Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : JB c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 9

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de permission d’en appeler

Parties demanderesse : J. B.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 25 novembre 2022 (GE-22-2996)

Membre du Tribunal : Pierre Lafontaine
Date de la décision : Le 5 janvier 2023
Numéro de dossier : AD-22-935

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Décision

[1] La demande d’autorisation d’en appeler est refusée. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] La demanderesse (prestataire) a perdu son emploi parce qu’elle ne s’est pas conformée à la politique de vaccination contre la COVID-19 de l’employeur (politique). L’employeur ne lui a pas accordé d’exemption. La prestataire a ensuite présenté une demande de prestations régulières d’assurance-emploi.

[3] La défenderesse (Commission) a déterminé que la prestataire avait perdu son emploi en raison d’une inconduite, de sorte qu’elle n’était pas en mesure de lui verser des prestations. Après le rejet de sa demande de révision, la prestataire a interjeté appel à la division générale.

[4] La division générale a conclu que la prestataire avait perdu son emploi à la suite de son refus de se conformer à la politique de l’employeur. L’employeur ne lui a pas accordé d’exemption. Elle a conclu que la prestataire savait qu’il était possible que l’employeur la congédie dans ces circonstances. La division générale a conclu que la prestataire a perdu son emploi en raison d’une inconduite.

[5] La prestataire demande la permission d’en appeler de la décision de la division générale auprès de la division d’appel. Elle soutient que la Commission n’a pas enquêté sur l’autre employé non vacciné qui n’a pas pu obtenir d’exemption et qui travaille toujours pour l’entreprise. La prestataire fait valoir qu’elle a droit à une protection égale en vertu de la loi. Elle soutient qu’elle a le droit constitutionnel de refuser toute intervention médicale. Elle avance que les médecins ont très peur d’accorder des exemptions par crainte de perdre leur permis d’exercice.

[6] Je dois décider si la prestataire a soulevé une erreur susceptible de révision de la division générale sur le fondement de laquelle l’appel pourrait être accueilli.

[7] Je refuse la permission d’en appeler parce que l’appel de la prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Question en litige

[8] La prestataire soulève-t-elle une erreur susceptible de révision de la division générale sur le fondement de laquelle l’appel pourrait être accueilli?

Analyse

[9] L’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social énonce les seuls moyens d’appel d’une décision de la division générale. Les erreurs susceptibles de révision sont les suivantes :

  1. Le processus d’audience de la division générale n’était pas équitable d’une manière ou d’une autre.
  2. La division générale ne s’est pas prononcée sur une question qu’elle aurait dû trancher. Ou encore, elle s’est prononcée sur une question qu’elle n’avait pas le pouvoir de trancher.
  3. La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.
  4. La division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droit.

[10] La demande de permission d’en appeler est une étape préliminaire à une audition sur le fond de l’affaire. Il s’agit de la première étape que la prestataire doit franchir, mais le fardeau est ici inférieur à celui dont elle devra s’acquitter à l’audition de l’appel sur le fond. À l’étape de la permission d’en appeler, la prestataire n’a pas à prouver le bien-fondé de ses prétentions; elle doit plutôt établir que l’appel a une chance raisonnable de succès compte tenu d’une erreur susceptible de révision. En d’autres termes, elle doit établir que l’on peut soutenir qu’il y a une erreur susceptible de révision sur le fondement de laquelle l’appel pourrait être accueilli.

[11] Par conséquent, avant que je puisse accorder la permission d’interjeter appel, je dois être convaincu que les motifs d’appel correspondent à l’un ou l’autre des moyens d’appel mentionnés précédemment et qu’au moins un des motifs a une chance raisonnable de succès.

La prestataire soulève-t-elle une erreur susceptible de révision de la division générale sur le fondement de laquelle l’appel pourrait être accueilli?

[12] La prestataire soutient que la Commission n’a pas enquêté sur l’autre employé non vacciné qui n’a pas pu obtenir d’exemption et qui travaille toujours pour l’entreprise. La prestataire fait valoir qu’elle a droit à une protection égale en vertu de la loi. Elle soutient qu’elle a le droit constitutionnel de refuser toute intervention médicale. Elle avance que les médecins ont très peur d’accorder des exemptions par crainte de perdre leur permis d’exercice.

[13] La division générale n’a pas compétence pour enquêter sur la conduite de la Commission dans le traitement de la demande de prestations de la prestataire. Le rôle de la division générale est d’examiner les éléments de preuve que lui présentent les deux parties pour déterminer les faits pertinents à la question juridique dont elle est saisie, et d’expliquer, dans sa décision écrite, la décision qu’elle rend concernant ces faits.

[14] La division générale devait décider si la prestataire avait perdu son emploi en raison d’une inconduite.

[15] La notion d’inconduite ne signifie pas qu’il est nécessaire que le comportement fautif découle d’une intention coupable; il suffit que l’inconduite soit consciente, voulue ou intentionnelle. Autrement dit, pour constituer de l’inconduite, l’acte reproché doit avoir été volontaire ou du moins procéder d’une telle insouciance ou négligence que l’on pourrait dire que l’employé a volontairement décidé de ne pas tenir compte des répercussions que ses actes auraient sur son rendement.

[16] Le rôle de la division générale n’est pas de juger de la sévérité de la sanction imposée par l’employeur ni de savoir s’il a mal agit en congédiant la prestataire de sorte que son congédiement était injustifié, mais bien de décider si la prestataire était coupable d’inconduite et si celle-ci a entraîné son congédiementNote de bas de page 1.

[17] La division générale a décidé que la prestataire avait perdu son emploi parce qu’elle a refusé de se faire vacciner conformément à la politique de l’employeur. Elle avait été informée de la politique de l’employeur et avait eu du temps pour s’y conformer. Elle n’a pas obtenu d’exemption. La prestataire a refusé intentionnellement; ce refus était volontaire. C’était la cause directe de son congédiement. La division générale a conclu que la prestataire savait que son refus de se conformer à la politique pouvait entraîner son congédiement.

[18] La division générale a conclu à partir de la preuve prépondérante que le comportement de la prestataire constituait une inconduite.

[19] Il est bien établi que le non-respect délibéré de la politique de l’employeur est considéré comme une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi)Note de bas de page 2.

[20] La question de savoir si l’employeur aurait dû accepter son exemption médicale, si l’employeur a fait preuve de discrimination à son égard ou si la politique a porté atteinte ses droits constitutionnels relève d’une autre instance. Le Tribunal n’est pas l’instance par laquelle la prestataire peut obtenir la réparation qu’elle rechercheNote de bas de page 3.

[21] Dans la récente affaire Paradis, le prestataire s’est vu refuser des prestations d’assurance-emploi en raison de son inconduite. Il a soutenu que la politique de l’employeur portait atteinte aux droits que lui confère l’Alberta Human Rights Act.

[22] La Cour fédérale a conclu que l’affaire relevait d’une autre instance. La Cour a également affirmé que le prestataire a, pour sanctionner le comportement de l’employeur, d’autres recours qui permettent d’éviter que par le truchement des prestations d’assurance-emploi les contribuables canadiens fassent les frais du comportement incriminé.

[23] La preuve prépondérante dont dispose la division générale montre que la prestataire a fait le choix personnel et délibéré de ne pas se conformer à la politique de l’employeur en réponse aux circonstances uniques et exceptionnelles créées par la pandémie, ce qui a entraîné son congédiement. Comme l’a déclaré la division générale, le texte de l’indemnité signée par la prestataire ne change pas le motif de son congédiement.

[24] Selon moi, la division générale n’a commis aucune erreur susceptible de révision lorsqu’elle a tranché la question de l’inconduite selon les paramètres établis par la Cour d’appel fédérale, qui a défini l’inconduite au sens de la LoiNote de bas de page 4.

[25] Je suis tout à fait conscient que la prestataire peut demander réparation à une autre instance si une infraction est établieNote de bas de page 5. Cela ne change rien au fait qu’en application de la Loi la Commission a prouvé, selon la prépondérance des probabilités, que la prestataire a été congédiée en raison de son inconduite.

[26] Dans sa demande de permission d’en appeler, la prestataire n’a soulevé aucune erreur susceptible de révision, comme la compétence ou le défaut de la division générale d’observer un principe de justice naturelle. Elle n’a pas relevé d’erreurs de droit ni de conclusions de fait erronées que la division générale aurait pu tirer de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance pour en arriver à sa décision.

[27] Après avoir examiné le dossier d’appel, la décision de la division générale et les arguments de la prestataire à l’appui de sa demande de permission d’en appeler, je conclus que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[28] La demande d’autorisation d’en appeler est refusée. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

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