle a refusé de proroger le délai pour demander une révision d’une décision.

[15] En effet, la Commission peut accorder un délai plus long pour la présentation d’une demande de révision, « si elle est convaincue, d’une part, qu’il existe une explication raisonnable à l’appui de la demande de prolongation du délai » et, d’autre part, que l’intéressé a « manifesté l’intention constante de demander la révision »Note de bas page 4.

[16] De plus, étant donné que le prestataire a présenté sa demande de révision plus de 365 jours en retard, la Commission doit également être convaincue que la demande de révision a une chance raisonnable de succès et qu’elle ne causera pas préjudice à aucune partieNote de bas page 5.

[17] La jurisprudence a confirmé que la décision de la Commission d’accorder une prorogation du délai pour la demande de réexamen est discrétionnaireNote de bas page 6.

[18] La Cour d’appel fédérale a conclu que les décisions discrétionnaires de la Commission ne devraient pas être infirmées sauf s’il peut être démontré qu’elle n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire, c’est‑à‑dire, agir de bonne foi, prendre en compte tous les facteurs pertinents et ne pas tenir compte des facteurs non pertinentsNote de bas page 7.

[19] Autrement dit, je ne peux substituer mon opinion à celle de la Commission. Je dois plutôt déterminer si, au moment de prendre sa décision, la Commission a agi de bonne foi, a tenu compte de toutes les circonstances pertinentes au dossier, tout en ne tenant pas compte des éléments non pertinents et si elle a agi pour un motif régulier et de manière non discriminatoireNote de bas page 8.

[20] Ainsi, je dois déterminer si la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle a refusé de proroger le délai de 30 jours pour la présentation d’une demande de révision de sa décision initiale. Si je suis d’avis que la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire, je ne peux pas accorder au prestataire une prolongation du délai pour présenter une demande de révision. Toutefois, si je suis d’avis que la Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de manière judiciaire, je peux accorder au prestataire une prolongation de délai pour présenter une demande de révision. La Commission devra alors réviser la décision qu’elle a initialement rendue.

[21] Comme mentionné, le prestataire a présenté sa demande de révision avec un retard de 1613 jours.

[22] Le prestataire explique ce délai par le fait qu’il était « jeune et inconscient ». Il explique que la personne qui a rendu la décision initiale l’a découragé en lui expliquant qu’il n’y avait rien à faire. Maintenant, il fait face à une situation financière difficile où le remboursement de la dette est un fardeau sur sa familleNote de bas page 9. Il a aussi été informé du fait qu’il aurait pu contester la décision, ce qu’il ne croyait pas possible.

[23] Je constate que la Commission a pris en considération les facteurs indiqués au paragraphe 1 (1) et 1 (2) du Règlement sur les demandes de révision.

[24] En effet, la Commission a conclu que le prestataire n’avait pas fourni une explication raisonnable à l’appui de la demande de prolongation du délai et qu’il n’avait pas manifesté l’intention constante de demander une révision des décisions rendues en octobre 2017. De plus, la Commission n’est pas convaincue que la demande de révision du prestataire a des chances raisonnables de succès. Dans le cadre de l’enquête 22745250A4 menant aux décisions de la Commission, le prestataire a pu fournir à l’enquêteur ses explications sur l’ensemble des litiges de fonds. Les informations fournies par le prestataire dans sa demande de révision étaient déjà connues au moment des décisions initiales. Finalement, la Commission ne considère pas que le fait d’autoriser un délai supplémentaire au prestataire lui porterait préjudice ni à aucune autre partieNote de bas page 10.

[25] Je constate qu’à l’audience, le prestataire a fourni des explications similaires à celles qu’il avait présentées à la Commission pour expliquer son retard à présenter son appel. Le prestataire a expliqué qu’il était jeune et mal informé. Il a été découragé par la personne qui a rendu la décision. Le prestataire n’a pas cherché à obtenir de l’information supplémentaire.

[26] Il est généralement reconnu que malgré la bonne foi, l’ignorance de la Loi ne peut justifier un retard à demander une révision. Au même titre, je ne peux refuser d’appliquer la Loi malgré le fait que je comprends les difficultés financières du prestataire.Note de bas page 11

[27] Je prends aussi en considération que la Commission a considéré qu’une révision ne causerait pas préjudice aux parties bien qu’elle ne soit pas convaincue que la demande de révision a des chances de succès.

[28] Je comprends les difficultés financières du prestataire et je comprends qu’il souhaite mettre la situation derrière lui afin de passer à autre chose. Malheureusement, je ne peux pas intervenir dans la décision de la Commission.

[29] En effet, je suis d’avis que la Commission a agi de bonne foi, a tenu compte de toutes les circonstances pertinentes au dossier, tout en ne tenant pas compte des éléments non pertinents lorsqu’elle a refusé de proroger le délai pour demander une révision d’une décision.

[30] Je suis d’avis que la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire de manière judiciaire lorsqu’elle a refusé de prolonger le délai pour demander une révision de la décision. Je ne peux donc pas intervenir.

Conclusion

[31] L’appel est rejeté.

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