Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : CA c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1252

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision sur la demande de permission d’en appeler

Demanderesse : C. A.
Défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 9 septembre 2022 (GE-22-1877 et GE-22-1876)

Membre du Tribunal : Melanie Petrunia
Date de la décision : Le 11 novembre 2022
Numéro de dossier : AD-22-704 et AD-22-705

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Décision

[1] La permission d’en appeler est refusée. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] La demanderesse, C. A. (prestataire), a demandé des prestations d’assurance‑emploi et a établi une demande prenant effet le 18 octobre 2015. Elle a touché des prestations de maladie, suivies de prestations de maternité et parentales pour la période du 18 octobre 2015 au 28 janvier 2017.

[3] La défenderesse, la Commission de l’assurance‑emploi du Canada, a examiné ses demandes. Elle a décidé que la prestataire a omis de déclarer la rémunération qui lui a été versée par deux employeurs pendant sa période de prestations. La Commission a envoyé à la prestataire des lettres datées du 12 juin 2018 et du 17 août 2018 pour lui faire part de ses décisions.

[4] La prestataire a demandé la révision de ces décisions le 17 mars 2022. La Commission a refusé de réviser les décisions parce que la demande était tardive et elle a décidé que la prestataire n’avait pas fourni d’explication raisonnable justifiant le retard ni n’avait démontré une intention constante de demander une révision.

[5] La prestataire a en vain fait appel de la décision de la Commission à la division générale du Tribunal. La division générale a conclu que la Commission avait agi correctement lorsqu’elle a refusé à la prestataire une prolongation du délai pour déposer sa demande de révision. Elle a rejeté ses appels.

[6] La prestataire souhaite maintenant faire appel de la décision de la division générale à la division d’appel du Tribunal. Toutefois, elle doit obtenir la permission pour que son appel puisse aller de l’avant. Elle soutient que la division générale n’a pas respecté l’équité procédurale.

[7] Je dois décider s’il existe une erreur susceptible de contrôle de la division générale sur le fondement de laquelle l’appel pourrait être accueilli. Je refuse la permission d’en appeler parce que l’appel de la prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Questions préliminaires

[8] La division générale a joint les appels des deux décisions de la Commission au motif que les faits dans les appels étaient semblables et qu’il n’en découlerait vraisemblablement aucune injustice pour l’une ou l’autre partie. Les appels ont été entendus ensemble, ce qui a donné lieu à une seule décision. Ces affaires sont également jointes à la division d’appel et les deux demandes de permission d’en appeler sont traitées dans la présente décision.

Questions en litige

[9] Les questions en litige sont les suivantes :

  1. a)  Peut‑on soutenir que la division générale n’a pas respecté l’équité procédurale en n’ajournant pas l’audience?
  2. b)  La prestataire soulève‑t‑elle une autre erreur susceptible de contrôle de la division générale sur le fondement de laquelle l’appel pourrait être accueilli?

Analyse

[10] Le critère juridique auquel la prestataire doit satisfaire dans une demande de permission d’en appeler est peu exigeant : existe-t-il un moyen défendable sur le fondement duquel l’appel pourrait être accueilliNote de bas de page 1?

[11] Pour trancher cette question, je me suis concentrée sur la question de savoir si la division générale aurait pu commettre une ou plusieurs des erreurs pertinentes (ou des moyens d’appel) énumérées dans la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement socialNote de bas de page 2.

[12] Un appel n’est pas une nouvelle audition de la demande initiale. Je dois plutôt décider si la division générale :

  1. a) n’a pas offert une procédure équitable;
  2. b) a omis de trancher une question qu’elle aurait dû trancher ou a tranché une question qu’elle n’aurait pas dû trancher.
  3. c) a fondé sa décision sur une erreur factuelle importanteNote de bas de page 3, ou
  4. d) a commis une erreur de droitNote de bas de page 4.

[13] Avant que la prestataire puisse passer à l’étape suivante de l’appel, je dois être convaincue qu’il y a une chance raisonnable de succès compte tenu d’un ou de plusieurs de ces moyens d’appel. Une chance raisonnable de succès signifie que la prestataire pourrait plaider sa cause et peut‑être gagner. Je dois également être consciente d’autres moyens d’appel possibles qui n’ont pas été mentionnés expressément par la prestataireNote de bas de page 5.

Contexte

[14] La prestataire a touché des prestations de maladie, suivies de prestations de maternité et parentales pour la période du 18 octobre 2015 au 28 janvier 2017Note de bas de page 6. La Commission a par la suite examiné ses demandes.

[15] La Commission a décidé que la prestataire a sciemment fait de fausses déclarations lorsqu’elle a omis de déclarer une rémunération qui lui a été versée par deux employeurs. Le 12 juin 2018, la Commission a envoyé à la prestataire une lettre expliquant que la rémunération avait été répartie sur les semaines commençant le 15 et le 22 janvier 2017, ce qui entraînait un trop payéNote de bas de page 7. Une pénalité a été imposée et un avis de violation mineure a été donné.

[16] La Commission a envoyé à la prestataire une lettre datée du 17 août 2018 expliquant qu’elle avait réparti la rémunération sur les semaines du 25 octobre 2015 au 14 février 2016, ce qui entraînait un trop payéNote de bas de page 8. Une autre pénalité a été imposée et un avis de violation très grave a été donné.

[17] La prestataire a eu des communications avec la Commission et l’Agence du revenu du Canada au cours des années qui ont suivi les décisions. Toutefois, elle n’a présenté une demande de révision que le 17 mars 2022, soit environ trois ans et demi en retardNote de bas de page 9.

[18] La Commission a décidé que la prestataire n’avait pas fourni d’explication raisonnable justifiant le retard dans la présentation de la demande de révision. Elle a également décidé qu’elle n’avait pas manifesté l’intention constante de demander une révision tout au long de ce retard. La Commission a écrit à la prestataire le 27 mars 2022 pour l’informer qu’elle ne réviserait pas ses décisionsNote de bas de page 10.

La décision de la division générale

[19] La division générale a rejeté les appels de la prestataire. Elle a conclu que la Commission a correctement exercé son pouvoir discrétionnaire lorsqu’elle a refusé à la prestataire une prolongation du délai pour présenter sa demande de révision.

[20] La division générale a tenu compte du fait que la prestataire avait communiqué avec la Commission pendant le retardNote de bas de page 11. Elle a également eu des contacts avec l’ARC et a conclu une entente de remboursement de la dette découlant des trop‑payés. Des agents de la Commission ont dit à plus d’une occasion à la prestataire qu’elle devrait demander une révisionNote de bas de page 12.

[21] La division générale a également tenu compte du fait que la prestataire a dit à la Commission qu’elle avait des problèmes de santé qui l’avaient empêchée de demander une révision, mais aucun document médical ou autre document n’a été fourni à l’appuiNote de bas de page 13. La division générale a convenu avec la Commission que la prestataire n’avait fourni aucune explication raisonnable justifiant le retard.

[22] La division générale a examiné les motifs pour lesquels la Commission a conclu que la prestataire n’avait pas démontré une intention constante de demander une révision. Elle a tenu compte des dates auxquelles la prestataire a communiqué avec la Commission, de l’entente qu’elle a conclue avec l’ARC pour rembourser la dette et du délai qui s’est écoulé entre le 30 avril 2021, date à laquelle elle a reçu instruction de demander une révision, et le 17 mars 2022, date à laquelle elle a présenté sa demandeNote de bas de page 14.

[23] La division générale a conclu que la Commission avait exercé son pouvoir discrétionnaire correctement. Elle a conclu que la Commission a tenu compte de tous les facteurs pertinents, qu’elle a fait fi des facteurs non pertinents, qu’elle a agi de bonne foi et qu’elle n’a pas agi de manière discriminatoireNote de bas de page 15.

On ne peut soutenir que la division générale a manqué à l’équité procédurale

[24] La prestataire affirme qu’elle n’a pas eu une audience équitable et qu’elle n’a pas eu la possibilité de fournir tous ses documents.

[25] Dans sa décision, la division générale a discuté de l’historique procédural de l’appel. Au départ, l’audience devait se tenir par vidéoconférence le 11 juillet 2022Note de bas de page 16. La prestataire a demandé un ajournement le 29 juin 2022 parce qu’il y avait eu un décès tragique dans sa famille. La demande a été accueillie et l’audience a été reportée au 21 juillet 2022Note de bas de page 17.

[26] À l’audience du 21 juillet, la prestataire a déclaré qu’elle voulait fournir des renseignements médicaux supplémentaires à l’appui de son appel. La division générale a ajourné l’audience au 30 août 2022 et lui a donné jusqu’au 19 août 2022 pour déposer des documents à l’appui. La prestataire n’a présenté aucun autre documentNote de bas de page 18.

[27] Le jour de l’audience du 30 août, la prestataire a demandé un ajournement pour cause de maladieNote de bas de page 19. Le membre de la division générale a rejeté la demande, mais il a donné à la prestataire jusqu’au 5 septembre 2022 pour présenter d’autres documents ou observationsNote de bas de page 20. La prestataire n’a rien déposé d’autre.

[28] La prestataire affirme qu’elle regrette de ne pas avoir expliqué les détails entourant le décès survenu dans sa famille et d’avoir demandé un ajournement plus long. Elle affirme qu’elle a réalisé lors de l’audience du 21 juillet qu’il manquait des documents dont elle avait besoin et on lui a donné une nouvelle date pour recueillir ces documentsNote de bas de page 21.

[29] La prestataire affirme qu’elle a demandé les documents médicaux et explique qu’elle n’a pas pu les obtenir à temps parce que le cabinet de son médecin a été fermé pendant près de deux semainesNote de bas de page 22. En outre, elle ne se sentait pas bien pendant cette période. La prestataire a demandé une nouvelle date d’audience le jour de l’audience du 30 août parce qu’elle ne se sentait pas bien.

[30] La prestataire affirme que le membre de la division générale lui a donné jusqu’au lundi suivant pour présenter de nouveaux documents. Elle soutient qu’elle n’était [traduction] « pas du tout en mesure d’accomplir la tâche au plus tard le lundi »Note de bas de page 23. Son état de santé a continué de se détériorer après l’audience.

[31] Comme la prestataire le mentionne dans sa demande de permission d’en appeler, elle n’a pas fourni de motifs détaillés à l’appui de sa première demande d’ajournement ni demandé un ajournement plus long. L’affaire a été ajournée pendant 10 jours et la prestataire a assisté à l’audience le 21 juillet. On ne peut soutenir que la division générale n’a pas respecté l’équité procédurale en n’ajournant pas l’audience plus longtemps.

[32] J’ai écouté l’audience tenue devant la division générale le 21 juillet 2022. La prestataire a déclaré qu’elle ne contestait plus la décision de la Commission datée du 12 juin 2018 ni n’interjetait appel du refus de la Commission de réviser cette décisionNote de bas de page 24. La prestataire éprouvait des problèmes avec sa vidéo sur son ordinateur, mais elle a dit à la division générale qu’elle était d’accord pour tenir l’audience en utilisant uniquement le sonNote de bas de page 25.

[33]   La prestataire s’est fait demander pourquoi elle n’avait communiqué avec la Commission que le 19 juin 2019, soit environ 10 mois après avoir reçu la décision du mois d’août 2018. Elle a dit avoir été malade durant cette période.

[34] La prestataire a dit au membre de la division générale qu’elle avait des documents médicaux supplémentaires à fournir et que ceux‑ci se trouvaient dans son unité d’entreposageNote de bas de page 26. Elle a renvoyé à ces documents comme étant son dossier de santéNote de bas de page 27. Le membre de la division générale a ajourné l’audience pour permettre à la prestataire de trouver et de fournir tous les documents médicaux pertinentsNote de bas de page 28.

[35] La prestataire a dit qu’il y avait de nombreux documents et a demandé s’il y avait un moyen de les numériser et de les soumettre avec une explication. Le membre de la division générale a expliqué à la prestataire comment elle pouvait soumettre les documents avec son explication des documentsNote de bas de page 29.

[36] La division générale a dit à la prestataire qu’elle devait soumettre les documents supplémentaires avant l’audience suivante. Elle a suggéré la date du 24 août et a demandé à la prestataire si elle était libre. Comme elle devait assister à un mariage, la prestataire a demandé que l’audience soit tenue la semaine suivante; la division générale a donc fixé la date de l’audience au 30 août 2022.

[37] La division générale a confirmé auprès de la prestataire qu’elle aurait suffisamment de temps pour rassembler les documents nécessaires. La prestataire a répondu que le délai devrait être plus que suffisantNote de bas de page 30. Elle a dit que son médecin de famille avait tous les dossiers s’il lui manquait quelque chose. La division générale a mentionné que tous les documents devaient être soumis au plus tard le 19 août 2022 pour donner à la partie opposée la possibilité de répondre. La prestataire a accepté ce délai.

[38] La prestataire n’a déposé aucun autre document avant la date limite du 19 août 2022. Elle n’a pas non plus communiqué avec le Tribunal pour demander une prolongation de ce délai ou fournir une explication.

[39] J’ai également écouté l’enregistrement de l’audience de la division générale du 30 août 2022. On a demandé à la prestataire pourquoi elle n’avait pas présenté ses documents avant le 19 août. Elle a dit qu’elle avait fait une erreur parce qu’elle croyait devoir soumettre les documents avant la nouvelle date d’audience et qu’elle était tombée malade la semaine précédenteNote de bas de page 31.

[40] La division générale a décidé de procéder par téléconférence plutôt que par vidéoconférence et de permettre à la prestataire de fournir d’autres documents ou des arguments écrits au plus tard le lundi suivant, le 5 septembre 2022Note de bas de page 32. La prestataire n’a pas demandé un délai plus long.

[41] Lorsque le membre de la division générale a demandé à la prestataire si elle comprenait que la demande d’ajournement avait été refusée, mais qu’elle avait quelques jours de plus pour présenter des documents et des arguments par courriel, la prestataire a répondu : [traduction] « Oui, pas de problème »Note de bas de page 33.

[42] La prestataire n’a fourni aucun autre document ou argument écrit avant la date limite du 5 septembre 2022. Dans sa demande de permission d’en appeler, la prestataire soutient qu’elle n’a pas été en mesure de respecter ce délai, mais qu’il n’y a pas eu de communication avec le Tribunal et qu’elle n’a pas demandé de prolongation du délai pour présenter les documents. La division générale a rendu sa décision le 9 septembre 2022.

[43] La prestataire affirme dans sa demande de permission d’en appeler qu’elle n’a pas été en mesure d’obtenir les documents avant la date limite du 19 août parce que le cabinet de son médecin a été fermé pendant près de deux semaines. Elle a dit avoir demandé les documents. Elle n’a pas fourni cette information lorsque la division générale lui a demandé pourquoi elle n’avait pas respecté le délai. La prestataire a également obtenu une autre date avant laquelle elle devait fournir les documents, soit le 5 septembre 2022, mais elle n’a rien soumis.

[44] On ne peut soutenir que la division générale a manqué à l’équité procédurale. L’affaire a été ajournée deux fois et la prestataire a eu d’autres occasions de fournir des documents et des arguments écrits. Elle a eu l’occasion de présenter sa preuve.

[45] Outre les arguments de la prestataire, j’ai également examiné d’autres moyens d’appel. La prestataire n’a signalé aucune erreur de fait importante et je n’en ai relevé aucune dans le dossier. On ne peut soutenir que la division générale a commis une erreur de compétence. Je n’ai relevé aucune erreur de droit.

[46] La prestataire n’a signalé aucune erreur de la division générale sur le fondement de laquelle l’appel pourrait être accueilli. Par conséquent, je refuse la permission d’en appeler.

Conclusion

[47] La permission d’en appeler est refusée. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.
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