Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : AM c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1231

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de permission d’en appeler

Parties appelantes : A. M.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 8 septembre 2022 (GE-22-1572)

Membre du Tribunal : Melanie Petrunia
Date de la décision : Le 9 novembre 2022
Numéro de dossier : AD-22-692

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Décision

[1] Je refuse la permission de faire appel. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] La prestataire, A. M., a été congédiée de son poste d’infirmière autorisée parce qu’elle ne s’est pas conformée à la politique de vaccination contre la COVID-19 de l’employeur. Elle a présenté une demande de prestations régulières d’assurance-emploi.

[3] La partie intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a décidé que le congédiement de la prestataire était attribuable à une inconduite. La prestataire a été exclue du bénéfice de prestations. La prestataire a demandé une révision et la Commission a maintenu sa décision après révision.

[4] La prestataire a fait appel de la décision de révision auprès de la division générale du Tribunal. La division générale a rejeté l’appel. Elle a conclu que la prestataire avait perdu son emploi en raison d’une inconduite et qu’elle était exclue du bénéfice de prestations d’assurance-emploi.

[5] La prestataire demande maintenant la permission de faire appel de la décision de la division générale auprès de la division d’appel du Tribunal. Toutefois, elle doit obtenir la permission pour que son appel puisse aller de l’avant. La prestataire soutient que la division générale a fondé sa décision sur des erreurs de fait importantes.

[6] Je dois décider s’il y a une erreur révisable de la division générale qui pourrait conférer à l’appel une chance d’être accueilli. Je refuse la permission de faire appel parce que l’appel de la prestataire n’a aucune chance raisonnable d’être accueilli.

Question en litige

[7] Les questions à trancher sont les suivantes :

  1. a)  Peut-on soutenir que la division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante lorsqu’elle a conclu que la prestataire n’avait pas fourni les documents appuyant l’exemption religieuse?
  2. b)  Peut-on soutenir que la division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante lorsqu’elle a omis de tenir compte du fait que le mandat de l’employeur constituait une violation de ses droits de la personne?
  3. c)  La prestataire soulève-t-elle d’autres erreurs révisables de la division générale qui pourraient conférer à l’appel une chance de succès?

Analyse

[8] À cette étape, la prestataire doit répondre à un critère juridique peu exigeant: est-il possible de soutenir que l’appel a une chance de succès?Note de bas de page 1

[9] Pour trancher cette question, je me suis concentrée sur la question de savoir si la division générale aurait pu faire une ou plusieurs des erreurs (ou des motifs d’appel) pertinentes qui sont énumérées dans la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement socialNote de bas de page 2.

[10] Un appel ne s’agit pas d’une nouvelle audience pour la demande initiale. Je dois plutôt décider si la division générale a fait l’une des choses suivantes :

  1. a) Elle a omis de mener une procédure équitable;
  2. b) Elle n’a pas tranché une question qu’elle aurait dû trancher ou a tranché une question qu’elle n’aurait pas dû trancher;
  3. c) Elle a fondé sa décision sur une erreur de fait importanteNote de bas de page 3;
  4. d) Elle a fondé sa décision sur une erreur de droitNote de bas de page 4.

[11] Avant que la prestataire puisse passer à l’étape suivante de l’appel, je dois être convaincue qu’au moins un motif d’appel pourrait lui conférer une chance raisonnable d’obtenir gain de cause. Une chance raisonnable de succès signifie que la prestataire pourrait plaider sa cause et peut-être gagner. Je devrais également être au courant d’autres motifs d’appel possibles qui ne sont pas précisément indiqués par la prestataireNote de bas de page 5.

Aperçu

[12] L’employeur de la prestataire a mis en place une politique concernant la vaccination contre la COVID-19. La prestataire a présenté une demande d’exemption à la politique fondée sur ses croyances religieuses. Cette demande a été refusée. L’employeur a congédié la prestataire puisqu’elle ne s’est pas conformée à la politique.

[13] La Commission a décidé que la prestataire avait été congédiée en raison d’une inconduite et qu’elle n’avait pas droit aux prestations d’assurance-emploi. La prestataire a fait appel de cette décision auprès de la division générale du Tribunal. Elle a soutenu que l’employeur avait violé ses droits de la personne et qu’il aurait dû lui accorder une exemption fondée sur ses croyances religieuses.

[14] La division générale a rejeté l’appel de la prestataire. Elle a conclu que la prestataire savait que le non-respect de la politique de l’employeur pouvait entraîner son congédiement. La division générale a conclu que l’employeur ne lui avait pas accordé d’exemption et qu’elle devait donc se conformer à la politique de vaccinationNote de bas de page 6.

[15] La division générale a également tenu compte des arguments de la prestataire selon lesquels l’employeur avait violé ses droits de la personne. Elle a conclu qu’il ne relevait pas de sa compétence de décider si la politique de l’employeur était juste ou raisonnableNote de bas de page 7. La division générale a conclu que la seule question qu’elle devait trancher était celle de savoir si la prestataire avait perdu son emploi en raison d’une inconduiteNote de bas de page 8.

On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur de fait

[16] La prestataire soutient que la division générale a commis d’importantes erreurs de fait. Elle dit avoir fourni des documents de chefs religieux qui ont été discutés à l’audience et ignorés par la division générale. Elle soutient également que la division générale a commis une erreur parce que le mandat de l’employeur constituait une violation des droits de la personne.

[17] Dans sa décision, la division générale a conclu que la Commission avait prouvé qu’il avait eu une inconduiteNote de bas de page 9. En examinant l’argument de la prestataire selon lequel l’employeur aurait dû lui accorder une exemption religieuse, la division générale a déclaré ce qui suit :

Je suis d’accord avec la Commission pour dire que la prestataire n’a pas fourni de document d’un chef religieux de son église indiquant qu’on lui avait conseillé de ne recevoir aucun des vaccins contre la COVID-19 pour une raison religieuseNote de bas de page 10.

[18] La prestataire affirme qu’il s’agit d’une déclaration erronée de la part de la division générale. Elle soutient qu’elle a fourni des documents et qu’on a discuté d’eux lors de l’audience devant la division générale. La prestataire affirme que la division générale a ignoré les documents, ainsi que les réponses qu’elle a fournies à leur sujet. La prestataire dit qu’elle a fourni des documents provenant de la Liberty Coalition Canada et du Christ’s Forgiveness MinistriesNote de bas de page 11.

[19] J’ai écouté l’audience devant la division générale. La division générale a interrogé la prestataire au sujet de la demande d’exemption qu’elle a confirmé avoir présentée par écritNote de bas de page 12. La prestataire a dit avoir reçu une réponse officielle de l’employeur rejetant la demande parce que cette dernière ne répondait pas aux critères. Elle a dit qu’elle a présenté plus de documents et que la demande a tout de même été rejetéeNote de bas de page 13.

[20] La prestataire a dit à la division générale qu’elle avait des convictions religieuses profondesNote de bas de page 14. Elle a expliqué pourquoi elle ne pensait pas pouvoir se faire vacciner. Elle a dit ne pas comprendre pourquoi sa demande d’exemption a été refuséeNote de bas de page 15.

[21] La division générale a expliqué la position de la Commission selon laquelle la prestataire a fourni des documents à l’appui de son point de vue, mais pas un document d’un chef religieux de son église indiquant qu’on lui avait conseillé de ne pas se faire vaccinerNote de bas de page 16. La prestataire a déclaré qu’elle a fourni une lettre des Christian Forgiveness MinistriesNote de bas de page 17.

[22] Dans sa décision, la division générale ne discute pas de ces documents. La prestataire avait fourni à Service Canada tous les documents qu’elle avait remis à l’employeur et ils font partie du dossierNote de bas de page 18.

[23] Il n’y a aucun document dans le dossier présenté à la division générale provenant d’un chef religieux de son église indiquant qu’on lui a conseillé de ne recevoir aucun des vaccins contre la COVID-19 pour une raison religieuse. Je conclus qu’il n’est pas possible de soutenir que la division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.

[24] La décision de la division générale précise également que l’employeur n’a pas accepté la demande d’exemption religieuse de la prestataireNote de bas de page 19. La prestataire a convenu que c’était le cas. Il n’est pas possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de fait importante dans cette conclusion. La prestataire savait que sa demande d’exemption avait été rejetée et que le non-respect de la politique de vaccination pouvait entraîner son congédiement.

[25] La prestataire soutient qu’elle ne demandait pas à la division générale de faire preuve de compassion. Elle dit qu’il n’y avait simplement pas une bonne raison de discriminer contre elle. Elle affirme avoir dit lors de l’audience à la division générale qu’un arbitre ontarien avait conclu qu’un employé avait fait l’objet de discrimination lorsqu’un employeur avait refusé sa demande d’exemption fondée sur ses croyances sincèresNote de bas de page 20.

[26] La division générale a examiné les arguments de la prestataire selon lesquels l’employeur avait violé ses droits de la personne. Elle a conclu qu’il n’appartenait pas au Tribunal de décider si la politique de l’employeur était juste ou raisonnable. La division générale a fait remarquer qu’il existe d’autres moyens pour la prestataire de présenter ces argumentsNote de bas de page 21.

[27] La division générale a cité une décision de la Cour fédéraleNote de bas de page 22. Cette décision précise que la conduite de l’employeur n’est pas pertinente à la question de l’inconduiteNote de bas de page 23. Il n’est pas possible de soutenir que la division générale a fondé sa décision sur une importante erreur de fait lorsqu’elle a omis de trancher la question de savoir si la politique de l’employeur était juste ou raisonnable. 

[28] La prestataire a déclaré dans sa demande de permission de faire appel qu’il s’agissait d’une erreur de fait importante. J’ai également examiné la question de savoir si la division générale a peut-être commis une erreur de compétence ou de droit en omettant d’examiner si les droits de la prestataire ont été violés par la politique de l’employeur ou s’il y avait un motif valable pour son congédiement.

[29] La Cour fédérale et la Cour d’appel fédérale ont toutes deux déclaré que la question de savoir si un employeur a omis de prendre des mesures d’adaptation pour un employé en vertu des lois sur les droits de la personne n’est pas pertinente à la question de l’inconduite en vertu de la Loi sur l’assurance-emploi. En effet, ce n’est pas la conduite de l’employeur qui est en cause, et d’autres tribunes peuvent aborder ces questionsNote de bas de page 24.

[30] Je conclus qu’il n’y a pas d’argument défendable selon lequel la division générale a mal interprété ou mal appliqué la loi, ou qu’elle a commis une erreur de compétence.

[31] Il n’est pas possible de soutenir que la division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante lorsqu’elle a conclu que la prestataire n’avait pas fourni de documents prouvant une exemption religieuse. Il n’est pas non plus possible de soutenir que la division générale a commis une erreur en omettant de décider si le mandat de l’employeur contrevenait aux droits de la personne de la prestataire.

[32] Outre les arguments de la prestataire, j’ai également examiné d’autres motifs d’appel. La prestataire n’a signalé aucune injustice procédurale de la part de la division générale et je ne vois aucune preuve d’injustice procédurale. Il n’est pas possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de compétence. Je n’ai relevé aucune erreur de droit.

[33] La prestataire n’a relevé aucune erreur de la division générale qui pourrait conférer à l’appel une chance d’être accueilli. Par conséquent, je refuse la permission de faire appel.

Conclusion

[34] La permission de faire appel est refusée. Cela signifie que l’appel n’ira pas de l’avant.

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