Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : MV c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 158

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de permission de faire appel

Partie demanderesse : M. V.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 29 novembre 2022 (GE-22-2090)

Membre du Tribunal : Neil Nawaz
Date de la décision : Le 14 février 2023
Numéro de dossier : AD-23-7

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Décision

[1] Je refuse à la prestataire la permission de faire appel parce qu’elle ne présente aucun argument défendable. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] La prestataire, M. V., fait appel d’une décision de la division générale lui refusant des prestations d’assurance-emploi. 

[3] La prestataire travaillait comme commis à la fonction publique de X. Le 24 novembre 2021, son employeur l’a mise en congé sans solde après qu’elle a refusé de prouver sa vaccination contre la COVID-19. Elle a fini par être congédiée. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé de ne pas lui verser de prestations d’assurance-emploi parce que le non-respect de la politique vaccinale de l’employeur constituait une inconduite.

[4] La division générale est d’accord avec la Commission. La division générale a conclu que la prestataire avait délibérément enfreint la politique vaccinale de son employeur. Elle a aussi conclu que la prestataire savait ou aurait dû savoir que le non-respect de la politique entraînerait probablement sa suspension.

[5] La prestataire demande maintenant la permission de faire appel de la décision de la division générale. Elle soutient que la division générale n’a pas tenu compte de ce qui suit :

  • En vertu de la loi canadienne, toute personne a droit à l’intégrité physique.
  • Son employeur lui a imposé une nouvelle condition d’emploi sans son accord.
  • Son employeur n’avait aucun droit de lui imposer une expérience médicale sans son consentement éclairé.
  • Elle ne se sentait pas à l’aise de communiquer ses renseignements médicaux personnels à son employeur.
  • Les effets à long terme du vaccin étaient inconnus lorsque l’employeur a mis en œuvre sa politique.

[6] Avant que l’appel de la prestataire puisse aller de l’avant, je dois décider s’il a une chance raisonnable de succèsNote de bas de page 1. Avoir une chance raisonnable de succès est la même chose qu’avoir une cause défendableNote de bas de page 2. Si la prestataire n’a aucun argument défendable, l’affaire prend fin maintenant.

Question en litige

[7] Peut-on soutenir que la division générale a commis une erreur lorsqu’elle a conclu que le refus de la prestataire de communiquer son statut vaccinal constituait une inconduite?

Analyse

[8] J’ai examiné la décision de la division générale, ainsi que le droit et les éléments de preuve qu’elle a utilisés pour arriver à sa décision. J’ai conclu que la prestataire n’a aucun argument défendable.

La division générale n’a pas mal interprété la loi

[9] La prestataire soutient qu’il n’y a eu aucune inconduite parce qu’elle n’était pas obligée de communiquer ses renseignements médicaux à son employeur. Elle affirme qu’en la forçant à le faire sous menace d’une suspension ou d’un congédiement, son employeur a porté atteinte à ses droits et l’a traitée injustement.

[10] J’estime que cet argument n’est pas fondé.

[11] La division générale a défini l’inconduite comme suit :

Selon la jurisprudence, pour être considérée comme une inconduite, la conduite doit être délibérée, c’est-à-dire consciente, voulue ou intentionnelle. L’inconduite peut aussi se présenter comme une conduite qui est si insouciante qu’elle est presque délibérée.

Pour qu’il y ait inconduite selon la loi, il ne faut pas nécessairement que la personne ait eu une intention coupable (c’est-à-dire qu’elle voulait faire quelque chose de mal).

Il y a inconduite si une personne savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait l’empêcher de remplir ses obligations envers son employeur et qu’il était réellement possible qu’elle soit suspendue et congédiée pour cette raisonNote de bas de page 3.

[12] Cet extrait montre que la division générale a bien résumé les principes entourant l’inconduite. Par la suite, la division générale a appliqué correctement la loi aux conclusions suivantes :

  • L’employeur de la prestataire a adopté et communiqué une politique de vaccination obligatoire claire exigeant que chaque membre du personnel confirme son statut vaccinal.
  • La prestataire savait que le non-respect de la politique à une certaine date entraînerait une perte d’emploi.
  • La prestataire a confirmé qu’elle a refusé de dire à son employeur si elle avait été vaccinée.
  • La prestataire a confirmé qu’elle a par la suite refusé de se faire tester ou de dire qu’elle avait été vaccinée.
  • La prestataire n’a pas tenté de démontrer son admissibilité à l’une des exemptions permises par la politique.

[13] La division générale a conclu que la prestataire était coupable d’inconduite : « En effet, les actions de la prestataire ont mené à son congédiement. Elle a agi délibérément. Elle savait que le non-respect de la politique était susceptible d’entraîner sa suspension et la perte de son emploiNote de bas de page 4 ».

La division générale n’a pas ignoré les arguments de la prestataire

[14] La prestataire avance que la division générale a ignoré ses allégations selon lesquelles la politique vaccinale de son employeur est injuste, illégale et inconstitutionnelle. Elle affirme que, comme la politique vaccinale est illégitime, son refus de la suivre ne peut être qualifié d’inconduite.

[15] Encore une fois, je ne vois pas la valeur de cet argument étant donné la loi entourant l’inconduite.

[16] La division générale n’a pas ignoré les allégations de la prestataire. Au paragraphe 45 de sa décision, la division générale a d’ailleurs résumé ses nombreuses revendications au sujet de la politique vaccinale de l’employeur. Toutefois, la division générale a ajouté que l’équité ou la légalité de la politique d’un employeur n’était pas pertinente pour trancher l’admissibilité à l’assurance-emploi :

Je reconnais ces arguments supplémentaires, mais le recours de la prestataire consiste à intenter une action en justice, ou devant tout autre tribunal qui peut prendre en considération ses arguments particuliers. Je peux seulement décider si ce que la prestataire a fait ou n’a pas fait est une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi. Dans la présente affaire, j’ai déjà décidé qu’il y avait inconduiteNote de bas de page 5.

[17] Cette déclaration est fidèle à la jurisprudence. En effet, la Cour d’appel fédérale a décidé que la légitimité des politiques de travail d’un employeur dépasse la compétence du Tribunal de la sécurité socialeNote de bas de page 6. La question de savoir si la politique de l’employeur a porté atteinte, par exemple, aux droits constitutionnels de la prestataire à l’autonomie corporelle et à la liberté de choix relève d’une autre instance. Dans la présente affaire, ce qui importe, c’est savoir si la prestataire a enfreint la politique et si cette violation était délibérée et susceptible d’entraîner vraisemblablement son congédiement. La division générale avait de bonnes raisons de répondre « oui » dans les deux cas.

Conclusion

[18] Je ne suis pas convaincu que l’appel a une chance raisonnable de succès. La permission de faire appel est donc refusée. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

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