Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : DP c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 180

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à la permission de faire appel

Partie demanderesse : D. P.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision rendue par la division générale le 9 décembre 2022 (GE-22-3019)

Membre du Tribunal : Melanie Petrunia
Date de la décision : Le 18 février 2023
Numéro de dossier : AD-22-950

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Décision

[1] La permission de faire appel est refusée. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] Le demandeur, D. P. (prestataire), a cessé de travailler et a demandé des prestations d’assurance-emploi le 28 février 2020. Sa période de prestations a débuté le 1er mars 2020.

[3] La partie défenderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a décidé que le prestataire avait droit à trente-six semaines de prestations régulières d’assurance-emploi. Lorsque ces prestations ont pris fin, le prestataire a demandé une révision en signalant que sa demande aurait dû être établie comme prestation d’assurance-emploi d’urgence (PAEU).

[4] La Commission a décidé qu’il avait reçu les trente-six semaines de prestations régulières qu’il devait recevoir, en fonction du moment où il a présenté sa demande de prestations, le taux de chômage et le nombre d’heures d’emploi assurable accumulées au cours de sa période de référence.

[5] Le prestataire souhaite porter en appel la décision de la division générale auprès de la division d’appel du Tribunal. Toutefois, il doit d’abord obtenir la permission de faire appel.  

[6] Je dois décider si la division générale a commis une erreur révisable qui pourrait conférer à l’appel une chance de succès. Je refuse la permission de faire appel parce que l’appel du prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Questions préliminaires

[7] Après avoir déposé sa demande de permission de faire appel, le prestataire a envoyé un nouveau relevé d’emploiNote de bas de page 1. Il affirme que la Commission n’a pas tenu compte de ce document et que ce dernier montre qu’il avait accumulé plus d’heures assurables.

[8] Je n’ai pas tenu compte de ce nouveau relevé d’emploi. Ce relevé d’emploi porte sur la période du 20 au 24 février 2019. Les heures indiquées sur le relevé d’emploi ne font pas partie de la période de référence du prestataire, soit du 3 mars 2019 au 29 février 2020. Le relevé d’emploi est un nouvel élément de preuve dont la division générale n’était pas saisie, et il n’est pas pertinent pour la question en litige parce qu’il reflète des heures accumulées en dehors de la période de référence.

Question en litige

[9] Le prestataire soulève-t-il une erreur révisable que la division générale aurait commise et qui pourrait conférer à l’appel une chance de succès?

Je n’accorde pas au prestataire la permission de faire appel

[10] Le critère juridique que le prestataire doit remplir pour demander la permission de faire appel est peu rigoureux : y a-t-il un moyen qui permettrait de soutenir que l’appel a une chance de succès?Note de bas de page 2

[11] Pour trancher cette question, je me suis surtout demandé si la division générale a commis une ou plusieurs des erreurs pertinentes (ou des moyens d’appel) énumérées dans la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement socialNote de bas de page 3.

[12] Un appel ne s’agit pas d’une nouvelle audience pour la demande initiale. Je dois plutôt décider si la division générale a fait l’une des choses suivantes :

  1. a) Elle n’a pas mené une procédure équitable;
  2. b) Elle n’a pas tranché une question qu’elle aurait dû trancher ou a tranché une question qu’elle n’aurait pas dû trancher;
  3. c) Elle a fondé sa décision sur une erreur de fait importante;Note de bas de page 4   
  4. d) Elle a commis une erreur de droit.Note de bas de page 5

[13] Avant que le prestataire puisse passer à l’étape suivante de l’appel, je dois être convaincue qu’au moins un de ces moyens d’appel confère à l’appel une chance raisonnable de succès. Une chance raisonnable de succès signifie que le prestataire pourrait plaider sa cause et possiblement gagner. Je dois aussi tenir compte d’autres moyens d’appel possibles qui n’ont pas été précisément évoqués par le prestataireNote de bas de page 6.

Historique de l’appel du prestataire

[14] Le prestataire a déjà fait appel à la division générale, mais son appel a été rejetéNote de bas de page 7. Il a porté cette décision en appel à la division d’appel et son appel a été accueilli. La division d’appel a décidé que l’affaire devait être renvoyée à la division générale pour une nouvelle audienceNote de bas de page 8. 

[15] La division d’appel a conclu que le prestataire n’avait pas eu l’occasion d’examiner les observations de la Commission et d’y répondre à la première audience. Pour cette raison, elle a conclu que la division générale n’avait pas mené une procédure équitable. La division d’appel a décidé de renvoyer l’affaire à la division générale pour une nouvelle audience.

On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur

[16] Le prestataire soutient que son appel aurait dû être accueilli à la division générale lorsque l’affaire y a été renvoyée pour une nouvelle audience. Il dit qu’elle n’était pas censée être renvoyée pour un nouvel appel. Il soutient qu’il aurait dû obtenir la réparation qu’il a demandée lorsque la division d’appel a conclu que l’audience précédente était inéquitable sur le plan procéduralNote de bas de page 9.

[17] Le prestataire soutient que la Commission n’a pas assisté à l’audience et n’a pas répondu à ses questions. Il affirme qu’il s’agit d’une pratique injuste. Le prestataire a fait également valoir qu’il devrait avoir droit à des semaines supplémentaires de PAEU parce qu’il croyait que sa demande passerait à une demande de PAEUNote de bas de page 10.

[18] Le prestataire soutient que des agents de Service Canada l’ont forcé à demander des prestations tout de suite. Il affirme avoir demandé des renseignements à la Commission au sujet de ses périodes de demande antérieures, mais celle-ci n’a pas répondu et n’était pas présente à l’audienceNote de bas de page 11.

[19] Le prestataire affirme que la Commission ne lui a pas fourni d’autres relevés d’emploi et qu’elle n’a pas assisté à l’audience pour répondre à ses questions au sujet des relevés d’emploi. Il affirme avoir déclaré à l’audience devant la division générale qu’il ne savait pas s’il avait plus d’heures assurables et qu’il n’avait aucun moyen de confirmer l’exactitude de ses relevés d’emploiNote de bas de page 12.

[20] Le prestataire affirme qu’il a demandé des prestations prolongées d’assurance-emploi et un règlement monétaire en raison de préjudice injustifié, de stress et des pratiques injustes qu’il a vécus. Il se demande pourquoi la division d’appel n’est pas en mesure d’accorder des dommages-intérêts. Il dit avoir payé des cotisations d’assurance-emploi en trop et qu’il s’agit d’une extorsion gouvernementale. Il prétend aussi qu’il a dit à la division générale que la Commission n’avait pas fourni de preuve portant sur les motifs de sa mise à pied. Il dit avoir perdu son emploi en raison de la COVIDNote de bas de page 13.

[21] Le prestataire soutient que la division générale a commis les mêmes erreurs de droit que le membre a commis lors de sa première audience. Il affirme que la division d’appel avait confirmé que ces erreurs constituaient des pratiques injustes.

[22] La division d’appel a conclu que la division générale avait omis d’offrir un processus équitable. En effet, la Commission avait déposé des observations supplémentaires que le prestataire n’avait pas reçues avant l’audience. Le prestataire n’avait pas eu l’occasion d’examiner ces observationsNote de bas de page 14. C’est pour cette raison que la division d’appel a renvoyé l’affaire à la division générale pour une nouvelle audience.

[23] Dans la décision de la division d’appel, la membre affirme expressément que le résultat de la révision par la division générale pourrait être le même. Elle souligne qu’il incombe toujours au prestataire de prouver que sa demande aurait dû être établie comme une demande de PAEU ou qu’il avait droit à plus de trente-six semaines de prestations régulières d’assurance-emploiNote de bas de page 15.

[24] On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur en tenant une nouvelle audience. C’est la division d’appel qui a décidé que cela devait se faire. Je ne suis pas d’accord avec le prestataire pour dire qu’il aurait dû obtenir la réparation demandée à la division générale sans une nouvelle audience. La division générale a également abordé cet argument du prestataire et a conclu que l’affaire avait été renvoyée pour une nouvelle audienceNote de bas de page 16.   

[25] La division générale a abordé les arguments du prestataire selon lesquels il est injuste que la Commission n’ait pas assisté à l’audience. Elle a conclu que le Tribunal n’a pas le pouvoir d’obliger les parties à assister à une audienceNote de bas de page 17.

[26] La division d’appel avait déjà examiné cet argument du prestataire; elle avait conclu qu’il n’y avait pas eu manquement à l’équité procédurale lorsque la division générale a examiné la preuve et les arguments de la Commission, même si elle n’avait pas assisté à l’audienceNote de bas de page 18. On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur de droit ou a omis d’offrir une procédure équitable.

[27] La division générale a examiné si la demande d’assurance-emploi du prestataire aurait dû être établie comme une demande de PAEU. Elle a conclu qu’il avait demandé des prestations le 28 février 2020 et que sa période de prestations a commencé le 1er mars 2020. La division générale a conclu que la période de prestations avait été bien établie comme une demande de prestations régulières d’assurance-emploi et qu’elle ne pouvait pas être modifiée pour commencer à une date ultérieureNote de bas de page 19.

[28] La division générale a abordé les arguments du prestataire voulant qu’il ait été forcé par des agents de Service Canada à demander des prestations peu de temps après avoir perdu son emploi. Elle n’était pas convaincue par les arguments du prestataire et a conclu qu’il avait fait le choix d’aller dans un centre de Service Canada et de demander des prestations. La division générale a conclu qu’il n’a pas été obligé de présenter une demande quand il l’a faitNote de bas de page 20.

[29] La division générale a examiné les arguments du prestataire et a tiré une conclusion de fait fondée sur la preuve dont elle disposait. On ne peut pas soutenir que la division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait ou de droit lorsqu’elle a décidé que le prestataire avait fait le choix de demander des prestations au moment où il l’a fait.

[30] La décision de la division générale porte sur les relevés d’emploi du prestataire. Elle a conclu que le prestataire avait accumulé un total de 1 688 heures d’emploi assurable au cours de sa période de référence. Cette décision était fondée sur les trois relevés d’emploi qui faisaient partie du dossier. Le prestataire n’était pas certain de l’exactitude de l’information, mais il estimait que le nombre d’heures était assez procheNote de bas de page 21.   

[31] La division générale a examiné l’argument du prestataire selon lequel il devrait pouvoir utiliser les heures accumulées en dehors de sa période de référence. Elle a conclu que les heures accumulées en dehors de la période de référence ne pouvaient pas être comptées. La division générale s’est appuyée sur une décision de la Cour d’appel fédéraleNote de bas de page 22.

[32] On ne peut pas soutenir que la division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait. Elle a tenu compte de tous les relevés d’emploi dont elle était saisie lorsqu’elle a déterminé les heures assurables du prestataire. On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur de droit lorsqu’elle a décidé qu’elle ne pouvait pas tenir compte des heures en dehors de la période de référence du prestataire.

[33] La division générale a également abordé les arguments du prestataire selon lesquels il devrait avoir droit à un règlement monétaire ou à des indemnités en raison de pratiques injustes. La division générale a conclu qu’elle n’avait pas le pouvoir d’accorder des indemnitésNote de bas de page 23. On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur de droit. La division d’appel avait également conclu que le Tribunal ne pouvait pas octroyer des indemnités.   

[34] Le prestataire a fait valoir à la division générale qu’il paie souvent trop de cotisations à l’assurance-emploi. Selon les conseils d’un comptable, il n’a pas produit de déclarations de revenus pendant quelques années. Le prestataire a ensuite appris qu’il ne pouvait pas recouvrer les cotisations d’assurance-emploi excédentaires après quatre ans. Il a soutenu que c’était injusteNote de bas de page 24.

[35] La division générale a reconnu les arguments du prestataire, mais a conclu qu’elle devait appliquer la Loi sur l’assurance-emploi et le Règlement sur l’assurance-emploi. Elle n’a pas le pouvoir de rembourser les cotisations versées en tropNote de bas de page 25. On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur de droit lorsqu’elle a rendu cette décision.  

[36] L’appel du prestataire a été instruit correctement par la division générale lors de la nouvelle audience, comme l’avait ordonné la division d’appel. Le prestataire a répété les mêmes arguments qu’il a présentés à la division générale. Ces arguments ont tous été pleinement pris en compte et traités par la division générale dans sa décision.

[37] En plus des arguments du prestataire, j’ai aussi examiné d’autres moyens d’appel.

[38] Le prestataire n’a signalé aucune erreur de compétence de la part de la division générale, et je ne vois aucune preuve d’une telle erreur. On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur de droit, qu’elle a fondé sa décision sur une erreur de fait importante ou qu’elle n’a pas mené une procédure équitable.

[39] Le prestataire n’a relevé aucune erreur que la division générale aurait commise et qui pourrait conférer à l’appel une chance de succès. Par conséquent, je refuse la permission de faire appel.

Conclusion

[40] La permission de faire appel est refusée. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

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