Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : RL c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1205

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : R. L.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (467116) datée du 3 mai 2022 (communiquée par Service Canada))

Membre du Tribunal : Membre du Tribunal :
Date de l’audience : Le 3 octobre 2022
Numéro de dossier : GE-22-1784

Sur cette page

Introduction

[1] Le prestataire a été suspendu de son emploi puisqu’il n’a pas respecté la politique de vaccination contre la COVID-19 de son employeur. La politique exigeait que les employés attestent leur statut vaccinal. Le prestataire ne s’est pas conformé à la politique avant la date limite. Par conséquent, l’employeur l’a placé en congé sans solde (suspension).

[2] La Commission a décidé que le prestataire ne pouvait pas recevoir de prestations d’assurance-emploi parce qu’il avait été suspendu en raison d’une inconduite. Le prestataire a demandé à la Commission de réviser cette décision parce que l’obligation de divulguer son statut vaccinal violait son droit à la vie privée. Il a dit que cette exigence ne faisait pas partie des conditions de son emploi lorsqu’il a été embauché.

[3] La Commission a maintenu sa décision après révision parce que le prestataire savait que la politique de l’employeur exigeait qu’il soit vacciné contre la COVID-19 ou qu’il ait une mesure d’adaptation approuvée. Il savait que s’il ne respectait pas la politique, il serait suspendu de son emploi, et il a choisi quand même de ne pas se conformer. Le prestataire a fait appel de cette décision auprès du Tribunal.

Question en litige

[4] Je dois décider s’il faut rejeter l’appel de façon sommaire.

Analyse

[5] Je dois rejeter un appel de façon sommaire si je suis convaincue qu’il n’a aucune chance raisonnable de succèsNote de bas de page 1.

[6] Selon la loi, une partie prestataire qui a été congédiée en raison d’une inconduite est exclue du bénéfice de prestationsNote de bas de page 2. 

[7] L’inadmissibilité de la partie prestataire qui a été suspendue de son emploi en raison d’une inconduite est levée lorsqu’au moins une des conditions suivantes est remplie :

  1. la période de suspension prend fin;
  2. la partie prestataire perd son emploi ou le quitte volontairement;
  3. la partie prestataire travaille suffisamment d’heures pour un autre employeur après le début de la suspensionNote de bas de page 3.

[8] Le prestataire travaillait pour le gouvernement fédéral. En octobre 2021, le gouvernement fédéral a mis en place des lignes directrices exigeant que les employés attestent leur statut vaccinal au plus tard le 29 octobre 2021Note de bas de page 4. Les employés qui n’ont pas attesté leur statut vaccinal étaient placés en congé sans solde deux semaines après la date limite d’attestationNote de bas de page 5.

[9] Le prestataire connaissait les exigences de la politique de l’employeur. Il savait que s’il n’attestait pas son statut vaccinal, il serait placé en congé sans soldeNote de bas de page 6.

[10] Le prestataire ne voulait pas attester son statut vaccinal. Il estimait que l’obligation de divulguer des renseignements médicaux violait son droit à la vie privéeNote de bas de page 7.   

[11] Le prestataire a été placé en congé sans solde le 12 novembre 2021. Dans le relevé d’emploi, un commentaire de l’employeur indique que le congé était [traduction] « attribuable au non-respect de la politique de vaccination de l’employeurNote de bas de page 8 ».

[12] Pour qu’il y ait inconduite en vertu de la Loi sur l’assurance-emploi, la Commission doit démontrer que le prestataire s’est livré à une conduite délibérée dont il savait ou aurait raisonnablement dû savoir qu’elle pouvait nuire à l’exercice de ses fonctions envers son employeur et qu’il y avait une réelle possibilité d’être congédié pour cette raisonNote de bas de page 9.

[13] Une conduite délibérée signifie que la conduite doit être consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas de page 10. Il n’est pas nécessaire que le prestataire ait eu une intention coupable (c’est-à-dire qu’il ait voulu faire quelque chose de mal) pour que son comportement constitue une inconduite en vertu de la loiNote de bas de page 11.

[14] Avant de rejeter sommairement un appel, je dois envoyer un avis écrit au prestataire et lui donner le temps de présenter des observationsNote de bas de page 12.

[15] Étant donné que la preuve au dossier montre que le prestataire a choisi de ne pas se conformer à la politique de vaccination obligatoire de l’employeur et qu’il savait qu’il pouvait perdre son emploi en raison de ce choix, je lui ai envoyé un avis l’informant de mon intention de rejeter sommairement l’appel le 14 septembre 2022Note de bas de page 13. J’ai tenu compte des observations supplémentaires présentées par le prestataire en rendant cette décisionNote de bas de page 14.

[16] D’après la preuve au dossier, je constate que l’employeur a exigé que le prestataire atteste son statut vaccinal au plus tard le 29 octobre 2021. On a avisé le prestataire de cette politique, et on lui a dit qu’il serait placé en congé sans solde s’il ne se conformait pas à la politique.  

[17] Le prestataire a dit que la politique de l’employeur ne faisait pas partie de son contrat d’emploi au moment de son embauche. La politique enfreint son droit à la vie privée. Son employeur a violé ses droits de la personne en tentant de le forcer à se faire vacciner pour conserver son emploi.

[18] Au Canada, il existe un certain nombre de lois qui protègent les droits d’une personne, comme le droit à la vie privée ou le droit à l’égalité (non-discrimination). La Charte n’est qu’une de ces lois. Il y a aussi la Déclaration canadienne des droits, la Loi canadienne sur les droits de la personne et plusieurs lois provinciales qui protègent les droits et les libertés.

[19] Différentes cours et différents tribunaux appliquent ces lois. 

[20] Le Tribunal de la sécurité sociale ( TSS) peut examiner si une disposition de la Loi sur l’assurance-emploi ou de son règlement (ou d’une loi connexe) porte atteinte aux droits garantis à une partie prestataire par la Charte.    

[21] Toutefois, le TSS n’est pas autorisé à décider si une mesure prise par un employeur viole les droits fondamentaux d’une partie prestataire garantis par la Charte. Cela ne relève pas de notre compétence. Le TSS n’est pas non plus autorisé à rendre des décisions fondées sur la Déclaration canadienne des droits, la Loi canadienne sur les droits de la personne ou les lois provinciales qui protègent les droits et les libertés.

[22] Il existe d’autres recours pour le prestataire afin qu’il puisse faire valoir ses arguments selon lesquels la politique de l’employeur enfreignait son contrat ou violait ses droits. Mais ces questions doivent être traitées par le tribunal approprié. Elles ne relèvent pas de ma compétence.

[23] L’employeur a le droit de gérer ses activités quotidiennes, ce qui comprend le droit d’élaborer et de mettre en œuvre des politiques en milieu de travail. Lorsque l’employeur a mis en œuvre cette politique comme exigence pour tous ses employés, cette politique est devenue une condition d’emploi du prestataire.  

[24] La Cour d’appel fédérale a déclaré que le Tribunal n’a pas à décider si la politique de l’employeur était raisonnable ou si le congédiement du prestataire était justifiéNote de bas de page 15.

[25] Il est bien établi qu’une violation délibérée de la politique de l’employeur est considérée comme une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 16.    

[26] Le prestataire a choisi de ne pas attester son statut vaccinal. Ce refus était intentionnel. Par conséquent, il n’a pas respecté la politique de l’employeur et, au moment où il a été congédié, il n’avait pas l’intention de s’y conformer.  

[27] Si j’accepte les faits comme véridiques, il n’y a aucun argument que le prestataire pourrait présenter qui m’amènerait à une conclusion différente. Aucune preuve qu’il pourrait fournir ne changerait ces faits. Par conséquent, je conclus que son appel est voué à l’échec, peu importe les arguments ou les éléments de preuve qu’il pourrait présenter à une audienceNote de bas de page 17. Cela signifie que je dois rejeter sommairement son appelNote de bas de page 18.

Conclusion

[28] Je conclus que l’appel n’a aucune chance raisonnable d’être accueilli. Par conséquent, l’appel est rejeté sommairement.

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