Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : AB c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1402

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : A. B.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (467398) datée du 16 mai 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Amanda Pezzutto
Date de la décision : Le 7 octobre 2022
Numéro de dossier : GE-22-1947

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Décision

[1] A. B. est le prestataire dans cette affaire. La Commission de l’assurance-emploi du Canada soutient qu’il ne peut pas recevoir de prestations d’assurance-emploi. Le prestataire n’est pas d’accord, alors il fait appel au Tribunal de la sécurité sociale.

[2] Je rejette l’appel du prestataire de façon sommaire, puisqu’il n’a aucune chance raisonnable d’être accueilli. Aucun argument du prestataire ne pourrait me permettre d’accueillir son appel.

Aperçu

[3] Le prestataire travaillait pour l’administration publique provinciale. Son employeur a mis en place une politique exigeant que tous les membres du personnel fournissent une preuve de vaccination contre la COVID-19. L’employeur a alors demandé au prestataire de fournir une preuve au plus tard le 22 novembre 2021. Le prestataire n’a pas confirmé son statut vaccinal et n’a pas fourni de preuve de vaccination dans le délai établi. L’employeur l’a alors suspendu.

[4] Le prestataire affirme que son arrêt de travail ne découle pas d’une inconduite. Selon lui, l’employeur a enfreint sa convention collective ainsi que le code du travail de la province. Il dit qu’il a voulu en savoir plus sur la politique et la responsabilité de l’employeur, mais personne n’a accepté de le renseigner à ce sujet. Le prestataire explique qu’il travaillait de son domicile et que son employeur aurait pu lui offrir une mesure d’adaptation.

[5] La Commission soutient que le prestataire a été suspendu en raison d’une inconduite. Elle affirme que le prestataire était au courant que son employeur exigeait qu’il soit vacciné contre la COVID-19. La Commission ajoute que le prestataire savait ou aurait dû savoir qu’il ne pourrait pas continuer à travailler s’il ne suivait pas la politique vaccinale de l’employeur.

Questions que je dois examiner en premier

[6] Avant de rejeter un appel de façon sommaire, je suis tenue d’aviser la partie prestataire. Je dois lui donner un délai raisonnable pour présenter des arguments à savoir si je devrais aller de l’avant avec un rejet sommaireNote de bas de page 1.

[7] Le 16 septembre 2022, le Tribunal a envoyé un courriel au prestataire dans lequel j’expliquais les raisons qui m’amenaient à vouloir rejeter l’appel de façon sommaire. Je lui ai demandé de fournir une réponse au plus tard le 30 septembre 2022.

[8] Le prestataire a envoyé sa réponse avec ses observations. Je vais examiner ces documents au fil de ma décision.

Question en litige

[9] Je dois décider s’il faut rejeter l’appel du prestataire de façon sommaire. Pour trancher cette question, je dois décider si son appel a une chance raisonnable de succès.

Analyse

[10] Je rejette un appel de façon sommaire s’il n’a aucune chance raisonnable de succèsNote de bas de page 2.

[11] On dit qu’un appel n’a « aucune chance raisonnable de succès » si, à la lecture du dossier, il est clair et évident qu’il est voué à l’échec. Il faut vérifier s’il existe des arguments ou des éléments de preuve qui permettraient à la partie prestataire de gagner sa cause si elle les présentait dans le cadre d’une audienceNote de bas de page 3.

[12] La loi dit qu’on ne peut pas toucher de prestations d’assurance-emploi si l’on perd son emploi en raison d’une inconduite. Cette règle s’applique tant en cas de congédiement qu’en cas de suspensionNote de bas de page 4.

[13] Une personne suspendue de son emploi en raison d’une inconduite est inadmissible aux prestations d’assurance-emploi. La période d’inadmissibilité se poursuit jusqu’à ce que l’une des choses suivantes se produise :

  • la suspension prend fin;
  • la personne perd son emploi ou démissionne;
  • la personne occupe un autre emploi pendant un nombre d’heures suffisant pour qu’une nouvelle période de prestations soit établieNote de bas de page 5.

[14] Pour être une inconduite au sens de la loi, la façon d’agir doit être délibérée, c’est-à-dire consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas de page 6. Une inconduite peut aussi se présenter comme une conduite à ce point insouciante qu’elle frôle le caractère délibéréNote de bas de page 7. Pour qu’il y ait inconduite au sens de la loi, il ne faut pas nécessairement avoir une intention coupable (c’est-à-dire vouloir faire quelque chose de mal)Note de bas de page 8.

[15] Il y a inconduite si la personne savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait l’empêcher de remplir ses obligations envers son employeur et qu’il y avait une réelle possibilité qu’elle soit suspendue ou congédiée pour cette raisonNote de bas de page 9.

[16] La Commission doit prouver que l’employeur a suspendu la personne pour inconduite. Elle doit en faire la preuve selon la prépondérance des probabilités. Cela veut dire que la Commission doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que la personne a perdu son emploi en raison d’une inconduiteNote de bas de page 10.

[17] Le prestataire affirme qu’il n’a pas perdu son emploi en raison d’une inconduite. Selon lui, son employeur a enfreint sa convention collective ainsi que le code du travail de la province. Il explique qu’il travaillait de son domicile et que son employeur aurait pu lui offrir une mesure d’adaptation.

[18] Le prestataire ajoute qu’il n’a pas refusé de se faire vacciner contre la COVID-19. Il dit plutôt qu’il n’a pas confirmé son statut vaccinal parce qu’il attendait que son employeur l’informe davantage sur sa politique de vaccination.

[19] Il affirme aussi qu’il ne savait pas que son employeur allait le suspendre. Il précise que sa politique disait seulement qu’il « pouvait » perdre son emploi, alors il ne savait pas qu’il allait réellement perdre son emploi.

[20] La Commission soutient que le prestataire a cessé de travailler en raison d’une inconduite. Elle affirme qu’il était au courant de la politique vaccinale de son employeur et du fait qu’il risquait de perdre son emploi s’il ne s’y conformait pas à la date limite du 22 novembre 2021.

[21] Je suis d’accord avec la Commission. J’estime que cet appel n’a aucune chance raisonnable de succès. En effet, le prestataire a perdu son emploi en raison d’une inconduite, et aucun argument ou élément de preuve ne pourrait m’amener à tirer une conclusion différente.

[22] Plusieurs faits de base de cette affaire ne sont pas contestés. Le prestataire a dit à la Commission qu’il savait que son employeur avait une politique vaccinale en place. Il admet qu’il savait que cette politique l’obligeait à confirmer son statut vaccinal et à fournir une preuve de vaccination contre la COVID-19 au plus tard le 22 novembre 2021. Il convient que la politique disait qu’il risquait de perdre son emploi s’il ne s’y conformait pas. Il admet aussi qu’il ne l’a pas respectée, parce qu’il a omis de confirmer son statut vaccinal et de fournir une preuve de vaccination complète contre la COVID-19 à la date limite fixée par l’employeur.

[23] Plusieurs arguments du prestataire concernent la conduite de l’employeur. Il dit que celui-ci a enfreint sa convention collective ainsi que le code du travail de la province. Il soutient que son employeur aurait dû répondre à ses questions à propos de la politique et aurait pu lui offrir une mesure d’adaptation puisqu’il travaillait de son domicile. Enfin, le prestataire conteste la politique vaccinale.

[24] Mais il ne revient pas au Tribunal de décider si l’employeur a agi de façon équitable lorsqu’il a mis en place une politique vaccinaleNote de bas de page 11. Il ne revient pas non plus au Tribunal de trancher sur la sûreté ou l’efficacité de la vaccination contre la COVID-19. Je ne peux pas décider si l’employeur aurait dû exempter le prestataire. Je ne peux pas non plus décider si l’employeur a enfreint la convention collective du prestataire. Le prestataire peut prendre d’autres mesures par l’entremise d’un tribunal des droits de la personne ou de son syndicat s’il souhaite présenter ces arguments.

[25] Mon seul rôle est de décider si l’appel du prestataire est voué à l’échec, peu importe les arguments ou les éléments de preuve qu’il pourrait présenter à une audience. Je conclus que l’appel du prestataire est voué à l’échec parce qu’il a perdu son emploi en raison d’une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi. En effet, le prestataire et la Commission sont d’accord sur ce qui suit :

  • Le prestataire a cessé de travailler parce qu’il ne respectait pas la politique vaccinale de son employeur. C’est la seule raison qui explique son arrêt de travail.
  • Le prestataire savait que son employeur avait une politique exigeant que tous les membres du personnel confirment leur statut vaccinal et fournissent une preuve de vaccination contre la COVID-19 au plus tard le 22 novembre 2021. Malgré tout, il a omis de façon intentionnelle de se conformer à la politique, puisqu’il n’a pas fourni de confirmation ni de preuve de son statut vaccinal dans le délai prescrit.
  • Le prestataire savait que son employeur l’avait averti du risque de perte d’emploi pour tout manquement à la politique.

[26] Si j’accepte tous ces faits, je dois alors conclure que l’employeur a suspendu le prestataire pour inconduite. Le défaut du prestataire de suivre la politique vaccinale a entraîné directement sa perte d’emploi. Il a agi volontairement. Il savait ou aurait dû savoir que ses actions étaient susceptibles d’entraîner la perte de son emploi.

[27] D’après les faits de cet appel, il n’y a aucun argument que le prestataire pourrait présenter qui m’amènerait à tirer une conclusion différente. Aucun élément de preuve ne contredit ces faits. L’appel du prestataire est voué à l’échec, quels que soient les arguments ou les éléments de preuve qu’il pourrait présenter à une audience.

Conclusion

[28] Je conclus que l’appel du prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès. Je dois donc rejeter son appel de façon sommaire.

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