Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : NL c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1591

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale — Section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : N. L.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (478831) datée du 13 juin 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Gary Conrad
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 5 décembre 2022
Personne présente à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 8 décembre 2022
Numéro de dossier : GE-22-2357

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] La prestataire n’a pas démontré qu’elle était disponible pour travailler. Par conséquent, elle est inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[3] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé que la prestataire n’était pas disponible pour travailler du 18 janvier 2021 au 22 avril 2022 parce qu’elle était aux études. La Commission soutient que les études de la prestataire ont limité sa disponibilité parce qu’elle ne pouvait travailler qu’en respectant son horaire de cours.

[4] La prestataire affirme que la Commission a mis beaucoup trop de temps à se prononcer sur cette question, car elle a toujours déclaré dans ses rapports qu’elle était aux études; ce n’est que des années plus tard que la Commission a décidé qu’elle n’était pas disponible. On aurait dû lui dire dès le début qu’elle allait devoir rembourser l’argent.

[5] La prestataire affirme qu’elle devait travailler pour survivre et qu’elle aurait modifié, au besoin, son horaire de cours pour travailler.

[6] Je dois décider si la prestataire a prouvé qu’elle était disponible pour travailler. La prestataire doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable (il y a plus de chances) qu’elle était disponible pour travailler.

Question que je dois examiner en premier

50(8) Inadmissibilité

[7] Dans ses observations, la Commission affirme avoir déclaré la prestataire inadmissible au titre de l’article 50(8) de la Loi sur l’assurance-emploi. L’article 50(8) de la Loi porte sur le défaut d’une personne de prouver à la Commission qu’elle faisait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi convenable.

[8] Même si je ne suis pas lié par cette décision, je trouve le raisonnement de l’arrêt TM c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2021 TSS 11 convaincant : il ne suffit pas que la Commission discute des démarches de recherche d’emploi avec la prestataire. La Commission doit plutôt demander expressément une preuve à la prestataire et lui expliquer quel type de preuve répondrait à une norme « habituelle et raisonnable ».

[9] En examinant la preuve, je n’ai vu aucune demande de la Commission à la prestataire pour qu’elle prouve ses démarches habituelles et raisonnables, ni aucune affirmation de la Commission selon laquelle, si la prestataire l’a fait, sa preuve était insuffisante.

[10] Je conclus également que la Commission n’a présenté aucune observation détaillée sur la façon dont la prestataire n’a pas réussi à prouver qu’elle faisait des démarches habituelles et raisonnables. La Commission a seulement résumé ce que la loi indique au sujet de l’article 50(8) de la Loi et ce qu’elle indique au sujet des démarches habituelles et raisonnables.

[11] Étant donné qu’il n’existe pas de preuve que la Commission a demandé à la prestataire de prouver ses démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi convenable au titre de l’article 50(8) de la Loi, la Commission n’a pas rendu la prestataire inadmissible au titre de cet article. Par conséquent, ce n’est pas quelque chose dont je dois tenir compte.

Question en litige

[12] La prestataire était-elle disponible pour travailler?

Analyse

La prestataire était-elle disponible pour travailler?

[13] La prestataire était étudiante. On présume que les personnes qui étudient à temps plein ne sont pas disponibles pour travaillerNote de bas de page 1. Comme cette présomption s’applique seulement aux personnes qui étudient à temps plein, la première chose que je dois vérifier est si la prestataire était étudiante à temps plein.

[14] Bien qu’elle l’ait écrit dans chaque questionnaire de formationNote de bas de page 2 et qu’elle ait dit à la Commission qu’elle étudiait à temps plein, je conclus que la prestataire n’était pas étudiante à temps plein. J’estime que le temps qu’elle consacrait à ses études n’équivalait pas à un temps plein. Elle consacrait 25 heures par semaine à ses étudesNote de bas de page 3.

[15] La prestataire affirme qu’elle ne suivait des cours que trois jours par semaine (le mardi, le mercredi et le jeudi), ce qui, selon moi, ne représente pas des études à temps plein. Bien qu’il ne soit pas nécessaire que les cours aient lieu tous les jours de la semaine pour qu’il soit question d’études à temps plein, ses trois jours totalisaient seulement 15 heures de cours par semaineNote de bas de page 4. J’estime que 15 heures par semaine c’est loin de représenter des heures à temps plein. Même si je tiens compte de tout le temps qu’elle consacrait à ses études (pas seulement le temps en classe), et que j’admets qu’elle consacrait 25 heures par semaine au total à ses études, je dois néanmoins conclure que 25 heures d’études par semaine n’équivalent toujours pas à un temps plein.

[16] Par conséquent, comme elle n’étudiait pas à temps plein, la présomption ne s’applique pas à elle.

[17] Toutefois, cela signifie seulement qu’on ne présume pas que la prestataire n’est pas disponible pour travailler.

[18] Je dois tout de même examiner la loi et décider si la prestataire était réellement disponible.

[19] La jurisprudence établit trois éléments que je dois examiner pour rendre ma décision. La prestataire doit prouver les trois choses suivantesNote de bas de page 5 :

  1. a) Elle voulait retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui serait offert.
  2. b) Elle a fait des démarches pour trouver un emploi convenable.
  3. c) Elle n’a pas établi de conditions personnelles qui auraient pu limiter indûment (c’est-à-dire trop) ses chances de retourner travailler.

[20] Lorsque j’examine chacun de ces éléments, je dois examiner l’attitude et la conduite de la prestataireNote de bas de page 6 pendant la période d’inadmissibilité, soit du 18 janvier 2021 au 22 avril 2022.

Vouloir retourner travailler

[21] La prestataire a démontré qu’elle voulait retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui serait offert.

[22] La prestataire a déclaré qu’elle travaillait dans le commerce de détail : elle a quitté un poste pour en trouver un autre ailleurs toujours dans le commerce de détail –, afin d’essayer d’obtenir plus d’heures. Elle affirme avoir également obtenu un emploi à temps partiel comme créatrice de contenu en octobre 2021.

[23] J’estime que le fait que la prestataire travaillait pendant la période d’inadmissibilité et qu’elle a même quitté un poste pour en occuper un autre qui lui offrait plus d’heures prouve qu’elle désirait travailler.

Faire des démarches pour trouver un emploi convenable

[24] La prestataire faisait des démarches suffisantes pour se trouver un emploi.

[25] La prestataire affirme qu’elle travaillait dans un magasin de détail, mais qu’elle n’obtenait pas beaucoup d’heures de travail. Ses amis travaillaient dans un autre magasin de détail; ils lui ont conseillé de postuler un emploi dans ce magasin afin d’obtenir plus d’heures.

[26] La prestataire a parlé à la gérante de ce magasin et a fini par se faire embaucher.

[27] Toutefois, la prestataire affirme que ce n’est pas parce qu’elle avait un emploi qu’elle a cessé de chercher du travail. Elle s’est inscrite à diverses banques d’emploi et a fait des recherches en ligne sur des sites comme Indeed et LinkedIn.

[28] La prestataire affirme qu’elle a trouvé en octobre 2021 un autre emploi à temps partiel comme créatrice de contenu.

[29] J’estime que les démarches de la prestataire pour trouver du travail en faisant des recherches en ligne, en faisant du réseautage avec des amis, en communiquant avec des employeurs potentiels, en postulant des emplois et en assistant à des entrevues représentent des démarches suffisantes. Ces démarches ont été soutenues pendant toute la période d’inadmissibilité et ont mené à l’obtention de deux emplois différents.

Limiter indûment ses chances de retourner travailler

[30] La prestataire a établi des conditions personnelles qui ont peut-être limité indûment ses chances de retourner travailler.

[31] La Commission soutient que même s’il est louable de suivre des cours, cela impose des restrictions à la disponibilité de la prestataire, ce qui limite ses chances de trouver un emploi.

[32] La prestataire affirme que ses études ne l’ont pas trop empêchée de retourner sur le marché du travail.

[33] Elle affirme que si elle a dit à la Commission qu’elle ne quitterait pas ses études pour occuper un emploi à temps plein c’est parce qu’elle aurait continué à étudier tout en travaillant.

[34] Elle dit qu’elle aurait suivi des cours de nuit ou de fin de semaine et qu’elle aurait travaillé en dehors de ses heures de cours, car l’assiduité n’était obligatoire que pour trois cours par semaine. Les autres cours étaient enregistrés, de sorte qu’elle pouvait les visionner à tout moment. La prestataire avait des amis dans les cours qui auraient pu la mettre au courant du contenu des cours si elle était occupée au travail.

[35] La prestataire affirme que dans le cadre de son deuxième emploi, on fixait ses quarts de travail avant ou après ses cours; si un quart de travail était prévu pendant un cours obligatoire, elle essayait d’échanger le quart de travail avec un autre employé.

[36] Alors que l’emploi de création de contenu était à temps plein au moment où elle a présenté sa demande, lors de l’entrevue, lorsque l’employeur a appris qu’elle était aux études, il a dit qu’il lui permettrait de travailler à temps partiel pour qu’elle puisse terminer ses études.

[37] J’estime que les cours de la prestataire constituaient une condition personnelle, puisqu’elle a choisi de les suivre, et que cela aurait trop limité ses chances de retourner sur le marché du travail.

[38] Je comprends les arguments de la prestataire selon lesquels elle aurait suivi des cours le soir ou la fin de semaine et que ses amis l’auraient aidée à accomplir son travail scolaire. Toutefois, il s’agit seulement d’une possibilité de disponibilité, car elle ne suivait pas de tels cours et elle avait des cours obligatoires qu’elle devait contourner; une disponibilité éventuelle, voire conditionnelle, n’est pas une disponibilité actuelleNote de bas de page 7.

[39] Bien qu’elle ait trouvé du travail pendant ses études, cela ne signifie pas que ses études n’ont imposé aucune restriction à sa disponibilité : ses cours obligatoires constituaient une restriction, car tout emploi devait se conformer à son horaire scolaire.

[40] Le fait que son emploi devait se conformer à son horaire de cours signifie que sa disponibilité était restreinte par ses études, ce qui signifie que ses études limitaient trop ses chances de retourner sur le marché du travailNote de bas de page 8.

Donc, la prestataire est-elle capable de travailler et disponible pour le faire?

[41] À la lumière de mes conclusions sur les trois éléments, je conclus que la prestataire n’a pas démontré qu’elle était disponible pour travailler.

Autres commentaires

[42] La prestataire s’est dite frustrée par le temps que la Commission a pris pour lui demander de rembourser l’argent, affirmant qu’elle aurait aimé qu’on lui dise dès le départ qu’il y avait une chance qu’elle doive rembourser l’argent.

[43] Je peux parfaitement comprendre sa frustration d’avoir reçu par la poste une énorme facture des années après avoir reçu son premier versement de prestations. Toutefois, la Commission peut réviser une demande jusqu’à 36 mois après le versement des prestationsNote de bas de page 9. Dans ce cas, la Commission a respecté ce délai.

[44] La prestataire a également affirmé qu’elle comprend qu’elle a peut-être fait une erreur. D’ailleurs, elle est prête à rembourser une partie de l’argent, mais elle n’a pas les moyens de rembourser le montant complet.

[45] Je suis très sensible à la situation de la prestataire, mais je ne peux pas modifier le montant du trop-payéNote de bas de page 10. La prestataire doit communiquer avec la Commission pour lui demander d’annuler une partie ou la totalité du trop-payé, car elle seule a le pouvoir de le faire.

Conclusion

[46] L’appel est rejeté. La prestataire n’a pas prouvé qu’elle était disponible pour travailler, alors l’inadmissibilité devrait être maintenue.

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