Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : SL c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 215

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une prolongation de délai

Partie demanderesse : S. L.
Représentant : R. l.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 14 octobre 2022 (GE-22-2401)

Membre du Tribunal : Stephen Bergen
Date de la décision : Le 27 février 2022
Numéro de dossier : AD-23-25

Sur cette page

Décision

[1] Je refuse de prolonger le délai permettant au prestataire de demander la permission de faire appel. Je n’examinerai pas sa demande de permission de faire appel.

Aperçu

[2] Dans cette affaire, la partie qui demande la permission de faire appel est S. L. Je vais l’appeler « prestataire » puisqu’il demandait des prestations d’assurance-emploi. Il a posté une demande de prestations de maladie à la fin de janvier ou en février 2022. La partie défenderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a reçu sa demande le 21 février 2022.

[3] Le prestataire a demandé à la Commission de traiter sa demande comme si elle avait été reçue en juillet 2019. C’est ce qu’on appelle « antidater » une demande. La Commission a refusé de le faire. Elle a établi que le prestataire n’avait pas un motif valable justifiant son retard pendant toute la période écoulée. Elle a aussi décidé que le prestataire n’avait pas droit aux prestations à compter de janvier 2022, parce qu’il n’avait pas accumulé assez d’heures d’emploi assurable pour y être admissible à ce moment-là.

[4] La Commission n’a pas modifié sa décision lorsque le prestataire lui a demandé une révision. Il a donc fait appel à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale. La division générale a rejeté son appel le 14 octobre 2022.

[5] Par la suite, le prestataire a demandé à la division d’appel la permission de faire appel de la décision de la division générale. Il a déposé sa demande le 5 janvier 2023. C’était trop tard. Par conséquent, je ne peux pas examiner sa demande de permission de faire appel, à moins de lui accorder d’abord une prolongation de délai.

[6] Je refuse de prolonger le délai. Le prestataire ne m’a pas convaincu qu’il avait une explication raisonnable pour le retard de sa demande.

Analyse

La demande a été présentée en retard

[7] La première question que je dois trancher est de savoir si la demande de permission de faire appel a été présentée en retard.

[8] La loi prévoit qu’une personne doit demander la permission de faire appel à la division d’appel dans les 30 jours suivant la date de réception de la décision de la division généraleNote de bas de page 1.

[9] La division générale a rendu sa décision le 14 octobre 2022 et l’a envoyée par courriel au prestataire ce jour-là. Je vais devoir tirer une conclusion sur la date à laquelle le prestataire a reçu la décision.

[10] Le prestataire a entamé son appel à la division générale en déposant un formulaire d’avis d’appel. Dans ce formulaire, il a fourni une adresse courriel. Il a confirmé que la division générale devrait envoyer toute correspondance et tout document par courriel.

[11] La réglementation prévoit qu’une décision est « présumée avoir été communiquée » le premier jour ouvrable suivant le jour où elle a été transmise par courrielNote de bas de page 2. Le premier jour ouvrable suivant le 14 octobre 2022 était le 15 octobre 2022.

[12] Par conséquent, je peux présumer que le prestataire a reçu la décision de la division générale le 15 octobre 2022, à moins que la preuve ne me convainque qu’il l’a reçue un autre jour.

[13] Dans sa demande à la division d’appel, le prestataire a déclaré qu’il ne se rappelait pas quand il avait reçu la décision. Le 7 février 2022, j’ai écrit à l’avocat du prestataire (monsieur R. I.). Dans ma lettre, j’ai demandé à quelle date le prestataire avait reçu la décision de la division générale. Monsieur R. I. a répondu à ma lettre le 20 février 2022, sans toutefois parler de la date à laquelle le prestataire avait reçu la décision.

[14] Je dois mentionner que les registres téléphoniques du Tribunal portent à croire que le prestataire a reçu la décision après le 15 octobre 2022. Le 17 octobre 2022, le personnel du Tribunal a dit au prestataire qu’on lui avait envoyé la décision le 14 octobre 2022, ainsi que de l’information sur ce qu’il devrait faire s’il n’était pas d’accord avec cette décision.

[15] Le prestataire a parlé au Tribunal le 18 octobre 2022. Il a dit qu’il n’avait toujours pas reçu la décision, mais qu’il allait vérifier sur son ordinateur. Il a précisé qu’il rappellerait s’il ne l’avait toujours pas reçue.

[16] Le 24 octobre 2022, le prestataire a téléphoné au Tribunal, affirmant une fois de plus qu’il n’avait pas reçu la décision. Le Tribunal a vérifié son adresse courriel et a renvoyé le courriel. Le Tribunal a également envoyé une copie de la décision par la poste.

[17] Le 3 novembre 2022, le Tribunal a informé le prestataire qu’on lui avait envoyé le mauvais formulaire pour demander la permission de faire appel. Le personnel du Tribunal lui a expliqué qu’il pouvait tout de même faire appel sans le bon formulaire. Mais le prestataire n’aimait pas l’idée de faire appel avec le mauvais formulaire. Rien dans les notes de cette conversation ne laisse croire que le prestataire n’avait pas reçu la décision de la division générale à ce moment-là.

[18] Je conclus donc que la décision de la division générale a été communiquée au plus tard le 3 novembre 2022.

[19] Avant le 3 novembre, le prestataire a téléphoné à quelques reprises pour dire qu’il n’avait pas reçu la décision. Cependant, lorsqu’il a téléphoné le 3 novembre, il n’a pas posé de questions à ce sujet ni dit qu’il ne l’avait pas reçue. Le Tribunal l’a simplement informé qu’il pouvait faire appel de la décision sans le bon formulaire.

[20] Je pense que le Tribunal a probablement donné ce conseil au prestataire en tenant pour acquis qu’il avait une copie de la décision qu’il voulait porter en appel. Je pense aussi que le prestataire aurait probablement demandé pourquoi il n’avait toujours pas reçu la décision (si cela avait été le cas) et comment il pouvait faire appel d’une décision qu’il n’avait pas vue. Le prestataire semble plutôt s’être préoccupé uniquement de l’utilisation du mauvais formulaire.

[21] Comme je conclus que le prestataire a reçu la décision au plus tard le 3 novembre 2022, la date limite pour déposer la demande à la division d’appel était le 2 décembre 2022. Toutefois, la division d’appel a reçu la demande du prestataire le 5 janvier 2023.

[22] La demande de permission de faire appel a un peu plus d’un mois de retard.

Je ne prolonge pas le délai permettant de déposer la demande

Explication raisonnable

[23] Pour décider s’il y a lieu de prolonger le délai, je dois vérifier si le prestataire a une explication raisonnable pour avoir déposé sa demande en retardNote de bas de page 3.

[24] Le prestataire est représenté par monsieur R. I., qui a déposé la demande en son nom. Monsieur R. I. a expliqué que le prestataire avait déposé sa demande en retard parce qu’il avait changé d’adresse et était donc [traduction] « incapable de recevoir de la correspondance à ce moment-là ». Monsieur R. I. a ajouté que le prestataire avait des problèmes de santé qui l’empêchaient d’agir de façon indépendante. Le prestataire devait donc compter sur l’aide des membres de sa famille.

[25] Lorsque j’ai écrit à monsieur R. I. le 7 février 2023, je lui ai donné une autre occasion d’expliquer la raison du retard de la demande et de me dire en quoi cette explication était raisonnable.

[26] Monsieur R. I. a répondu le 20 février 2023 en me donnant les détails que voici sur son explication précédente :

  • Le changement d’adresse décrit dans l’explication précédente était un changement [traduction] « d’adresse domiciliaire » du prestataire.
  • Le prestataire n’a pas « les compétences ou l’expérience » nécessaires pour lire et comprendre la décision ou tout autre document du Tribunal.
  • Le prestataire a eu un rendez-vous au cabinet d’avocats de monsieur R. I. au début de décembre 2022 pour discuter de la décision que la division générale avait rendue le 14 octobre 2022. Il n’avait aucune idée que la date limite pour déposer la demande à la division d’appel était passée, jusqu’à ce qu’il consulte monsieur R. I.
  • Le prestataire avait des [traduction] « problèmes » d’audition et de communication.
  • Le prestataire s’était fié à sa fille pour l’aider à comprendre l’audience de la division générale et à répondre aux questions.

[27] Je suis d’avis que le prestataire n’a pas fourni une explication raisonnable pour le retard de sa demande.

[28] Le prestataire soutient que son adresse a changé et que c’est une des raisons qui expliquent le retard de sa demande. Toutefois, l’avis d’appel du prestataire autorisait la division générale à correspondre avec lui au moyen d’une adresse courriel qu’il avait fournie. La division générale a envoyé toute sa correspondance, y compris sa décision, à cette adresse courriel.

[29] De plus, le prestataire a confirmé plus tard que le Tribunal avait la bonne adresse courriel pour le joindre.

[30] Au cours de tous ses appels téléphoniques avec le personnel du Tribunal, le prestataire n’a pas mentionné une seule fois que son adresse domiciliaire avait changé. Il n’en a même pas été question dans la conversation où il a demandé qu’on lui envoie une copie de la décision de la division générale par la poste. Son adresse actuelle qui figure au dossier du Tribunal est la même que celle dans l’entête de la lettre du 21 juillet 2022. Il s’agit de la lettre dans laquelle la division générale a accusé réception de l’avis d’appel du prestataire.

[31] Le prestataire n’a pas dit s’il a finalement trouvé la décision dans ses courriels ou s’il l’avait reçue par la poste. S’il l’a reçue par courriel, tout changement d’adresse domiciliaire n’est pas pertinent. S’il a reçu sa copie par la poste, et non par courriel, il n’a pas expliqué en quoi son changement d’adresse domiciliaire a retardé l’accès à la décision.

[32] Le prestataire a peut-être l’habitude de compter sur d’autres personnes pour l’aider, comme il l’a fait avec sa fille à l’audience de la division générale. Toutefois, il n’a pas dit avoir perdu cette forme d’aide entre le moment où il a reçu la décision de la division générale et celui où il a présenté sa demande à la division d’appel. Sa fille semblait disposée à continuer de l’aider même après l’audience de la division générale. Le 4 octobre 2022, le prestataire a mentionné au Tribunal que sa fille l’aiderait à présenter une déclaration après l’audience.

[33] Lors du même appel téléphonique, le 4 octobre 2022, le prestataire a déclaré qu’il avait des difficultés depuis son accident vasculaire cérébralNote de bas de page 4. Je n’ai aucune raison de douter que le prestataire a certains [traduction] « problèmes d’audition et de communication », comme l’a fait valoir monsieur R. I. Cependant, le prestataire n’a pas précisé la nature ou l’étendue de ces problèmes. Il n’a pas expliqué comment ils auraient pu nuire à sa capacité de présenter une demande à temps.

[34] Le prestataire a eu de nombreuses conversations avec le Tribunal avant et après l’audience de la division générale. Aucune preuve dans les notes de ces conversations ne montre qu’il avait de la difficulté à communiquer avec le Tribunal.

[35] De plus, le prestataire a consulté monsieur R. I. [traduction] « au début de décembre 2022 », et il est maintenant représenté. Pourtant, sa demande à la division d’appel n’a pas été déposée avant le 5 janvier 2022 [sic]. Ni monsieur R. I. ni le prestataire n’ont expliqué la période qui s’est écoulée entre la consultation juridique et le dépôt de la demande.

Résumé

[36] Je ne suis pas convaincu que le prestataire ait une explication raisonnable pour son retard.

Conclusion

[37] Je refuse de prolonger le délai. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

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