Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation: DH c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2020 TSS 1386

Numéro de dossier du Tribunal: GE-22-2562

ENTRE :

D. H.

Appelant

et

Commission de l’assurance-emploi du Canada

Intimée


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division générale – Section de l’assurance-emploi


DÉCISION RENDUE PAR : Teresa M. Day
DATE DE LA DÉCISION : Le 6 septembre 2022

Sur cette page

MOTIFS ET DÉCISION

Aperçu

[1] L’appelant a demandé des prestations d’assurance-emploi le 10 avril 2022. L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a décidé qu’il ne pouvait pas recevoir de prestations parce qu’il n’avait pas accumulé le nombre d’heures d’emploi assurable requis pour y être admissible. Il avait accumulé 413 heures au cours de sa période de référence, mais il avait besoin de 420 heures pour établir une période de prestations.

[2] Après avoir reçu une demande de révision le 20 mai 2022, la Commission a rendu une décision au titre de l’article 112 de la Loi sur l’assurance-emploi le 14 juin 2022. Dans sa décision de révision, la Commission a maintenu sa décision initiale du 12 avril 2022 selon laquelle l’appelant ne pouvait pas recevoir de prestations d’assurance-emploi parce qu’il n’avait pas accumulé le nombre d’heures d’emploi assurable requis pour y être admissibleNote de bas de page 1. L’appelant a porté la décision de révision en appel devant le Tribunal de la sécurité sociale.

[3] L’appelant a dit avoir reçu la lettre de décision initiale le 12 avril 2022 et en avoir joint une copie à l’avis d’appel qu’il a déposé au Tribunal. Il n’a cependant fourni aucun renseignement sur la date à laquelle il a reçu la lettre l’informant de la décision de révision et n’en a pas non plus joint une copie à son avis d’appelNote de bas de page 2. Toutefois, un dossier indique que le personnel de Service Canada a communiqué le résultat de la révision à l’appelant lors d’un appel téléphonique le 14 juin 2021Note de bas de page 3.

[4] Conformément à l’article 52(1)(a) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, l’appelant avait 30 jours pour déposer un appel devant le Tribunal. Étant donné que le courrier ordinaire est livré dans un délai de 10 jours, l’appelant avait jusqu’au 25 juillet 2022 pour déposer son appel auprès du Tribunal. Il a déposé son appel le 2 août 2022, après le délai de 30 jours.

[5] Avant que l’appel de l’appelant puisse aller de l’avant, je dois décider s’il faut lui accorder une prolongation de délai pour faire appel conformément à l’article 52(2) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social.

Analyse

[6] Pour décider s’il y a lieu d’accorder à l’appelant une prolongation de délai pour faire appel, je dois tenir compte des quatre critères établis dans la décision Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c Gattellaro, 2005 CF 883. Le poids qu’il faut accorder à chacun de ces critères varie selon les circonstances et, dans certains cas, d’autres critères peuvent aussi être pertinents. La considération primordiale est celle de savoir si la décision d’accorder ou non plus de temps est dans l’intérêt de la justice (Canada (Procureur général) c Larkman, 2012 CAF 204; voir aussi la décision Jama c Canada (Procureur général), 2016 CF 1290, qui a confirmé cette approche pour décider si une prolongation de délai doit être accordée).

[7] Le Tribunal a envoyé une lettre à l’appelant le 19 août 2022 lui demandant d’expliquer pourquoi son appel était en retard et de démontrer qu’il avait l’intention persistante de poursuivre l’appel (document GD5)Note de bas de page 4. L’appelant a répondu ce qui suit par courriel le 24 août 2022 :

[traduction]

« Si j’ai tardé à déposer mon appel, c’est parce que chaque fois que j’ai appelé, le temps d’attente était de deux ou trois heures. Et j’attendais d’obtenir des documents de mon ancien employeur et cela a pris beaucoup de temps. J’ai appelé plusieurs fois le gouvernement, mais je devais attendre une réponse, je n’ai aucun contrôle là-dessus. »

[8] Je vais maintenant procéder à l’analyse des critères établis dans la décision Gattellaro sur la base des informations dont je dispose dans le dossier de révision, l’avis d’appel et le courriel de l’appelant du 24 août 2022.

Intention persistante de poursuivre l’appel

[9] J’estime que la décision confirmant que l’appelant n’avait pas accumulé suffisamment d’heures d’emploi assurable pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi lui a été communiquée le 24 juin 2022, soit 10 jours après l’envoi de la lettre de décision le 14 juin 2022Note de bas de page 5. Je tire cette conclusion puisque j’ai accordé à l’appelant un délai raisonnable pour que la lettre l’informant de la décision de révision lui soit envoyée par le service postal régulier de Postes Canada.

[10] Pour satisfaire à ce critère établi dans la décision Gattellaro, l’appelant doit démontrer qu’il avait l’intention de faire appel dans le délai d’appel de 30 jours qui a débuté le 24 juin 2022.

[11] L’appelant ne dit pas qu’il n’a pas reçu la lettre de décision. Cependant, je ne vois aucun élément de preuve montrant qu’il avait l’intention de faire appel ou qu’il ait pris des mesures pour faire appel dans les 30 jours suivant la communication (verbale ou autre) de la décision de révision.

[12] L’appel n’est accompagné d’aucun nouvel élément de preuve qui n’a pas été présenté à la Commission pendant le processus de révision, et aucune explication n’a été fournie quant à la raison pour laquelle la déclaration figurant dans l’avis d’appel n’a pas été signée avant le 25 juillet 2022, soit le tout dernier jour du délai de 30 jours pour faire appelNote de bas de page 6.

[13] Je conclus donc que l’appelant n’avait pas l’intention persistante de poursuivre l’appel.

Argument défendable

[14] La Cour d’appel fédérale a conclu que la question de savoir si une partie prestataire a soulevé un argument défendable en droit revient à décider si son appel a une chance raisonnable de succès (Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c Hogervorst, 2007 CAF 41) et Fancy c Canada (Ministre du Développement social), 2010 CAF 63).

[15] La question en litige dans le présent appel est de savoir si la Commission a conclu à juste titre que l’appelant n’avait pas accumulé suffisamment d’heures d’emploi assurable pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi.

[16] Pour que cette décision soit infirmée, l’appelant doit prouver que la Commission a commis une erreur dans ses calculs.

[17] L’appelant a affirmé dans son avis d’appel qu’il lui manquait seulement sept heures pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi. Il a également dit qu’il avait manqué quatre jours de travail parce qu’il avait contracté le virus de la COVID-19 et que ces quatre jours lui auraient permis d’accumuler les heures dont il avait besoinNote de bas de page 7.

[18] Malheureusement pour lui, rien de tout cela ne répond à la question de savoir si la Commission a conclu à juste titre qu’il n’était pas admissible aux prestations d’assurance-emploi.

[19] Pour recevoir des prestations d’assurance-emploi, l’appelant doit satisfaire aux conditions énoncées à l’article 7 de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 8. La Commission a décidé qu’il a besoin de 420 heures d’emploi assurable au cours de sa période de référenceNote de bas de page 9 pour pouvoir établir une période de prestations pour sa demande du 10 avril 2022Note de bas de page 10. Il n’a que 413 heuresNote de bas de page 11.

[20] Aucun des arguments de l’appelant ne remet en cause ces calculs, et encore moins n’y relève d’erreurs. Il ne conteste pas les décisions de la Commission établissant que sa période de référence s’étend du 4 avril 2021 au 2 avril 2022, qu’il a besoin de 420 heures d’emploi assurable pour être admissible aux prestations d’assurance‑emploi et qu’il a accumulé 413 heures au cours de sa période de référence.

[21] Le Tribunal n’a pas le pouvoir discrétionnaire d’ignorer les conditions d’admissibilité énoncées dans la Loi sur l’assurance-emploi ou d’y déroger. La Cour d’appel fédérale a confirmé ce principe lorsqu’elle a examiné une affaire semblable à celle de l’appelant, dans laquelle il ne manquait à la prestataire qu’une heure pour remplir les conditions d’admissibilitéNote de bas de page 12. Dans cette affaire, la Cour a déclaré que le décideur ne peut déroger aux conditions énoncées dans la Loi sur l’assurance-emploi, même s’il ne manque qu’une heure à une partie prestataire pour satisfaire aux conditions d’admissibilité.

[22] Le Tribunal n’a pas non plus compétence pour accorder la réparation équitable que l’appelant demandeNote de bas de page 13, c’est-à-dire ordonner qu’on lui verse des prestations d’assurance-emploi même s’il n’a pas accumulé suffisamment d’heures pour y être admissible.

[23] Le Tribunal ne peut pas non plus faire une exception pour l’appelant, quelque impérieuse ou difficile soit sa situationNote de bas de page 14.

[24] L’appelant a besoin de 420 heures d’emploi assurable au cours de sa période de référence pour établir une demande de prestations d’assurance-emploi pour sa demande du 10 avril 2022. Je ne peux pas tout simplement modifier cette condition ou y déroger. Il n’a que de 413 heures. Cela signifie qu’il ne remplit pas les conditions d’admissibilité aux prestations d’assurance-emploi.

[25] Par conséquent, je conclus que l’appelant n’a pas soulevé d’argument défendable en appel.

Explication raisonnable pour le retard

[26] L’appelant a déposé son appel le 2 août 2022.

[27] Cela signifie que sa période de retard est relativement courte, à savoir les 8 jours entre le 25 juillet 2022 (l’expiration du délai de 30 jours pour déposer un appel fondé sur la communication de la décision de révision) et le 2 août 2022 (la date à laquelle il a effectivement déposé son appel au Tribunal).

[28] Mais l’explication que l’appelant a fournie pour ce bref retard n’a aucun sens.

[29] Comme indiqué au paragraphe 7 ci-dessus, l’appelant a attribué son retard à de nombreux appels téléphoniques au gouvernement, à de longues attentes au téléphone et à de longs délais d’attente pour obtenir une réponse. Il n’a cependant fourni aucun détail sur nature de ses appels ni sur les renseignements qu’il attendait d’obtenir. Étant donné que son appel reprend exactement les mêmes déclarations qu’il a faites dans sa demande de révision, y compris la raison pour laquelle sa demande de révision était en retard, je ne vois pas en quoi cela est pertinent pour expliquer son retard à déposer son appel devant le TribunalNote de bas de page 15.

[30] L’appelant a ajouté qu’il attendait des documents d’un ancien employeur. Aucun nouvel élément de preuve ou nouveau renseignement provenant d’un ancien employeur n’est cependant inclus dans son appel, alors je ne vois pas non plus en quoi cela est pertinent pour son retard à déposer son appel.

[31] Par conséquent, je conclus que l’appelant n’a pas fourni d’explication raisonnable pour son retard à déposer son appel.

Préjudice à l’autre partie

[32] Les intérêts de la Commission ne semblent pas être lésés étant donné la période relativement courte qui s’est écoulée depuis la décision de révision. Elle a déjà fourni ses documents et ses observations relativement à l’appel et, par conséquent, ne serait pas indûment touchée par une prolongation de délai pour faire appel.

Conclusion

[33] Compte tenu des critères établis dans la décision Gattellaro et dans l’intérêt de la justice, je refuse d’accorder à l’appelant une prolongation de délai pour faire appel au titre de l’article 52(2) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social.

[34] L’appelant n’a pas satisfait à trois des quatre critères établis dans la décision Gattellaro, et il n’est pas dans l’intérêt de la justice de lui accorder une prolongation de délai parce qu’il n’a pas présenté aucun argument défendable.

[35] Par conséquent, l’appel de l’appelant est rejeté et n’ira pas de l’avant.

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