Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : TP c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1123

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : T. P.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (461650) datée du 23 mars 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Amanda Pezzutto
Date de la décision : Le 5 août 2022
Numéro de dossier : GE-22-1457

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Décision

[1] T. P. est la prestataire dans cette affaire. La Commission de l’assurance-emploi du Canada affirme que la prestataire ne peut pas recevoir de prestations d’assurance-emploi. La prestataire n’est pas d’accord avec cette décision. Elle fait donc appel au Tribunal de la sécurité sociale.

[2] Je rejette l’appel de façon sommaire. L’appel de la prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès. Il n’y a aucun argument que pourrait faire la prestataire qui me permettrait d’accueillir son appel.

Aperçu

[3] La prestataire a travaillé comme travailleuse de la santé dans un foyer pour personnes âgées. À la suite d’un arrêté sanitaire provincial, son employeur lui a dit qu’elle devait fournir une preuve de vaccination contre la COVID-19 pour conserver son emploi. L’employeur lui a demandé de fournir une preuve de vaccination au plus tard le 12 octobre 2021. La prestataire ne s’est pas fait vacciner avant la date limite fixée par l’employeur. L’employeur l’a donc suspendue.

[4] La prestataire dit qu’elle n’a pas arrêté de travailler à cause d’une inconduite. Elle dit avoir des motifs religieux pour refuser de recevoir le vaccin contre la COVID-19. Elle dit que sa convention collective n’exige pas de vaccins non testés.

[5] La Commission affirme que la prestataire a été suspendue en raison d’une inconduite. La Commission affirme que la prestataire savait que son employeur exigeait qu’elle soit vaccinée contre la COVID-19. Elle affirme aussi que la prestataire savait qu’elle ne pouvait pas travailler si elle n’était pas vaccinée.

Questions que je dois examiner en premier

[6] Avant de rejeter un appel de façon sommaire, je dois aviser la prestataire. Je dois lui accorder un délai raisonnable pour présenter des arguments sur la question du rejet sommaire de son appelNote de bas de page 1.

[7] Le personnel du Tribunal a envoyé un courriel à la prestataire le 13 juillet 2022. Dans cette lettre, j’ai expliqué pourquoi j’envisageais de rejeter son appel de façon sommaire. Je lui ai demandé de répondre au plus tard le 15 juillet 2022.

[8] La prestataire n’a pas répondu à la lettre. Elle n’a pas communiqué avec le Tribunal pour demander une prolongation du délai ou pour obtenir plus d’informations sur la lettre.

[9] Donc, je vais prendre une décision fondée sur les preuves dont je dispose.

Question en litige

[10] Je dois décider si je dois rejeter l’appel de la prestataire de façon sommaire. Pour trancher cette question, je dois décider si son appel a une chance raisonnable de succès.

Analyse

[11] Je dois rejeter un appel de façon sommaire s’il n’a aucune chance raisonnable de succèsNote de bas de page 2.

[12] On dit qu’un appel n’a « aucune chance raisonnable de succès » si, à la lecture du dossier, il est clair et évident qu’il est voué à l’échec. Il faut vérifier s’il existe des arguments ou des preuves qui permettraient à la prestataire de gagner sa cause si elle les présentait dans le cadre d’une audienceNote de bas de page 3.

[13] Selon la loi, une personne ne peut recevoir des prestations d’assurance-emploi si elle a perdu son emploi en raison de son inconduite. Cela s’applique même si l’employeur a seulement suspendu la personneNote de bas de page 4.

[14] Une personne suspendue de son emploi en raison d’une inconduite n’est plus admissible aux prestations d’assurance-emploi. La période d’inadmissibilité se poursuit jusqu’à ce que l’une des choses suivantes se produise :

  1. la suspension prend fin;
  2. la personne perd son emploi ou démissionner;
  3. elle occupe un autre emploi pendant un nombre d’heures suffisant pour qu’une nouvelle période de prestations soit établieNote de bas de page 5

[15] Pour être considérée comme une inconduite au sens de la loi, la conduite doit être volontaire. Cela signifie que les actes doivent être conscients, voulus ou intentionnelsNote de bas de page 6. Une inconduite comprend aussi une conduite qui est tellement insouciante qu’elle est presque délibéréeNote de bas de page 7. Il n’est cependant pas nécessaire que la personne ait eu une intention coupable (c’est-à-dire qu’elle ait voulu faire quelque chose de mal) pour que son comportement soit une inconduite au sens de la loiNote de bas de page 8.

[16] Il y a inconduite si la personne savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait l’empêcher de remplir ses obligations envers son employeur et qu’il y avait une réelle possibilité qu’elle soit suspendue ou congédiée pour cette raison.Note de bas de page 9

[17] Il faut que la Commission prouve que l’employeur a suspendu la personne en raison d’une inconduite. Elle doit en faire la preuve selon la prépondérance des probabilités. Cela veut dire que la Commission doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable (il y a plus de chances) que la personne a perdu son emploi en raison d’une inconduiteNote de bas de page 10.

[18] La prestataire affirme qu’elle n’a pas perdu son emploi en raison d’une inconduite. Elle dit qu’elle avait des motifs religieux pour refuser le vaccin contre la COVID-19. Elle dit qu’elle portait des masques et faisait des tests rapides avant chaque quart de travail. Elle affirme que sa convention collective ne prévoyait pas l’obligation de recevoir des vaccins non testés et dangereux. Elle dit s’être opposée au mandat de vaccination.

[19] La Commission affirme que la prestataire a cessé de travailler en raison d’une inconduite. Elle soutient qu’elle était au courant du décret sanitaire provincial et de l’obligation de son employeur de se faire vacciner contre la COVID-19. La Commission affirme aussi que la prestataire savait que son employeur la suspendrait si elle n’était pas vaccinée contre la COVID-19 à la date limite du 12 octobre 2021.

[20] Je suis d’accord avec la Commission. J’estime que cet appel n’a aucune chance raisonnable de succès. En effet, j’estime que la prestataire a perdu son emploi en raison d’une inconduite. Il n’y a aucun argument ou preuve qui me mènerait à une conclusion différente.

[21] La prestataire et l’employeur s’entendent sur plusieurs des faits de base concernant l’obligation de respecter la politique de vaccination et la date limite. La prestataire convient que son employeur avait une politique, à la suite d’une ordonnance sanitaire provinciale, qui exigeait qu’elle soit vaccinée contre la COVID-19. Elle convient aussi que l’employeur lui a parlé de la politique pour la première fois en septembre 2021. Elle savait que la date limite pour la vaccination était le 12 octobre 2021. De plus, elle savait que l’employeur ne la laisserait pas continuer à travailler si elle n’était pas vaccinée contre la COVID-19.

[22] La prestataire dit avoir choisi de ne pas se faire vacciner contre la COVID-19. Elle dit être en désaccord avec le mandat de vaccination de l’employeur. Elle s’oppose au vaccin contre la COVID-19 pour des motifs religieux. Elle pense également que sa convention collective n’inclut pas l’obligation de recevoir des vaccins non testés.

[23] Cependant, il n’appartient pas au Tribunal de décider si l’employeur a agi équitablement en introduisant un mandat de vaccinationNote de bas de page 11. Il n’appartient pas au Tribunal de décider si le vaccin contre la COVID-19 est sécuritaire ou efficace. Je ne peux pas décider si l’employeur aurait dû lui accorder une exemption religieuse. De même, je ne peux pas décider si l’employeur a enfreint les conditions de la convention collective de la prestataire. Celle-ci peut prendre d’autres mesures par l’entremise d’un tribunal des droits de la personne ou de son syndicat si elle veut faire valoir ces arguments.

[24] J’estime que la preuve montre clairement que la prestataire a perdu son emploi en raison d’une inconduite. Je juge que l’appel est voué à l’échec. En effet, la prestataire et la Commission sont d’accord sur les points suivants :

  • L’employeur a suspendu la prestataire parce qu’elle ne s’était pas fait vacciner contre la COVID-19.
  • La prestataire savait que son employeur avait une politique exigeant que tout le personnel soit vacciné contre la COVID-19 au plus tard le 12 octobre 2021. Malgré cela, elle a délibérément choisi de ne pas se faire vacciner contre la COVID-19.
  • La prestataire savait que son employeur la suspendrait si elle ne respectait pas sa politique de vaccination.

[25] Je conclus donc que l’employeur a suspendu la prestataire en raison d’une inconduite. Le fait que la prestataire n’ait pas respecté la politique de vaccination a mené directement à sa suspension. Elle a agi délibérément. Elle savait que ses actions étaient susceptibles de mener à sa suspension.

[26] Il n’y a aucun argument que la prestataire pourrait faire qui me mènerait à une conclusion différente. Il n’y a aucune preuve qu’elle pourrait fournir qui changerait ces faits. Son appel est voué à l’échec, quels que soient les arguments ou les preuves qu’elle pourrait fournir lors d’une audience.

Conclusion

[27] Je conclus que l’appel de la prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès. Par conséquent, je dois rejeter son appel de façon sommaire.

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