Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : EL c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1155

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de permission d’en appeler

Demanderesse : E. L.
Défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 28 septembre 2022 (GE-22-1656)

Membre du Tribunal : Pierre Lafontaine
Date de la décision : Le 2 novembre 2022
Numéro de dossier : AD-22-773

Sur cette page

Décision

[1] La demande de permission d’en appeler est refusée. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] La demanderesse (la prestataire) a été mise en congé sans solde parce qu’elle ne s’était pas conformée à la politique de vaccination contre la COVID-19 de l’employeur (la politique). Elle a ensuite présenté une demande de prestations régulières d’assurance-emploi.

[3] La défenderesse (la Commission) a déterminé que la prestataire a été suspendue de son emploi en raison d’une inconduite. C’est pourquoi la Commission a déterminé que la prestataire est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi. Après révision, la Commission a maintenu sa décision initiale. La prestataire a interjeté appel de la décision en révision auprès de la division générale.

[4] La division générale a conclu que l’employeur avait mis la prestataire en congé sans solde parce qu’elle ne s’était pas conformée à sa politique. Elle a déterminé que la prestataire avait été suspendue à la suite de son refus de suivre la politique de l’employeur. Elle a conclu que la prestataire savait que l’employeur était susceptible de la suspendre dans ces circonstances. La division générale a conclu que le non-respect de la politique était la cause de sa suspension. Elle a conclu que la prestataire a été suspendue de son emploi en raison d’une inconduite.

[5] La prestataire demande la permission d’en appeler de la décision de la division générale auprès de la division d’appel. Elle soutient que la division générale n’a pas tenu compte du fait qu’elle n’avait pas respecté la politique en raison de ses troubles cardiaques. Il ne lui était pas possible de voir un cardiologue avant six ou sept mois. L’employeur l’a rappelée au travail même si elle n’était pas vaccinée.

[6] Je dois déterminer si la prestataire a soulevé une erreur susceptible de révision de la part de la division générale, sur le fondement de laquelle l’appel pourrait être accueilli.

[7] Je refuse la permission d’en appeler parce que l’appel de la prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Question en litige

[8] La prestataire soulève-t-elle une erreur susceptible de révision de la division générale sur le fondement de laquelle l’appel pourrait être accueilli?

Analyse

[9] Le paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social énonce les seuls moyens d’appel d’une décision de la division générale. Les erreurs susceptibles de révision sont les suivantes :

  1. Le processus d’audience de la division générale n’était d’aucune façon équitable.
  2. La division générale ne s’est pas prononcée sur une question qu’elle aurait dû trancher. Ou encore, elle s’est prononcée sur une question qu’elle n’avait pas le pouvoir de trancher.
  3. La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.
  4. La division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droit.

[10] La demande de permission d’en appeler est une étape préliminaire à une audition sur le fond de l’affaire. Il s’agit d’un premier obstacle que la prestataire doit franchir, mais le fardeau est ici inférieur à celui dont elle devra s’acquitter à l’audience relative à l’appel sur le fond. À l’étape de la permission d’en appeler, la prestataire n’a pas à prouver le bien-fondé de ses prétentions; elle doit plutôt établir que l’appel a une chance raisonnable de succès compte tenu d’une erreur susceptible de révision. En d’autres termes, elle doit établir que l’on peut soutenir qu’il y a une erreur susceptible de révision sur le fondement de laquelle l’appel pourrait être accueilli.

[11] Par conséquent, avant que je puisse accorder la permission d’interjeter appel, je dois être convaincu que les motifs d’appel correspondent à l’un ou l’autre des moyens d’appel mentionnés précédemment et qu’au moins l’un des motifs a une chance raisonnable de succès.

La prestataire soulève-t-elle une erreur susceptible de révision de la division générale sur le fondement de laquelle l’appel pourrait être accueilli?

[12] La prestataire soutient que la division générale n’a pas tenu compte du fait qu’elle n’avait pas respecté la politique en raison de ses troubles cardiaques. Il ne lui était pas possible de voir son cardiologue avant six ou sept mois. L’employeur l’a rappelée au travail même si elle n’était pas vaccinée.

[13] La division générale devait décider si la prestataire avait été suspendue en raison de son inconduite.

[14] La notion d’inconduite n’implique pas qu’il soit nécessaire que le comportement fautif résulte d’une intention coupable; il suffit que l’inconduite soit consciente, voulue ou intentionnelle. Autrement dit, pour constituer de l’inconduite, l’acte reproché doit avoir été volontaire ou du moins procéder d’une telle insouciance ou négligence que l’on pourrait dire que l’employé a volontairement décidé de ne pas tenir compte des répercussions que ses actes auraient sur son rendement.

[15] Le rôle de la division générale n’est pas de juger de la sévérité de la sanction de l’employeur ou d’établir si l’employeur a été coupable d’inconduite en suspendant la prestataire de sorte que sa suspension était injustifiée, mais bien de décider si la prestataire s’était rendue coupable d’inconduite et si cette inconduite a entraîné sa suspensionNote de bas page 1.

[16] La preuve démontre que la prestataire a été suspendue (temporairement empêchée de travailler) parce qu’elle a refusé de suivre la politique de l’employeur. Elle avait été informée de la politique de l’employeur et avait eu le temps de s’y conformer. La prestataire a refusé intentionnellement; ce refus était volontaire. Il s’agissait de la cause directe de sa suspension. La division générale a conclu que la prestataire savait que son refus de se conformer à la politique pouvait entraîner sa suspension.

[17] La division générale a conclu à partir de la preuve prépondérante que le comportement de la prestataire constituait une inconduite.

[18] Il est bien établi que le non-respect délibéré de la politique de l’employeur est considéré comme une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE)Note de bas page 2.

[19] La prestataire soutient que la division générale n’a pas tenu compte du fait qu’elle n’avait pas respecté la politique en raison de ses troubles cardiaques. Il ne lui était pas possible de voir son cardiologue avant six ou sept mois.

[20] Je remarque que la division générale a bel et bien tenu compte de l’argument de la prestataire. Elle a conclu que la prestataire avait consulté son médecin de famille pour faire signer son formulaire d’exemption médicale. Son médecin a refusé de signer le formulaire et lui a dit [traduction] « de ne pas s’inquiéter ». La division générale a conclu que la prestataire n’avait pas tenté de communiquer avec son cardiologue pour obtenir une exemption et a pris la décision personnelle de ne pas suivre la politique.

[21] Devant la division générale, la prestataire a fait valoir que la politique violait ses droits constitutionnels. Cette question relève d’une autre tribune. Le Tribunal n’est pas la tribune par laquelle la prestataire peut obtenir la réparation qu’elle rechercheNote de bas page 3.

[22] Comme je l’ai mentionné précédemment, la question soumise à la division générale n’était pas de savoir si l’employeur s’était rendu coupable d’inconduite en suspendant la prestataire de sorte que la suspension serait injustifiée, mais de savoir si la prestataire était coupable d’inconduite au sens de la Loi sur l’AE et si cette inconduite a entraîné la suspension de la prestataire.

[23] La preuve prépondérante dont dispose la division générale montre que la prestataire a fait le choix personnel et délibéré de ne pas se conformer à la politique de l’employeur en réponse aux circonstances uniques et exceptionnelles créées par la pandémie, ce qui a entraîné sa suspension et son congédiement.

[24] Selon moi, la division générale n’a commis aucune erreur susceptible de révision lorsqu’elle a tranché la question de l’inconduite selon les paramètres établis par la Cour d’appel fédérale, qui a défini l’inconduite au sens de la Loi sur l’AENote de bas page 4.

[25] La prestataire fait valoir que son employeur l’a rappelée au travail même si elle n’était pas vaccinée. Ce fait ne change pas la nature de l’inconduite, qui a initialement mené à la suspension de la prestataireNote de bas page 5.

[26] Je suis tout à fait conscient que la prestataire peut demander réparation à une autre instance si une violation est établieNote de bas page 6. Cela ne change rien au fait que, conformément à la Loi sur l’AE, la Commission a prouvé, selon la prépondérance des probabilités, que la prestataire a été suspendue en raison de son inconduite.

[27] Dans sa demande de permission d’en appeler, la prestataire n’a soulevé aucune erreur susceptible de révision, comme la compétence ou le défaut de la division générale d’observer un principe de justice naturelle. Elle n’a relevé aucune erreur de droit ni aucune conclusion de fait erronée que la division générale aurait tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance en rendant sa décision sur la question de l’inconduite.

[28] Après avoir examiné le dossier d’appel, la décision de la division générale et les arguments de la prestataire à l’appui de sa demande de permission d’en appeler, je conclus que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[29] La demande de permission d’en appeler est refusée. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.