Assurance-emploi (AE)

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Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : DM c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1140

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de permission de faire appel

Parties demanderesse  : D. M.
Partie défenderesse  : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision rendue par la division générale le 19 octobre 2022 (GE-22-2736)

Membre du Tribunal : Pierre Lafontaine
Date de la décision : Le 2 novembre 2022
Numéro de dossier : AD-22-767

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Décision

[1] La permission de faire appel est refusée. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] Le demandeur (prestataire) a perdu son emploi. Son employeuse a expliqué qu’il avait été remercié parce qu’il refusait de se conformer à sa politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19. Par la suite, le prestataire a demandé des prestations régulières d’assurance-emploi.

[3] La défenderesse (Commission) a accepté la raison que l’employeuse a fournie pour expliquer le congédiement. Elle a décidé que le prestataire avait perdu son emploi en raison d’une inconduite. Elle a donc conclu qu’il était exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi. Après avoir fait une révision, la Commission a maintenu sa décision initiale. Le prestataire a porté la décision de révision en appel à la division générale.

[4] La division générale a conclu que le prestataire avait perdu son emploi après avoir refusé de suivre la politique de l’employeuse. Elle a décidé qu’il savait ou aurait dû savoir que, dans de telles circonstances, l’employeuse allait probablement le congédier. La division générale a jugé que le non-respect de la politique était la cause du congédiement. Elle a conclu que le prestataire avait perdu son emploi en raison d’une inconduite.

[5] Le prestataire demande la permission de porter la décision de la division générale en appel devant la division d’appel. Il soutient que les tribunaux ont affirmé à maintes reprises son droit au consentement éclairé et son droit de refuser un traitement. Il est fâché d’avoir à utiliser son propre argent pour se défendre contre une entité gouvernementale qui se sert de son argent pour le priver de ses droits.

[6] Je dois décider si le prestataire a invoqué une erreur révisable que la division générale aurait commise et qui pourrait conférer à l’appel une chance de succès.

[7] Je refuse la permission de faire appel puisque l’appel du prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Question en litige

[8] Le prestataire soulève-t-il une erreur révisable que la division générale aurait commise et qui pourrait donner à l’appel une chance de succès? 

Analyse

[9] L’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social prévoit les seuls moyens d’appel d’une décision de la division générale. Il s’agit des erreurs révisables que voici :

  1. 1. La procédure de la division générale était inéquitable d’une façon ou d’une autre.
  2. 2. La division générale n’a pas décidé d’une question qu’elle aurait dû trancher ou elle a décidé d’une question qu’elle n’avait pas le pouvoir de trancher.
  3. 3. La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.
  4. 4. La division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droit.

[10] La demande de permission de faire appel est une étape préliminaire à l’examen sur le fond. C’est une première étape que le prestataire doit franchir, mais où la barre est moins haute que celle qu’il faut franchir durant l’instruction de l’appel sur le fond. À l’étape de la permission de faire appel, le prestataire n’a pas à prouver ses prétentions. Il doit plutôt établir que l’appel a une chance raisonnable de succès en raison d’une erreur révisable. En d’autres termes, il doit démontrer la possibilité de soutenir qu’il y a eu une erreur révisable pouvant faire que l’appel soit accueilli.

[11] Par conséquent, pour accorder la permission, je dois être convaincu que les motifs de l’appel correspondent à l’un ou l’autre des moyens d’appel mentionnés plus haut et qu’au moins un des motifs a une chance raisonnable de succès.

Le prestataire soulève-t-il une erreur révisable que la division générale aurait commise et qui pourrait donner à l’appel une chance de succès?

[12] Le prestataire avance que les tribunaux ont affirmé à maintes reprises son droit au consentement éclairé et son droit de refuser un traitement. Il est fâché d’avoir à utiliser son propre argent pour se défendre contre une entité gouvernementale qui se sert de son argent pour le priver de ses droits.

[13] La division générale devait décider si le prestataire a été congédié en raison d’une inconduite.

[14] La notion d’inconduite ne veut pas nécessairement dire que le comportement fautif résulte d’une intention coupable. Il suffit que l’inconduite soit consciente, voulue ou intentionnelle. Autrement dit, pour qu’il y ait inconduite, l’acte reproché doit avoir été délibéré ou, à tout le moins, être d’une telle insouciance ou négligence que l’on pourrait dire que la personne a volontairement décidé d’ignorer les répercussions de ses actes sur son rendement au travail.

[15] Le rôle de la division générale n’est pas de juger de la sévérité de la sanction imposée par l’employeuse ni de décider si l’employeuse s’est rendue coupable d’inconduite en congédiant le prestataire de telle manière que son congédiement était injustifié. Son rôle est plutôt de décider si le prestataire était coupable d’inconduite et si l’inconduite a entraîné la perte de son emploiNote de bas de page 1.

[16] La preuve montre que le prestataire avait été congédié parce qu’il a refusé de suivre la politique de l’employeuse. On l’avait informé de la politique et on lui avait donné le temps de s’y conformer. Le refus du prestataire était intentionnel. C’était un refus délibéré. C’était la cause directe de son congédiement. La division générale a conclu que le prestataire savait ou aurait dû savoir que son refus de se conformer à la politique pouvait entraîner son congédiement.

[17] La division générale a conclu que la preuve prépondérante démontrait que le comportement du prestataire constituait une inconduite.

[18] Il est bien établi qu’une violation délibérée de la politique de l’employeuse est considérée comme une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 2.

[19] Le prestataire avance que l’employeuse a fait preuve de discrimination à son endroit et qu’elle a violé ses droits de la personne et ses droits constitutionnels. Ces questions relèvent d’une autre autorité. Le Tribunal n’est pas le bon endroit pour obtenir la réparation que le prestataire demandeNote de bas de page 3.

[20] Comme je l’ai mentionné plus haut, la question soumise à la division générale n’était pas de savoir si l’employeuse s’est rendue coupable d’inconduite quand elle a congédié le prestataire, ce qui aurait rendu le congédiement injuste. La question était plutôt de savoir si le prestataire était coupable d’inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi et si l’inconduite a entraîné la perte de son emploi.

[21] La preuve prépondérante présentée à la division générale montre que le prestataire a fait le choix personnel et délibéré de ne pas suivre la politique mise en place par l’employeuse en réponse à la situation unique et exceptionnelle engendrée par la pandémie, ce qui a entraîné son congédiement.

[22] Je ne vois pas en quoi la division générale aurait fait une erreur susceptible de révision lorsqu’elle a expliqué qu’elle devait trancher la question de l’inconduite uniquement d’après les paramètres établis par la Cour d’appel fédérale, qui a défini l’inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 4.

[23] Le prestataire a fait valoir devant la division générale que le Tribunal avait accordé des prestations à un homme qui avait refusé de se faire vacciner parce qu’il s’inquiétait des répercussions sur sa santé, notamment sur son hypertension et sur le fait que certaines personnes avaient développé des caillots sanguins après avoir reçu le vaccin. Le prestataire affirme qu’il avait à peu près les mêmes préoccupationsNote de bas de page 5.

[24] Je remarque que la division générale avait alors conclu que l’homme n’avait pas perdu son emploi en raison d’une inconduite parce que son employeur ne lui avait pas donné assez de temps pour se conformer à sa politique verbale ou pour demander une exemption. Personne ne l’avait informé qu’il perdrait son emploi s’il ne suivait pas la politique. Les faits dans la présente affaire sont différents et n’appuient pas une telle conclusion.

[25] Je suis tout à fait conscient que le prestataire peut demander réparation devant une autre autorité, si l’existence d’une violation est établieNote de bas de page 6. Cela ne change rien au fait qu’aux termes de la Loi sur l’assurance-emploi, la Commission a prouvé selon la prépondérance des probabilités que le prestataire a été congédié en raison d’une inconduite.

[26] Dans sa demande de permission de faire appel, le prestataire n’a relevé aucune erreur susceptible de révision comme la compétence de la division générale ou le non-respect d’un principe de justice naturelle. En ce qui a trait à l’inconduite, il n’a cerné aucune erreur de droit dont la décision serait entachée ni de conclusion de fait erronée, que la division générale aurait pu tirer de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[27] Après avoir examiné le dossier d’appel, la décision de la division générale et les arguments que le prestataire a présentés pour appuyer sa demande de permission de faire appel, je conclus que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[28] La permission de faire appel est refusée. Cela met donc un terme à l’appel.

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