Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : MI c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 52

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de
permission de faire appel

Partie demanderesse : M. I.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 24 novembre 2022 (GE-22-2999)

Membre du Tribunal : Neil Nawaz
Date de la décision : Le 19 janvier 2023
Numéro de dossier : AD-22-931

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Décision

[1] Je refuse à la prestataire la permission de faire appel parce qu’elle n’a pas présenté d’argument défendable. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] La demanderesse (prestataire) est une Canadienne autochtone qui a travaillé en tant qu’intervenante auprès de jeunes en âge de transition dans un organisme de services à l’enfance et à la famille. Le 11 mars 2022, elle a quitté son emploi après avoir subi ce qu’elle décrit comme du harcèlement et de la discrimination. Elle a demandé des prestations d’assurance-emploi.

[3] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé que la prestataire avait quitté volontairement son emploi sans justification et qu’elle n’avait donc pas à lui verser des prestations. La prestataire a porté la décision de la Commission en appel à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[4] À la suite d’une audience par vidéoconférence, la division générale a rejeté l’appel. Elle a décidé que la prestataire avait quitté volontairement son emploi sans justification. Elle a conclu que même si la prestataire avait pu avoir des raisons de quitter son emploi, elles n’étaient pas suffisantes pour établir qu’elle était fondée à quitter son emploi au sens de la Loi sur l’assurance-emploi. La division générale a aussi conclu que la prestataire avait d’autres solutions raisonnables que de démissionner.

[5] La prestataire demande maintenant la permission de faire appel de la décision de la division générale. Elle allègue qu’elle n’a pas eu droit à une audience équitable parce que le membre de la division générale qui a instruit son appel n’avait pas d’antécédents autochtones. Elle estime que sa cause ne pouvait être comprise que par une personne connaissant bien le racisme systémique, la discrimination et la suprématie blanche. Elle dit qu’elle a eu de la difficulté à discuter des complexités de sa cause avec une personne qui semblait être d’origine caucasienne.

Question en litige

[6] Il y a quatre moyens d’appel à la division d’appel. La partie appelante doit démontrer que la division générale :

  • a agi de façon inéquitable;
  • a outrepassé sa compétence ou a refusé de l’exercer;
  • a mal interprété la loi;
  • a fondé sa décision sur une erreur de fait importanteNote de bas page 1.

Un appel peut aller de l’avant seulement avec la permission de la division d’appelNote de bas page 2. À cette étape, la division d’appel doit être convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succèsNote de bas page 3. Il s’agit d’un critère relativement facile à satisfaire. Cela signifie que la prestataire doit présenter au moins un argument défendableNote de bas page 4.

[7] Je devais décider si l’un des motifs d’appel de la prestataire correspondait à l’un des moyens d’appel susmentionnés et, dans l’affirmative, s’il s’agissait d’un argument défendable.

Analyse

[8] J’ai examiné la décision de la division générale ainsi que le droit applicable et les éléments de preuve qui ont mené à cette décision. J’ai conclu que la prestataire n’a pas présenté d’argument défendable.

Il n’est pas possible de soutenir que la division générale a fait preuve de partialité

[9] La prestataire allègue que le membre de la division générale a rejeté son appel parce qu’il n’avait pas les antécédents nécessaires pour juger des enjeux propres aux autochtones. En fait, la prestataire accuse le membre de partialité.

[10] Un esprit partial est un esprit fermé, qui résiste à la raison et à la preuve. Il faut faire preuve de rigueur pour conclure à la partialité et la charge d’établir la partialité incombe à la personne qui en allègue l’existence. La Cour suprême du Canada a déclaré que le critère à appliquer pour déterminer la présence de partialité consiste à se demander « à quelle conclusion en arriverait une personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratiqueNote de bas page 5? ».

[11] Compte tenu de ce critère, je ne vois pas d’argument défendable dans les allégations de la prestataire. La Cour suprême dit qu’il faut établir une réelle probabilité de partialité. Un simple soupçon ne suffit pas. Un résultat défavorable n’est pas en soi une preuve de partialité.

[12] La prestataire allègue que le membre de la division générale n’était pas en mesure d’apprécier les subtilités de son appel parce qu’il n’était pas autochtone. Toutefois, elle n’a pas donné de détails sur un incident particulier de partialité. J’ai écouté l’enregistrement de l’audience de la division générale et je n’ai rien entendu qui laisse croire que le membre de l’audience a mal compris les observations de la prestataire ou qu’il a préjugé sa cause. En l’absence de preuve que la division générale a fait preuve de partialité contre la prestataire, j’estime que son appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

La prestataire a implicitement renoncé à son droit d’invoquer la partialité en appel

[13] Il y a une autre raison pour laquelle le présent appel ne peut être accueilli : la prestataire n’a pas soulevé de crainte de partialité auparavant. Avant son audience, la prestataire n’a jamais demandé à la division générale de confier son appel à un membre qui avait des antécédents autochtones. Au cours de l’audience et immédiatement après, elle ne s’est pas opposée à la conduite du membre de la division générale ni dit quoi que ce soit qui puisse suggérer qu’elle doutait de l’équité du processus.

[14] Il est de jurisprudence constante que l’omission de s’opposer à une injustice procédurale perçue à la première occasion équivaut à une renonciation implicite au droit de porter en appel cette injustice plus tard. La Cour d’appel fédérale a déclaré ce qui suit : « La personne qui croit que le juge président a fait naître une crainte raisonnable de partialité doit le faire savoir à la première occasion. On ne peut entretenir secrètement une crainte raisonnable de partialité en vue de la faire valoir en cas d’issue défavorableNote de bas page 6. »

[15] La prestataire devait faire valoir ses craintes de partialité à la première occasion raisonnable, mais elle ne l’a pas fait jusqu’à ce qu’elle demande la permission de faire appel. Après avoir examiné le dossier, je ne suis pas convaincu que l’appel ait une chance raisonnable de succès.

Conclusion

[16] Pour les raisons qui précèdent, je conclus que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

[17] La permission de faire appel est refusée.

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