Assurance-emploi (AE)

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Citation : CB c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1393

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : C. B.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (459730) datée du 15 février 2022 rendue par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Manon Sauvé
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 26 mai 2022
Personne présente à l’audience :  
Date de la décision : Le 22 juin 2022
Numéro de dossier : GE-22-1018

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli. La Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire, lorsqu’elle a refusé la demande de prolongation de délai du prestataire.

Aperçu

[2] Le 20 mars 2015, le prestataire présente une demande pour recevoir des prestations d’assurance-emploi.

[3] Le 8 mars 2017, la Commission informe le prestataire qu’elle a procédé au réexamen de sa demande. Elle conclut qu’il n’a pas déclaré tous ses revenus pendant sa période de chômage. Elle lui réclame les prestations payées en trop et lui impose une pénalité de 9000 $. Il doit donc payer plus de 15 000 $ à la Commission.

[4] Le 28 janvier 2022, le prestataire présente à la Commission une demande de révision. Il est en désaccord avec la pénalité imposée.

[5] La Commission établit que le prestataire à 1757 jours de retard dans sa demande de révision. La loi prévoit un délai de 30 jours.

[6] Cependant, la Commission peut prolonger la période si le prestataire démontre qu’il avait une explication raisonnable, une intention constante de demander une révision et dans les cas de plus d’un an de retard que la cause est défendable et qu’elle ne cause pas de préjudice.

[7] Après enquête, la Commission refuse de prolonger le délai. Le prestataire sait depuis le mois de mars 2017 que la Commission lui réclame des prestations versées en trop ainsi qu’une pénalité. Il a pris une entente pour le remboursement de sa dette.

[8] Le prestataire demande la révision de la décision, parce qu’il ne savait pas qu’il pouvait le demander.

Question que je dois examiner en premier

[9] Le prestataire ne s’est pas présenté à son audience du 26 mai 2022. J’ai constaté qu’il a été dûment convoqué. En effet, le Tribunal lui a rappelé la date et l’heure de l’audience.

[10] Le règlement me permet de procéder en l’absence d’une partie, si je suis convaincue qu’elle a été avisée de la tenue de l’audienceNote de bas page 1. Par conséquent, j’ai procédé en son absence.

Questions en litige

  1. La demande de révision a-t-elle été présentée en retard ?
  2. La Commission a-t-elle exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire en rejetant la demande du prestataire de prolonger la période de 30 jours pour présenter une demande de révision ?

Analyse

[11] Toute personne qui fait l’objet d’une décision de la Commission peut demander la révision de cette décision dans les 30 jours suivant la date où elle en reçoit communication, ou dans le délai supplémentaire que la Commission peut accorderNote de bas page 2.

[12] La décision de la Commission d’accorder un délai supplémentaire pour présenter une demande de révision est un pouvoir discrétionnaireNote de bas page 3. Le pouvoir discrétionnaire de la Commission doit être exercé selon les critères du Règlement sur les demandes de révision.

[13] La Commission peut accorder plus de temps à une partie prestataire pour la présentation d’une demande de révision si elle est convaincue qu’il existe une explication raisonnable à l’appui de la demande de prolongation du délai et si la partie prestataire a manifesté l’intention constante de demander la révisionNote de bas page 4.

[14] De plus, lorsque la demande est présentée plus d’un an après la décision initiale, la Commission doit être convaincue que la demande de révision a des chances raisonnables de succès et ne porte pas préjudiceNote de bas page 5.

[15] Je dois décider si, en rejetant la demande de prolongation du délai pour présenter une demande de révision, la Commission a agi de bonne foi, à des fins et pour des motifs légitimes, qu’elle a pris en compte tous les facteurs pertinents, ignorant tout facteur non pertinent, et qu’elle a agi de manière non discriminatoireNote de bas page 6.

[16] Je peux intervenir seulement si je détermine que la Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire. Si je conclus qu’elle n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire, alors je rendrai la décision que la Commission aurait dû rendre.

Question en litige no 1 : La demande de révision a-t-elle été présentée en retard ?

[17] Oui. La demande de révision a été présentée en retard par le prestataire. La décision a été rendue le 3 mars 2017. Le prestataire a demandé la révision le 28 janvier 2022, soit plus d’un an après la décision.

[18] Il savait qu’une décision a été rendue lui réclamant des prestations payées en trop ainsi qu’une pénalité, puisqu’il avait une entente pour régler sa dette.

Question en litige no 2 : La Commission a-t-elle exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire en rejetant la demande du prestataire de prolonger la période de 30 jours pour présenter une demande de révision ?

[19] Dans le présent cas, la demande de révision a été présentée plus d’un an après la décision. La Commission devait donc analyser la demande selon les quatre critères prévus au RèglementNote de bas page 7. Or, la Commission a tenu compte de seulement deux des critères.

[20] Je vais donc examiner les deux premiers critères en tenant des observations de la Commission. Pour les deux autres critères, je vais procéder à leur examen, puisque la Commission ne l’a pas fait.

[21] En omettant de tenir compte de deux des quatre critères, je suis d’avis que la Commission n’a pas exercé son pouvoir de façon discrétionnaire.

Explication raisonnable et intention constante de poursuivre sa demande de révision

[22] Je retiens que la Commission a tenu compte de ces deux critères seulement dans l’analyse de la demande de révision.

[23] Le prestataire a expliqué à la Commission qu’il ne savait qu’il pouvait présenter une demande de révision concernant la pénalité de 9000 $ imposée pour de fausses déclarations alléguées.

[24] Selon la Commission, le prestataire aurait dû se renseigner avant. Il a reçu la décision du 3 mars 2017. Il a également reçu l’avis de dettes. Il pouvait s’informer auprès de la Commission bien avant le mois de janvier 2022.

[25] De plus, il n’a pas démontré qu’il avait une intention constante de poursuivre sa demande de révision. En fait, il l’a présentée plus d’un an après la décision du 3 mars 2017.

[26] Je suis d’avis que la Commission a agi correctement dans son analyse. Elle a permis au prestataire de fournir des explications et elle en a tenu compte dans sa décision.

Les chances raisonnables de succès

[27] Je retiens que le prestataire conteste la décision de la Commission de lui imposer une amende de 9000 $ pour les fausses déclarations alléguées.

[28] La Commission a omis de tenir compte de ce critère. Il est, selon moi, un critère important dans les circonstances. Il n’y a pas d’analyse des chances raisonnables de succès de la cause, puisque le prestataire n’a pas eu l’occasion de fournir des explications. Il faut comprendre que la Commission a rendu sa décision initiale sans avoir discuté avec le prestataire.

[29] Dans ce contexte, j’estime que la cause a des chances raisonnables de succès. En effet, lorsqu’il est question d’une fausse déclaration les conséquences sont graves pour un prestataire. Comme il s’agit d’une question de fait et qu’il doit fournir sa version, il est opportun de l’entendre sur cette question. Cela pourrait modifier la décision concernant la pénalité.

Préjudice

[30] Je suis d’avis qu’il n’y a pas de préjudice pour la Commission, si elle révise la décision du 3 mars 2017. Les prestations ont déjà été versées et le prestataire a commencé à rembourser sa dette.

[31] J’estime qu’il y a un risque de préjudice pour le prestataire. Il a une pénalité de 9000 $ et il n’a pas été en mesure de fournir des explications concernant les fausses déclarations alléguées par la Commission.

[32] Après avoir tenu compte des éléments au dossier, je suis d’avis que la Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire. En effet, elle n’a pas tenu compte de deux critères dans le cadre de son analyse pour refuser la demande de révision.

[33] Pour cette raison, j’ai procédé à l’analyse des quatre critères et j’ai conclu que le délai pour prolonger la demande de révision doit être accordé.

Conclusion

[34] La Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire. La prolongation de délai doit être accordée.

[35] L’appel est accueilli.

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