Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : SB c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1391

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de permission de faire appel

Partie demanderesse : S. B.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision rendue par la division générale le 14 octobre 2022 (GE-22-2962)

Membre du Tribunal : Melanie Petrunia
Date de la décision : Le 20 novembre 2022
Numéro de dossier : AD-22-793

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Décision

[1] La permission de faire appel est refusée. L’appel n’ira donc pas de l’avant.

Aperçu

[2] La demanderesse, S. B. (prestataire), a demandé et reçu des prestations de maternité, puis des prestations parentales de l’assurance-emploi. Dans son formulaire de demande, elle a sélectionné les prestations parentales prolongées. Cette option permet de recevoir des prestations à un taux moins élevé sur une plus longue période.

[3] La prestataire affirme qu’elle voulait recevoir les prestations parentales standards. Elle prévoyait prendre un an de congé au total, mais elle a choisi par erreur la mauvaise option dans le formulaire de demande.

[4] Quand elle a commencé à toucher des prestations parentales prolongées, la prestataire a communiqué avec la défenderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, pour lui demander de passer à l’option standard.

[5] La Commission a refusé la requête de la prestataire. Elle lui a expliqué qu’il était trop tard pour changer d’option, car les premières prestations parentales avaient déjà été versées. La prestataire a demandé à la Commission de réviser sa décision. Cette dernière a maintenu sa décision.

[6] La prestataire a fait appel à la division générale du Tribunal. Son appel a été rejeté. La division générale a conclu que la prestataire avait choisi les prestations parentales prolongées et que son choix était irrévocable (impossible à changer). La prestataire veut maintenant porter la décision de la division générale en appel devant la division d’appel du Tribunal. Elle a toutefois besoin d’une permission pour que son dossier aille de l’avant.

[7] Je dois décider si la division générale a commis une erreur révisable qui pourrait donner à l’appel une chance de succès. Je refuse la permission de faire appel puisque l’appel de la prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Question en litige

[8] La prestataire soulève-t-elle une erreur révisable que la division générale aurait commise et qui pourrait conférer à l’appel une chance de succès?

Analyse

[9] Le critère juridique que la prestataire doit remplir pour une demande de permission de faire appel est peu exigeantNote de bas page 1 : y a-t-il un moyen (argument) qui permettrait de soutenir que l’appel a une chance de succès?

[10] Pour trancher cette question, je me suis concentrée sur la question de savoir si la division générale avait peut-être fait une ou plusieurs des erreurs pertinentes (appelées « moyens d’appel ») qui figurent dans la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement socialNote de bas page 2.

[11] Un appel n’est pas une nouvelle occasion de débattre de la demande originale. En fait, je dois plutôt décider si :

  1. a) la procédure de la division générale était inéquitable;
  2. b) la division générale n’a pas tranché une question alors qu’elle aurait dû le faire ou si elle a tranché une question alors qu’elle n’aurait pas dû le faire;
  3. c) la division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importanteNote de bas page 3;
  4. d) la division générale a fait une erreur de droitNote de bas page 4.

[12] Avant que l’appel de la prestataire puisse passer à la prochaine étape, je dois être convaincue qu’au moins un des moyens d’appel ci-dessus lui donne une chance raisonnable de succès. Par « une chance raisonnable de succès », on entend qu’en faisant valoir ses arguments, la prestataire pourrait gagner sa cause. Je dois aussi tenir compte des autres moyens d’appel possibles, ceux que la prestataire n’a pas cernés avec précisionNote de bas page 5.

Contexte

[13] Il y a deux types de prestations parentales :

  • les prestations parentales standards – le taux des prestations s’élève à 55 % de la rémunération hebdomadaire assurable des prestataires, jusqu’à concurrence d’un montant maximal, et un parent peut toucher des prestations pendant un maximum de 35 semaines;
  • les prestations parentales prolongées – le taux des prestations s’élève à 33 % de la rémunération hebdomadaire assurable des prestataires, jusqu’à concurrence d’un montant maximal, et un parent peut toucher des prestations pendant un maximum de 61 semaines.

[14] Selon la Loi sur l’assurance-emploi, il faut choisir l’option standard ou l’option prolongée quand on présente la demande de prestations parentales et le choix est irrévocable dès que des prestations sont verséesNote de bas page 6.

[15] La prestataire a demandé des prestations de maternité et des prestations parentales. Dans son formulaire de demandeNote de bas page 7, elle a écrit que son dernier jour de travail était le 31 octobre 2021 et qu’elle prévoyait retourner au travail le 1er novembre 2022. Son relevé d’emploi indiquait la même date de retour au travail.

[16] La prestataire a précisé qu’elle voulait recevoir les prestations parentales immédiatement après les prestations de maternité. Elle a choisi les prestations parentales prolongées. À la question sur le nombre de semaines pendant lesquelles elle désirait recevoir des prestations, elle a choisi 52 semaines dans le menu déroulantNote de bas page 8.

[17] Le premier versement de prestations parentales prolongées a été traité le 11 mars 2022. Le 16 mars 2022, la prestataire a communiqué avec la Commission pour demander le remplacement des prestations prolongées par les prestations standardsNote de bas page 9.

[18] La Commission a refusé la requête de la prestataire. Elle lui a expliqué qu’il était trop tard pour modifier son choix parce qu’elle avait déjà reçu des prestations parentales. La prestataire a demandé à la Commission de réviser sa décision. Cette dernière a maintenu sa décision.

Décision de la division générale

[19] La division générale a conclu que la prestataire a choisi les prestations parentales prolongées dans son formulaire de demandeNote de bas page 10. La division générale s’est penchée sur son témoignage et a admis que son choix était une erreur. Elle a reconnu que la prestataire avait l’intention de retourner au travail après un congé de maternité d’un an et qu’elle n’avait jamais prévu de recevoir les prestations parentales prolongéesNote de bas page 11.

[20] La division générale a examiné la jurisprudence récente de la Cour d’appel fédérale, qui a clarifié le fait que le choix fait par les prestataires ne peut plus être modifié après le versement des prestationsNote de bas page 12. Elle a conclu que la prestataire avait voulu passer à l’option standard après avoir reçu des prestations parentales. Comme il y avait déjà eu un premier versement, la division générale a conclu que le choix de la prestataire ne pouvait pas être modifié, même s’il résultait d’une erreurNote de bas page 13.

La division générale n’a fait aucune erreur révisable qui aurait pu donner à l’appel une chance de succès

[21] La prestataire dit que c’est son premier bébé, alors elle a fait une erreur en remplissant le formulaire de demande. Elle explique qu’elle s’est rendu compte de son erreur seulement quand son paiement a diminué, quand elle a commencé à toucher les prestations parentales. Elle n’aurait donc pas pu modifier son choix avant ce moment‑làNote de bas page 14.

[22] La prestataire fait valoir que la date de retour au travail qui figure dans son formulaire de demande et dans son relevé d’emploi ne concorde visiblement pas avec l’option prolongée qui est sélectionnée. Elle ajoute que le système a des failles et que sa demande de prestations aurait dû être signalée. Elle fait aussi valoir que le choix n’est pas irréversible parce qu’elle peut le porter en appelNote de bas page 15.

[23] Je juge que les arguments de la prestataire n’ont aucune chance raisonnable de succès. La prestataire a expliqué à la division générale qu’elle avait fait une erreur dans son formulaire, ce que la décision reconnaîtNote de bas page 16.

[24] La division générale mentionne une décision rendue récemment par la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Canada (Procureur général) v Hull (en anglais seulement). Dans cette affaire, la prestataire avait aussi demandé 52 semaines de prestations parentales prolongées, car elle voulait recevoir des prestations de maternité et des prestations parentales au total pendant un an. La CourNote de bas page 17 a confirmé le principe voulant que [traduction] « les prestataires qui fondent leur choix sur une mauvaise compréhension du régime de prestations parentales n’ont aucun recours possible en droit ».

[25] Dans la décision Hull, la Cour a déclaré ceci :

[traduction]
La question de droit aux fins de l’article 23(1.1) de la Loi sur l’assurance-emploi est la suivante : le mot « choisit » désigne-t‑il ce que les prestataires indiquent comme choix de prestations parentales dans le formulaire de demande ou désigne-t‑il ce que les prestataires « avaient l’intention » de choisirNote de bas page 18?

[26] La Cour a conclu que le choix des prestataires est en fait l’option choisie dans leur formulaire de demande, et non l’option que les prestataires avaient peut-être l’intention de choisirNote de bas page 19. Elle a aussi confirmé qu’une fois que le versement des prestations parentales a commencé, le choix ne peut pas être révoqué, que ce soit par les prestataires, la Commission ou le TribunalNote de bas page 20.

[27] On ne peut pas soutenir que la division générale a ignoré le fait que le choix de la prestataire était une erreur. Lorsque la prestataire souligne que le système aurait dû signaler les renseignements contradictoires dans son formulaire de demande, elle ne cerne aucune erreur qui pourrait relever de la division générale. Cette dernière avait l’obligation d’appliquer la loi, et c’est ce qu’elle a fait.

[28] On ne peut pas non plus soutenir que la division générale a fait une erreur lorsqu’elle a conclu que le choix est révocable [sic] parce que la prestataire peut le porter en appel. Le fait que la prestataire ait le droit de faire appel des décisions de la Commission ou du Tribunal dont elle n’est pas satisfaite n’a rien à voir avec la question en litige dans son appel. La Cour d’appel fédérale s’est penchée sur un appel dont les circonstances ressemblaient à celles de la prestataire. Elle a conclu que le choix, même s’il constitue une erreur, est irrévocable dès que des prestations sont verséesNote de bas page 21.

[29] En plus d’avoir examiné les arguments de la prestataire, je me suis aussi penchée sur les autres moyens d’appel. La prestataire n’a signalé aucune injustice procédurale de la part de la division générale et je ne vois aucune preuve que la procédure ait été inéquitable. On ne peut pas soutenir que la division générale a fait une erreur de compétence. Je n’ai relevé aucune erreur de droit.

[30] La prestataire n’a cerné aucune erreur que la division générale aurait commise et qui pourrait donner à l’appel une chance de succès. Par conséquent, je refuse la permission de faire appel.

Conclusion

[31] La permission de faire appel est refusée. Cela met donc un terme à l’appel.

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