Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : BT c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1283

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : B. T.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (469016) datée du 9 mai 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Audrey Mitchell
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience  : Le 20 septembre 2022
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 26 septembre 2022
Numéro de dossier : GE-22-1819

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Décision

[1] L’appel est rejeté avec des modifications. Le Tribunal n’est pas d’accord avec le prestataire.

[2] Le prestataire n’a pas démontré qu’il était disponible pour travailler. Par conséquent, il ne peut pas recevoir de prestations d’assurance‑emploi.

Aperçu

[3] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé que le prestataire était inadmissible aux prestations régulières d’assurance-emploi à compter du 13 février 2022 parce qu’il n’était pas disponible pour travailler. Pour recevoir des prestations régulières, les prestataires doivent être disponibles pour travailler. La disponibilité est une exigence continue. Il faut donc que les prestataires cherchent un emploi.

[4] Je dois décider si le prestataire a prouvé qu’il était disponible pour travailler. Il doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’il était disponible pour travailler.

[5] La Commission affirme que le prestataire n’est pas disponible pour travailler parce qu’il n’a pas fait d’efforts raisonnables pour trouver un emploi convenable et qu’il a refusé une offre d’emploi convenable.

[6] Le prestataire n’est pas d’accord et affirme que lorsqu’il a été mis à pied, on lui a garanti qu’il serait rappelé au travail. Il affirme qu’il a été honnête avec la Commission et qu’il se sent puni alors que d’autres personnes mentent en disant qu’elles cherchent un emploi sans avoir l’intention de le faire.

Question en litige

[7] Le prestataire était-il disponible pour travailler?

Analyse

[8] Il y a deux articles de loi qui exigent que les prestataires démontrent leur disponibilité pour travailler. La Commission a décidé que le prestataire était inadmissible selon les deux articles. Il doit donc remplir les critères des deux articles pour recevoir des prestations.

[9] Premièrement, la Loi sur l’assurance-emploi dit qu’une personne qui demande des prestations doit prouver qu’elle fait des « démarches habituelles et raisonnables » pour trouver un emploi convenableNote de bas page 1. Le Règlement sur l’assurance-emploi prévoit des critères qui aident à expliquer ce qui constitue des « démarches habituelles et raisonnablesNote de bas page 2 ».

[10] La Commission explique qu’elle a déclaré le prestataire inadmissible au titre de l’article 50 de la Loi et de l’article 9.001 du Règlement parce qu’il n’a pas réussi à prouver sa disponibilité pour travailler. Dans ses observations, la Commission affirme que pour prouver sa disponibilité, le prestataire peut être tenu de démontrer qu’il a fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi convenable.

[11] J’estime que la décision d’inadmissibilité rendue par la division d’appel au titre de l’article 50 est convaincante. La décision dit que la Commission peut demander à une personne qui veut des prestations de prouver qu’elle a fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi. La Commission peut déclarer la personne inadmissible si celle-ci ne répond pas à sa demande. Elle doit cependant demander à la personne de fournir une telle preuve et lui dire quel genre de preuve lui permettra de répondre à ses exigencesNote de bas page 3.

[12] Les notes de la Commission ne mentionnent pas si elle a demandé au prestataire de prouver sa disponibilité en présentant un registre détaillé de ses recherches d’emploi. J’estime donc qu’il n’est pas inadmissible au titre de cette partie de la loi.

[13] Deuxièmement, la Loi prévoit aussi que la personne doit prouver qu’elle est « capable de travailler et disponible à cette fin », mais incapable d’obtenir un emploi convenableNote de bas page 4. Selon la jurisprudence, il y a trois éléments que la personne doit prouver pour démontrer qu’elle est « disponible » en ce sensNote de bas page 5. Je vais examiner ces éléments ci‑dessous.

[14] La Commission a décidé que le prestataire était inadmissible aux prestations parce qu’il n’était pas disponible pour travailler aux termes des deux articles de loi.

[15] Je vais maintenant examiner moi-même ces deux articles pour vérifier si le prestataire était disponible pour travailler.

Capable de travailler et disponible à cette fin

[16] La jurisprudence établit trois éléments que je dois examiner pour décider si le prestataire était capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable de trouver un emploi convenable. Le prestataire doit prouver les trois choses suivantesNote de bas page 6 :

  1. a) qu’il voulait retourner au travail aussitôt qu’un emploi convenable serait offert;
  2. b) qu’il a fait des efforts pour trouver un emploi convenable;
  3. c) qu’il n’a pas établi de conditions personnelles qui pouvaient limiter indûment (c’est-à-dire trop) ses chances de retourner au travail.

[17] Lorsque j’examine chacun de ces éléments, je dois prendre en considération l’attitude et la conduite du prestataireNote de bas page 7.

Désir de retourner au travail

[18] Le prestataire n’a pas démontré qu’il voulait retourner au travail aussitôt qu’un emploi convenable serait offert.

[19] Le prestataire a été mis à pied. Il a expliqué à l’audience que lui et d’autres personnes avaient été embauchés pour remplacer des employés qui devaient prendre leur retraite une fois qu’un nouveau contrat serait en place. En raison d’un retard dans les négociations du contrat, le prestataire et d’autres personnes avec lesquelles il avait été embauché ont été mises à pied.

[20] Le prestataire a affirmé que son délégué syndical lui avait dit que son emploi était protégé et qu’il n’était donc pas logique pour lui de postuler pour un emploi ailleurs. Le délégué syndical lui a dit qu’il serait rappelé au travail une fois que le contrat serait réglé. En fin de compte, le syndicat a déposé un grief pour que le prestataire et ses collègues soient rappelés au travail. Le prestataire est retourné au travail le 6 juin 2022.

[21] J’ai trouvé que le prestataire était très crédible. Son témoignage concordait avec les déclarations qu’il a faites à la Commission, malgré l’incidence qu’elles ont eue sur sa demande de prestations. Je conclus d’après son témoignage qu’il voulait travailler. La lettre de son employeur disant qu’il ne s’est jamais absenté du travail au cours du quatrième trimestre de 2021 appuie cette conclusion.

[22] J’admets que le prestataire voulait reprendre son emploi. Compte tenu de ce que son délégué syndical lui a dit et des négociations contractuelles qui étaient en cours, je comprends qu’il ait attendu que cela se produise. La loi exigeait cependant qu’il recherche un emploi convenable, pas seulement qu’il attende d’être rappelé à son ancien emploi.

[23] Le prestataire a commencé à chercher du travail après que la Commission ait rejeté sa demande de prestations. Il dit avoir postulé pour deux emplois vers la fin du mois de mars 2022. J’en discuterai plus en détail ci-dessous, mais je ne pense pas que cela corresponde aux actions et à l’attitude d’une personne qui veut retourner au travail aussitôt qu’un emploi convenable lui est offert.

[24] Je juge que le prestataire aurait pu trouver un autre emploi pendant ses presque quatre mois de mise à pied s’il l’avait voulu. Il a dit à la Commission qu’on lui avait offert un emploi, mais qu’il ne pouvait pas l’accepter en raison des heures de travail.

[25] Aux fins de la Loi sur l’assurance-emploi, j’estime que le prestataire n’a pas prouvé qu’il voulait retourner au travail aussitôt qu’un emploi convenable serait offert.

Efforts pour trouver un emploi convenable

[26] Le prestataire n’a pas fait assez d’efforts pour trouver un emploi convenable.

[27] Comme il a été mentionné ci-dessus, le prestataire a déclaré qu’il n’avait pas cherché de travail jusqu’à ce que la Commission rejette sa demande de prestations. Il a déclaré avoir reçu des courriels de la Commission au sujet d’emplois de messager. Les efforts du prestataire pour trouver un nouvel emploi consistaient notamment à recevoir ces courriels et à chercher un emploi sur un site Internet. Il a ajouté qu’il ne savait pas qu’il devait chercher constamment un emploi.

[28] Le formulaire de demande de prestations mentionne que les prestataires qui demandent des prestations régulières d’assurance-emploi doivent chercher activement un emploi convenable et être disposés à accepter un tel emploi lorsque celui-ci est offert. J’ai demandé au prestataire s’il avait lu cela. Il a dit qu’il ne se souvient pas de l’avoir lu.

[29] Je n’ai aucune raison de douter du témoignage du prestataire selon lequel il a commencé à chercher un autre emploi et a postulé pour deux emplois à la fin de mars 2022. Je juge toutefois que cela n’est pas suffisant pendant les presque quatre mois où il n’a pas travaillé. Encore une fois, je comprends que le prestataire suivait les conseils de son délégué syndical, mais je ne trouve pas que ses efforts sont suffisants pour répondre aux exigences du deuxième élément.

Limitation indue des chances de retourner au travail

[30] Le prestataire a bel et bien établi des conditions personnelles qui ont peut-être limité indûment ses chances de retourner au travail.

[31] J’estime que le prestataire a restreint sa disponibilité en ne faisant tardivement que peu d’efforts pour chercher du travail et en attendant de retourner à son emploi.

[32] Comme il a été mentionné ci-dessus, le prestataire a suivi les conseils de son délégué syndical et n’a pas cherché de travail au début. On lui a garanti qu’il reprendrait son emploi une fois le contrat réglé. Il n’a postulé que pour deux emplois en près de quatre mois, mais seulement après que la Commission ait rejeté sa demande de prestations.

[33] J’estime que la raison pour laquelle le prestataire n’a pas fait beaucoup d’efforts pour chercher un emploi est logique compte tenu de sa situation. Je juge cependant qu’en attendant que son ancien employeur le rappelle au travail, il a établi une condition personnelle qui a peut-être limité indûment ses chances de retourner au travail plus tôt qu’il ne l’a fait.

Le prestataire était-il donc capable de travailler et disponible à cette fin?

[34] D’après mes conclusions sur les trois éléments analysés, je juge que le prestataire n’a pas démontré qu’il était capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable de trouver un emploi convenable.

[35] Le prestataire a témoigné au sujet de ses collègues qui ont été mis à pied. Il a dit qu’ils étaient dans la même situation que lui, qu’ils ne cherchaient pas de travail, mais qu’ils ont obtenu des prestations d’assurance-emploi en moins de deux semaines. C’est peut-être le cas, mais je dois trancher l’appel du prestataire en fonction de la preuve dans la présente affaire.

[36] Le prestataire a dit qu’il a cotisé au régime d’assurance-emploi pendant des années. Il estime qu’il est injuste de ne pas pouvoir toucher des prestations lorsqu’il en a besoin. Je comprends sa frustration. Mais l’assurance-emploi est un régime d’assurance et, comme les autres régimes d’assurance, il faut satisfaire à certaines exigences pour recevoir des prestations.

[37] Le prestataire dit qu’il a épuisé ses économies pour payer ses factures et son hypothèque. Je suis sensible à sa situation, mais je ne peux pas changer la loiNote de bas page 8.

Conclusion

[38] Le prestataire n’a pas démontré qu’il était disponible pour travailler au sens de la loi. Je conclus donc qu’il ne peut pas recevoir de prestations d’assurance-emploi.

[39] Par conséquent, l’appel est rejeté avec des modifications. Plus précisément, le prestataire n’est pas inadmissible au titre de l’article 50 de la Loi. Il est plutôt inadmissible au titre de l’article 18(1)(a) de la Loi.

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