Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : MH c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1481

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de
permission d’en appeler

Partie demanderesse : M. H.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 13 octobre 2022 (GE-22-1999)

Membre du Tribunal : Pierre Lafontaine
Date de la décision : Le 15 décembre 2022
Numéro de dossier : AD-22-871

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Décision

[1] Je refuse la permission de faire appel. Cela signifie que l’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] La demanderesse (la prestataire) a été suspendue et a perdu son emploi parce qu’elle n’a pas respecté la politique de vaccination contre la COVID-19 de l’employeur. Elle n’a pas obtenu d’exemption. La prestataire a ensuite présenté une demande de prestations régulières d’assurance-emploi.

[3] La partie défenderesse (la Commission) a conclu que la prestataire a été suspendue et a perdu son emploi en raison d’une inconduite, de sorte qu’elle ne pouvait pas lui verser des prestations. Après l’échec de la révision, la prestataire a fait appel auprès de la division générale.

[4] La division générale a conclu que la prestataire avait été suspendue et congédiée à la suite de son refus de se conformer à la politique de l’employeur. L’employeur ne lui a pas accordé d’exemption. La division générale a conclu que la prestataire savait que l’employeur était susceptible de la suspendre et de la congédier dans ces circonstances. La division générale a conclu que la prestataire avait été suspendue et congédiée pour inconduite.

[5] La prestataire demande la permission de faire appel de la décision de la division générale auprès de la division d’appel. Elle a présenté une décision de la Cour suprême de New York qui a invalidé l’obligation de se faire vacciner parce qu’elle était arbitraire, capricieuse et inconstitutionnelle. La prestataire fait valoir que la politique de l’employeur contrevenait au Code de Nuremberg. Elle affirme que l’une des raisons pour lesquelles elle a refusé le vaccin était la liste des effets indésirables. La prestataire soutient que la politique de l’employeur était un génocide contre l’humanité.

[6] Je dois décider si la prestataire a soulevé une erreur révisable de la division générale qui conférerait à l’appel une chance de succès.

[7] Je refuse la permission de faire appel puisque l’appel de la prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Question en litige

[8] La prestataire soulève-t-elle une erreur révisable de la division générale qui conférerait à l’appel une chance de succès?

Analyse

[9] L’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social précise les seuls moyens d’appel d’une décision de la division générale. Voici les erreurs révisables :

  1. La procédure de la division générale était inéquitable d’une façon ou d’une autre.
  2. La division générale n’a pas décidé d’une question qu’elle aurait dû trancher ou elle a décidé d’une question qu’elle n’avait pas le pouvoir de trancher.
  3. La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.
  4. La division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droit.

[10] Une demande de permission de faire appel est une étape préliminaire à l’examen sur le fond. C’est une première étape que la prestataire doit franchir, mais où la barre est moins haute que celle qu’il faut franchir durant l’instruction de l’appel sur le fond. À l’étape de la permission de faire appel, la prestataire n’a pas à prouver ses prétentions. Elle doit plutôt établir que l’appel a une chance raisonnable de succès en raison d’une erreur révisable. En d’autres termes, elle doit démontrer la possibilité de soutenir qu’il y a eu une erreur révisable pouvant faire que l’appel soit accueilli.

[11] Par conséquent, pour accorder la permission, je dois être convaincu que les motifs de l’appel correspondent à l’un ou l’autre des moyens d’appel mentionnés ci-dessus et qu’au moins un des motifs a une chance raisonnable de succès.

La prestataire soulève-t-elle une erreur révisable de la division générale qui conférerait à l’appel une chance de succès?

[12] La prestataire a présenté une décision de la Cour suprême de New York qui a invalidé l’obligation de se faire vacciner parce qu’elle était arbitraire, capricieuse et inconstitutionnelle. La prestataire fait valoir que la politique de l’employeur contrevenait au Code de Nuremberg. Elle affirme que l’une des raisons pour lesquelles elle a refusé le vaccin était la liste des effets indésirables. La prestataire soutient que la politique de l’employeur était un génocide contre l’humanité.

[13] La division générale devait décider si la prestataire avait été suspendue et congédiée en raison d’une inconduite.

[14] La notion d’inconduite ne sous-entend pas qu’il soit nécessaire que le comportement fautif soit le résultat d’une intention coupable; il suffit que l’inconduite soit consciente, délibérée ou intentionnelle. Autrement dit, pour qu’il y ait inconduite, l’acte reproché doit avoir été volontaire ou du moins procéder d’une telle insouciance ou négligence que l’on pourrait dire que l’employé a volontairement décidé de ne pas tenir compte des répercussions que ses actes auraient sur son rendement au travail.

[15] Le rôle de la division générale n’est pas de juger de la sévérité de la sanction de l’employeur ni de décider si l’employeur était coupable d’inconduite en suspendant et en congédiant la prestataire de telle sorte que sa suspension et son congédiement étaient injustifiés, mais bien de savoir si la prestataire était coupable d’inconduite et si cette inconduite a mené à sa suspension et à son congédiementNote de bas page 1.

[16] La division générale a conclu que la prestataire avait été suspendue et congédiée parce qu’elle avait refusé de se faire vacciner conformément à la politique de l’employeur. On a informé à plusieurs reprises la prestataire de la politique de l’employeur et elle a eu le temps de s’y conformer. Elle n’a pas obtenu d’exemption. La prestataire a refusé intentionnellement; ce refus était volontaire. C’était la cause directe de sa suspension et de son congédiement. La division générale a conclu que la prestataire savait que son refus de se conformer à la politique pouvait entraîner sa suspension et son congédiement.

[17] La division générale a conclu, selon la preuve prépondérante, que le comportement de la prestataire constituait une inconduite.

[18] Il est bien établi qu’une violation délibérée de la politique de l’employeur est considérée comme une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas page 2.

[19] La prestataire soutient que la division générale n’a pas évalué l’efficacité et le caractère raisonnable de la politique de l’employeur. La prestataire soutient qu’elle avait des préoccupations légitimes en matière de sécurité, de droit et de morale.

[20] Il n’est pas vraiment contesté qu’un employeur a l’obligation de prendre toutes les précautions raisonnables pour protéger la santé et la sécurité de ses employés dans leur milieu de travail. Le Tribunal n’a pas compétence pour décider si les mesures de santé et de sécurité de l’employeur concernant la COVID-19 sont efficaces ou raisonnables.

[21] Je conclus que la division générale n’a pas commis d’erreur révisable lorsqu’elle a décidé qu’elle n’avait pas compétence pour trancher les questions sur l’efficacité du vaccin et le caractère raisonnable de la politique de l’employeur.

[22] La question de savoir si la politique de l’employeur violait les droits de la personne et les droits constitutionnels de la prestataire relève d’une autre instance. Le Tribunal n’est pas le forum approprié par lequel la prestataire peut obtenir la réparation qu’elle rechercheNote de bas page 3.

[23] Dans la récente affaire Paradis, le prestataire s’est vu refuser des prestations d’assurance-emploi en raison d’une inconduite. Il a soutenu que la politique de l’employeur en matière d’alcool et de drogues violait ses droits en vertu de l’Alberta Human Rights Act. La Cour fédérale a conclu que l’affaire relevait d’une autre instance. La Cour a également déclaré qu’il existe des recours permettant à une partie prestataire de sanctionner le comportement d’un employeur autre que le transfert des coûts de ce comportement au programme d’assurance-emploi.

[24] Comme mentionné plus haut, la question soumise à la division générale n’était pas de savoir si l’employeur était coupable d’une inconduite, mais plutôt si la prestataire était coupable d’une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi et si cette inconduite a entraîné la perte de son emploi.

[25] La preuve prépondérante dont dispose la division générale montre que la prestataire a fait un choix personnel et délibéré de ne pas suivre la politique de l’employeur mise en œuvre en raison des circonstances exceptionnelles créées par la pandémie. Ce choix a entraîné sa suspension et son congédiement.

[26] Selon moi, la division générale n’a commis aucune erreur susceptible de révision lorsqu’elle a tranché la question de l’inconduite selon les paramètres établis par la Cour d’appel fédérale, qui a défini l’inconduite au sens de la LoiNote de bas page 4.

[27] Je suis tout à fait conscient que la prestataire peut demander réparation à une autre instance si une violation est établieNote de bas page 5. Cela ne change rien au fait que, en vertu de la Loi, la Commission a prouvé, selon la prépondérance des probabilités, que la prestataire a été suspendue de son emploi en raison d’une inconduite.

[28] Dans sa demande de permission de faire appel, la prestataire n’a relevé aucune erreur révisable, comme la compétence ou le défaut de la division générale de respecter un principe de justice naturelle. Elle n’a relevé aucune erreur de droit ni aucune conclusion de fait erronée, que la division générale aurait pu tirer de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont elle disposait pour en arriver à sa décision.

[29] Après avoir examiné le dossier d’appel, la décision de la division générale et les arguments de la prestataire à l’appui de sa demande de permission de faire appel, je conclus que l’appel n’a aucune chance raisonnable d’être accueilli.

Conclusion

[30] La permission de faire appel est refusée. Cela signifie que l’appel n’ira pas de l’avant.

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