Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : CD c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 62

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Appelant : C. D.
Représentante : Mykelti St-Louis

Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentante : Mélanie Allen

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 1er avril 2022 (GE-22-252)

Membre du Tribunal : Charlotte McQuade
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 19 octobre 2022
Personnes présentes à l’audience : Appelant
Représentant de l’appelant
Représentante de l’intimée 
Date de la décision : Le 25 janvier 2023
Numéro de dossier : AD-22-317

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

Aperçu

[2] C. D. est le prestataire. Il fréquentait un collège à temps plein, loin de sa ville natale. Il travaillait également à temps partiel. En mars 2020, il a perdu temporairement son emploi à temps partiel en raison de la pandémie. Ses cours ont alors été offerts en ligne. Le prestataire est retourné dans sa ville natale et, en juillet 2020, il a commencé à travailler chez un concessionnaire d’automobiles, où il avait travaillé auparavant.

[3] Le 8 janvier 2021, le prestataire a quitté son emploi chez le concessionnaire d’automobiles et il est retourné dans la ville où il fréquentait le collège. Il a repris les cours en personne le 11 janvier 2021.

[4] La Commission de l’assurance-emploi du Canada (Commission) a décidé que le prestataire avait quitté volontairement son emploi chez le concessionnaire d’automobiles (qu’il avait choisi de démissionner) sans justification, de sorte qu’il a été exclu du bénéfice des prestations régulières d’assurance-emploi à compter du 10 janvier 2021. De plus, la Commission a décidé que le prestataire n’avait pas prouvé qu’il était disponible pour travailler pendant qu’il étudiait à temps plein. Il était donc inadmissible au bénéfice des prestations pendant ses études.

[5] Le prestataire a fait appel de la décision de la Commission devant la division générale du Tribunal, qui a rejeté l’appel. Il demande maintenant à la division d’appel de trancher le litige. Il soutient que la division générale a manqué à l’équité procédurale, a commis des erreurs de droit et a fondé sa décision sur des erreurs de fait.

[6] La Commission fait valoir que la division générale n’a commis aucune erreur. Elle demande à la division d’appel de rejeter l’appel du prestataire.

[7] Je rejette l’appel. La division générale n’a commis aucune erreur susceptible de contrôle.

Questions préliminaires

[8] Pour soulever un argument au sujet de la Charte canadienne des droits et libertés (Charte), il faut suivre le processus spécial dont le Tribunal disposeNote de bas de page 1. Une partie doit d’abord déposer auprès du Tribunal un avis de la question fondée sur la Charte précisant la disposition de la loi sur l’assurance-emploi en cause et présentant des observations sur la question soulevéeNote de bas de page 2.

[9] Le prestataire avait mentionné la Charte dans ses documents présentés à la division générale. Il a déclaré que les droits qui lui sont garantis par l’art 7 de la Charte avaient été violés parce que la division générale n’avait pas obligé la Commission à lui fournir certains renseignements sur son dossier, qu’à son avis la Commission avait en sa possessionNote de bas de page 3.

[10] La membre de la division générale a informé le prestataire à son audience que s’il voulait soulever un argument fondé sur la Charte, il devrait communiquer séparément avec le Tribunal. La membre a expliqué au prestataire que s’il voulait envisager cette possibilité, elle mettrait son appel en suspens. Le prestataire a confirmé qu’il souhaitait tenir l’audienceNote de bas de page 4.

[11] La division générale a souligné dans sa décision que le prestataire ne soulevait aucun argument constitutionnel devant elleNote de bas de page 5.

[12] Le prestataire a toutefois soulevé la même question fondée sur la Charte dans les observations qu’il a présentées à la division d’appelNote de bas de page 6. Il a déclaré que la Commission avait violé les droits que lui garantit la Charte en ne faisant pas une divulgation complète et équitable. Il a déclaré que la division générale avait manqué à l’équité procédurale en n’exigeant pas que la Commission divulgue les renseignements qu’il avait demandés.

[13] Normalement, la division d’appel n’exercera pas son pouvoir discrétionnaire ni n’examinera un argument fondé sur la Charte pour la première fois en appel si cet argument n’a pas été soulevé ou examiné par la division généraleNote de bas de page 7. Cela s’explique notamment par le fait que la division d’appel est à la recherche d’erreurs susceptibles de contrôle que la division générale a pu commettre dans le dossier dont elle était saisie. Soulever un argument fondé sur la Charte n’est pas un moyen d’appel distinct.

[14] Toutefois, il n’est pas nécessaire que je décide si le prestataire peut présenter un argument fondé sur la Charte en appel parce que, à l’audience de la division d’appel, le représentant du prestataire a confirmé qu’il ne faisait valoir aucun argument fondé sur la CharteNote de bas de page 8.

[15] Par conséquent, bien que j’aie examiné l’argument du prestataire selon lequel la division générale a manqué à l’équité procédurale, j’ai tranché cette question sans tenir compte de la Charte.

Questions en litige

Les questions en litige dans le présent appel sont les suivantes :

  1. a) La division générale a-t-elle manqué à l’équité procédurale en n’exigeant pas que la Commission divulgue les renseignements que le prestataire avait demandés à la division générale d’obtenir pour son compte?
  2. Départ volontaire sans justification

  3. b) La division générale a-t-elle fondé sa décision selon laquelle le prestataire n’était pas fondé à quitter son emploi sur une erreur de fait selon laquelle les circonstances de son départ ne comprenaient pas une modification importante de ses fonctions au travail?
  4. c) La division générale a-t-elle fondé sa décision selon laquelle le prestataire n’était pas fondé à quitter son emploi sur une erreur de fait selon laquelle les circonstances de son départ ne comprenaient pas une modification importante des conditions de rémunération?
  5. d) La division générale a-t-elle fondé sa décision selon laquelle le prestataire n’était pas fondé à quitter son emploi sur une erreur de fait selon laquelle les circonstances de son départ ne comprenaient pas l’assurance raisonnable d’obtenir un autre emploi dans un avenir immédiat?
  6. e) La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en interprétant « avenir immédiat » sans tenir compte des répercussions de la pandémie?
  7. f) La division générale a-t-elle fondé sa décision selon laquelle le prestataire n’était pas fondé à quitter son emploi sans tenir compte du fait qu’un agent de la Commission lui avait dit qu’il pouvait quitter son emploi s’il avait l’assurance raisonnable d’obtenir un autre emploi?
  8. Disponibilité pour travailler

  9. g) La division générale a-t-elle fondé sa décision selon laquelle le prestataire n’avait pas prouvé sa disponibilité pour travailler sur des erreurs de fait importantes concernant les démarches qu’il faisait pour trouver du travail?
  10. h) La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en ne tenant pas compte de l’impact de la pandémie lorsqu’elle a décidé que les démarches de recherche d’emploi du prestataire étaient insuffisantes?
  11. i) La division générale a-t-elle décidé que le prestataire avait établi une condition personnelle qui limitait indûment ses chances de retourner sur le marché du travail sans tenir compte de la preuve de son expérience dans le secteur de l’automobile?
  12. j) La division générale a-t-elle mal appliqué le critère juridique de la disponibilité sous le régime de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi) en confondant le désir du prestataire de trouver du travail avec ses démarches pour trouver du travail?

Analyse

[16] Le prestataire soutient que la division générale a manqué à l’équité procédurale, a commis des erreurs de droit et a fondé sa décision sur des erreurs de fait importantes.

[17] Si l’un de ces types d’erreurs était établi, je pourrais intervenir dans la décision de la division généraleNote de bas de page 9.

La division générale n’a pas manqué à l’équité procédurale

[18] Le prestataire soutient que la division générale a manqué à l’équité procédurale en n’exigeant pas que la Commission lui fournisse certains renseignements qu’il avait demandés.

[19] Le 2 février 2022, le prestataire a écrit au Tribunal pour lui demander d’ordonner à la Commission de lui fournir certains renseignements. Il a demandé tous les enregistrements audios et notes manuscrites issus des conversations qu’il a eues avec les deux premiers agents de la Commission avec lesquels il a parlé. Il a également demandé les notes manuscrites de l’agent de révision de la Commission et des renseignements manquants concernant la demande de prestationsNote de bas de page 10.

[20] Le 10 février 2022, le 14 février 2022 et le 15 février 2022, le prestataire a réitéré sa demande que le Tribunal obtienne les renseignements qu’il demandait. Il a également demandé que le Tribunal exige de la Commission qu’elle prouve l’enregistrement audio et les notes manuscrites d’un appel téléphonique qu’il a eu le 18 janvier 2021 avec un agent de la CommissionNote de bas de page 11.

[21] Le 15 février 2022, la division générale a écrit au prestataire pour l’informer qu’elle n’avait pas les renseignements qu’il avait demandés et qu’elle ne pouvait pas contraindre la Commission à les fournir. La division générale a suggéré au prestataire de faire une demande en vertu de la Loi sur l’accès à l’information et la protection des renseignements personnels et lui a fourni l’adresse du site Web où une telle demande pouvait être présentée. La division générale a demandé au prestataire de confirmer s’il choisissait cette voie, auquel cas son dossier serait mis en suspens jusqu’à ce qu’il ait reçu une réponse à sa demandeNote de bas de page 12.

[22] Le prestataire a répondu le 18 février 2022 que la division générale avait tort de demander qu’il opte pour une demande d’accès à l’information pour obtenir les renseignements. Il a fait valoir qu’il était essentiel, aux fins d’une procédure appropriée, de s’assurer qu’il obtienne tous les renseignements pertinents en la possession de la Commission. Il a dit qu’il s’agissait d’une violation des droits qui lui sont garantis par l’article 7 de la CharteNote de bas de page 13.

[23] Au début de l’audience du prestataire, à titre de question préalable à l’audience, la membre de la division générale a examiné la question de la divulgation avec le prestataire. Elle lui a expliqué qu’il pouvait témoigner sur toute incohérence dans les renseignements de la Commission. Elle a également expliqué qu’elle pourrait ajourner l’audience s’il souhaitait faire une demande d’accès à l’information pour tenter d’obtenir les renseignements dont il avait besoin. Le prestataire a confirmé qu’il voulait aller de l’avant avec la tenue de son audienceNote de bas de page 14.

[24] La Commission soutient que, dans ces circonstances, la division générale n’a pas manqué à l’équité procédurale. La division générale a donné au prestataire la possibilité de présenter une demande d’accès à l’information, mais il a décidé d’aller de l’avant avec son audience.

[25] Le prestataire soutient que la membre de la division générale a admis dans sa décision que la Commission a fourni une preuve incomplète ou incohérenteNote de bas de page 15. Il affirme que les renseignements manquants ont nui à sa capacité de connaître la preuve qu’il devait réfuter.

[26] Conformément au Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale, la Commission est tenue de déposer tous les documents en sa possession qui sont pertinents quant à la décision portée en appelNote de bas de page 16. Le Tribunal fournit les documents reçus de la Commission aux autres parties, à savoir en l’espèce le prestataire.

[27] Les principes de justice naturelle comprennent le droit à une audience équitable. Le droit à une audience équitable devant le Tribunal comprend certaines protections procédurales comme le droit à un décideur impartial et le droit à un avis de l’audience. Il comprend également le droit d’une partie de connaître la preuve qu’elle doit réfuter et d’avoir la possibilité de répondre à cette preuveNote de bas de page 17.

[28] Toutefois, l’équité procédurale ne comprend pas l’obligation pour la division générale de contraindre la Commission à fournir des documents. Bien que la division générale puisse renvoyer une question à la Commission relativement à une demande de prestations aux fins d’enquête et de rapport, la division générale n’a aucun pouvoir d’assignationNote de bas de page 18.

[29] Le prestataire affirme que sa capacité de connaître la preuve qu’il devait réfuter a été compromise en raison de l’absence de divulgation, mais il n’a fourni aucune explication à cet égard. Rien n’indique que la Commission avait les renseignements demandés par le prestataire. Plus important encore, la division générale n’a pas fondé sa décision sur des renseignements de la Commission qui n’avaient pas été fournis au prestataire.

[30] Dans les cas où elle a relevé une incohérence ou une lacune dans les renseignements fournis par la Commission, la division générale a privilégié le témoignage du prestataire. Par exemple, la division générale a déclaré ce qui suit : « Je souscris à l’argument du prestataire selon lequel la Commission a fourni une preuve incomplète ou incohérente, notamment des descriptions différentes de ses heures de cours. J’ai donc accordé plus de poids à son témoignage sur ces questions. »Note de bas de page 19

[31] En ce qui concerne l’appel téléphonique du 18 janvier 2021, la division générale a accepté le témoignage du prestataire selon lequel un agent de la Commission lui avait dit qu’avoir l’assurance raisonnable d’obtenir un autre emploi lui permettrait de démissionner et de toucher des prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 20.

[32] Le prestataire a reçu les documents sur lesquels la Commission s’appuyait et les observations de la Commission avant l’audienceNote de bas de page 21. Ces observations expliquaient la thèse de la Commission sur les raisons pour lesquelles elle avait exclu le prestataire du bénéfice des prestations ou l’avait déclaré inadmissible à celui-ciNote de bas de page 22. Le prestataire était donc au courant de la preuve qu’il devait réfuter.

[33] Le prestataire a également eu pleinement l’occasion de réfuter la preuve faite contre lui. Il a eu la possibilité, avant l’audience et à l’audience, d’ajourner son audience pour présenter une demande d’accès à l’information à la Commission. Il a choisi de ne pas se prévaloir de cette option et d’aller de l’avant avec la tenue de l’audience dans son dossier.

[34] Le prestataire a témoigné à l’audience. Il a donc eu l’occasion d’expliquer en quoi il contestait le contenu des notes de la Commission et ce qui a été dit pour les appels téléphoniques avec les agents de la Commission, pour lesquels aucune note n’a été fournie. Le prestataire a également eu l’occasion de présenter des observations écrites à la division générale avant et après l’audienceNote de bas de page 23.

[35] Je conclus donc que la division générale n’a pas manqué à l’équité procédurale.

La division générale n’a commis aucune erreur susceptible de contrôle lorsqu’elle a décidé que le prestataire avait quitté volontairement son emploi sans justification

[36] La Commission a exclu le prestataire du bénéfice des prestations à compter du 8 janvier 2021 parce qu’elle a décidé qu’il avait quitté volontairement son emploi à cette date sans justification. Le prestataire a porté cette décision en appel devant la division générale.

[37] La Loi sur l’assurance-emploi (Loi) prévoit que le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il quitte volontairement son emploi sans « justification »Note de bas de page 24.

[38] Personne ne conteste que le prestataire a quitté volontairement son emploi le 8 janvier 2021.

[39] La division générale devait décider si le prestataire était fondé à quitter son emploi au moment où il l’a fait.

[40] Pour démontrer qu’il était fondé à quitter son emploi, le prestataire doit prouver que, compte tenu de toutes les circonstances, y compris celles énoncées par la loi, son départ constituait la seule solution raisonnable.

[41] Le prestataire a fait valoir que les circonstances de son départ comprenaient certaines des circonstances énoncées dans la loi. Il a déclaré qu’il avait quitté son emploi parce que des modifications importantes avaient été apportées à son salaire et à ses fonctions et qu’il avait l’assurance raisonnable d’obtenir un autre emploi dans un avenir immédiat auprès de l’employeur qui l’avait mis à piedNote de bas de page 25. Il a soutenu qu’il s’agissait des raisons pour lesquelles il avait démissionné et que le retour à l’apprentissage en personne au collège était une raison secondaire de quitter son emploi.

[42] La division générale a décidé que les circonstances du départ du prestataire ne comprenaient pas une modification importante de ses fonctions au travail ni une modification importante de ses conditions de rémunération. La division générale a également conclu que le prestataire n’avait pas l’assurance d’obtenir un autre emploi dans un avenir immédiat lorsqu’il a démissionné.

[43] La division générale en est arrivée à la conclusion de fait que le prestataire avait quitté son emploi pour reprendre ses études. Elle a conclu que, compte tenu de cette circonstance, le prestataire avait comme solution raisonnable de conserver son emploi. La division générale a donc conclu que le prestataire n’avait pas démontré qu’il était fondé à quitter son emploi.

[44] La Commission soutient que la division générale n’a commis aucune erreur lorsqu’elle en a décidé ainsi. Elle soutient que la division générale a appliqué le droit établi aux faits et que sa décision était appuyée par la preuve.

[45] La Commission souligne que le prestataire a dit à la Commission qu’il avait quitté son emploi pour se rendre dans une autre ville et y reprendre sa formation en classe au collègeNote de bas de page 26. La Commission soutient qu’il s’agissait de la principale raison pour laquelle le prestataire avait dû déménager. La Commission maintient la décision de la division générale selon laquelle une décision personnelle, assortie d’une seule promesse de son ancien employeur de lui offrir peut-être du travail, n’est pas considérée comme étant un motif valable au sens de la loi. Le prestataire n’a pas démontré devant la division générale que son départ constituait la seule solution raisonnable.

La division générale n’a pas fondé sa décision sur des erreurs de fait importantes

[46] Le prestataire soutient que la division générale a fondé sa décision selon laquelle il n’était pas fondé à démissionner sur des erreurs de fait concernant les circonstances de son départ.

[47] La division d’appel ne peut intervenir qu’en présence de certains types d’erreurs de fait. Selon la loi, je ne peux intervenir que si la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissanceNote de bas de page 27.

[48] Une conclusion de fait tirée de façon abusive ou arbitraire est une conclusion qui contredit carrément la preuve ou n’est pas étayée par la preuveNote de bas de page 28.

[49] Les conclusions de fait tirées sans tenir compte des éléments de preuve comprendraient les circonstances où la conclusion n’était rationnellement étayée d’aucun élément de preuve ou celles où le décideur a omis de tenir raisonnablement compte d’éléments de preuve importants qui étaient contraires à sa conclusionNote de bas de page 29.

Aucune modification importante des fonctions au travail

[50] Le prestataire soutient que la division générale a tiré une conclusion de fait erronée selon laquelle une modification importante de ses fonctions n’était pas une circonstance dans laquelle il a démissionnéNote de bas de page 30.

[51] La division générale en est arrivée à la conclusion de fait que les circonstances du départ du prestataire ne comprenaient pas une modification de ses fonctions au travail. Elle a reconnu que la pandémie a entraîné des changements importants dans la situation de travail de nombreux prestataires. Elle a noté que le prestataire a dit que ces changements avaient été mis en place lorsqu’il a commencé à travailler en juillet 2020. La division générale a conclu que cela signifiait que le prestataire n’avait pas démontré qu’une modification apportée à ses fonctions pendant ce contrat de travail l’avait forcé à démissionnerNote de bas de page 31.

[52] La division générale a également fait remarquer que même si les fonctions au travail avaient été modifiées, il était plus probable qu’improbable que l’employeur s’attende à ce que les étudiants travaillent là où on avait besoin d’eux et s’acquittent des tâches jugées essentielles à l’époque compte tenu des règles relatives à la COVID-19Note de bas de page 32.

[53] Le prestataire soutient que la division générale a supposé à tort que la réduction des heures était la raison de sa rémunération réduite, alors que la réduction de la rémunération était en fait le résultat d’une modification importante des fonctions du prestataire.

[54] Le prestataire soutient également que la division générale a supposé à tort qu’il avait été embauché à titre d’« étudiant » pour effectuer les tâches plus banales de l’entreprise, malgré le fait qu’il avait acquis plusieurs années d’expérience dans le secteur de l’automobile et qu’il était reconnu comme un expert des besoins des consommateurs dans ce secteur.

[55] La conclusion de la division générale concordait avec la preuve.

[56] Le RE au dossier révèle que le prestataire a travaillé du 27 juillet 2020 au 8 janvier 2021Note de bas de page 33.

[57] Selon le témoignage du prestataire, ce dernier a été embauché pour exercer des fonctions différentes de celles qu’il avait auparavant assumées auprès du même employeur. Le prestataire a témoigné qu’il avait déjà travaillé pour le concessionnaire d’automobiles comme gérant du parc de voitures. Toutefois, lorsqu’il a été réembauché en juillet 2020, il travaillait au service des pièces et faisait du travail de réception. Il a témoigné que ces nouvelles fonctions ont commencé en juillet 2020Note de bas de page 34.

[58] Le prestataire avait fourni une lettre du concessionnaire d’automobiles datée du 2 février 2022. La lettre expliquait que le prestataire avait travaillé pour le concessionnaire d’automobiles de mai 2018 à janvier 2021. Elle expliquait aussi que le prestataire avait des heures de travail réduites en raison de la pandémie de COVID-19. On pouvait y lire en outre que le prestataire avait été réembauché à titre temporaire en juillet 2020. La lettre expliquait également que le concessionnaire avait été soumis à de nombreuses fermetures imposées par le gouvernement au motif que les ventes d’automobiles étaient reconnues comme étant non essentielles. Elle ajoutait que le concessionnaire avait été soumis à une réduction des heures d’ouverture et que les pénuries de fournisseurs avaient également entraîné une modification de ses tâches. Il a été noté que les heures de travail du prestataire ont été considérablement réduites.

[59] La division générale n’a pas mentionné cette lettre, mais elle n’avait pas à le faire. Elle n’était pas contraire à ses conclusions. Bien qu’elle fasse référence à une modification des fonctions dont le poste était assorti, la lettre ne précise pas quand cela s’est produit. Elle n’est donc pas incompatible avec la conclusion de la division générale selon laquelle il n’y a pas eu de modification importante des fonctions du mois de juillet 2020 au 8 janvier 2021.

[60] Le fait que le prestataire exerçait des fonctions différentes lorsqu’il avait auparavant travaillé pour le même employeur n’est pas pertinent. La division générale a correctement interprété cette circonstance comme n’incluant qu’une modification importante des fonctions de travail survenue pendant la période d’emploi du 27 juillet 2020 au 8 janvier 2021.

[61] J’admets que la division générale a peut-être supposé à tort que le prestataire a été embauché à titre d’« étudiant ». Mais cette conclusion de fait n’a eu aucune incidence sur le résultat. La conclusion de la division générale reposait sur le fait que les fonctions du prestataire n’avaient pas beaucoup changé entre le 27 juillet 2020 et le 8 janvier 2021.

Aucune modification importante des conditions de rémunération

[62] Le prestataire affirme que la division générale a commis une erreur de fait lorsqu’elle a décidé qu’une modification importante des conditions de rémunération n’était pas une circonstance dans laquelle il a démissionné.

[63] La division générale en est arrivée à la conclusion de fait qu’il n’y avait pas eu de modification importante du salaire du prestataire.

[64] À cet égard, la division générale a souligné que le RE révélait certaines fluctuations entre les périodes de paie. Mais il ne faisait état d’aucune réduction importante dans l’ensemble pendant son emploiNote de bas de page 35.

[65] La division générale a également noté que le prestataire a déclaré qu’il avait été embauché pour effectuer des heures réduites en juillet 2021, ce qui aurait signifié une réduction de salaire dès le départ.

[66] La division générale a rejeté l’affirmation du prestataire selon laquelle la Commission aurait dû communiquer avec ses employeurs et fournir des RE de ses emplois antérieurs à mars 2020 au motif que les heures et la rémunération du prestataire dans ses emplois antérieurs n’étaient pas pertinentes relativement à sa situation dans laquelle il se trouvait lorsqu’il a démissionné.

[67] Cette circonstance prévue dans la loi concerne la situation où les « conditions de rémunération » sont modifiées pendant la durée de l’emploi. Autrement dit, lorsqu’il y a eu une modification importante de la rémunération convenue.

[68] Cette circonstance ne concerne pas les situations où une personne a été réembauchée et touche un taux de rémunération inférieur à celui qu’elle touchait auparavant. Par conséquent, la division générale a conclu à juste titre que les RE d’emplois antérieurs n’étaient pas pertinents.

[69] Quoi qu’il en soit, il n’y avait aucune preuve devant la division générale que l’employeur avait modifié les conditions de rémunération convenues. Comme l’a fait remarquer la division générale, la preuve était plutôt qu’il y avait eu une réduction des heures d’ouverture, ce qui avait entraîné une baisse globale de la rémunération.

[70] À cet égard, le prestataire a témoigné que la réduction des heures d’ouverture en raison de la pandémie signifiait une réduction de son salaireNote de bas de page 36.

[71] De plus, la lettre du concessionnaire d’automobiles explique que les heures de travail du prestataire étaient réduites en raison de la pandémie de COVID-19Note de bas de page 37.

[72] La décision de la division générale selon laquelle une modification importante des conditions de rémunération n’était pas une circonstance de départ était étayée par la preuve.

Aucune assurance raisonnable d’obtenir un autre emploi dans un avenir immédiat

[73] Le prestataire soutient que la division générale a conclu à tort qu’une assurance raisonnable d’obtenir un emploi dans un avenir immédiat n’était pas une circonstance dans laquelle il a quitté son emploi.

[74] Le prestataire affirme qu’en tirant cette conclusion, la division générale n’a pas accordé suffisamment de poids à la lettre de l’employeur confirmant qu’il s’attendait à un rappel en janvier 2021.

[75] Le prestataire soutient également que la division générale a commis une erreur de droit lorsqu’elle a interprété « avenir immédiat » sans tenir compte des répercussions de la pandémie.

[76] Le prestataire a fourni à la division générale une lettre du directeur général de son employeur datée du 2 février 2022Note de bas de page 38. La lettre expliquait que l’employeur avait l’intention de rappeler immédiatement le prestataire au travail en janvier 2021. Elle disait en outre qu’en raison de la pandémie de COVID-19 en cours, son rappel avait été retardé du fait du manque de stocks, de la réduction des ventes et du ralentissement général des activités et qu’ils attendaient en ce moment activement le rappel du prestataire.

[77] La division générale n’a pas négligé la lettre de l’employeur. Elle en a fait expressément mention dans sa décision. La division générale a noté le témoignage du prestataire selon lequel, lorsque l’employeur l’a mis à pied en mars 2020 en raison de la pandémie, il lui a assuré qu’il le réembaucherait dès qu’il le pourrait. La division générale a renvoyé à la lettre de l’employeur datée du 22 février 2022, confirmant qu’il s’agissait d’un engagement continuNote de bas de page 39.

[78] La division générale a renvoyé à la jurisprudence de la Cour d’appel fédérale selon laquelle pour démontrer qu’il avait l’assurance raisonnable de revenir dans un avenir immédiat, le prestataire devait satisfaire à trois exigences : Il devait démontrer que, lorsqu’il a démissionné, il savait qu’il aurait cet autre emploi. Il devait également savoir quel serait cet emploi et à quel moment il commencerait à l’avenirNote de bas de page 40.

[79] La division générale a décidé que le prestataire ne satisfaisait qu’à la deuxième exigence : il savait qui serait l’employeur et connaissait le type d’emploi. Toutefois, la division générale a décidé que lorsque le prestataire a quitté son emploi en janvier 2021, il n’avait pas vraiment l’assurance d’un retour à son ancien emploi dans un avenir immédiat. La division générale a souligné que le prestataire n’avait même pas de date de retour provisoire. Elle a reconnu que l’employeur espérait le réembaucher, mais les assurances données en mars 2020 ne signifiaient pas qu’il avait un emploi sur lequel compter en janvier 2021Note de bas de page 41.

[80] Autrement dit, la division générale n’était pas convaincue, compte tenu de la preuve dont elle disposait, que le prestataire avait l’assurance raisonnable d’un retour à son ancien emploi dans un avenir immédiat au moment où il a démissionné.

[81] La division générale n’était pas non plus convaincue que l’assurance raisonnable d’obtenir un emploi était une raison pour laquelle le prestataire a quitté son emploi. Elle a plutôt décidé qu’il était plus probable qu’improbable que le prestataire avait quitté son emploi pour retourner aux études.

[82] Pour en arriver à cette conclusion, la division générale s’est fondée sur le motif inscrit dans le RE comme étant le suivant : « démission/retour aux études ».

[83] La division générale a pris en compte le témoignage du prestataire selon lequel le cours était secondaire, mais elle n’a pas accepté cette affirmation. Elle a déclaré qu’en réalité, le prestataire n’avait à l’époque aucun emploi qu’il pouvait reprendre et il était en train de suivre un cours collégial qu’il souhaitait mener à terme.

[84] La division générale a également noté que le collège avait repris l’apprentissage en personne en janvier 2021, de sorte que le prestataire avait dû retourner dans la ville où se trouvait le collège pour poursuivre son cours. La division générale s’est également appuyée sur le fait que, dans sa demande de révision, le prestataire a déclaré en termes clairs et sans équivoque : [traduction] « J’ai déménagé à (nom de la ville) pour retourner aux études […] pour mon cinquième semestre ».

[85] La division générale a accordé plus de poids à l’affirmation faite par le prestataire dans sa demande de révision qu’à ses déclarations ultérieures selon lesquelles il est retourné dans la ville où se trouvait le collège pour y travailler. La division générale a déclaré que cela s’expliquait par le fait que les premières affirmations spontanées d’un prestataire ont généralement plus de poids que les affirmations faites après que des prestations lui sont refusées.

[86] J’ai écouté l’enregistrement audio établi à partir de l’audience de la division générale. Le prestataire a dit qu’il avait de bonnes assurances, avant de quitter son emploi chez le concessionnaire d’automobiles, qu’il serait réembauché par son autre employeur en janvier 2021. Il a dit que son employeur avait l’intention de le rappeler au travail en janvier 2021, mais que ce rappel a été retardé en raison de la pandémieNote de bas de page 42.

[87] Toutefois, le prestataire n’a pas témoigné que l’employeur avait confirmé une date de début avant de quitter son emploi et il n’y a aucune preuve documentaire au dossier à cet effet.

[88] Il est plutôt ressorti de la preuve que le prestataire avait été informé par son employeur le 9 mars 2020 ou vers cette date que sa mise à pied était temporaire et qu’il serait rappelé au travailNote de bas de page 43. Il a dit à la Commission qu’il n’avait pas de date ferme de réemploi au moment où il a quitté son emploiNote de bas de page 44.

[89] La division générale a le droit d’apprécier la preuve dont elle est saisie. En l’espèce, il y avait des éléments de preuve à l’appui de sa conclusion selon laquelle le prestataire a quitté son emploi pour retourner aux études et les circonstances de son départ ne comprenaient pas une assurance raisonnable d’obtenir un emploi dans un avenir immédiat.

[90] Le prestataire soutient également que la division générale a mal interprété ce que signifie « avenir immédiat ». Il affirme que la division générale n’a pas permis une interprétation tenant compte des difficultés et des réalités auxquels le prestataire devait faire face. Le prestataire soutient qu’en raison de la pandémie, l’« avenir immédiat » était incertain pour de nombreuses entreprises.

[91] La division générale a fait remarquer que l’expression « avenir immédiat » n’est pas définie dans la loi et qu’elle ne signifiait pas que le prestataire devait avoir une date de rappel « imminente »Note de bas de page 45. La division générale a toutefois décidé que l’interprétation simple du mot « immédiat » ne s’appliquait pas à un délai de près d’un an, soit de mars 2020, date à laquelle on a mis le prestataire à pied et on lui a promis de le rappeler au travail, à janvier 2021, date à laquelle il attendait encore qu’on le rappelle.

[92] Je crois comprendre que la division générale voulait dire qu’« avenir immédiat » ne signifiait pas une période indéfinie ou incertaine.

[93] La division générale a correctement décrit et appliqué le critère établi par la Cour d’appel fédérale pour démontrer l’existence d’une « assurance raisonnable d’obtenir un autre emploi dans un avenir immédiat ». Comme l’a déclaré la division générale, le critère exige qu’au moment où une personne décide de quitter un emploi, elle sache qu’elle aurait un emploi, quel sera cet emploi chez quel employeur et à quel moment à l’avenir elle aurait cet emploiNote de bas de page 46.

[94] La conclusion de la division générale reposait sur le fait que le prestataire ne savait pas exactement quand il serait rappelé au moment de son départ, et non sur le fait que la date de début n’était pas dans un « avenir immédiat ». La jurisprudence de la Cour d’appel fédérale exige qu’un prestataire ait à tout le moins des renseignements précis sur sa situation d’emploi future au moment de quitter son emploi actuel.

[95] Je ne peux pas intervenir dans la conclusion de la division générale dans laquelle celle-ci applique correctement le droit établi aux faitsNote de bas de page 47. Je ne peux pas non plus intervenir dans l’appréciation de la preuve par la division générale, même si j’aurais pu apprécier la preuve différemment ou en arriver à une conclusion différenteNote de bas de page 48.

L’appel téléphonique du 18 janvier 2021 n’était pas une circonstance du départ

[96] Le prestataire affirme que la division générale a commis une erreur de fait lorsqu’elle a décidé que sa conversation téléphonique avec un agent de la Commission le 18 janvier 2021, au cours de laquelle on lui a dit que le fait d’avoir une assurance raisonnable d’obtenir un emploi lui permettrait de démissionner, n’était pas une circonstance dans laquelle il a quitté son emploi.

[97] Le prestataire soutient que la membre de la division générale a [traduction] « conclu qu’il était plus probable » que l’agent ne disposait pas de tous les faits et qu’il a donné de mauvais conseils au prestataire au détriment de ce dernier, sans que la division générale ait quelque détail que ce soit sur cette conversation.

[98] La division générale a accepté le témoignage du prestataire donné sous serment, selon lequel un agent de la Commission lui a dit qu’avoir l’assurance raisonnable d’obtenir un autre emploi lui permettrait de démissionner et de toucher des prestations d’assurance-emploi. La division générale a toutefois conclu qu’il était plus probable qu’improbable que l’agent ignorait que le prestataire attendait un rappel depuis près de dix mois déjà. La division générale a déclaré que même si l’agent lui avait fourni des informations erronées ou incomplètes, la loi devait quand même être appliquéeNote de bas de page 49.

[99] Je conviens avec le prestataire que la conclusion de la division générale au sujet de ce que l’agent avait compris lorsqu’il lui a fourni des renseignements a été tirée sans preuve quant à la compréhension de la situation du prestataire par l’agent. Toutefois, ce que l’agent savait de la situation du prestataire n’est pas pertinent. La division générale a accepté le témoignage du prestataire selon lequel l’agent lui avait dit qu’il pouvait démissionner s’il avait l’assurance raisonnable d’obtenir un autre emploi.

[100] Quoi qu’il en soit, peu importe ce qu’on a dit au prestataire lors de cet appel, cela n’aurait pas changé la décision de la division générale, car cet appel a eu lieu le 18 janvier 2021, après que le prestataire a démissionné le 8 janvier 2021.

[101] Seules les circonstances au moment où une personne quitte son emploi sont pertinentes, et non ce qui se passe aprèsNote de bas de page 50.

[102] La division générale a décidé que, compte tenu de la circonstance dans laquelle le prestataire a quitté son emploi, à savoir son retour aux études, le prestataire avait comme solution raisonnable de conserver son emploi jusqu’à ce qu’il obtienne un autre emploi. La conclusion de la division générale est conforme à la jurisprudence de la Cour d’appel fédérale selon laquelle les prestataires qui ont quitté leur emploi pour faire des études n’ont pas démontré qu’ils étaient fondés à quitter leur emploiNote de bas de page 51.

[103] Je n’ai trouvé aucune erreur susceptible de contrôle qui me permettrait d’intervenir dans la décision de la division générale selon laquelle le prestataire n’était pas fondé à quitter son emploi le 8 janvier 2021.

La division générale n’a commis aucune erreur susceptible de contrôle lorsqu’elle a décidé que le prestataire n’avait pas prouvé qu’il était disponible pour travailler

[104] Le prestataire qui touche des prestations régulières doit prouver qu’il est capable de travailler et disponible à cette fin, mais qu’il est incapable de trouver un emploi convenableNote de bas de page 52.

[105] Le 2 novembre 2021, la Commission a déclaré le prestataire inadmissible au bénéfice des prestations régulières à compter du 11 janvier 2021 jusqu’au 31 août 2021 et à compter du 7 septembre 2021 parce qu’il suivait un cours de formation de sa propre initiative et qu’il n’avait pas prouvé qu’il était disponible pour travailler.

[106] Le prestataire a porté la décision de la Commission en appel devant la division générale du Tribunal.

[107] La division générale devait décider si le prestataire avait prouvé qu’il était disponible pour travailler.

[108] La loi dit que les étudiants à temps plein sont présumés ne pas être disponibles pour travaillerNote de bas de page 53.

[109] Une personne peut réfuter cette présomption de deux façons. L’une d’elles consiste à montrer qu’elle a par le passé travaillé à temps plein pendant ses étudesNote de bas de page 54. L’autre façon consiste à démontrer qu’il existe des circonstances exceptionnellesNote de bas de page 55.

[110] Si une personne réfute la présomption, cela signifie simplement qu’on ne supposera pas qu’elle n’est pas disponible pour travailler. Toutefois, elle doit quand même prouver qu’elle est réellement disponible pour travailler. Selon la loi, il y a trois éléments à considérer pour déterminer si une personne est disponible pour travailler. Il s’agit de savoir si la personneNote de bas de page 56 :

  • a le désir de retourner sur le marché du travail aussitôt qu’un emploi convenable sera offert;
  • a exprimé ce désir par des démarches pour se trouver un emploi convenable;
  • n’a pas établi de conditions personnelles pouvant limiter indûment ses chances de retour sur le marché du travail.

[111] Personne ne conteste que le prestataire était étudiant à temps pleinNote de bas de page 57.

[112] La division générale a décidé que le prestataire avait fait la preuve de circonstances exceptionnelles pour réfuter la présomption de non-disponibilité. Elle a expliqué que la nature de l’emploi précédent du prestataire, qui était un emploi à temps partiel, et sa capacité démontrée de maintenir au moins ce niveau d’emploi pendant ses études à temps plein constituaient une circonstance exceptionnelle. Elle a donc examiné la question de savoir si le prestataire avait satisfait au critère de la disponibilité.

[113] La division générale a admis que le prestataire souhaitait sincèrement retourner sur le marché du travail.

[114] Elle a toutefois décidé que le prestataire n’avait pas fait suffisamment de démarches pour trouver du travail. À cet égard, la division générale a noté que la recherche d’emploi du prestataire ne témoignait pas d’une motivation quotidienne à trouver du travail pendant qu’il s’attendait à être rappelé au travail. Elle a décidé qu’attendre un rappel n’équivalait pas à vouloir retourner sur le marché du travail de toutes les façons possibles. C’était plutôt une préférence personnelleNote de bas de page 58.

[115] Plus particulièrement, la division générale s’est concentrée sur le fait que le prestataire n’avait postulé aucun emploi pendant la période où il avait touché des prestations d’assurance-emploi.

[116] La division générale a également conclu que le fait pour le prestataire de suivre son cours n’était pas une condition personnelle qui limitait ses chances de retourner au travail, car il avait par le passé été en mesure de travailler à temps partiel pendant ses études.

[117] Toutefois, la division générale a décidé que la recherche d’emploi du prestataire montrait une préférence marquée pour les emplois dans le secteur de l’automobile, où, a-t-il affirmé, il n’y avait aucun emploi dans la ville où il fréquentait l’écoleNote de bas de page 59. La division générale a conclu qu’il était plus probable qu’improbable que cette condition personnelle avait limité ses chances d’obtenir d’autres emplois convenables.

[118] La Commission affirme que la division générale n’a commis aucune erreur susceptible de contrôle lorsqu’elle a décidé que le prestataire n’avait pas démontré qu’il était disponible pour travailler.

[119] La Commission soutient que la division générale a examiné la preuve et a conclu que les démarches du prestataire n’étaient pas suffisantes ni suffisamment soutenues pour satisfaire au deuxième facteur de la disponibilité.

[120] La Commission soutient que la conclusion de la division générale était conforme à la jurisprudence de la Cour d’appel fédérale selon laquelle un prestataire ne peut restreindre son réemploi à son ancien employeur ou à son employeur actuel et ne peut simplement attendre d’être rappelé. Le prestataire doit chercher activement un emploiNote de bas de page 60.

[121] La Commission maintient également que la division générale a correctement conclu, sur le fondement de la preuve, que le prestataire a établi une condition personnelle limitant ses chances d’obtenir des emplois convenables.

[122] La Commission affirme que le prestataire demande à la division d’appel d’apprécier à nouveau la preuve, ce que la division d’appel ne peut faire. Elle soutient que la division générale a correctement soupesé la preuve et que ses motifs expliquent clairement sa décision.

La division générale n’a pas commis d’erreurs factuelles

Les démarches pour trouver un emploi étaient insuffisantes

[123] Le prestataire soutient que la division générale a commis un certain nombre d’erreurs factuelles qui ont influé sur sa conclusion selon laquelle il ne faisait pas suffisamment de démarches pour trouver un emploi convenable.

[124] Le prestataire soutient ce qui suit :

  • La division générale fait référence à des « inscriptions caviardées » dans la recherche d’emploi, mais il s’agissait de recherches personnelles sur Google qui n’étaient pas pertinentes.
  • La division générale a tiré une conclusion de fait erronée selon laquelle il limitait son réemploi à son ancien employeur et qu’il attendait d’être rappelé par ce dernier.
  • La membre de la division générale a déclaré que les inscriptions répétitives à une même date et les multiples visites répétitives effectuées sur le même site, AutoIQ, ne montrent pas que le prestataire a cherché régulièrement du travail. Toutefois, la division générale a également déclaré que le prestataire avait consulté une fois les sites d’Air Canada, de Fedex et de MAG Aerospace.
  • La division générale a fait l’hypothèse défavorable sans confirmer auprès du prestataire que le site Web qu’il a utilisé pour la recherche d’emploi, « AutoIQ », ne concernait qu’une concession, alors que ce site incluait des annonces d’emplois dans un réseau de concessionnaires d’automobiles en Ontario, y compris des options de travail en personne et virtuelles.
  • La division générale affirme que [traduction] « l’historique de recherches ne montre pas que le prestataire a examiné des sites relevant du secteur de l’alimentation et des boissons », puis a fait référence à sa recherche d’emploi dans un hôtel. Le prestataire soutient qu’une quantité importante d’hôtels, voire la majorité d’entre eux, servent de la nourriture et des boissons.
  • La division générale n’a pas tenu compte du fait que le prestataire avait surveillé activement des secteurs d’activités, notamment celui de l’aviation, de l’hôtellerie (ce qui peut raisonnablement sous-entendre le service à la clientèle et le secteur de l’alimentation et des boissons), les services Web, les services financiers et les loisirs.
  • La division générale a qualifié le prestataire d’« étudiant » à tort, faisant complètement fi de ses antécédents professionnels spécialisés dans le secteur de l’automobile.
  • La division générale a négligé l’incidence de la pandémie sur tous les secteurs d’activités au Canada.

[125] La division générale a examiné en détail la preuve de recherches d’emploi du prestataire, et elle a véritablement analysé cette preuveNote de bas de page 61.

[126] La division générale n’était pas convaincue, d’après la preuve de recherches d’emploi, que le prestataire avait fait suffisamment de démarches pour satisfaire au deuxième facteur de la disponibilité. Elle a conclu que cela était attribuable au fait que la recherche d’emploi du prestataire était passive et qu’elle ne faisait état d’aucune demande d’emploi tout au long des mois où il a touché des prestations d’assurance-emploi.

[127] La division générale n’a pas négligé le témoignage du prestataire selon lequel il passait en revue des emplois en ligne dans des secteurs d’activités autres que celui de l’automobile. Elle a mentionné le fait que la majorité des recherches du prestataire ont été effectuées dans le secteur de l’automobile, mais qu’à quelques reprises, il a cherché des emplois en ligne, des emplois dans le domaine de l’aviation ou de préposés aux loisirs. Il a à une occasion consulté une annonce d’emploi dans un hôtelNote de bas de page 62.

[128] Le prestataire affirme que la division générale l’a qualifié à tort d’« étudiant », sans tenir compte de ses antécédents professionnels spécialisés dans le secteur de l’automobile.

[129] Toutefois, le commentaire de la division générale selon lequel il était étudiant se rapportait spécifiquement à deux emplois contenus dans l’historique de recherches d’emploi du prestataire. Il s’agissait de postes d’associé directeur et de directeur des services financiers dans une concession. La division générale a noté qu’il n’y avait aucune preuve que ses compétences et sa formation en tant qu’étudiant correspondaient à celles dont ces postes étaient assortisNote de bas de page 63. La division générale se concentrait expressément sur le fait qu’il n’y avait aucune preuve que le prestataire avait l’expérience requise pour occuper ces deux emplois en particulier.

[130] La division générale a bien noté que diverses inscriptions dans les recherches d’emploi étaient caviardées. Mais cela n’a aucune importance. La question en litige était la suffisance des démarches de recherche d’emploi du prestataire.

[131] La division générale a fait remarquer que le prestataire a effectué plusieurs visites répétées sur le même site, AutoIQ. Le prestataire affirme que la division générale n’a pas précisé qu’AutoIQ incluait des offres d’emploi pour un réseau de concessionnaires d’automobiles de l’Ontario, y compris des options de travail en personne et virtuelles.

[132] J’ai examiné l’enregistrement audio de l’audience tenue par la division générale et le dossier. Je ne vois aucune preuve qu’un réseau de concessionnaires était rattaché à ce site. Je note plutôt que le prestataire a mentionné qu’AutoIQ se rapportait à ses deux anciens employeursNote de bas de page 64. La division générale ne peut avoir omis de tenir compte d’éléments de preuve qui ne lui ont pas été fournis.

[133] La division générale n’a pas conclu par erreur que la seule activité de recherche d’emploi du prestataire était l’attente d’un rappel. La division générale a noté le témoignage du prestataire selon lequel il croyait que le fait d’attendre un rappel au travail était suffisant compte tenu des conseils que la Commission lui a donnés. La division générale a déclaré que le prestataire n’avait pas démontré qu’à mesure que les semaines progressaient et qu’il n’était pas rappelé au travail, il avait effectué une recherche d’emploi intensive chaque jour pour lequel il demandait des prestationsNote de bas de page 65.

[134] Autrement dit, la division générale n’était pas convaincue que le prestataire faisait suffisamment de démarches de recherche d’emploi en attendant d’être rappelé au travail. Elle n’a pas décidé que sa seule démarche avait été d’attendre d’être rappelé au travail.

[135] La division générale a pris connaissance des commentaires du prestataire selon lesquels la pandémie et les fermetures imposées par le gouvernement ont restreint le marché du travail, ce qui a rendu difficile la recherche d’emploi. Mais la division générale a souligné qu’être disposé à travailler et avoir le temps de travailler ne reviennent pas à faire des démarches réelles pour trouver du travail. La division générale a souligné que les prestataires doivent tout de même postuler des emplois. La division générale a décidé que la recherche passive n’était pas suffisante et que, même s’il pense qu’il peut être difficile d’obtenir un emploi, un prestataire doit quand même démontrer qu’il a essayéNote de bas de page 66.

[136] Cette conclusion était conforme au droit. Comme la Commission l’a souligné, la Cour d’appel fédérale a expliqué en des termes clairs que, peu importe la faible probabilité de succès qu’un prestataire estime avoir dans ses recherches d’emploi, il doit tout de même chercher activement du travail pour prouver sa disponibilitéNote de bas de page 67.

[137] La conclusion de la division générale concordait également avec la preuve. La preuve ne démontre pas un effort soutenu pour trouver un emploi, étant donné qu’aucune demande d’emploi n’a été présentée sur une période de plusieurs mois. La division générale avait le droit de conclure, compte tenu de la preuve dont elle disposait, que les démarches de recherche d’emploi du prestataire ne démontraient pas qu’il voulait retourner au travail dès qu’un emploi convenable lui serait offert.

Condition personnelle limitant indûment les chances de retour sur le marché du travail

[138] Le prestataire maintient que la conclusion de fait de la division générale selon laquelle l’accent mis par le prestataire sur des emplois dans le secteur de l’automobile était une condition personnelle qui limitait indûment ses chances d’obtenir d’autres emplois convenables était incompatible avec sa conclusion selon laquelle les prestataires doivent chercher des emplois qu’ils peuvent obtenir et était également incompatible avec l’expérience du prestataire dans le secteur de l’automobile.

[139] La division générale a conclu que le prestataire avait établi des conditions personnelles en ce qu’il attendait un rappel au travail et préférait des emplois dans le secteur de l’automobileNote de bas de page 68.

[140] La division générale a décidé que, par sa recherche d’emploi, le prestataire a démontré une préférence marquée pour les emplois dans le secteur de l’automobile, alors qu’il avait dit qu’aucun emploi n’était offert dans ce secteur dans la ville où il résidait pour fréquenter le collège. Elle a donc conclu qu’il était plus probable qu’improbable qu’il s’agissait d’une condition personnelle qui limitait ses chances d’obtenir d’autres emplois convenablesNote de bas de page 69.

[141] Je ne vois aucune erreur de fait dans cette conclusion. Elle était compatible avec la preuve. Les recherches d’emploi fournies par le prestataire sont principalement liées au secteur de l’automobileNote de bas de page 70.

[142] La conclusion de la division générale selon laquelle le fait de restreindre les recherches au secteur de l’automobile limitait indûment les chances du prestataire était liée à la preuve fournie par ce dernier selon laquelle il n’y avait pas d’emplois dans ce secteur dans la ville où il résidait. La conclusion de la division générale ne témoignait pas d’une mauvaise compréhension de son expérience dans le secteur de l’automobile.

La division générale n’a pas mal appliqué le critère juridique de la disponibilité

[143] Le prestataire affirme que la division générale a commis une erreur de droit dans la façon dont elle a appliqué le critère de la disponibilité.

[144] Le prestataire soutient que la division générale a décidé qu’il était disposé à travailler et que les exigences de son cours ne limitaient pas ses chances de gérer à la fois le travail et les études, mais elle a ensuite conclu que sa volonté de travailler n’était pas une démarche réelle pour trouver du travail.

[145] Le prestataire soutient que le désir de travailler et les démarches actives pour trouver du travail sont deux aspects différents du critère de la disponibilité. Il fait valoir que, dans sa décision, la division générale a confondu la volonté du prestataire de travailler avec ses démarches concrètes.

[146] La division générale savait que le désir de travailler et les démarches pour trouver du travail constituaient des volets différents du critère de la disponibilité et a appliqué ces volets séparément.

[147] La division générale a manifestement tenu compte des démarches faites par le prestataire pour travailler lorsqu’elle a envisagé d’évaluer le deuxième facteur de la disponibilité. Elle a examiné les dossiers de recherche d’emploi du prestataire et ses activités de recherche d’emploi lorsqu’elle a conclu que ses démarches étaient insuffisantes.

La pandémie n’est pas pertinente pour les démarches de recherche d’emploi

[148] Le prestataire soutient également que la division générale a commis une erreur de droit en ne tenant pas compte comme elle le devait de la capacité limitée du prestataire de chercher un emploi compte tenu de la pandémie de COVID-19. Il fait remarquer qu’il y avait moins de salons de l’emploi et qu’il avait dû s’en remettre aux recherches en ligne et aux quelques autres avenues qui étaient à sa disposition.

[149] La division générale n’a pas commis d’erreur de droit en ne tenant pas compte de l’incidence de la pandémie sur la recherche d’emploi du prestataire.

[150] Bien qu’il ne soit pas contraignant, le Règlement sur l’assurance-emploi fournit certaines directives pour décider si les démarches d’un prestataire ont fait état d’un désir de retourner sur le marché du travail dès qu’un emploi convenable lui serait offert.

[151] Les critères servant à déterminer si les démarches que fait un prestataire pour trouver un emploi convenable constituent des démarches habituelles et raisonnables sont le fait que les démarches du prestataire sont soutenues et consistent notamment en l’évaluation des possibilités d’emploi, la rédaction d’un curriculum vitae ou d’une lettre de présentation, l’inscription à des outils de recherche d’emploi ou auprès de banques d’emplois électroniques ou d’agences de placement, la participation à des ateliers sur la recherche d’emploi ou à des salons de l’emploi, le réseautage, la communication avec des employeurs éventuels, la présentation de demandes d’emploi et la participation à des entrevuesNote de bas de page 71.

[152] Ce critère me dit que la question de savoir si un prestataire a fait suffisamment de démarches pour démontrer qu’il souhaitait sincèrement retourner sur le marché du travail dès qu’un emploi convenable lui serait offert concerne les démarches faites par le prestataire pour trouver du travail et non des facteurs externes, comme la pandémie. Ce qui est pertinent, ce sont les types d’activités qu’un prestataire entreprend pour trouver un emploi convenable et le fait que les démarches sont soutenues.

[153] Comme je l’ai mentionné précédemment, la jurisprudence de la Cour d’appel fédérale nous enseigne que, peu importe la faible probabilité de succès qu’un prestataire estime avoir dans ses recherches d’emploi, il doit tout de même chercher activement du travail pour prouver sa disponibilité.

[154] En l’espèce, la division générale n’était pas convaincue que les démarches limitées du prestataire aient été suffisantes pour démontrer un désir sincère de retourner sur le marché du travail dès qu’un emploi convenable lui serait offert. La division générale a conclu que les démarches du prestataire étaient passives et qu’elles ne témoignaient pas d’une recherche d’emploi active.

[155] Le prestataire n’a pas démontré que la division générale a commis des erreurs susceptibles de contrôle lorsqu’elle a décidé qu’il n’était pas disponible pour travailler.

Aucune erreur susceptible de contrôle n’a été commise

[156] Je réalise que le prestataire trouvera ce résultat décevant. Toutefois, compte tenu des arguments qu’il a présentés, je n’ai relevé aucune erreur susceptible de contrôle commise par la division générale. Malheureusement, cela signifie que le trop payé subsiste.

[157] Le conseiller juridique du prestataire a expliqué que ce dernier éprouve des difficultés financières. Comme la division générale l’a souligné dans sa décision, le prestataire peut demander à la Commission de radier sa dette. Il peut également demander à l’Agence du revenu du Canada de radier la dette ou de convenir de modalités de paiementNote de bas de page 72. Si le prestataire ne l’a pas fait, il pourrait souhaiter donner suite à ces options.

[158] Je n’ai pas le pouvoir d’ordonner à ces organismes de radier une dette, mais je demanderais à la Commission ou à l’Agence du revenu du Canada de prendre en considération la demande du prestataire.

Conclusion

[159] L’appel est rejeté. La division générale n’a pas commis d’erreur qui relève des moyens d’appel autorisés.

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