Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : RD c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1349

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : R. D.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant d’une révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (463860) datée du 12 avril 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Teresa M. Day
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 13 septembre 2022
Personnes présentes à l’audience :
Appelant
Date de la décision : Le 20 septembre 2022
Numéro de dossier : GE-22-1505

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] Le prestataire (qui est l’appelant dans le présent appel) ne peut pas recevoir de prestations d’assurance-emploi, car il a été suspendu de son emploi en raison de sa propre inconduiteNote de bas de page 1.

Aperçu

[3] Le prestataire travaillait comme technicien des équipages pour X (l’employeur). Au moment de sa suspension, l’employeur était sous-traitant d’un projet pour une autre société, X. Le prestataire a travaillé à ce projet. Le 14 octobre 2021, X a mis en place une politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19, mais l’employeur ne l’a pas fait. La politique de X exigeait que toutes les personnes travaillant au projet soient entièrement vaccinées contre la COVID-19, ou qu’elles obtiennent une exemption approuvée pour des motifs médicaux ou religieux, au plus tard le 15 novembre 2021. Toute personne qui ne respectait pas la politique ne serait pas autorisée à travailler sur le projet après le 15 novembre 2021.

[4] Le prestataire a été informé de la politique. Il ne voulait pas se conformer à la politique en se faisant vacciner, alors il a demandé une exemption pour des motifs religieuxNote de bas de page 2. L’employeur a transmis sa demande d’exemption à X, qui l’a refusée. Comme le prestataire n’avait pas été vacciné et qu’il n’avait pas obtenu d’exemption avant la date limite du 15 novembre 2021, l’employeur l’a placé en congé temporaire sans solde.

[5] Le prestataire a demandé des prestations d’assurance-emploi. L’intimée (la Commission) a établi qu’il avait été suspendu de son poste en raison de sa propre inconduiteNote de bas de page 3. Cela signifiait qu’il ne pouvait pas recevoir de prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 4.

[6] Le prestataire a demandé à la Commission de réviser sa décision. Il a admis que l’employeur était un sous-traitant de X, et qu’il a travaillé au projet qui relevait de la politique de vaccination contre la COVID-19 obligatoire de X. Mais il a soutenu que l’employeur aurait dû lui accorder une mesure d’adaptation en lui permettant de travailler de la maisonNote de bas de page 5. La Commission n’a pas été convaincue et a maintenu l’inadmissibilité de sa demande. Il a fait appel de cette décision auprès du Tribunal de la sécurité sociale.

[7] Je dois décider si le prestataire a été suspendu de son emploi en raison de sa propre inconduite. Pour ce faire, je dois examiner la raison de sa suspension, puis établir si la conduite qui a causé sa suspension est une conduite que la loi considère comme une « inconduite » aux fins des prestations d’assurance-emploi.

[8] La Commission affirme que même si le prestataire était au courant de la politique, des délais pour s’y conformer et des conséquences de ne pas le faire, il a fait le choix conscient et délibéré de ne pas s’y conformer après que sa demande d’exemption a été refusée. Il savait qu’il serait placé en congé sans solde s’il faisait ce choix, et c’est ce qui s’est produit. La Commission affirme que ces faits prouvent que le prestataire a été suspendu en raison de sa propre inconduite, ce qui signifie qu’il ne peut pas recevoir de prestations d’assurance-emploi.

[9] Le prestataire n’est pas d’accord. Il affirme qu’il a fait un choix personnel de ne pas se faire vacciner pour des raisons religieuses et qu’il aurait dû bénéficier d’une exemption pour cette raison. Il affirme également que l’employeur n’a pas suivi son propre processus de mesures d’adaptation et que le refus de sa demande de mesures d’adaptation constitue une violation des droits de la personne.

[10] Je suis d’accord avec la Commission. Voici pourquoi.

Questions préliminaires

[11] J’ai initialement envisagé de rejeter l’appel du prestataire de façon sommaire.

[12] La loi dit que je dois rejeter un appel de façon sommaire (c’est-à-dire sans audience) si l’appel n’a aucune chance raisonnable d’être accueilliNote de bas de page 6. Cela signifie que je dois établir s’il est clair et évident à la lecture du dossier que l’appel est voué à l’échecNote de bas de page 7.

[13] Le Règlement sur le Tribunal précise qu’avant de rejeter sommairement un appel, je dois aviser la partie prestataire par écrit et lui accorder un délai raisonnable pour présenter des observationsNote de bas de page 8.

[14] Le 12 juillet 2022, le prestataire a été informé de mon intention de rejeter sommairement son appel (page GD-08 du dossier d’appel). Il a eu jusqu’au 5 août 2022 pour présenter des observations écrites détaillées expliquant pourquoi son appel avait une chance raisonnable de succès.

[15] Après avoir examiné la réponse du prestataire (page GD-09 du dossier d’appel), j’ai décidé de ne pas rejeter sommairement son appel et j’ai plutôt choisi de tenir une audience afin de clarifier les éléments de preuve et les observations du prestataire. L’audience a eu lieu par téléconférence le 13 septembre 2022.

[16] Ceci est ma décision sur le fond de son appel.

Question en litige

[17] Le prestataire a-t-il été suspendu en raison de sa propre inconduite?

Analyse

[18] Pour répondre à cette question, je dois décider de deux choses. D’abord, je dois établir pourquoi le prestataire a été suspendu. Ensuite, je dois vérifier si la Loi sur l’assurance-emploi considère cette raison comme une inconduite.

Question en litige no 1 : Pourquoi le prestataire a-t-il été suspendu de son emploi?

[19] Le prestataire a été suspendu parce qu’il a refusé de se faire vacciner après que sa demande d’exemption pour motifs religieux a été refusée, comme l’exige la politique applicable à toutes les personnes participant au projet sur lequel il travaillait.

[20] L’employeur a déclaré ce qui suit à la Commission :

  • Le prestataire a été mis en congé sans solde à la demande de l’employeur en raison du non-respect de la politique de vaccination de XNote de bas de page 9.
  • X est le client de l’employeur. X est lui-même un entrepreneur du gouvernement du Canada et a adopté la politique du gouvernement fédéral en matière de vaccinationNote de bas de page 10. En tant que sous-traitant de X, l’employeur devait suivre toutes les politiques de X afin d’être conforme sur ses lieux de travailNote de bas de page 11.
  • Cela signifie que tous les membres du personnel de l’employeur qui travaillaient au projet, à l’exception des personnes qui avaient obtenu des exemptions approuvées pour motifs médicaux ou religieux, devaient être entièrement vaccinés contre la COVID-19 au plus tard le 15 novembre 2021Note de bas de page 12.
  • Le prestataire a travaillé au projet et était assujetti à cette politique.
  • Le 9 novembre 2021, après que sa demande d’exemption a été refusée par X, l’employeur a envoyé au prestataire une lettre lui rappelant qu’il devait être entièrement vacciné au plus tard le 15 novembre 2021 pour avoir [traduction] « un accès continu au site du projetNote de bas de page 13 ».
  • La lettre précisait que le prestataire serait mis en congé sans solde à compter du 15 novembre 2021 parce que sa demande de mesures d’adaptation avait été [traduction] « rejetée par le client » et qu’il n’était donc pas [traduction] « en mesure de travailler sur le site fédéral de XNote de bas de page 14 ».
  • La lettre disait également que si le prestataire était entièrement vacciné, il devait aviser l’employeur de son intention de retourner au travail au moins 14 jours avant la date prévue de son retour au travailNote de bas de page 15.
  • En date du 19 janvier 2022, le prestataire était toujours en congé sans soldeNote de bas de page 16.

[21] Le prestataire ne conteste rien de cela.

[22] Il a déclaré ce qui suit à la CommissionNote de bas de page 17 :

  • Son employeur l’a placé en congé temporaire parce qu’ils ne lui permettront pas de travailler sans être vacciné.
  • Il était au courant de la politique de vaccination obligatoire régissant le lieu de travail et il a manifestement compris qu’il serait suspendu sans solde s’il n’était pas vacciné, ou s’il n’obtenait pas une exemption approuvée avant la date limite du 15 novembre 2021.
  • Il a demandé une exemption pour motifs religieux, mais ils n’ont rien voulu entendre.

[23] À l’audience, le prestataire a déclaré ce qui suit :

  • L’employeur n’avait pas de politique de vaccination. L’employeur a plutôt demandé aux membres du personnel qui travaillaient au projet du client de suivre la politique de vaccination de celui-ci.
  • L’employeur a émis une note de service à ce sujet le 19 octobre 2021Note de bas de page 18. Il a reçu cette note de service.
  • Il travaillait au projet du client et a compris que l’employeur adoptait la politique de X (dont une copie était jointe à la note de service) pour tout le monde qui travaillait au projet.
  • Il a demandé une exemption pour motifs religieux, mais sa demande a été rejetée.
  • Il ne veut pas se faire vacciner pour des raisons religieuses.
  • Après la date limite de vaccination, il a été placé en congé sans solde.
  • Il n’est pas retourné au travail.

[24] J’estime que la preuve démontre que le prestataire a été suspendu de son emploi parce qu’il a refusé de se faire vacciner après que sa demande d’exemption pour motifs religieux a été refusée, comme l’exige la politique régissant son emploi.

Question en litige no 2 : La raison de sa suspension est-elle une inconduite au titre de la loi?

[25] Oui, la raison de la suspension du prestataire est une inconduite aux fins des prestations d’assurance-emploi.

[26] Pour être une inconduite au sens de la loi, il faut que la conduite soit délibérée. Cela signifie que la conduite était consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas de page 19. L’inconduite comprend également les comportements qui sont si imprudents (ou insouciants ou négligents) qu’ils sont presque délibérésNote de bas de page 20 (ou qui démontrent une indifférence délibérée à l’égard des répercussions de leurs actes sur l’exécution de leur travail).

[27] Il n’est pas nécessaire que la partie prestataire ait eu une intention coupable (c’est-à-dire qu’elle ait voulu faire quelque chose de mal) pour que son comportement soit considéré comme une inconduite au sens de la loiNote de bas de page 21.

[28] Il y a inconduite si la partie prestataire savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait nuire à l’exécution de ses fonctions envers son employeur et qu’en conséquence, sa suspension était une possibilité bien réelleNote de bas de page 22.

[29] La Commission doit prouver que le prestataire a été suspendu de son emploi pour inconduiteNote de bas de page 23. Elle s’appuie sur les preuves que les représentantes et représentants de Service Canada obtiennent de l’employeur et de la partie prestataire pour le faire.

[30] Le prestataire soutient qu’il a suivi les politiques et les directives de l’employeur pour demander une mesure d’adaptation, de sorte que sa conduite ne peut être considérée comme volontaireNote de bas de page 24. Je ne suis pas d’accord.

Preuve de l’employeur

[31] La note de service du 19 octobre 2021 émise par l’employeur (à la page DG3-87 du dossier d’appel) dit ce qui suit :

  • L’employeur [traduction] « demeure déterminé à respecter les exigences des clients » concernant les politiques de vaccination obligatoire contre la COVID-19.
  • Le client de l’employeur, X, a mis en œuvre une politique de vaccination obligatoire à compter du 14 octobre 2021 et a exigé que tous les membres du personnel, les entrepreneurs, les sous-traitants et les visiteurs s’y conforment.
  • L’employeur s’attendait à ce que tous les membres de son personnel, les entrepreneurs, les sous-traitants et les visiteurs respectent la même politique.
  • Tout membre du personnel nécessitant des mesures d’adaptation pour des raisons médicales ou autres motifs protégés était responsable d’en faire la demande conformément à la politique de l’employeur sur les mesures d’adaptation raisonnables.
  • Les demandes de mesures d’adaptation seraient traitées au cas par cas et conformément aux lois applicables en matière de droits de la personne.

[32] La politique de X abordait la question des mesures d’adaptation pour les personnes qui ne peuvent pas être vaccinées. Elle disait ce qui suit :

[traduction]
« L’entreprise s’est engagée à offrir un milieu de travail exempt de discrimination et de harcèlement illicites, conformément à la Loi canadienne sur les droits de la personne. L’entreprise prendra des mesures d’adaptation pour les personnes visées en fonction de motifs liés aux droits de la personne protégés jusqu’à la limite de la contrainte excessive.

Les personnes visées qui cherchent à obtenir des mesures d’adaptation sont tenues par la loi de participer au processus de mesures d’adaptation, ce qui comprend, sans toutefois s’y limiter, fournir des renseignements pour établir l’existence d’un motif protégé et des restrictions connexes. L’entreprise peut exiger une preuve raisonnable de l’existence et de l’applicabilité d’un motif protégé au titre de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

Pour discuter de mesures d’adaptation, les personnes visées admissibles doivent communiquer avec leur gestionnaire immédiat ou les Ressources humaines. » (page GD3-90 du dossier d’appel)

[33] L’employeur a dit à la Commission qu’il irait seulement de l’avant avec une demande de mesures d’adaptation raisonnables au titre de sa politique et de son processus si la demande d’exemption était d’abord approuvée par le clientNote de bas de page 25.

[34] X n’a pas approuvé la demande d’exemption du prestataireNote de bas de page 26.

[35] La conseillère ou le conseiller juridique de l’employeur lui a recommandé de présenter toutes les demandes de mesures d’adaptation au client, car il était lié par la politique de celui-ciNote de bas de page 27.

[36] C’est la politique du client qui déterminait si une demande de mesures d’adaptation était acceptée ou non, et selon la décision du client, l’employeur devait soit examiner les mesures d’adaptation, soit préparer la lettre de congé. C’était la pratique de l’employeur dans tous ses lieux de travail.

[37] L’employeur a dit au prestataire que les mesures d’adaptation pouvaient seulement être approuvées par le client, et celui-ci a refusé la sienne. L’employeur a également dit au prestataire de communiquer avec sa représentante syndicale ou son représentant syndical parce qu’il n’avait pas le pouvoir d’approuver les mesures d’adaptationNote de bas de page 28.

Preuve du prestataire

[38] Le prestataire soutient que son refus d’être vacciné après le rejet de sa demande d’exemption n’est pas une inconduite parce que l’employeur n’a pas suivi son propre processus et sa propre politique d’adaptation.

[39] Il dit que si l’employeur avait agi correctement, il aurait obtenu des mesures d’adaptation pour motifs religieux au lieu d’être placé en congé sans solde.

[40] À l’audience, il a déclaré ce qui suit :

  • L’employeur n’a pas suivi son propre processus de mesures d’adaptation, tel qu’il est décrit au paragraphe 3 de la note de service du 19 octobre 2021 (page GD3-87 du dossier d’appel).
  • Ils ont plutôt transmis sa demande de mesures d’adaptation à X pour qu’il en décide.
  • Il a rempli le formulaire X (pages GD3-32 et GD3-33 du dossier d’appel), à la demande de l’employeur. L’employeur l’a apporté à X, mais celui-ci l’a [traduction] « rejeté » et n’a pas poussé plus loin le processus de demande de mesures d’adaptation.
  • Il n’y a eu aucune interaction pour établir si sa demande de mesures d’adaptation liées aux droits de la personne était raisonnable ou non.
  • X a fait référence au site Web du Tribunal des droits de la personne de l’Ontario pour dire que sa demande de mesures d’adaptation n’était pas valide. Mais il croit que le site Web dit en fait le contraire, à savoir qu’il aurait dû obtenir des mesures d’adaptation pour motifs religieux.
  • De plus, sa situation est régie par la Commission canadienne des droits de la personne, et non par l’organisme provincial des droits de la personne.
  • La politique d’adaptation de l’employeur exigeait [traduction] « plus de discussions » et un [traduction] « processus approprié ».
  • S’il y avait eu un dialogue, comme il l’a suggéré dans son formulaireNote de bas de page 29, il aurait été clair a) qu'il présentait une demande de mesures d’adaptation fondée sur les droits de la personne et b) qu'il satisfaisait aux exigences d’approbation de sa demande d’exemption de vaccination pour des motifs religieux.
  • Lorsqu’il a vu la réponse de X, elle disait qu’il demandait une exemption pour motifs religieux dans le cadre de « sa propre religion » Note de bas de page 30. C’était une hypothèse erronée au sujet de ses convictions religieuses, mais on ne lui a jamais demandé plus d’information ou de répondre.
  • Il a consulté son syndicat au sujet du refus de sa demande de mesures d’adaptation, mais ils ont refusé de déposer un grief contre le fait qu’il avait été placé en congé sans solde. Ils ont refusé de déposer un grief sur [traduction] « tout ce qui concerne la politique relative à la COVID-19 ».
  • Il avait compris que la politique de X disait que s’il n’était pas approuvé pour une exemption et qu’il demeurait non vacciné après le 15 novembre 2021, il serait mis à pied sans salaire.
  • Cependant, il ne lui est pas venu à l’esprit qu’il ne serait pas approuvé pour une exemption pour motifs religieux.
  • Il a supposé que sa demande d’exemption suivrait le processus de l’employeur pour les mesures d’adaptation et qu’on lui accorderait des mesures d’adaptation, ou du moins qu’on lui fournirait une décision expliquant pourquoi sa demande a été refusée et qu’il y aurait un processus pour la contester. Mais aucune décision officielle n’a été rendue, et il n’y a eu aucune discussion sur les raisons pour lesquelles son exemption pour motifs religieux a été refusée.
  • D’après les recherches qu’il a effectuées [traduction] « après le fait », il croit qu’il aurait dû bénéficier de mesures d’adaptation au titre de la politique de l’employeur.
  • En juin 2022, il a déposé une plainte contre l’employeur auprès de la Commission canadienne des droits de la personne.

[41] Il n’appartient pas au Tribunal de décider si la politique de l’employeur était raisonnable ou si l’employeur aurait dû accepter la demande d’exemption ou de mesures d’adaptation du prestataire, ou si la sanction de la suspension était trop sévèreNote de bas de page 31. Le Tribunal doit se concentrer sur la conduite qui a entraîné la suspension du prestataire et décider s’il s’agit d’une inconduite au titre de la Loi sur l’assurance-emploi.

[42] J’ai déjà conclu que la conduite qui a mené à la suspension du prestataire était son refus d’être vacciné après que sa demande d’exemption pour motifs religieux a été refusée, comme l’exige la politique régissant son emploi.

[43] La preuve non contestée obtenue de l’employeur et du prestataire me permet de tirer les conclusions supplémentaires suivantes :

  1. a) Le prestataire a été informé de la politique de vaccination obligatoire et il a eu le temps de s’y conformer.
  2. b) Son refus de se conformer à la politique après le rejet de sa demande d’exemption était délibéré et intentionnel. Son refus était donc volontaire.
  3. c) Il savait que son refus pouvait entraîner sa suspension de son emploi. Cela signifie qu’il a accepté les conséquences possibles.
  4. d) Son refus de se conformer à la politique était la cause directe de sa suspension.

[44] L’employeur a le droit d’établir des politiques en matière de sécurité au travail. De plus, en tant que sous-traitant, l’employeur est tenu de respecter toutes les politiques en milieu de travail de son client afin d’être conforme sur les lieux de travail de celui-ci. Cela comprend naturellement de demander au client de décider des demandes d’exemption ou de mesures d’adaptation.

[45] En adoptant la politique de X, l’employeur exerçait son droit d’établir une politique pour assurer la santé et la sécurité du personnel en milieu de travail pendant la pandémie.

[46] Le prestataire a toujours eu le droit de refuser de se conformer à la politique.

[47] Toutefois, en choisissant de ne pas se faire vacciner après le rejet de sa demande d’exemption, il a pris une décision personnelle qui a entraîné des conséquences prévisibles pour son emploi.

[48] Il est bien établi qu’une violation délibérée de la politique d’un employeur est considérée comme une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 32. Mes conclusions appuient également la conclusion selon laquelle le refus volontaire du prestataire de se faire vacciner conformément à la politique régissant son emploi constitue une inconduite au titre de la Loi sur l’assurance-emploi.

[49] Le prestataire affirme que sa conduite n’était pas volontaire parce qu’il a suivi les politiques et les directives de l’employeur pour demander une mesure d’adaptation. Ce n’est pas un argument convaincant.

[50] Le prestataire avait peut-être certaines attentes à l’égard du processus de demande de mesures d’adaptation et espérait obtenir une exemption pour motifs religieux à la politique de vaccination obligatoire avant la date limite du 15 novembre 2021. Mais cela ne diminue en rien le fait que, le 9 novembre 2021, il savait que sa demande d’exemption avait été rejetée et qu’il avait reçu une lettre de l’employeur disant qu’il serait placé en congé sans solde s’il refusait de fournir une preuve de vaccination avant la date limite de la politique. Il a tout de même choisi de ne pas se conformer à la politique après que sa demande d’exemption a été rejetée, et ce choix rend sa conduite volontaire.

[51] Le prestataire estime qu’il avait un [traduction] « droit légal » à une exemption pour motifs religieux (à la politique de vaccination obligatoire régissant son emploi) et à une mesure d’adaptation qui lui aurait permis de continuer à travailler une fois le processus d’adaptation de l’employeur terminéNote de bas de page 33. Il soutient que le refus de sa demande d’exemption et le processus de demande de mesures d’adaptation insuffisant entrepris dans son cas ont porté atteinte à ses droits individuels et constitutionnelsNote de bas de page 34. Il affirme que l’employeur n’a pas veillé à ce que sa demande (qui devait être identifiée comme un employé non vacciné travaillant avec une exemption pour motifs religieux) soit traitée conformément à la législation applicable en matière de droits de la personneNote de bas de page 35. Il affirme également que l’employeur ne l’a pas traité conformément aux lois sur les normes d’emploiNote de bas de page 36.

[52] Je n’ai pas le pouvoir de décider si l’employeur a porté atteinte aux droits du prestataire en le plaçant en congé obligatoire sans solde. Je n’ai pas non plus le pouvoir de décider si le processus de demande de mesures d’adaptation de l’employeur était approprié ou si l’employeur aurait pu offrir des mesures d’adaptation au prestataire d’une autre façon.

[53] Le recours du prestataire pour toutes ses plaintes contre l’employeur est de poursuivre ses réclamations devant un tribunal ou un autre tribunal qui traite de ces questions.

[54] Par conséquent, je ne tire aucune conclusion à l’égard de l’une ou l’autre de ces allégations, et le prestataire demeure libre de présenter ces arguments devant les organismes décisionnels appropriés et d’y demander réparationNote de bas de page 37.

[55] Cependant, aucun des arguments du prestataire (résumés aux paragraphes 49 à 51 ci-dessus) ne change le fait que la Commission a prouvé, selon la prépondérance des probabilités, qu’il a été suspendu en raison d’une conduite qui est considérée comme une inconduite au titre de la Loi sur l’assurance-emploi.

[56] Cela signifie qu’il est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Conclusion

[57] La Commission a prouvé que le prestataire a été suspendu de son emploi en raison de sa propre inconduite. Par conséquent, il est inadmissible aux prestations d’assurance-emploi.

[58] L’appel est rejeté.

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