Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : CL c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1499

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : C. L.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (461368) datée du 30 mars 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Lilian Klein
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 29 août 2022
Personne présente à l’audience : Appelant

Date de la décision : Le 29 octobre 2022
Numéro de dossier : GE-22-1556

Sur cette page

Décision

[1] Je rejette l’appel du prestataire. Cette décision explique mon raisonnement.

[2] Je suis d’accord avec la Commission de l’assurance-emploi du Canada pour dire que le prestataire n’a pas démontré qu’il était disponible pour travailler pendant qu’il suivait des cours du 4 octobre 2020 au 17 décembre 2021.

[3] Par conséquent, le prestataire n’est pas admissible aux prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[4] Le 3 avril 2020, le prestataire a été inscrit au programme de subvention d’urgence du Canada [sic]. Le 6 juin 2020, il a été mis à pied en tant qu’agent de bord. Sa date de retour au travail n’était pas connue. Il a été rappelé au travail le 15 septembre 2021.

[5] Le prestataire a suivi des cours non recommandés du 14 septembre 2020 au 31 juillet 2021 et du 13 septembre 2021 au 17 décembre 2021.

[6] Le 8 février 2022, la Commission a décidé que le prestataire n’était pas disponible pour travailler du 6 septembre 2021 au 17 décembre 2021. Elle l’a exclu du bénéfice des prestations pendant cette période.

[7] Le prestataire a demandé une révision de la décision de la Commission. La Commission a donc révisé sa demande. Le 30 mars 2022, elle a conclu que le prestataire était exclu du bénéfice des prestations pour une période plus longue, soit du 4 octobre 2020 au 17 décembre 2021.

[8] Pour obtenir des prestations régulières de l’assurance-emploi, une personne doit prouver qu’elle est disponible pour travailler. Pour prouver sa disponibilité, la personne doit continuer à chercher du travail et n’avoir fixé aucune condition personnelle susceptible de limiter indûment (de manière déraisonnable) ses chances de trouver un emploi convenable.

[9] La Commission affirme que le prestataire n’était pas disponible pour travailler parce qu’il attendait de se faire rappeler au travail tout en suivant un cours non recommandé au lieu d’essayer de trouver un autre emploi.

[10] Le prestataire soutient qu’il était disponible pour occuper un emploi convenable puisqu’il pouvait étudier en ligne à son propre rythme et qu’il était sur le point d’être rappelé au travail. Il dit que la Commission a approuvé ses prestations.

La question que je dois trancher

[11] Le prestataire était-il exclu du bénéfice des prestations du 4 octobre 2020 au 17 décembre 2021?

Analyse

[12] La loi exige que toutes les parties prestataires démontrent qu’elles sont disponibles pour travaillerNote de bas de page 1. De plus, un nouvel article provisoire de la Loi sur l’assurance-emplo i confirme que toute personne qui étudie à temps plein ne peut pas toucher de prestations à moins de prouver qu’elle est capable de travailler et disponible pour le faireNote de bas de page 2. Elles doivent démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’elles soient disponibles.

Présumer que les personnes qui étudient à temps plein ne sont pas disponibles pour travailler

[13] Il existe une présomption selon laquelle les prestataires qui étudient à temps plein ne sont pas disponibles pour travaillerNote de bas de page 3. Cela signifie que nous pouvons supposer que les personnes qui étudient à temps plein ne sont pas disponibles, à moins qu’elles ne prouvent le contraire. Je vais commencer par examiner si je peux supposer que le prestataire n’était pas disponible. Je vais ensuite examiner s’il était disponible pour travailler.

[14] Dans sa demande de prestations, le prestataire a déclaré qu’il était étudiant à temps plein. Il a ensuite déclaré que ses trois cours en ligne faisaient de lui un étudiant à temps partiel selon son université. Il n’y a aucune preuve dans un sens ou dans l’autre. Je vais donc utiliser ses premières déclarations d’études à temps plein pour examiner, d’abord, s’il peut réfuter la présomption selon laquelle il n’est pas disponible.

[15] Je ne pense pas que le prestataire puisse réfuter cette présomption puisqu’il n’avait pas d’antécédents de travail à temps plein tout en étudiant à temps plein et n’avait pas de circonstances exceptionnelles.

[16] Bien que j’estime que le prestataire ne peut pas réfuter la présomption, je dois quand même examiner la loi qui s’applique à lui pour décider s’il était disponible pour travailler.

[17] La Commission soutient qu’une partie prestataire doit faire des démarches « habituelles et raisonnables » pour trouver un emploi, conformément à l’article 50(8) de la Loi sur l’assurance-emploi. Cependant, la Commission a appliqué le critère de disponibilité prévu à l’article 18(1)(a) de la Loi sur l’assurance-emploi. Par conséquent, je vais uniquement examiner le critère de disponibilité aux termes de cet article et de l’article 153.161 de la Loi sur l’assurance-emploi. Le critère est énoncé ci-après.

Le prestataire était-il disponible pour travailler et incapable de trouver un emploi convenable?

[18] Pour démontrer qu’il était disponible pour travailler, le prestataire devait prouver trois choses :

  1. i) qu’il voulait retourner travailler dès qu’il aurait trouvé un emploi convenable;
  2. ii) qu’il a exprimé ce désir par des démarches pour se trouver un emploi;
  3. iii) qu’il n’avait fixé aucune condition personnelle susceptible de limiter indûment ses chances de trouver un emploi convenableNote de bas de page 4.

[19] Je dois examiner chacun de ces trois éléments pour trancher la question de la disponibilité. Je dois également examiner l’attitude et la conduite du prestataireNote de bas de page 5.

Le prestataire souhaitait-il retourner travailler dès qu’il aurait trouvé un emploi convenable?

[20] Non. Le prestataire n’a pas démontré qu’il voulait retourner travailler dès qu’il le pourrait dans n’importe quel emploi convenable. Il attendait d’être rappelé à son ancien emploi tout en poursuivant ses études pour améliorer ses compétences.

[21] Le prestataire soutient que son rappel était [traduction] « imminent » et qu’il peut donc démontrer qu’il voulait retourner au travail en attendant d’être rappelé et en acceptant immédiatement de retourner travailler. Il affirme que la compagnie aérienne a commencé à procéder à des rappels par ancienneté un mois après les mises à pied et que son rappel devrait avoir lieu peu de temps après.

[22] Je conclus que le prestataire ne peut pas démontrer qu’il voulait retourner travailler dès qu’il le pouvait alors qu’il était prêt à attendre 15 mois sans travail pour être rappelé par son ancien employeur.

Le prestataire a-t-il fait des démarches suffisantes pour trouver un emploi convenable?

[23] Non. Le prestataire n’a pas démontré qu’il avait fait des démarches suffisantes pour trouver un travail convenable. Il dit qu’il pensait que la note figurant dans son compte Mon Dossier Service Canada (MDSC) le 18 octobre 2020, indiquant que sa formation avait été ajoutée, signifiait que sa formation avait été approuvéeNote de bas de page 6. Il dit avoir pensé que cela signifiait qu’il n’avait pas à chercher un emploi pendant qu’il attendait d’être rappelé.

[24] Je reconnais que le prestataire pensait qu’il allait assurément être rappelé et qu’il a donc attendu avant de chercher du travail. Il soutient que le fait de pouvoir conserver son ancienneté montrait qu’il serait rappelé. Il affirme qu’il était justifié d’attendre puisque, aux termes de la convention collective de la compagnie aérienne, celle-ci ne pouvait pas embaucher du nouveau personnel avant de rappeler les personnes qui avaient été mises à pied.

[25] Mais cette disposition, à elle seule, ne montre pas que le fait que le prestataire soit rappelé était garanti. Il dit avoir perdu ses prestations de santé en juin 2020. Il n’y avait pas de date de retour sur son relevé d’emploi. Il n’a donc pas démontré qu’il bénéficiait d’une sécurité d’emploi. L’incertitude qui régnait dans le secteur à l’époque aurait pu entraîner des réductions permanentes de personnel.

[26] Le prestataire reconnaît cette réalité lorsqu’il dit qu’il avait besoin de suivre un cours de gestion d’entreprise pour [traduction] « me rendre plus employable sur le marché du travail en constante évolutionNote de bas de page 7 ».

[27] Le prestataire affirme que sa recherche d’emploi a consisté à regarder en ligne et à faire du réseautage avec sa famille et ses amis qui avaient des emplois dans le secteur bancaire ou dans l’industrie hôtelière. Il explique qu’il n’a pas pu trouver d’emploi dans le secteur bancaire parce qu’il n’avait pas terminé ses études et qu’il n’y avait pas d’emploi dans l’hôtellerie après l’effondrement de l’industrie du voyage. Il n’a postulé pour aucun emploi. Il affirme qu’il aurait postulé pour des emplois en dehors de sa profession et accepté un travail moins bien rémunéré s’il n’avait pas été rappelé.

[28] Mais le prestataire n’a pas été rappelé pendant 15 mois. Il n’a pas eu à prouver que son rappel était [traduction] « imminent »Note de bas de page 8. Il n’est pas automatiquement exclu du bénéfice des prestations parce que cela a pris du temps avant qu’il ne soit rappelé. Toutefois, il doit encore prouver qu’il a cherché du travail pendant qu’il attendait.

[29] Le prestataire soutient qu’il n’y avait pas d’emploi convenable auquel postuler en raison de la pandémie. Je conviens que le marché du travail était difficile en raison de la COVID-19. Cependant, toute personne doit prouver qu’elle a essayé de trouver un emploi, même si elle pense avoir peu de chances de réussir.

[30] Le prestataire n’a pas démontré qu’il avait essayé très fort de trouver du travail. Les quelques démarches de recherche d’emploi qu’il a rapportées ne l’emportent pas sur sa déclaration selon laquelle il supposait que son cours avait été approuvé et qu’il n’avait pas besoin de chercher du travail.

[31] J’estime donc que le prestataire n’a pas prouvé qu’il avait fait des démarches suffisantes pour trouver un emploi convenable pendant qu’il suivait un cours non recommandé et qu’il attendait d’être rappelé.

Le prestataire a-t-il fixé des conditions personnelles?

[32] Oui. Le prestataire a fixé des conditions personnelles sur le type de travail qu’il accepterait. Ces conditions ont limité sa disponibilité. La loi prévoit qu’une personne ne peut pas fixer de conditions personnelles qui limitent indûment ses chances de réintégrer le marché du travail et d’occuper un emploi convenableNote de bas de page 9.

[33] J’ai examiné la question de savoir si le prestataire avait fixé une condition personnelle quant à sa disponibilité en suivant des cours non recommandés. Le fait de suivre des cours alors qu’il était au chômage était un choix personnel, mais je ne pense pas que cela ait indûment limité sa disponibilité pour travailler. J’accepte son témoignage selon lequel il pouvait étudier en ligne à son propre rythme, comme il l’a fait plus tard lorsqu’il a repris son travail à temps plein. Cependant, il ne suffit pas d’avoir le temps de travailler, il faut aussi montrer qu’on a cherché du travail.

[34] Le fait d’attendre 15 mois pour être rappelé à son ancien emploi au lieu de se concentrer sur la recherche d’un autre emploi convenable est une condition personnelle. Cette condition limite indûment sa disponibilité au travail et ses chances de trouver un nouvel emploi convenable.

[35] Le prestataire affirme qu’il n’y avait plus d’emploi dans l’industrie de l’aviation après le début de la COVID-19. Je suis d’accord. Cependant, comme l’une des caractéristiques essentielles de son travail d’agent de bord était le service à la clientèle, des emplois dans ce secteur auraient pu lui convenir. Il a également déclaré qu’il était un [traduction] « professionnel de la sécurité formé » et que ses [traduction] « expériences de vie » dans le cadre de son travail l’avaient préparé à tout.

[36] Toutefois, il n’y a aucune preuve que le prestataire a sérieusement envisagé des postes convenables dans un autre secteur où il pourrait utiliser ses compétences transférables.

[37] J’ai examiné l’argument du prestataire selon lequel il n’aurait pas dû être tenu de chercher un emploi en dehors de sa profession pendant une période [traduction] « raisonnable ». Il n’admet pas que le fait de retarder sa recherche d’emploi était une condition personnelle qui limitait indûment sa disponibilité.

[38] L’obligation de chercher un emploi convenable commence dès le premier jour de chômage. La loi prévoit que toute personne qui demande des prestations régulières doit prouver qu’elle est disponible pour travailler tous les jours ouvrables, mais qu’elle n’est pas en mesure de trouver un emploi convenableNote de bas de page 10. Il importe peu que vous pensiez avoir peu de chances de succès ou que vous vous attendiez à n’être au chômage que pendant une courte périodeNote de bas de page 11.

[39] La loi précise qu’un emploi n’est pas « convenable » s’il ne correspond pas à la profession habituelle du prestataire et s’il est assorti d’un taux de rémunération inférieur et de conditions moins favorablesNote de bas de page 12. La loi précise également qu’une partie prestataire peut être tenue d’étendre sa recherche d’emploi au-delà des exigences de l’article mentionné ci-dessus, après un « délai raisonnable »Note de bas de page 13. La durée de ce délai n’est pas définie dans la loi. Elle dépend des circonstances.

[40] Il n’y a aucune preuve que le prestataire a commencé à chercher sérieusement un emploi dès qu’il a été mis à pied ou pendant qu’il attendait d’être rappelé, ce qui a pris plus de temps que prévu. Rien ne prouve non plus qu’il ait élargi sa recherche d’emploi après un « délai raisonnable ». Il a déclaré qu’il [traduction] « n’avait pas l’intention d’accepter un emploi moins bien rémunéré et assorti d’avantages moins favorables, pour le quitter peu de temps aprèsNote de bas de page 14 ».

[41] Cela laisse entendre que le prestataire considérait qu’un délai de 15 mois était un délai raisonnable avant de commencer sa recherche d’emploi ou de l’élargir. Je ne suis pas d’accord pour dire que 15 mois étaient raisonnables.

[42] Sans recherche d’emploi, le prestataire ne peut pas démontrer qu’il a testé le marché pour d’autres emplois convenables pendant les 15 mois de son chômage. Il ne peut pas non plus démontrer qu’il n’a pas continué à se limiter à un seul type d’emploi dans un secteur qui avait ferméNote de bas de page 15. Il ne peut donc pas établir que tous les autres emplois convenables étaient moins bien rémunérés ou offraient des conditions moins favorables.

[43] Comme je l’ai noté ci-dessus, j’estime qu’il est plus probable qu’improbable que le prestataire n’ait pas essayé de trouver un autre emploi convenable étant donné que son intention déclarée était d’attendre d’être rappelé. Il affirme qu’il serait injuste de commencer un nouvel emploi et de demander à un nouvel employeur de le former, puisqu’il prévoyait de reprendre son ancien poste dès qu’il serait rappelé. Il se fondait également sur l’hypothèse que sa formation avait été approuvée en octobre 2020 et qu’il pouvait attendre d’être rappelé à son poste sans avoir à chercher un emploi.

[44] Cependant, le mot « approuvé » n’apparaît pas dans les notes que le prestataire a citées à partir de son compte MDSC. Ce mot n’apparaît nulle part dans ses conversations ou sa correspondance avec la Commission.

[45] Par conséquent, je conclus que le prestataire avait fixé la condition personnelle de ne vouloir retourner travailler que pour son ancien employeur et qu’il a maintenu cette condition après avoir mal interprété les notes figurant dans son compte MDSC. Je conclus également que cette condition a indûment limité sa capacité à trouver un autre emploi convenable.

Alors, le prestataire était-il capable de travailler et disponible pour le faire?

[46] Compte tenu de mes conclusions sur les trois facteurs mentionnés ci-dessus, j’estime que le prestataire n’a pas démontré qu’il était capable de travailler et disponible pour le faire, et qu’il était incapable de trouver un emploi convenable.

[47] La loi prévoit que la Commission peut vérifier rétroactivement si les personnes aux études étaient admissibles aux prestations régulières qu’elles ont reçuesNote de bas de page 16. Puisque le prestataire n’a pas démontré, selon la prépondérance des probabilités, qu’il était disponible pour travailler, il doit rembourser ces prestationsNote de bas de page 17.

[48] Le prestataire dit qu’il aurait abandonné ses cours s’il avait su qu’il ne pourrait pas obtenir de prestations pendant qu’il attendait d’être rappeléNote de bas de page 18. L’assurance-emploi n’est cependant pas une bourse d’études. La loi prévoit que les personnes aux études qui demandent des prestations doivent prouver par leurs actions qu’elles sont disponibles pour travailler, selon l’interprétation donnée ci-dessus. Je ne peux pas changer la loiNote de bas de page 19.

Conclusion

[49] Le prestataire est exclu du bénéfice des prestations du 4 octobre 2020 au 17 décembre 2021 parce qu’il n’a pas démontré qu’il était disponible pour travailler.

[50] Par conséquent, je rejette l’appel du prestataire.

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