Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : IW c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1353

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : I. W.
Représentante ou représentant : R. W.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (462663) datée du 14 mars 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Lilian Klein
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 14 juin 2022
Personne présentes à l’audience : Appelante
Représentant de la partie appelante
Date de la décision : Le 19 juillet 2022
Numéro de dossier : GE-22-1300

Sur cette page

Décision

[1] Je rejette l’appel du prestataire. Cette décision explique mes motifs.

[2] Le prestataire n’a pas démontré qu’il était disponible pour travailler pendant qu’il suivait un cours à temps plein. Par conséquent, il est inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi à compter du 8 septembre 2021.

Aperçu

[3] Le 30 mai 2021, le prestataire a été licencié de son emploi de manœuvre pour la Ville. Il a donc présenté une demande de prestations d’assurance-emploi. Le 8 septembre 2021, il a commencé à suivre un cours à temps plein. Il a affirmé qu’il était disponible pour travailler, s’il avait au moins les mêmes conditions qu’avant.

[4] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a révisé le cas du prestataire. Elle a jugé que le prestataire était inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi à compter du 8 septembre 2021, après avoir conclu qu’il n’était pas disponible pour travailler.

[5] Pour recevoir des prestations régulières d’assurance‑emploi, la partie prestataire doit démontrer qu’elle est disponible pour travailler. Pour prouver sa disponibilité, une partie prestataire doit chercher un emploi et ne pas se fixer de conditions personnelles qui limiteraient indûment (c’est-à-dire limiteraient trop) ses chances de trouver un emploi convenable.

[6] La Commission affirme que le prestataire a fait très peu de démarches pour chercher un emploi, donc il n’était pas disponible pour travailler. Le prestataire n’a jamais travaillé à temps plein tout en étudiant à temps plein. Il a accordé la priorité au cours qu’il suivait plutôt qu’à la recherche d’un emploi.

[7] Le prestataire soutient qu’il était disponible pour travailler puisque les séances du cours qu’il suivait se donnaient en ligne en raison de la COVID-19. Donc, il pouvait écouter les séances à n’importe quel moment. Il affirme qu’il est injuste que ses amis, qui ont fourni les mêmes réponses que lui et qui ne cherchaient pas d’emploi, reçoivent des prestations, alors que lui n’en reçoit pas.

La question que je dois trancher

[8] Le prestataire était-il disponible pour travailler pendant qu’il suivait un cours à temps plein ?

Analyse

[9] Selon la loi, toutes les parties prestataires doivent démontrer qu’elles sont disponibles pour travaillerNote de bas de page 1. Un nouvel article provisoire de la Loi sur l’assurance-emploi prévoit qu’une personne qui suit un cours à temps plein n’est pas admissible au bénéfice des prestations, à moins qu’elle prouve qu’elle est capable de travailler ou disponible à cette finNote de bas de page 2. Elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’elle est disponible pour travailler.

Présumer que les personnes qui étudient à temps plein ne sont pas disponibles pour travailler

[10] La Cour d’appel fédérale a déclaré que les parties prestataires qui sont aux études à temps plein sont présumées ne pas être disponibles pour travaillerNote de bas de page 3. Par conséquent, on considère que les personnes qui étudient à temps plein ne sont probablement pas disponibles pour travailler, à moins qu’elles puissent prouver le contraire. Je vais d’abord voir si je peux présumer que le prestataire n’était pas disponible pour travailler. Je vais ensuite décider s’il a démontré qu’il était réellement disponible pour travailler.

[11] Le prestataire affirme qu’il étudie à temps plein. Donc, la présomption s’applique au prestataire.

[12] La présomption peut parfois être réfutée, par exemple si la partie prestataire démontre qu’elle a l’habitude de travailler à temps plein tout en étant aux études à temps plein ou qu’il existe des circonstances exceptionnelles dans son cas. La Commission soutient que le prestataire ne peut pas réfuter cette présomption, car : i) il n’a pas l’habitude de travailler tout en étudiant; ii) il ne cherchait pas activement un emploi; iii) il accordait plus d’importance à son cours qu’à la recherche d’un emploi.

[13] Je suis d’accord avec la Commission. Sur sa demande de prestations, le prestataire a indiqué qu’il n’avait jamais travaillé tout en suivant un coursNote de bas de page 4. Il affirme maintenant qu’il a déjà travaillé pour un service d’entretien d’arbres pendant ses vacances d’été, quand il était à l’école secondaire. Il a déclaré avoir occupé cet emploi pendant l’année scolaire également, mais il n’existe aucune preuve qu’il ne s’agissait pas seulement d’un emploi occasionnel à temps partiel.

[14] Les déclarations du prestataire au sujet de l’abandon de son cours pour se trouver un emploi à temps plein étaient aussi contradictoires. Il a d’abord affirmé qu’il n’abandonnerait pas son cours, à moins qu’il puisse repousser la date de début de l’emploiNote de bas de page 5. Il s’est ensuite contredit lorsqu’il a présenté une demande de révision, dans laquelle il a indiqué qu’il abandonnerait sa troisième année de cours s’il obtenait un emploi bien rémunéré dans le domaine de la gestionNote de bas de page 6. En appel, il a affirmé qu’il abandonnerait son cours, même pour un emploi au salaire minimumNote de bas de page 7.

[15] Les déclarations initiales spontanées d’une partie prestataire sont jugées plus fiables que celles qu’elle fait après que la Commission a refusé leur demande de prestationsNote de bas de page 8. Donc, j’accorde plus de poids à la déclaration initiale du prestataire. Pour cette raison, je suis d’accord avec la Commission sur le fait que le prestataire a accordé la priorité à son cours plutôt qu’à la recherche d’emploi à temps plein ou à temps partiel.

[16] De plus, le prestataire n’a pas démontré qu’il existait des circonstances exceptionnelles dans son cas.

[17] Pour toutes ces raisons, je conclus que le prestataire n’a pas réfuté la présomption de non-disponibilité. Je dois cependant encore examiner les articles de loi applicables dans son cas, puis décider s’il a démontré qu’il était réellement disponible pour travailler.

[18] La Commission soutient que le prestataire doit faire des « démarches habituelles et raisonnables » pour trouver un emploi. Toutefois, la Commission n’a pas demandé au prestataire de lui fournir des preuves de ses recherches d’emploi. Elle ne l’a pas non plus informé du type de preuves requisesNote de bas de page 9.

[19] Pour cette raison, je ne peux pas décider si l’absence de démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi fait en sorte que le prestataire est inadmissible aux prestations selon l’article 50 de la Loi sur l’assurance-emploi. Je ne tiendrai compte que du critère de disponibilité suivant prévu aux articles 18(1)(a) et 153.161 de la Loi sur l’assurance-emploi.

Le prestataire était-il disponible pour travailler, mais incapable de trouver un emploi convenable ?

[20] Pour montrer qu’il était disponible pour travailler, le prestataire devait prouver les trois éléments suivants :

  1. i) Montrer qu’il voulait retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui était offert;
  2. ii) Tenter de retourner travailler en faisant des démarches pour trouver un emploi convenable;
  3. iii) Éviter d’établir des conditions personnelles qui limiteraient indûment ses chances de trouver un emploi convenableNote de bas de page 10.

[21] Je dois examiner chacun de ces trois éléments pour trancher la question de la disponibilité. Je dois aussi tenir compte de l’attitude et de la conduite du prestataireNote de bas de page 11.

Le prestataire voulait-il retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui était offert ?

[22] Non. Le prestataire n’a pas démontré qu’il voulait retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui était offert.

[23] Je conclus que le prestataire voulait terminer son cours avant de retourner sur le marché du travail. Il n’a pas démontré par des gestes concrets qu’il était pressé de retourner travailler.

[24] Le prestataire soutient qu’il peut prouver qu’il voulait retourner travailler, car il avait plusieurs heures de disponibilité du lundi au vendredi, ainsi que toute la journée le samedi et le dimanche. Toutefois, il n’est pas suffisant d’affirmer vouloir travailler et avoir du temps à consacrer au travail pour prouver la disponibilité. Une partie prestataire doit démontrer par des gestes concrets qu’elle voulait réellement retourner au travail.

[25] J’accorde peu de poids à l’argument donné par le prestataire en appel, selon lequel il aurait abandonné sa troisième année de cours pour un emploi au salaire minimum. Cet argument contredit ses déclarations précédentes. Il ne prouve pas que le prestataire voulait retourner travailler dès que possible.

[26] Le prestataire a expliqué qu’il s’attendait à recevoir des prestations sans devoir retourner travailler, comme c’était le cas pour ses amis à l’université. Ce sentiment que « tout lui est dû » va à l’encontre de l’attitude et de la conduite d’une personne qui souhaite réellement retourner au travail.

Le prestataire a-t-il fait suffisamment de démarches pour trouver un emploi convenable ?

[27] Non. Le prestataire n’a pas démontré qu’il avait fait suffisamment de démarches pour trouver un emploi convenable. Selon la loi, une partie prestataire doit prouver qu’elle a effectué une recherche d’emploi chaque jour ouvrable pour lequel elle demande des prestations.

[28] Cette exigence est précisée sur la demande de prestations du prestataire. Il y est indiqué qu’il doit être disponible pour travailler, qu’il doit activement chercher un emploi et qu’il doit conserver un dossier détaillé de sa recherche d’emploi. Sur le questionnaire de formation que le prestataire devait remplir, il est précisé qu’il devait continuellement chercher un emploi et conserver une liste des employeurs avec qui il avait communiqué, y compris les dates et l’issue de chaque communication avec un employeur.

[29] Le prestataire n’a pas respecté ces consignes. Il n’a conservé aucun dossier. Son témoignage sous serment au sujet de sa recherche d’emploi était vague. Il a déclaré avoir cessé de chercher un emploi lorsque la Commission lui a initialement refusé sa demande de prestations, car il s’est senti suffisamment « puni ». Il s’est ensuite contredit en affirmant qu’il avait continué de chercher un emploi.

[30] J’estime qu’il est plus probable qu’improbable que le prestataire ait cessé de chercher un emploi, du moins temporairement, comme il l’a affirmé au départ. J’ai tiré cette conclusion parce que, comme je le mentionne précédemment, les déclarations initiales spontanées sont jugées plus fiables que les déclarations contradictoires faites plus tard.

[31] J’admets que le prestataire ait fait quelques démarches pour chercher un emploi, mais qu’il n’a pas nécessairement répondu à des affichages de postes vacants. En appel, il a déclaré avoir demandé à se faire embaucher auprès de cinq entreprisesNote de bas de page 12. Il a affirmé avoir demandé du travail auprès de garages, d’épiceries, de restaurants, du YMCA, du centre de conditionnement physique où il s’entraînait ainsi que du centre de conditionnement physique de son campus. Il a expliqué qu’il avait cherché des postes vacants en ligne, mais qu’il ne s’était pas inscrit auprès d’une agence de placement.

[32] Rien ne prouve que le prestataire a cherché un emploi chaque jour pour lequel il a demandé des prestations ou qu’il a posé sa candidature à des postes vacants.

[33] Je conclus qu’il est plus probable qu’improbable que, si le prestataire avait cherché sérieusement un emploi, il aurait trouvé un poste vacant auquel poser sa candidature. Il a affirmé qu’il y avait peu de postes vacants affichés. Je suis d’accord avec lui sur le fait que le marché du travail était difficile, mais la Commission a donné des exemples de postes auxquels il aurait pu poser sa candidature. Il devait chercher un emploi, même s’il pensait avoir une faible chance d’en trouverNote de bas de page 13.

Le prestataire a-t-il établi des conditions personnelles ?

[34] Oui. Le prestataire a établi des conditions personnelles pour accepter un emploi. Il est plus probable qu’improbable que ces conditions aient limité ses chances de trouver un emploi.

[35] Le fait d’accorder la priorité à ses études plutôt qu’à la recherche d’emploi constitue une condition personnelle. Certaines personnes préfèrent se concentrer sur leurs études et ne veulent pas travailler en même temps. Il s’agit d’un choix personnel. Cependant, les prestations d’assurance-emploi sont versées uniquement aux personnes qui tentent sincèrement de se trouver un emploi tout en poursuivant leurs études.

[36] Le prestataire a établi d’autres conditions personnelles. Par exemple, il a affirmé qu’il abandonnerait son cours uniquement pour un emploi à temps plein dans le domaine de la gestion. Aussi, il aurait accepté de faire tout au plus une heure de route environ à condition que l’emploi soit bien rémunéré. Ces conditions laissent croire que le prestataire ne voulait pas exercer n’importe quel emploi convenable.

[37] Selon le prestataire, un emploi convenable est un emploi semblable à celui qu’il occupait auparavant, avec un salaire similaire, et qui respectait ses capacités en matière de santé et d’aptitudes physiquesNote de bas de page 14. Le salaire de son ancien emploi de manœuvre était de 13 $ l’heure. Donc, le fait de vouloir un emploi bien rémunéré dans le domaine de la gestion était une condition personnelle irréaliste. Cette condition a limité indûment ses chances de retourner travailler et de trouver un emploi convenable.

Alors, le prestataire était-il capable de travailler et disponible pour le faire ?

[38] Selon mes conclusions sur les trois éléments mentionnés précédemment, je conclus que le prestataire n’a pas démontré qu’il était capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenable.

[39] Le prestataire affirme qu’il est injuste que la Commission mette fin à ses prestations, alors qu’il sait que d’autres étudiants qui ne travaillent pas et ne cherchent pas d’emploi en reçoivent. Il ajoute qu’il devrait recevoir des prestations d’assurance-emploi pour l’aider à atteindre son but, soit devenir autosuffisant.

[40] Toutefois, l’assurance-emploi n’est pas une bourse d’études. Une personne aux études qui souhaite recevoir des prestations d’assurance-emploi doit démontrer par des gestes concrets qu’elle était disponible pour travailler, comme il est expliqué ci-dessus. Les actions et les conseils de ses amis ne justifient pas l’inaction du prestataire.

[41] Le prestataire a demandé s’il pouvait recevoir des prestations pendant son congé d’hiver, étant donné qu’il n’étudierait pas à temps plein pendant cette période. Toutefois, ce n’est pas à moi de trancher cette question puisqu’elle n’a pas fait l’objet d’une révision auprès de la Commission. Le prestataire pourrait présenter une demande à cet effet auprès de la Commission.

Conclusion

[42] Le prestataire n’a pas démontré qu’il était capable de travailler et disponible pour travailler pendant qu’il suivait un cours à temps plein. Donc, il est inadmissible au bénéfice des prestations régulières d’assurance-emploi à compter du 8 septembre 2021. Par conséquent, je rejette l’appel du prestataire.

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