Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : TM c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1610

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : T. M.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant d’une révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (462530) datée du 24 mars 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Catherine Shaw
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 30 août 2022
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 4 octobre 2022
Numéro de dossier : GE-22-1411

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli en partie.

[2] Le prestataire ne peut pas recevoir de prestations parentales standards au-delà des 52 semaines permises par la loi. Cependant, il peut recevoir des prestations parentales prolongées parce qu’il n’a pas fait un choix valide lorsqu’il a choisi les prestations parentales standards. Son choix était fondé sur des renseignements trompeurs qu’il avait reçus de la Commission de l’assurance-emploi du Canada.

Aperçu

[3] Le prestataire a demandé des prestations parentales de l’assurance-emploi en janvier 2022. Il avait communiqué avec la Commission à plusieurs reprises avant de présenter sa demande. Les agentes et agents de la Commission lui avaient dit qu’il pouvait commencer à demander des prestations parentales à tout moment avant le premier anniversaire de son enfant, et qu’il pouvait recevoir des prestations parentales standards jusqu’à un an plus tard. À la lumière de ces renseignements, le prestataire a demandé 12 semaines de prestations parentales standards.

[4] Cependant, l’enfant du prestataire est né en février 2021. Il y a une « période d’admissibilité aux prestations parentales » de 52 semaines, à compter de la date de naissance de l’enfant, pendant laquelle les parties prestataires peuvent toucher des prestations parentales standardsNote de bas de page 1. Comme le prestataire a demandé des prestations standards si près de la fin de la période d’admissibilité aux prestations parentales, il a seulement reçu 4 semaines de prestations dans le cadre de sa demande.

[5] La Commission affirme que le prestataire ne peut pas recevoir de versements après la fin de sa période d’admissibilité. De plus, son choix de prestations parentales standards est devenu irrévocable lorsque le premier versement a été fait.

[6] Le prestataire affirme qu’il n’était pas au courant de la période d’admissibilité aux prestations parentales lorsqu’il a fait sa demande. Et il a choisi les prestations parentales standards parce qu’il a été induit en erreur par les renseignements qu’il a reçus de la Commission.

Questions en litige

[7] Le prestataire peut-il recevoir des prestations parentales standards après le 19 février 2022?

[8] Le prestataire peut-il recevoir des prestations parentales prolongées?

Analyse

Peut-il recevoir des prestations parentales standards après le 19 février 2022?

[9] Non. Le prestataire peut seulement recevoir des prestations parentales standards jusqu’au 19 février 2022, parce que c’est à ce moment-là que sa période d’admissibilité aux prestations parentales prend fin.

[10] Les prestations parentales visent à venir en aide aux personnes qui prennent congé pour prendre soin de leur nouveau-néNote de bas de page 2.

[11] Les prestations parentales peuvent être versées seulement pendant une période précise, appelée la période d’admissibilité aux prestations parentales. Cette période commence la semaine de la naissance de l’enfant et se termine 52 semaines plus tard.

[12] Les faits suivants ne sont pas contestés :

  • L’enfant du prestataire est né le 17 février 2021.
  • Le prestataire a demandé de recevoir 12 semaines de prestations parentales standards à partir du 16 janvier 2022.

[13] La Commission affirme que la période d’admissibilité du prestataire commence la semaine suivant la naissance de l’enfant et se termine 52 semaines plus tard. Par conséquent, sa période d’admissibilité aux prestations parentales commence le 14 février 2021 et se termine le 19 février 2022.

[14] La période d’admissibilité peut être prolongée dans certaines circonstancesNote de bas de page 3. À l’audience, le prestataire a confirmé qu’il ne répondait à aucune des conditions pour obtenir une prolongation de la période d’admissibilité.

[15] Le prestataire peut seulement recevoir des prestations parentales pendant la période d’admissibilité. Sa période de prestations parentales a pris fin le 19 février 2022. Il ne peut donc pas recevoir de prestations parentales après cette date.

Le prestataire peut-il recevoir des prestations parentales prolongées?

[16] Oui. Le prestataire n’a pas fait un choix valide pour les prestations parentales standards. Il peut donc recevoir des prestations parentales prolongées.

[17] Les parties prestataires qui demandent des prestations parentales doivent choisir une option de prestations parentalesNote de bas de page 4. Il y a deux options pour les prestations parentales : les prestations standards et les prestations prolongéesNote de bas de page 5.

[18] L’option standard permet de recevoir des prestations au taux normal pendant un maximum de 35 semaines. L’option prolongée, quant à elle, permet de recevoir des prestations à un taux moins élevé pendant un maximum de 61 semainesNote de bas de page 6.

[19] Une fois que vous commencez à recevoir des prestations parentales, vous ne pouvez plus changer d’optionNote de bas de page 7.

[20] Lorsque le prestataire a demandé des prestations d’assurance-emploi, il devait choisir entre les prestations parentales standards et les prestations parentales prolongées. Il a choisi les prestations parentales standards. Le formulaire demandait ensuite combien de semaines de prestations parentales il voulait recevoir, et le prestataire en a demandé 12Note de bas de page 8.

[21] Le prestataire a reçu sa première semaine de prestations parentales standards le 28 janvier 2022Note de bas de page 9. Le 3 mars 2022, il a demandé de passer aux prestations parentales prolongéesNote de bas de page 10.

Quel type de prestations parentales a-t-il choisi?

[22] Le prestataire a choisi les prestations parentales standards.

[23] Dans sa demande, le prestataire a choisi l’option standard. Il a demandé 12 semaines de prestations. Il a précisé que son dernier jour de travail était le 14 janvier 2022 et que sa date de retour au travail était le 4 avril 2022. Cela équivaut environ à 12 semaines de congé.

[24] La Cour d’appel fédérale a déclaré que le choix des prestations parentales du prestataire est le choix qu’il fait dans le formulaire de demandeNote de bas de page 11.

[25] Je conclus que le prestataire a choisi les prestations parentales standards parce que c’est ce qu’il a choisi dans son formulaire de demande.

Le choix des prestations parentales standards était-il valide?

[26] Le choix de prestations parentales standards du prestataire n’était pas valide. En effet, la Commission l’a induit en erreur par rapport à la durée pendant laquelle il pouvait demander des prestations parentales standards. Comme il a été induit en erreur, il n’a pas été en mesure de faire un choix valide entre les prestations parentales standards et les prestations parentales prolongées.

[27] Le prestataire a déclaré qu’il a communiqué avec la Commission à plusieurs reprises au sujet de sa demande de prestations parentales. En novembre et en décembre 2021, il a téléphoné à la Commission pour s’informer au sujet des prestations parentales. Il a demandé aux agentes et agents de la Commission à quel moment il devait faire sa demande et combien de semaines de prestations parentales il pouvait recevoir. Les agentes et agents lui ont dit qu’il pouvait présenter une demande à tout moment avant le premier anniversaire de son enfant, et qu’il pouvait recevoir des prestations parentales standards jusqu’à un an plus tard.

[28] À la lumière de ces renseignements, le prestataire a décidé de prendre quelques mois de congé parental à compter de janvier 2022. Il pensait que les prestations parentales standards étaient le bon choix compte tenu des conversations qu’il avait eues avec la Commission. Il a demandé des prestations parentales standards le 16 janvier 2022 et il a demandé 12 semaines de prestations.

[29] Il a téléphoné à la Commission plusieurs jours après avoir fait sa demande. L’agente de la Commission a confirmé que sa demande était correcte. Elle a dit qu’il pouvait prendre plus de 12 semaines de congé. Il pouvait demander des prestations parentales standards pendant une année complète. Elle a aussi dit que la Commission garderait cette option ouverte pour lui et qu’il pourrait prolonger ses prestations parentales plus tard, s’il le voulait.

[30] Quelques jours plus tard, il a reçu une lettre confirmant les renseignements figurant dans sa demande. La lettre comprenait la date de naissance de son enfant et disait qu’il avait demandé 12 semaines de prestations parentales. Le prestataire a téléphoné de nouveau à la Commission pour confirmer quand ses prestations prendraient fin. Il n’avait pas encore reçu de prestations. L’agent de la Commission lui a dit que ses prestations avaient été approuvées et qu’il commencerait à les recevoir sous peu. Il a confirmé qu’il recevrait 12 semaines de prestations parentales standards.

[31] La Commission a cessé de verser des prestations au prestataire à compter du 19 février 2022. Le prestataire a téléphoné pour demander pourquoi et l’agente de la Commission lui a dit que c’était une erreur de leur part et que ses prestations recommenceraient à lui être versées bientôt. Comme il n’a pas reçu d’autres prestations, le prestataire a téléphoné de nouveau et on lui a dit que ses prestations avaient pris fin.

[32] La Commission affirme que le formulaire de demande informait le prestataire de la différence entre les prestations parentales standards et les prestations parentales prolongées. Le formulaire précise également que la période de prestations parentales standards commence la semaine de la naissance de l’enfant ou de son placement chez une personne en vue de son adoption, et se termine 52 semaines plus tard.

[33] À l’audience, le prestataire a répété qu’il croyait que les prestations parentales standards étaient le bon choix en raison des appels qu’il avait faits à la Commission avant de faire sa demande. Ce choix a également été validé lorsqu’il a parlé à la Commission après avoir présenté sa demande. Il n’avait aucune raison de douter de cette information.

[34] Le prestataire a dit qu’il aurait choisi les prestations parentales prolongées s’il avait été au courant de la période d’admissibilité aux prestations parentales de 52 semaines pour l’option standard. J’accepte son témoignage sur ce point. L’intention du prestataire de demander 12 semaines de prestations était claire dans son formulaire de demande. Je pense qu’il est beaucoup plus probable qu’il voulait 12 semaines de prestations, même à un taux réduit, plutôt que 4 semaines de prestations parentales standards.

[35] La loi prévoit que le choix de prestations parentales d’une partie prestataire ne peut pas être modifié une fois que le premier versement a été fait. Toutefois, la division d’appel du Tribunal a déclaré que si le choix d’une partie prestataire entre les prestations parentales standards et les prestations parentales prolongées était fondé sur des renseignements trompeurs, elle peut faire son choix à nouveauNote de bas de page 12.

[36] Dans l’affaire Karval, la Cour fédérale a conclu que les parties prestataires doivent obtenir des renseignements sur les prestations qu’elles demandent et poser des questions à la Commission s’il y a des choses qu’elles ne comprennent pasNote de bas de page 13.

[37] Cependant, la division d’appel a déclaré qu’il y a une différence entre les personnes qui n’ont pas les connaissances nécessaires pour répondre à des questions claires, et celles qui sont induites en erreur parce qu’elles se fient à des renseignements inexacts fournis par la CommissionNote de bas de page 14.

[38] Je conclus que le prestataire a été induit en erreur par la Commission au sujet du nombre de semaines de prestations parentales standards qu’il pouvait demander. Le fait que la Commission n’a pas fourni de renseignements essentiels sur la période d’admissibilité a induit le prestataire en erreur et l’a amené à choisir l’option standard. Cette information trompeuse a amené le prestataire à faire son choix sans savoir que sa demande prendrait fin après seulement 4 semaines de prestations d’assurance-emploi, soit bien avant la fin de son congé parental de 12 semaines.

[39] Pour cette raison, je conclus que le choix des prestations parentales standards du prestataire était invalide dès le départ parce que la Commission l’a induit en erreur en lui fournissant des renseignements erronés et insuffisants.

[40] Ma conclusion est également appuyée par le fait que la Commission n’a pas envoyé de lettre de décision ni autrement avisé le prestataire qu’il recevrait seulement 4 semaines de prestations dans le cadre de sa demande de 12 semaines.

[41] Le prestataire a dit avoir vu une confirmation de l’approbation de ses prestations dans son compte Mon dossier Service Canada peu de temps après avoir fait sa demandeNote de bas de page 15. Son compte comprenait des renseignements sur la date du début de sa demande, le délai de carence, le type de prestations (prestations parentales standards) et le nombre total d’heures d’emploi assurable, le taux de prestations et l’impôt fédéral à déduire. Il montre également que 12 semaines de prestations parentales ont été demandées. Enfin, il indique que la date de fin de sa demande était le 14 janvier 2023.

[42] Il n’y avait aucun renseignement dans le compte Mon dossier Service Canada du prestataire qui l’aurait averti qu’il recevrait seulement 4 semaines sur les 12 semaines de prestations qu’il avait demandées. Il n’y avait aucune information sur les dates de début et de fin de sa période d’admissibilité aux prestations parentales, ni aucune indication que cela pourrait avoir une incidence sur son admissibilité aux prestations.

[43] Les renseignements figurant au compte du prestataire n’étaient pas suffisamment clairs ou complets pour que la Commission communique sa décision sur l’admissibilité du prestataire aux prestations. L’obligation de la Commission de communiquer sa décision exige qu’elle fasse une déclaration de résultat claire. Le prestataire n’a jamais reçu de décision sur le nombre de semaines de prestations parentales standards auxquelles il avait droit avant la fin de ses prestations le 19 février 2022.

[44] La loi permet aux parties prestataires de modifier leur choix avant le premier versement de prestations parentales. Mais le prestataire n’a pas eu cette chance. En ne l’informant pas de la décision concernant les semaines d’admissibilité sur sa demande avant l’émission du premier versement, la Commission a privé le prestataire de cette occasion. Elle ne peut pas maintenant compter sur le fait que le premier versement a été fait pour l’empêcher de modifier son choix.

[45] La division d’appel du Tribunal a déclaré qu’une partie prestataire peut faire un nouveau choix si son premier choix n’était pas valide. Le prestataire a déclaré qu’il choisirait l’option prolongée s’il pouvait faire un nouveau choix en se fondant sur les bons renseignements.

[46] Puisque j’ai conclu que le premier choix du prestataire n’était pas valide, je conclus qu’il peut faire un nouveau choix. Je conclus que son nouveau choix est de recevoir des prestations parentales prolongées.

Conclusion

[47] La période d’admissibilité aux prestations parentales standards du prestataire a pris fin le 19 février 2022. Il ne peut pas recevoir de prestations parentales standards après cette date.

[48] Cependant, son choix de prestations parentales standards n’était pas valide. Cela signifie que le prestataire peut faire un nouveau choix et qu’il a choisi les prestations parentales prolongées.

[49] Par conséquent, l’appel est accueilli en partie.

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