Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : HF c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 115

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : H. F.
Partie intimée : Commission de l’assurance emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (526818) datée du 1er septembre 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Kristen Thompson
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience  : Le 22 mars 2023
Personne présente à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 24 mars 2023
Numéro de dossier : GE-22-3088

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal de la sécurité sociale n’est pas d’accord avec l’appelante.

[2] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a prouvé que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite (autrement dit, parce qu’elle a fait quelque chose qui lui a fait perdre son emploi). Par conséquent, l’appelante est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploiNote de bas page 1.

Aperçu

[3] L’appelante a perdu son emploi. Son employeur affirme l’avoir congédiée parce qu’elle a agi contre sa politique de vaccination : elle n’a pas voulu dire si elle s’était fait vacciner.

[4] Même si l’appelante ne conteste pas ce qui s’est passé, elle soutient qu’agir contre la politique vaccinale de son employeur n’est pas une inconduite.

[5] La Commission a accepté la raison du congédiement que l’employeur a fournie. Elle a conclu que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite. Elle l’a donc exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[6] L’appelante affirme que son exemption pour motifs religieux aurait dû lui être accordée. Elle ajoute que la politique va à l’encontre de plusieurs lois et principes juridiques. Selon elle, le vaccin n’est pas sûr et n’arrête pas la transmission. Elle dit aussi que d’autres précautions étaient disponibles.

Question en litige

[7] L’appelante a-t-elle perdu son emploi en raison d’une inconduite?

Analyse

[8] La loi prévoit qu’une personne ne peut pas recevoir de prestations d’assurance-emploi si elle perd son emploi en raison d’une inconduite. Cette règle s’applique que la personne ait été congédiée ou suspendueNote de bas page 2.

[9] Pour savoir si l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite, je dois décider deux choses. D’abord, je dois établir la raison de la fin d’emploi. Ensuite, je dois voir si la loi considère cette raison comme une inconduite.

Pourquoi l’appelante a-t-elle perdu son emploi?

[10] Je considère que l’appelante a perdu son emploi parce qu’elle a agi contre la politique vaccinale de son employeur.

[11] L’appelante ne conteste pas ce qui s’est passé.

[12] La Commission affirme que l’appelante a perdu son emploi parce qu’elle a agi contre la politique vaccinale de son employeur.

[13] Il ne fait aucun doute que l’appelante a perdu son emploi parce qu’elle a agi contre la politique vaccinale de son employeur.

La raison du congédiement de l’appelante est-elle une inconduite selon la loi?

[14] La raison du congédiement de l’appelante est une inconduite au sens de la loi.

[15] La Loi sur l’assurance-emploi ne précise pas ce qu’est une inconduite. Cependant, la jurisprudence (décisions des cours et des tribunaux) nous aide à décider si le congédiement de l’appelante constitue une inconduite au sens de la Loi. La jurisprudence établit le critère juridique relatif à l’inconduite, c’est-à-dire les questions et facteurs à prendre en considération quand on examine une affaire d’inconduite.

[16] Selon la jurisprudence, pour qu’il y ait inconduite, la conduite doit être délibérée, c’est-à-dire consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas page 3. Une inconduite comprend aussi une conduite si insouciante qu’elle est presque délibéréeNote de bas page 4. Pour qu’il y ait inconduite au sens de la loi, il n’est pas nécessaire que l’appelante ait eu une intention coupable (c’est-à-dire qu’elle ait voulu faire quelque chose de mal)Note de bas page 5.

[17] Il y a inconduite si l’appelante savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait l’empêcher de remplir ses obligations envers son employeur et qu’il y avait une réelle possibilité qu’elle soit congédiée pour cette raisonNote de bas page 6.

[18] La loi ne dit pas que je dois tenir compte du comportement de l’employeurNote de bas page 7. Je dois plutôt me concentrer sur ce que l’appelante a fait ou n’a pas fait et me demander si cela constitue une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas page 8.

[19] Je dois me concentrer uniquement sur la Loi sur l’assurance-emploi. Je ne peux pas évaluer si d’autres lois offrent d’autres options à l’appelante. Il ne m’appartient pas de décider si l’appelante a été congédiée à tort ou si l’employeur aurait dû lui accorder des mesures d’adaptation raisonnablesNote de bas page 9. Je peux évaluer une seule chose : si ce que l’appelante a fait ou n’a pas fait est une inconduite au sens de la Loi.

[20] La Commission doit prouver que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite. Elle doit le prouver selon la prépondérance des probabilités, c’est-à-dire qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que l’appelante a perdu son emploi en raison de son inconduiteNote de bas page 10.

[21] La Commission affirme qu’il y a eu inconduite parce que :

  • l’employeur avait une politique de vaccination;
  • l’appelante a été informée de la politique;
  • l’appelante n’a pas reçu d’exemption pour motifs religieux de la part de l’employeur;
  • l’appelante a été informée des conséquences si elle ne respectait pas la politique.

[22] L’appelante soutient qu’il n’y a pas eu inconduite parce que :

  • l’exemption pour motifs religieux aurait dû lui être accordée;
  • la politique va à l’encontre de plusieurs lois et principes juridiques, dont la confidentialité des renseignements médicaux, la discrimination, le consentement éclairé, l’autonomie corporelle, le congédiement injustifié et la contrainte;
  • le vaccin a des effets indésirables et n’arrête pas la transmission;
  • d’autres précautions étaient disponibles, y compris le port d’un équipement de protection individuelle.

[23] La politique vaccinale de l’employeur disait que les membres du personnel devaient être entièrement vaccinés contre la COVID-19 au plus tard le 22 octobre 2021. Les personnes non vaccinées s’exposaient à des mesures disciplinaires pouvant aller jusqu’au congédiementNote de bas page 11.

[24] Le 3 septembre 2021, l’employeur a révisé sa politique de vaccination comme suit :

  • les membres du personnel devaient être entièrement vaccinés contre la COVID-19 au plus tard le 22 octobre 2021;
  • toute personne qui ne voulait pas dire si elle avait été vaccinée allait être considérée comme non vaccinée;
  • toute personne pouvait être exemptée en raison d’une contre-indication médicale confirmée ou d’un motif conforme au Code des droits de la personne de l’Ontario;
  • toute personne non vaccinée s’exposait à des mesures disciplinaires pouvant aller jusqu’au congédiementNote de bas page 12.

[25] L’appelante a déclaré qu’elle n’a pas dit à son employeur si elle avait été vaccinée. Elle affirme qu’elle a entendu parler de la politique de vaccination obligatoire pour la première fois dans les nouvelles à la mi-août 2021.

[26] L’appelante a dit qu’elle était en congé de maladie lorsque l’employeur a instauré la politique de vaccination en août 2021.

[27] L’appelante a déclaré qu’elle a présenté une demande d’exemption pour des raisons concernant les droits de la personne au début de septembre 2021. Sa demande indiquait qu’elle avait choisi de refuser la vaccination et le dépistage obligatoires en fonction de sa religion ou d’un motif pertinent lié aux droits de la personneNote de bas page 13.

[28] Dans une lettre datée du 14 septembre 2021, l’employeur a rejeté sa demande d’exemption relative aux droits de la personneNote de bas page 14.

[29] L’appelante a déclaré qu’elle devait retourner au travail le 8 novembre 2021 après son congé de maladie. Elle a rencontré son employeur à cette date pour parler de son statut vaccinal. Toutefois, elle n’a pas dit à son employeur si elle s’était fait vacciner.

[30] L’appelante a déclaré avoir rencontré son employeur le 9 novembre 2021 dans le cadre d’une réunion de congédiement. L’employeur lui a envoyé une lettre de congédiement datée du 9 novembre 2021Note de bas page 15.

[31] L’appelante a affirmé qu’elle ne savait pas que la politique révisée prévoyait que toute personne qui ne voulait pas dire si elle avait été vaccinée allait être considérée comme non vaccinée. Elle dit qu’elle n’a pas reçu la politique révisée avant d’être congédiée.

[32] L’appelante a déclaré que même si elle avait été au courant de cet énoncé de la politique révisée, elle n’aurait toujours pas dit à son employeur si elle s’était fait vacciner.

[33] Je conclus que la Commission a prouvé qu’il y a eu inconduite parce que :

  • l’employeur avait une politique de vaccination selon laquelle tous les membres du personnel devaient être vaccinés contre la COVID-19, à moins d’avoir une exemption;
  • l’employeur a clairement informé l’appelante de ses attentes concernant la vaccination et la communication de son statut vaccinal;
  • l’appelante savait que l’employeur avait rejeté sa demande d’exemption;
  • l’employeur a parlé à l’appelante plusieurs fois pour lui faire part de ses attentes;
  • l’appelante savait ou aurait dû savoir quelles étaient les conséquences si elle ne respectait pas la politique vaccinale de l’employeur.

Alors, l’appelante a-t-elle perdu son emploi en raison d’une inconduite?

[34] Selon mes conclusions ci-dessus, je suis d’avis que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite.

[35] En effet, les actions de l’appelante ont mené à son congédiement. Elle a agi délibérément. Elle savait que son refus de dire si elle avait été vaccinée pouvait entraîner la perte de son emploi.

Conclusion

[36] La Commission a prouvé que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite. C’est pourquoi l’appelante est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[37] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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