Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : FG c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1522

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Parties appelante : F. G.
Représentante ou représentant : P. A.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentante ou représentant : Angèle Fricker

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 27 mai 2022 (GE-22-858)

Membre du Tribunal : Janet Lew
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 26 octobre 2022
Personnes présentes à l’audience : Appelante
Représentant de l’appelante
Représentante de l’intimée
Date de la décision : Le 22 décembre 2022
Numéro de dossier : AD-22-397

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli. L’affaire sera renvoyée à la division générale pour réexamen devant un autre membre.

Aperçu

[2] L’appelante, F. G. (prestataire), une préposée au soutien à domicile, interjette appel de la décision de la division générale. La division générale a conclu que la prestataire a volontairement pris congé. La division générale a également conclu que la prestataire n’était pas fondée à quitter son emploi et qu’elle avait d’autres options raisonnables pour maintenir son emploi. La division générale a conclu que la prestataire était inadmissibleNote de bas de page 1 au bénéfice des prestations de l’assurance-emploi.

[3] La prestataire affirme que la division générale a commis une importante erreur de fait. Elle soutient notamment qu’elle n’a pas tenu compte du fait qu’elle a cessé de travailler en raison d’un manque de travail. Elle nie avoir initialement demandé un congé et affirme que le congé a été suscité par son employeur. Elle nie également avoir cessé de travailler en raison de préoccupations concernant sa santé. Elle demande à la division d’appel de faire droit à son appel et de conclure qu’elle n’était pas inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[4] L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, nie que la division générale a négligé l’un ou l’autre des éléments de preuve ou qu’elle a commis des erreurs susceptibles de révision. La Commission soutient que la division générale a examiné les éléments de preuve pertinents, qu’elle les a correctement appréciés et qu’elle a tiré des conclusions conformes à ces éléments de preuve. La Commission demande à la division d’appel de rejeter l’appel de la prestataire.

Question en litige

[5] La question en litige est la suivante : La division générale a-t-elle ignoré certains éléments de preuve qui expliquent pourquoi la prestataire a cessé de travailler?

Analyse

[6] La division d’appel peut intervenir dans les décisions de la division générale si elles renferment des erreurs de compétence, de procédure, de droit ou certains types d’erreurs de faitNote de bas de page 2.

[7] En ce qui concerne les erreurs de fait, la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

La division générale a-t-elle ignoré certains éléments de preuve qui expliquent pourquoi la prestataire a cessé de travailler?

[8] La prestataire soutient que la division générale n’a pas tenu compte de certains éléments de preuve qui expliquent pourquoi elle avait cessé de travailler. Elle soutient qu’il n’y avait pas assez de travail. Elle affirme avoir demandé plus de travail à son employeur, mais que ce dernier lui a dit qu’il n’avait rien à lui offrir. Elle soutient que son employeur lui a ordonné de partir en congé parce qu’il n’y avait pas assez de travailNote de bas de page 3.

[9] Donc, la principale raison pour laquelle elle a pris congé était un manque de travail. Elle affirme que les préoccupations pour sa santé étaient un facteur secondaire aux fins de son congé.

[10] La prestataire affirme que, si la division générale n’avait pas négligé cet élément de preuve selon lequel il y avait un manque de travail, elle aurait admis qu’elle n’avait pas quitté volontairement son emploi. Et si elle n’avait pas quitté volontairement son emploi, elle n’aurait pas été inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

La décision de la division générale

[11] La division générale a souligné que la prestataire n’était pas d’accord avec le fait qu’elle ait volontairement pris congé.

[12] La division générale a présenté le témoignage de la prestataire comme suit :

  • La prestataire a décidé qu’elle accepterait beaucoup moins de quarts de travail. Cette décision découlait de préoccupations pour sa santé et sa sécurité pendant la pandémie. Elle dit qu’elle voulait minimiser ses risques de contracter le virusNote de bas de page 4.
  • Lorsqu’elle a communiqué avec Service Canada, elle a appris qu’elle aurait besoin d’un relevé d’emploi. Son employeur a d’abord refusé de lui en fournir un parce qu’elle n’avait pas quitté son emploi. L’employeur a offert à la prestataire de lui remettre un relevé d’emploi si elle était mise [traduction] « en suspens » (en congé). La prestataire a accepté cet arrangementNote de bas de page 5.
  • La prestataire n’était pas au courant des conséquences de la mise en [traduction] « suspens ». Elle n’y a consenti que parce que son employeur ne lui aurait pas remis de relevé d’emploi autrementNote de bas de page 6.

[13] La division générale a également souligné la preuve de la Commission. La Commission a déclaré que la prestataire a d’abord affirmé qu’elle avait perdu son emploi parce qu’il n’y avait pas assez de travail pour elle. Elle a ensuite déclaré qu’elle avait pris un congé pour établir une demande d’assurance-emploi. Puis, finalement, elle a affirmé avoir pris un congé par crainte de contracter la COVID-19Note de bas de page 7.

La preuve au dossier d’audience

[14] La preuve est constituée des éléments suivants :

La preuve de la prestataire
  • La prestataire a travaillé cinq à six jours par semaine pendant plus de 20 ans jusqu’au début de la pandémie. Dans sa demande de prestations d’assurance-emploi, la prestataire a déclaré qu’elle avait travaillé pour la dernière fois le 1er octobre 2021. Elle ne travaillait plus en raison d’un manque de travailNote de bas de page 8.
  • Lorsque la prestataire a parlé à la Commission au sujet de sa demande, elle a précisé qu’elle travaillait encore, mais seulement de deux à trois heures par semaine à ce moment-làNote de bas de page 9.
  • La prestataire a expliqué que sa cessation d’emploi était attribuable à un manque de travail. Elle a nié qu’elle souhaitait prendre congé. Elle avait demandé un relevé d’emploi, mais son employeur ne voulait pas en produire un avant qu’elle cesse complètement de travailler. [Traduction] « Donc, [son employeur] a cessé de lui donner des quarts de travailNote de bas de page 10 ».
  • La prestataire a affirmé que son employeur avait moins de travail à offrir. Elle a insisté sur le fait qu’il y avait un manque de travailNote de bas de page 11.
  • Lorsque la prestataire a demandé à la Commission de réexaminer sa décision initiale rejetant sa demande, la prestataire a affirmé que son employeur lui avait dit qu’il n’y avait pas assez de travail et qu’elle devrait demander des prestations d’assurance-emploi. La prestataire a écrit ce qui suit : [traduction] « Essentiellement, il a réduit mes heures de travail de sorte que je ne travaillais plus et qu’il n’y avait plus de travail […] J’ai également tenté de communiquer avec mon employeur pour que je sois inscrite à l’horaire, mais ai été informée qu’il n’y avait pas d’heures disponiblesNote de bas de page 12. »
  • La prestataire a nié les affirmations de l’employeur selon lesquelles il n’y avait pas de manque de travailNote de bas de page 13.
  • Lorsqu’elle a déposé un avis de demande à la division générale, la prestataire a expliqué qu’elle avait des préoccupations au sujet du travail pendant une pandémie, compte tenu du risque d’exposition à la COVID-19. Elle voulait minimiser son risque d’expositionNote de bas de page 14.
  • La prestataire a dit qu’elle avait cherché d’autres emplois au sein de l’entreprise qui ne nécessitaient pas de travailler directement auprès des patients. Mais son employeur a dit qu’il n’y avait [traduction] « aucun autre travailNote de bas de page 15 ».
  • À l’audience devant la division générale, la prestataire a affirmé qu’elle avait des préoccupations concernant la COVID-19Note de bas de page 16. Le membre de la division générale a dit à la prestataire que son employeur avait dit qu’elle pouvait prendre plus de quarts de travail si elle le voulaitNote de bas de page 17. La prestataire a dit qu’elle était prudente en raison de son âge et de l’âge de son époux. Dans son témoignage, elle a également affirmé que si son employeur lui avait offert des quarts de travail, elle les aurait acceptés. Elle a ajouté qu’elle n’avait jamais refusé les quarts de travail offerts par son employeur.
La preuve de l’employeur
  • L’employeur a indiqué que la prestataire était une employée occasionnelle. Cela voulait dire qu’elle pouvait décider d’accepter ou non les quarts de travail qui lui étaient offerts. L’employeur la considérait comme une employée active, de sorte qu’il était incapable de produire un relevé d’emploiNote de bas de page 18.
  • L’employeur a fourni un relevé d’emploi indiquant que la prestataire était en congéNote de bas de page 19.
  • L’employeur a déclaré que la prestataire avait décidé de prendre congé. L’agent de Service Canada a demandé à l’employeur s’il avait produit le relevé d’emploi pour congé en raison d’un manque de travail. L’employeur a répondu qu’il n’y avait pas de manque de travail.
  • L’agent a également demandé à l’employeur s’il avait offert moins de quarts de travail à la prestataire en raison d’un manque de travail. L’employeur a répondu qu’il ne pouvait pas confirmer si la prestataire avait choisi d’effectuer moins de quarts de travail. La prestataire était une employée occasionnelle et pouvait donc choisir des quarts de travail en fonction de sa disponibilitéNote de bas de page 20.
  • L’employeur a affirmé que la prestataire travaillait comme employée occasionnelle et pouvait choisir des quarts de travail en fonction de sa disponibilité. L’employeur a déclaré que la seule fois où il y avait eu un manque de travail était pendant la première vague de la pandémie. Après le 10 septembre 2020, il n’y a eu aucun manque de travail. Il y avait suffisamment de travail pour permettre à l’employée occasionnelle de travailler à temps pleinNote de bas de page 21.
  • L’employeur a affirmé que la prestataire aurait pu travailler à temps plein (40 heures par semaine), car il y avait beaucoup de travail. Mais, à titre d’employée occasionnelle, la prestataire pouvait choisir des quarts de travail en fonction de sa disponibilitéNote de bas de page 22.
  • L’employeur a déclaré que leurs services sont très recherchés dans la collectivité et qu’il y a toujours du travail, mais qu’il revient aux employés de décider s’ils veulent accepter du travail. L’employeur a affirmé que la prestataire avait demandé à être mise en suspens pour des raisons personnelles. La prestataire avait demandé un relevé d’emploi, mais comme il y avait du travail, il ne pouvait pas en produire un pour manque de travailNote de bas de page 23.

Éléments de preuve contradictoires dans le dossier d’audience

[15] Il y avait des éléments contradictoires entre la preuve de la prestataire et celle de son employeur. D’une part, la prestataire a affirmé dans son témoignage qu’il y avait un manque de travail. D’autre part, l’employeur a indiqué dans son témoignage qu’il y avait amplement de travail. D’autres éléments de preuve pouvaient raisonnablement expliquer pourquoi la prestataire a cessé de travailler.

[16] La division générale était en droit de préférer certains éléments de preuve et d’en rejeter d’autres, dans la mesure où elle prenait en compte toute la preuve contradictoire et expliquait pourquoi elle accordait la préférence ou plus de poids à certains éléments de preuve plutôt qu’à d’autres.

La division générale devait être au courant des affirmations de la prestataire selon lesquelles il y avait un manque de travail

[17] La division générale devait être au courant des affirmations de la prestataire selon lesquelles elle avait cessé de travailler en raison d’un manque de travail. Après tout, la division générale a renvoyé aux arguments de la CommissionNote de bas de page 24. La Commission a fait valoir que le récit de la prestataire a changé au fil du temps, qu’elle a d’abord dit qu’elle avait cessé de travailler en raison d’un manque de travail, puis qu’elle a dit plus tard qu’elle avait peur de contracter la COVID-19.

[18] La division générale a rejeté les arguments de la Commission selon lesquels les préoccupations de la prestataire en matière de santé et de sécurité n’étaient pas crédibles. La division générale a accepté les affirmations de la prestataire selon lesquelles elle s’inquiétait pour sa santé pendant la pandémieNote de bas de page 25. Malgré cela, la division générale a conclu que les préoccupations de la prestataire ne constituaient pas une justification pour prendre congé. La division générale a conclu que la prestataire avait d’autres solutions raisonnables.

La position de la prestataire

[19] La prestataire affirme que la division générale n’a pas pris en compte les affirmations antérieures de la prestataire selon lesquelles elle avait cessé de travailler en raison d’un manque de travail. En fait, la division générale ne fait pas directement référence aux affirmations antérieures de la prestataire à la Commission selon lesquelles elle a cessé de travailler en raison d’un manque de travail.

La position de la Commission

[20] La Commission soutient qu’il ressort clairement de la décision de la division générale qu’elle a rejeté les affirmations de la prestataire selon lesquelles il y avait un manque de travail. La Commission affirme qu’il ressort clairement de ce qui suit que la division générale a examiné cette question :

  • La division générale a reconnu la prestataire et la Commission ne s’entendaient pas sur la question de savoir si le congé de la prestataire était volontaireNote de bas de page 26. La Commission laisse entendre que, si le congé de la prestataire avait été volontaire, cela voudrait nécessairement dire qu’il y avait du travail pour elle.
  • La division générale a fait référence à la preuve selon laquelle la prestataire a parlé à son employeur de ses préoccupations pour sa santé, et que la prestataire a accepté d’être mise en suspens. Ainsi, elle pourrait obtenir un relevé d’emploiNote de bas de page 27. La Commission avance que le fait que la prestataire a accepté d’être mise en suspens pour pouvoir obtenir un relevé d’emploi signifiait qu’il y avait du travail.
  • La division générale a fait référence au témoignage de la prestataire selon lequel elle avait accepté d’être mise en suspens parce que c’était la seule façon pour elle d’obtenir un relevé d’emploiNote de bas de page 28. La Commission soutient que cela laisse entendre et confirme qu’il y avait du moins un peu de travail. Mais la prestataire voulait s’absenter complètement du travail pour pouvoir obtenir un relevé d’emploi.
  • La division générale a écrit qu’il ressort clairement des observations et du témoignage de la prestataire qu’elle [traduction] « voulait soit cesser de travailler, soit réduire considérablement ses heures pendant la pandémie ». La division générale a souligné que l’employeur lui avait offert la possibilité de la mettre en [traduction] « suspens », ce qui signifiait qu’il ne lui offrirait plus de quarts de travailNote de bas de page 29. La Commission affirme que ce passage montre que la division générale n’a pas accepté les affirmations de la prestataire selon lesquelles elle a cessé de travailler en raison d’un manque de travail.
  • La division générale a conclu que l’option d’un congé n’avait pas été imposée à la prestataire. L’employeur a présenté le congé comme une option. La Commission soutient que le congé était le mécanisme qui permettait à la prestataire d’obtenir un relevé d’emploiNote de bas de page 30. La Commission soutient que cela démontre qu’il y avait du travail, car autrement, la prestataire n’aurait eu d’autre choix que d’accepter la [traduction] « mise en suspens ».
  • La division générale a conclu que le congé de la prestataire était entièrement volontaireNote de bas de page 31. La Commission affirme que, si le congé était volontaire, cela signifiait qu’il devait y avoir du travail.

La division générale a-t-elle tenu compte des affirmations de la prestataire selon lesquelles il y avait un manque de travail?

[21] Le fait que la division générale ait tiré certaines conclusions de fait n’établit ni ne démontre qu’elle a analysé la question de savoir si la prestataire avait cessé de travailler en raison d’un manque de travail.

[22] Si la division générale avait tenu compte des affirmations antérieures de la prestataire selon lesquelles elle avait cessé de travailler en raison d’un manque de travail, elle aurait sûrement au moins pris acte des affirmations de la prestataire selon lesquelles elle avait cessé de travailler en raison d’un manque de travail. Cela ne signifie pas que la division générale aurait accepté ces affirmations, mais plutôt qu’elle était au courant de la position de la prestataire.

[23] Et si la division générale avait examiné et analysé cette question, elle aurait sûrement fait référence aux affirmations de l’employeur à la Commission. Les affirmations de l’employeur étaient les éléments de preuve les plus solides qui indiquaient qu’il n’y avait pas de manque de travail.

[24] L’employeur a nié l’existence de tout manque de travail après septembre 2020Note de bas de page 32. L’employeur a également affirmé que la prestataire avait demandé à être retirée de l’horaire entre la deuxième semaine de septembre 2021 et la fin de novembre 2021Note de bas de page 33.

[25] Toutefois, le registre des gains pouvait être considéré comme étayant les allégations de la prestataire selon lesquelles elle recevait déjà quelques heures de travail de son employeur. L’employeur a rémunéré la prestataire pour la dernière fois le 13 octobre 2021.

[26] Pour les 12 dernières périodes de paie de la prestataire avant qu’elle cesse de travailler, sa rémunération était beaucoup plus faible qu’elle ne l’avait été pour les périodes de paie précédentes. Il y a eu plusieurs périodes de paie au cours des 24 dernières semaines où elle a gagné 34 $Note de bas de page 34. Autrement dit, la prestataire ne gagnait pratiquement rien même avant la deuxième semaine de septembre 2021, avant qu’elle ait apparemment demandé d’être en mise en [traduction] « suspens ».

[27] La division générale a interrogé la prestataire au sujet de ces gains. La prestataire a expliqué qu’elle recevait moins d’heures parce que les patients (clients) craignaient de contracter la COVID-19. Les patients (clients) ont demandé à son employeur de ne pas envoyer de préposés au service de soutien chez euxNote de bas de page 35.

[28] L’employeur n’a rien dit au sujet des gains et des quarts de travail de la prestataire avant septembre 2021, bien qu’il ait dit que les employés occasionnels comme la prestataire avaient une certaine latitude. Ils pouvaient choisir les quarts de travail qu’ils voulaientNote de bas de page 36.

[29] La prestataire a toujours déclaré qu’elle recevait peu d’heures. La division générale n’a pas contesté le témoignage de la prestataire à l’égard de cet élément de preuve.

[30] La division générale a interrogé la prestataire au sujet de l’affirmation de son employeur à la Commission. L’employeur a dit à la Commission que la prestataire avait la possibilité de prendre des quarts de travail quand elle le voulait. La prestataire a répondu [traduction] « Ce n’est pas ce qu’on m’a dit. On m’a dit que comme, après ce qui estNote de bas de page 37… »

[31] La prestataire était déjà retournée au travail lorsque l’audience de la division générale a eu lieu. Elle avait repris le travail depuis deux mois peut-être. Elle a repris le travail après que la Commission eut rejeté sa demande de prestations d’assurance-emploi et que son employeur l’ait rappeléeNote de bas de page 38.

[32] La division générale a réexaminé sa question concernant l’affirmation de l’employeur selon laquelle il y avait du travail et qu’il n’y avait pas de manque de travail. Le membre a demandé [traduction] « [Votre employeur] dit que vous pouvez prendre plus de quarts de travail si vous le voulez. Que dites-vous à cela? » La prestataire a répondu [traduction] « Cette fois, s’ils m’appellent pour d’autres quarts de travail, d’accord, mais ces jours-là, j’ai 65 ans, mon mari a 67 ans, mes enfants et mes petits-enfants traversaient la COVID-19, et même moi, j’ai eu la COVID-19, alors je suis prudenteNote de bas de page 39 ».

[33] Lorsque la prestataire a déclaré [traduction] « Cette fois, s’ils m’appellent pour d’autres quarts de travail, d’accord », cela laissait croire que l’employeur avait déjà offert des quarts de travail à la prestataire, mais qu’elle les avait refusés. Toutefois, la prestataire a affirmé par la suite que chaque fois que son employeur lui offrait des quarts de travail, elle ne refusait rienNote de bas de page 40.

[34] La division générale n’a pas discuté de ces considérations pour déterminer s’il y avait un manque de travail. La division générale s’est concentrée sur la question de savoir si la prestataire a cessé de travailler en raison de préoccupations pour sa santé et sa sécurité liées à l’exposition à la COVID-19. Cela n’est pas déraisonnable. Après tout, la prestataire s’était concentrée sur les préoccupations pour sa santé et sa sécurité dans son avis d’appel à la division générale et dans son témoignage devant la division générale.

[35] À l’audience devant la division générale, la prestataire a confirmé qu’elle était préoccupée par les dangers de la COVID-19 et le risque pour elle et sa famille. Elle a confirmé avoir été mise en [traduction] « suspens » pour pouvoir obtenir un relevé d’emploi de son employeur, puis des prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 41.

[36] C’est probablement en raison de l’avis d’appel et du témoignage de la prestataire que la division générale n’a pas analysé la preuve qui appuyait ou contredisait les affirmations de la prestataire selon lesquelles un manque de travail avait mené à sa cessation d’emploi.

[37] À tout le moins, la division générale aurait dû déterminer si la prestataire continuait de dire qu’elle avait cessé de travailler en raison d’un manque de travail ou si elle renonçait maintenant à cette position. Après tout, lorsque la prestataire a demandé à la Commission de réexaminer sa décision initiale, elle a écrit ce qui suit :

[traduction]

Il semble y avoir un malentendu au sujet du motif de cessation d’emploi. Plus précisément, mon employeur a commencé à réduire de façon radicale mes heures de travail de sorte qu’elles ne suffisaient plus à subvenir à mes besoins. Lorsque je lui en ai parlé, il m’a indiqué qu’il n’y avait pas assez de travail pour moi et que je devrais présenter une demande d’assurance-emploiNote de bas de page 42.

[38] La question du manque de travail était un problème pour la prestataire aussi récemment qu’à l’étape du réexamen, mais aussi probablement à l’étape de la permission d’en appeler. Dans sa demande à la division d’appel (avis d’appel), la prestataire a écrit ce qui suit :

[traduction]

De mon point de vue, […] une fois que la pandémie a frappé, je n’avais plus de travail, je m’inquiétais pour ma sécurité et j’ai été abandonnée par un système mis en place pour aider en cas de besoin. J’ai fait de mon mieux pour obtenir plus de travail de mon employeur pour subvenir à mes besoins et à ceux de mon mari, en recevant peu de travail et en risquant ma santé, je ne touchais pas un revenu suffisant et je ne pouvais pas effectuer les paiements nécessairesNote de bas de page 43.

[Mis en évidence par la soussignée.]

[39] Si la prestataire n’avait pas dit que le manque de travail était un problème, j’aurais renvoyé la décision à la division générale. Mais la division générale s’est concentrée sur la question des préoccupations de la prestataire pour sa santé et sa sécurité sans examiner ou analyser la question de savoir si la prestataire avait cessé de travailler en raison d’un manque de travail alors qu’elle en avait fait un problème.

Réparation

[40] Comment puis-je corriger l’erreur de la division générale? J’ai deux choixNote de bas de page 44. Je peux substituer ma propre décision ou renvoyer l’affaire à la division générale pour une nouvelle décision. Si je substitue ma propre décision, cela signifie que je peux tirer des conclusions de fait.

[41] La division générale ne s’est pas penchée sur la question du manque de travail. Cela a en partie entraîné certaines lacunes dans la preuve. Les parties devraient avoir la possibilité de combler ou d’expliquer ces lacunes. C’est pourquoi il convient de renvoyer l’affaire à la division générale.

[42] Cela permettra aux parties d’obtenir des renseignements supplémentaires pour expliquer certaines de ces lacunes. Par exemple, les parties peuvent obtenir des relevés d’emploi qui pourraient indiquer s’il y a eu des semaines au cours des 12 dernières périodes de paie où elle n’a pas travailléNote de bas de page 45 ou pourquoi la prestataire a eu si peu d’heures au cours des 12 dernières périodes de paie avant de cesser de travailler.

[43] L’employeur a également indiqué qu’à un certain moment la prestataire a été retirée du service auprès d’un client de l’entreprise. Autrement dit, on ne lui offrait plus de quarts de travail pour offrir du soutien à ce client. Il n’est pas clair si cela s’est produit au cours des 12 dernières périodes de paie, lorsque le nombre d’heures de la prestataire a diminué, mais les relevés d’emploi peuvent répondre à cette question.

Conclusion

[44] L’appel est accueilli et l’affaire est renvoyée à la division générale pour qu’un autre membre rende une nouvelle décision.

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