Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : RK c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1628

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : R. K.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (496538) datée du 28 juillet 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Kristen Thompson
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 1er décembre 2022
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 2 décembre 2022
Numéro de dossier : GE-22-2725

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec le prestataire.

[2] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a prouvé que le prestataire a été suspendu de son emploi en raison d’une inconduite (autrement dit, parce qu’il a fait quelque chose qui a entraîné sa suspension). Par conséquent, le prestataire n’est pas admissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 1.

Aperçu

[3] Le prestataire a été suspendu de son emploi. Son employeur dit qu’il a été suspendu parce qu’il n’a pas respecté sa politique de vaccination : il a refusé de dire s’il avait été vacciné.

[4] Même si le prestataire ne conteste pas que cela s’est produit, il soutient que ne pas suivre la politique de vaccination de son employeur n’est pas une inconduite.

[5] La Commission a accepté la raison fournie par l’employeur pour expliquer la suspension. Elle a décidé que le prestataire avait été suspendu de son emploi en raison d’une inconduite. La Commission a donc conclu que le prestataire n’est pas admissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[6] Le prestataire affirme qu’il ne voulait pas divulguer ses renseignements médicaux à son employeur. Il dit que la politique allait à l’encontre d’un certain nombre de lois et de principes juridiques, dont le Code de Nuremberg, le Code criminel, le droit en matière de droits de la personne, les lois sur la protection des renseignements personnels et son contrat de travail initial.

Question en litige

[7] Le prestataire a-t-il été suspendu de son emploi en raison d’une inconduite?

Analyse

[8] La loi dit qu’une personne ne peut pas recevoir de prestations d’assurance‑emploi si elle perd son emploi en raison d’une inconduite. Cette règle s’applique tant en cas de congédiement que de suspensionNote de bas de page 2.

[9] Pour décider si le prestataire a été suspendu de son emploi en raison d’une inconduite, je dois décider deux choses. D’abord, je dois examiner pour quelle raison le prestataire a été suspendu de son emploi. Ensuite, je dois voir si la loi considère cette raison comme une inconduite.

Pourquoi le prestataire a-t-il été suspendu de son emploi?

[10] Je conclus que le prestataire a été suspendu de son emploi parce qu’il n’a pas respecté la politique de vaccination de son employeur.

[11] Le prestataire ne conteste pas que cela s’est produit.

[12] La Commission affirme que le refus du prestataire de se conformer à la politique de vaccination de l’employeur était une inconduite parce qu’il a volontairement refusé une instruction directe de son employeur, sachant qu’il pouvait être mis en congé sans solde s’il ne s’y conformait pas.

[13] Je conclus que le prestataire a été suspendu de son emploi parce qu’il n’a pas respecté la politique de vaccination de son employeur.

Le prestataire a-t-il été suspendu en raison d’une inconduite au sens de la loi?

[14] Le prestataire a été suspendu en raison d’une inconduite au sens de la loi.

[15] La Loi sur l’assurance-emploi ne précise pas ce qu’on entend par inconduite. Toutefois, la jurisprudence (décisions des cours et des tribunaux) nous montre comment établir si le prestataire a été congédié pour une inconduite au sens de la Loi. Elle énonce le critère juridique de l’inconduite, c’est-à-dire les questions et les éléments à prendre en considération lors de l’examen d’un cas d’inconduite.

[16] Selon la jurisprudence, pour qu’il y ait inconduite, la conduite doit être délibérée. Cela signifie que la conduite doit être consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas de page 3. Par inconduite, on entend aussi une conduite qui est si insouciante qu’elle est presque délibéréeNote de bas de page 4. Il n’est pas nécessaire que le prestataire ait eu une intention coupable (c’est-à-dire qu’il ait voulu faire quelque chose de mal) pour que son comportement soit une inconduite au sens de la loiNote de bas de page 5.

[17] Il y a inconduite si le prestataire savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait l’empêcher de remplir ses obligations envers son employeur et que, de ce fait, il était réellement possible qu’il soit congédiéNote de bas de page 6.

[18] La Loi sur l’assurance-emploi ne dit pas que je dois tenir compte du comportement de l’employeurNote de bas de page 7. Je dois plutôt me concentrer sur ce que le prestataire a fait ou n’a pas fait et sur la question de savoir si cela constitue une inconduite au sens de la LoiNote de bas de page 8.

[19] Je dois me concentrer uniquement sur la Loi sur l’assurance-emploi. Je ne peux pas décider si le prestataire a d’autres options au titre d’autres lois. Il ne m’appartient pas de décider si le prestataire a été congédié à tort ou si l’employeur aurait dû prendre des dispositions raisonnables (mesures d’adaptation) à l’égard du prestataireNote de bas de page 9. Je ne peux examiner qu’une seule chose, soit si ce que le prestataire a fait ou omis de faire est une inconduite au sens de la Loi.

[20] La Commission doit prouver que le prestataire a été suspendu de son emploi en raison d’une inconduite. Elle doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que le prestataire a été suspendu de son emploi en raison d’une inconduiteNote de bas de page 10.

[21] La Commission affirme qu’il y a eu inconduite pour les raisons suivantes :

  • L’employeur a adopté une politique de vaccination obligatoire claire et l’a communiquée aux employés.
  • Le prestataire savait que le non-respect de la politique entraînerait une perte d’emploi.
  • L’application de la politique était raisonnable en milieu de travail pendant une pandémie.

[22] Le prestataire affirme qu’il n’y a pas eu d’inconduite pour les raisons suivantes :

  • Il pouvait travailler de la maison.
  • La politique de vaccination allait à l’encontre d’un certain nombre de lois et de principes juridiques, notamment le Code de Nuremberg, le Code criminel, le droit en matière de droits de la personne, les lois sur la protection des renseignements personnels et son contrat de travail initial.
  • La politique était déraisonnable et excessive.
  • Son employeur ne lui a pas fourni assez d’information sur les risques liés au vaccin.
  • La Commission devrait tenir compte de la situation et de la liberté de choix de chaque personne.

[23] La politique de vaccination de l’employeur prévoyait ce qui suit :

  • Les employés devaient attester qu’ils étaient entièrement vaccinés contre la COVID-19 au plus tard le 29 octobre 2021.
  • L’employeur a accepté d’offrir des mesures d’adaptation aux employés qui en avaient besoin en raison d’une contre-indication médicale certifiée, de la religion ou d’un autre motif prévu par la Loi canadienne sur les droits de la personne.
  • La politique s’appliquait à tous les employés, qu’ils travaillent sur place ou à distance ou qu’ils télétravaillent.
  • En cas de non-respect de la politique, les employés pouvaient être mis en congé administratif sans solde deux semaines après la date limite pour présenter une attestationNote de bas de page 11.

[24] Le prestataire a déclaré qu’il n’a pas divulgué à son employeur s’il avait été vacciné. Il affirme qu’il connaissait les intentions de l’employeur lorsque celui-ci a adopté la politique, mais que la politique était excessive.

[25] Le prestataire dit qu’il n’a pas parlé à un professionnel de la santé de ses préoccupations concernant la sécurité du vaccin.

[26] Le prestataire affirme qu’il ne pouvait pas demander une exemption à la politique parce qu’il devait divulguer s’il avait été vacciné pour le faire. Il a demandé à l’employeur s’il pouvait demander une exemption sans divulguer son statut vaccinal, mais cela lui a été refusé.

[27] Le prestataire soutient avoir été mis en congé sans solde après le 12 novembre 2021. Il dit qu’il a pu retourner au travail à partir du 20 juin 2022, lorsque la politique a changé.

[28] Je conclus que la Commission a prouvé qu’il y a eu inconduite pour les raisons suivantes :

  • L’employeur avait une politique de vaccination qui exigeait que les employés attestent qu’ils étaient vaccinés.
  • L’employeur a dit au prestataire ce qu’il attendait de ses employés, à savoir qu’ils lui disent s’ils avaient été vaccinés.
  • Le prestataire a confirmé qu’il n’avait pas dit à l’employeur s’il avait été vacciné et qu’il connaissait les intentions de l’employeur lorsque celui-ci a adopté la politique.
  • Le prestataire connaissait ou aurait dû connaître les conséquences du non‑respect de la politique de vaccination de l’employeur.

Somme toute, le prestataire a-t-il été suspendu de son emploi en raison d’une inconduite?

[29] Selon mes conclusions précédentes, je juge que le prestataire a été suspendu de son emploi en raison d’une inconduite.

[30] Je tire cette conclusion parce que les actions du prestataire ont mené à sa suspension. Il a agi délibérément. Il savait qu’il risquait d’être suspendu de son emploi en refusant de dire s’il avait été vacciné.

Conclusion

[31] La Commission a prouvé que le prestataire a été suspendu de son emploi en raison d’une inconduite. Le prestataire n’est donc pas admissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[32] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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