Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : PJ c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1279

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : P. J.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de révision (446205) rendue le 12 janvier 2022 par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Amanda Pezzutto
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience  : Le 27 juin 2022
Personnes présentes à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 29 juin 2022
Numéro de dossier : GE-22-1112

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Décision

[1] P. J. est la prestataire dans le présent dossier. La Commission de l’assurance-emploi du Canada affirme qu’elle n’était pas admissible aux prestations d’assurance-emploi pendant qu’elle était à l’étranger. La prestataire porte cette décision en appel devant le Tribunal de la sécurité sociale.

[2] J’accueille l’appel en partie. La prestataire a droit aux prestations d’assurance-emploi pendant les sept premiers jours où elle était à l’étranger, car elle rendait visite à une personne de sa famille qui était gravement malade. Elle n’a cependant pas droit aux prestations d’assurance-emploi pour le reste de son séjour à l’étranger.

Aperçu

[3] La prestataire a demandé des prestations d’assurance-emploi au début du mois de novembre 2021. Elle a dit à la Commission qu’elle quittait le Canada le 3 novembre 2021. Elle ne savait pas encore quand elle serait de retour. La Commission a décidé que la prestataire n’était pas admissible aux prestations d’assurance-emploi pendant qu’elle se trouvait à l’étranger.

[4] Selon la Commission, la prestataire ne peut pas obtenir de prestations d’assurance-emploi pendant son séjour à l’étranger. Elle affirme que la prestataire n’a pas démontré que les raisons de son voyage à l’étranger s’inscrivent dans l’une des exceptions permises par la loi.

[5] La prestataire n’est pas d’accord. Elle dit qu’elle devrait toucher des prestations d’assurance-emploi pendant toute la période où elle se trouvait à l’étranger. Elle rendait visite à sa mère, qui était gravement malade. Elle ajoute qu’elle a continué ses recherches d’emploi à distance, même si elle était à l’étranger. Elle affirme que la Loi sur l’assurance-emploi ne reflète pas les réalités du monde moderne comme la possibilité de faire des recherches d’emploi à distance et même de travailler à distance.

Question en litige

[6] Je dois décider si la prestataire a prouvé qu’elle était admissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi pendant son séjour à l’étranger.

Analyse

[7] Habituellement, on ne peut pas recevoir de prestations d’assurance-emploi quand on est à l’étrangerNote de bas page 1. Il y a quelques exceptions. Le Règlement sur l’assurance-emploi dresse la liste des exceptions. Si l’on se trouve à l’étranger pour l’une des raisons suivantes, il se pourrait qu’on puisse toucher des prestations :

  • subir un traitement médical qui n’est pas immédiatement ou rapidement disponible au Canada;
  • assister aux funérailles d’un membre de la famille;
  • voyager avec un membre de la famille qui reçoit un traitement médical à l’étranger;
  • visiter un membre de la famille gravement malade ou blessé;
  • assister à une entrevue d’emploi;
  • faire une recherche d’emploiNote de bas page 2.

[8] On a toujours la responsabilité de prouver qu’on remplit toutes les conditions requises pour recevoir des prestations d’assurance-emploiNote de bas page 3. Autrement dit, il faut prouver que l’une de ces exceptions s’applique dans son cas si l’on veut recevoir des prestations pendant un séjour à l’étrangerNote de bas page 4.

Pourquoi la prestataire était-elle à l’étranger?

[9] La prestataire affirme avoir voyagé à l’étranger pour rendre visite à sa famille. Elle n’avait pas vu sa famille depuis 2019 parce qu’elle respectait les restrictions de voyage liées à la COVID-19. Elle explique que sa mère et d’autres membres de sa famille étaient gravement malades.

[10] La Commission affirme que la prestataire n’est pas crédible lorsqu’elle dit qu’elle devait rendre visite à des membres de sa famille qui étaient gravement malades. Selon la Commission, la prestataire a d’abord dit qu’elle rendait visite à des membres de sa famille sans mentionner que ces personnes étaient malades.

[11] Les éléments de preuve au dossier d’appel sont, en effet, contradictoires. Au début, la prestataire a dit à la Commission qu’elle partait en vacances à l’étranger. Dans le questionnaire original, elle ne mentionne pas que des membres de sa famille étaient malades. Dans la lettre qui accompagne sa demande de révision, elle écrit qu’elle visite sa famille, mais elle ne mentionne pas que certaines personnes sont malades. Selon les notes qu’un agent de la Commission a prises durant une conversation, la prestataire a dit que les membres de sa famille étaient [traduction] « en bonne santé, pas malades ».

[12] Toutefois, dans son avis d’appel et à l’audience, la prestataire a précisé qu’elle rendait visite à des membres de sa famille qui étaient gravement malades. Elle a dit que sa mère était malade et que son père et sa grand-mère avaient aussi des problèmes de santé.

[13] La prestataire a dit qu’elle n’avait pas parlé de la santé de sa famille à la Commission parce qu’elle ne savait pas que cette information était nécessaire. Elle a ajouté qu’elle ne comprenait pas les questions de la Commission pendant le processus de révision. Lorsqu’elle a dit à l’agent de la Commission que les membres de sa famille étaient « en bonne santé, pas malades », elle pensait que la discussion portait sur elle‑même. Elle n’a pas compris que l’agent posait des questions sur la santé de sa famille.

[14] Je comprends que, selon la Commission, la prestataire a changé sa version des faits, et cela voudrait dire que ses dernières déclarations sur la santé de sa famille sont peu crédibles. Mais je crois la prestataire. Je pense que son explication est plausible. Je crois qu’elle ne savait pas de quel genre d’information la Commission avait besoin pour décider de son admissibilité pendant son séjour à l’étranger. D’ailleurs, les notes de l’agent de la Commission ne mentionnent pas en termes précis les questions qu’il lui a posées, alors je crois qu’il est plausible que la prestataire n’ait pas compris les questions. Je pense qu’il est plausible qu’elle ait cru que l’agent l’interrogeait au sujet de sa santé à elle.

[15] Je crois donc que la prestataire a voyagé à l’étranger pour rendre visite à des membres de sa famille qui étaient gravement malades. Il y a une exception qui porte sur les voyages dont le but est de rendre visite à des membres de la famille gravement malades. Je vais examiner comment elle s’applique à la prestataire.

[16] La prestataire affirme aussi qu’elle cherchait du travail pendant qu’elle était à l’étranger. À l’audience, elle a précisé qu’elle cherchait un emploi auprès des entreprises canadiennes. Elle a dit à la Commission qu’elle aurait pu revenir au Canada n’importe quand si elle avait trouvé un emploi.

[17] Je pense que cela montre que la prestataire n’a pas quitté le Canada pour chercher du travail. Elle cherchait simplement du travail pendant son séjour à l’étranger. Par conséquent, je ne vais pas vérifier si l’exception qui porte sur les voyages à l’étranger dans le cadre d’une recherche d’emploi s’applique à la prestataireNote de bas page 5.

La prestataire est-elle admissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi pendant tout son séjour à l’étranger?

[18] Je conviens que la prestataire était à l’étranger pour rendre visite à des membres de sa famille gravement malades. La loi dit qu’on peut recevoir des prestations d’assurance-emploi pendant sept jours consécutifs si l’on se rend à l’étranger pour cette raison. Je conclus donc que la prestataire est admissible aux prestations d’assurance-emploi pour les sept premiers jours où elle était absente du Canada.

[19] Elle a quitté le Canada le 4 novembre 2021. La première journée complète de son absence du Canada était donc le 5 novembre 2021. On compte sept jours consécutifs du 5 novembre au 11 novembre 2021. Je conclus donc que la prestataire est admissible aux prestations d’assurance-emploi du 5 novembre au 11 novembre 2021. Par contre, la période de sept jours consécutifs autorisée par la loi prend fin le 12 novembre 2021. La prestataire se trouvait encore à l’étranger le 12 novembre 2021. Elle est rentrée au Canada le 21 février 2022. Ainsi, la dernière journée complète de son séjour à l’étranger était le 20 février 2022.

[20] Je dois donc décider si la prestataire est aussi admissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi du 12 novembre 2021 au 18 février 2022Note de bas page 6.

[21] La prestataire croit qu’elle devrait aussi recevoir des prestations d’assurance-emploi pour le reste de son séjour à l’étranger. Elle dit qu’elle a continué à chercher du travail. Elle explique qu’elle a contribué à la caisse de l’assurance-emploi et qu’elle devrait donc recevoir de l’aide financière quand elle en a besoin. Elle ajoute que la loi est désuète et ne reflète pas les réalités du monde moderne comme le travail à distance.

[22] Je comprends les arguments de la prestataire. Je suis d’accord : le monde du travail a beaucoup changé depuis que le Parlement a rédigé les lois qui régissent le programme d’assurance-emploi. Je conviens que la recherche d’emploi à distance et le travail à distance sont des choses courantes de nos jours. Mais même si je comprends les arguments de la prestataire sur ce point, je suis quand même obligée de respecter la loi.

[23] Je n’ai pas le pouvoir de modifier la législation sur l’assurance-emploi. Je dois plutôt appliquer le texte de loi suivant son sens ordinaireNote de bas page 7. La loi établit tout d’abord une règle générale qui dit qu’on ne peut pas obtenir de prestations d’assurance-emploi quand on est à l’étranger. Ensuite, la loi prévoit quelques exceptions à la règle générale. Si l’on ne peut pas prouver que l’une des exceptions s’applique dans son cas, on ne peut pas recevoir de prestations d’assurance-emploi pendant un séjour à l’étranger.

[24] Autrement dit, la prestataire peut toucher des prestations d’assurance-emploi seulement si elle peut prouver que sa situation fait partie des exceptions. Elle a démontré qu’elle rendait visite à des membres de sa famille gravement malades, alors cette exception s’applique pour les sept premiers jours de son séjour à l’étranger. Elle n’a toutefois pas démontré qu’une autre exception s’applique pour le reste de son séjour à l’étranger.

[25] En conséquence, la prestataire n’est pas admissible aux prestations d’assurance-emploi du 12 novembre 2021 au 18 février 2022.

Conclusion

[26] J’accueille l’appel en partie. La prestataire est admissible aux prestations d’assurance-emploi pendant les sept premiers jours où elle était à l’étranger. Elle n’y est cependant pas admissible pour le reste de son séjour à l’étranger.

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