Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : CB c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1073

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de permission d’en appeler

Partie demanderesse : C. B.
Partie demanderesse : M. C.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 1er septembre 2022 (GE-22-1219)

Membre du Tribunal : Pierre Lafontaine
Date de la décision : Le 21 octobre 2022
Numéro de dossier : AD-22-716

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Décision

[1] La permission de faire appel est refusée. Cela signifie que l’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] La demanderesse (prestataire) travaillait à temps partiel dans un hôpital. L’employeur l’a congédiée le 22 octobre 2021 parce qu’elle n’avait pas respecté sa politique de vaccination contre la COVID-19 au travail. Par la suite, la prestataire a demandé des prestations d’assurance-emploi. La partie défenderesse (la Commission) a décidé que la prestataire n’avait pas le droit de recevoir des prestations d’assurance-emploi parce qu’elle avait perdu son emploi en raison de sa propre inconduite. Après avoir fait une révision, la Commission a maintenu sa décision initiale. La prestataire a porté la décision de révision en appel à la division générale.

[3] La division générale a établi que la prestataire avait été congédiée après avoir refusé de se conformer à la politique de l’employeur. Elle a conclu que la prestataire savait ou aurait dû savoir que, dans de telles circonstances, l’employeur allait probablement la congédier. La division générale a conclu que le non-respect de la politique était la cause du congédiement de la prestataire. Elle a conclu que la prestataire avait été congédiée pour inconduite.

[4] La prestataire demande la permission de faire appel de la décision de la division générale à la division d’appel. Elle soutient que la division générale n’a pas décidé si la politique de l’employeur était légale ou si elle contrevenait à une loi. Elle affirme avoir énuméré de nombreuses lois provinciales et fédérales auxquelles la politique contrevenait. La prestataire soutient que la directive no 6 indiquait seulement que les employeurs devaient avoir une politique sur la COVID-19 et non que les employées et employés devaient se faire vacciner. Elle affirme qu’elle ne pouvait pas savoir qu’elle serait mise à pied parce qu’elle s’acquittait de ses fonctions, et qu’elle avait demandé des mesures d’adaptation ainsi que soulevé des préoccupations au sujet de la politique auxquelles on n’avait pas donné suite. La prestataire soutient que son refus de divulguer son statut de vaccination ne constitue pas une inconduite.

[5] Je dois décider si la prestataire a invoqué une erreur révisable que la division générale aurait commise et qui pourrait conférer à l’appel une chance de succès.

[6] Je refuse la permission de faire appel puisque l’appel de la prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Question en litige

[7] La prestataire soulève-t-elle une erreur révisable que la division générale aurait commise et qui pourrait donner à l’appel une chance de succès?

Analyse

[8] L’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social prévoit les seuls moyens d’appel d’une décision de la division générale. Il s’agit des erreurs révisables que voici :

  1. La procédure de la division générale était inéquitable d’une façon ou d’une autre.
  2. La division générale n’a pas décidé d’une question qu’elle aurait dû trancher ou elle a décidé d’une question qu’elle n’avait pas le pouvoir de trancher.
  3. La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.
  4. La division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droit.

[9] La demande de permission de faire appel est une étape préliminaire à l’examen sur le fond. C’est une première étape que la prestataire doit franchir, mais où la barre est moins haute que celle qu’il faut franchir durant l’instruction de l’appel sur le fond. À l’étape de la permission de faire appel, la prestataire n’a pas à prouver ses prétentions. Elle doit plutôt établir que l’appel a une chance raisonnable de succès en raison d’une erreur révisable. En d’autres termes, elle doit démontrer la possibilité de soutenir qu’il y a eu une erreur révisable pouvant faire que l’appel soit accueilli.

[10] Par conséquent, pour accorder la permission, je dois être convaincu que les motifs de l’appel correspondent à l’un ou l’autre des moyens d’appel mentionnés plus haut et qu’au moins un des motifs a une chance raisonnable de succès.

La prestataire soulève-t-elle une erreur révisable que la division générale aurait commise et qui pourrait donner à l’appel une chance de succès?

[11] La prestataire soutient que la division générale n’a pas décidé si la politique de l’employeur était légale ou si elle contrevenait à une loi. Elle affirme avoir énuméré de nombreuses lois provinciales et fédérales auxquelles la politique contrevenait. La prestataire soutient que la directive no 6 indiquait seulement que les employeurs devaient avoir une politique relative à la COVID-19 et non que les employées et employés devaient recevoir le vaccin. Elle affirme qu’elle ne pouvait pas savoir qu’elle serait congédiée par son employeur parce qu’elle exerçait ses fonctions, et qu’elle avait demandé des mesures d’adaptation ainsi que soulevé des préoccupations au sujet de la politique auxquelles on n’avait pas donné suite. La prestataire soutient que son refus de divulguer son statut de vaccination ne constitue pas une inconduite au titre de la loi.

[12] La prestataire travaillait à temps partiel dans un hôpital. L’employeur l’a congédiée le 22 octobre 2021 parce qu’elle ne s’était pas conformée à la politique au travail. Elle n’était pas exemptée de la politique.

[13] La division générale devait décider si la prestataire avait été congédiée en raison de son inconduite.

[14] La notion d’inconduite ne veut pas nécessairement dire que le comportement fautif résulte d’une intention coupable. Il suffit que l’inconduite soit consciente, voulue ou intentionnelle. Autrement dit, pour qu’il y ait inconduite, l’acte reproché doit avoir été délibéré ou, à tout le moins, être d’une telle insouciance ou négligence que l’on pourrait dire que la personne a volontairement décidé d’ignorer les répercussions de ses actes sur son rendement au travail.

[15] Le rôle de la division générale n’est pas de juger de la sévérité de la sanction imposée par l’employeur ni de décider si l’employeur s’est rendu coupable d’inconduite en congédiant la prestataire de telle manière que son congédiement était injustifié. Son rôle est plutôt de décider si la prestataire était coupable d’inconduite et si l’inconduite a entraîné son congédiementNote de bas page 1.

[16] La division générale a conclu que la prestataire avait été congédiée parce qu’elle avait refusé de se conformer à la politique dans son milieu de travail.

[17] Le médecin hygiéniste en chef de l’Ontario a publié la directive no 6 au titre de la Loi sur la protection et la promotion de la santé, qui demande aux organismes de soins de santé d’élaborer et de mettre en œuvre une politique de vaccination contre la COVID-19 et d’en assurer le respect, à compter du 7 septembre 2021. Cette directive visait à protéger les travailleuses et les travailleurs de la santé, les patientes et les patients, et la capacité du système de soins de santé.

[18] L’employeur a mis une politique en place. Elle précise qu’un membre du personnel qui refuse de divulguer son statut de vaccination ou de se conformer à la politique, sans exemption approuvée, pourrait faire l’objet de mesures disciplinaires pouvant aller jusqu’au congédiement. Elle dit également que tout membre du personnel qui n’a pas d’exemption approuvée sera congédié s’il refuse d’être complètement vacciné après le 22 octobre 2022Note de bas page 2.

[19] La division générale a conclu que l’employeur ne s’était pas livré à une pratique contraire à la loi en mettant en œuvre une politique et en appliquant les mesures énoncées dans la politique. La politique reflète les obligations de l’employeur en tant qu’organisme de soins de santé pendant la pandémie et est conforme à la directive no 6 du Bureau du médecin hygiéniste en chef de l’OntarioNote de bas page 3.

[20] La division générale a conclu que la prestataire avait été informée de la politique et qu’elle avait eu le temps de s’y conformer. La prestataire n’avait pas d’exemption approuvée. La division générale a conclu que le refus de la prestataire était intentionnel. Ce refus délibéré était la cause directe de son congédiement. La division générale a conclu que la prestataire savait que son refus de se conformer à la politique pouvait mener à son congédiement.

[21] La division générale a conclu que la preuve prépondérante démontrait que le comportement de la prestataire constituait une inconduite.

[22] Il est bien établi qu’une violation délibérée de la politique de l’employeur est considérée comme une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas page 4.

[23] La prestataire soutient que l’employeur ne lui a pas offert de mesures d’adaptation, qu’il a fait preuve de discrimination à son égard et qu’il a violé ses droits constitutionnels. Ces questions relèvent d’un autre forum. Ce tribunal n’est pas le bon endroit pour obtenir la réparation que la prestataire demandeNote de bas page 5.

[24] Comme je l’ai mentionné plus haut, la question soumise à la division générale n’était pas de savoir si l’employeur s’est rendu coupable d’inconduite quand il a congédié la prestataire, ce qui aurait rendu le congédiement injuste. La question était plutôt de savoir si le prestataire était coupable d’inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi et si l’inconduite a entraîné son congédiement.

[25] La preuve prépondérante présentée à la division générale montre que la prestataire a fait le choix personnel et délibéré de ne pas suivre la politique en réponse à la situation exceptionnelle engendrée par la pandémie, ce qui a entraîné son congédiement.

[26] Je ne vois pas en quoi la division générale aurait fait une erreur susceptible de révision lorsqu’elle a expliqué qu’elle devait trancher la question de l’inconduite uniquement d’après les paramètres établis par la Cour d’appel fédérale, qui a défini l’inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas page 6.

[27] Je suis pleinement conscient que le prestataire peut demander réparation devant une autre autorité, si l’existence d’une violation est établieNote de bas page 7. Cela ne change rien au fait qu’aux termes de la Loi sur l’assurance-emploi, la Commission a prouvé selon la prépondérance des probabilités que la prestataire a été congédiée en raison d’une inconduite.

[28] Dans sa demande de permission de faire appel, la prestataire n’a relevé aucune erreur susceptible de révision comme la compétence de la division générale ou le non-respect d’un principe de justice naturelle. En ce qui a trait à l’inconduite, elle n’a cerné aucune erreur de droit dont la décision serait entachée ni de conclusion de fait erronée, que la division générale aurait pu tirer de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[29] Après avoir révisé le dossier d’appel et la décision de la division générale et compte tenu des arguments que la prestataire a présentés pour appuyer sa demande de permission de faire appel, je conclus que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[30] La permission de faire appel est refusée. Cela signifie que l’appel n’ira pas de l’avant.

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