Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : X c Commission de l’assurance-emploi du Canada et JL, 2022 TSS 1043

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : X
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Partie mise en cause : J. L.

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (476424) datée du 25 avril 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Bret Edwards
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 15 septembre 2022
Personnes présentes à l’audience : Aucune
Date de la décision : Le 27 septembre 2022
Numéro de dossier : GE-22-1673

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Décision

[1] L’appel est accueilli. Je suis d’accord avec l’employeur (appelant).

[2] L’employeur a démontré que le prestataire (partie mise en cause) n’était pas fondé à quitter son emploi au moment de son départ (c’est-à-dire qu’il n’avait pas une raison acceptable selon la loi). Le prestataire est parti sans justification, car son départ n’était pas la seule solution raisonnable. Par conséquent, le prestataire est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[3] Le prestataire a quitté son emploi le 11 mars 2021 et a demandé des prestations d’assurance-emploi. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a examiné les raisons du départ du prestataire. Elle a d’abord décidé qu’il avait quitté volontairement son emploi (c’est-à-dire qu’il avait choisi de le quitter) sans justification. Elle ne pouvait donc pas lui verser de prestations.

[4] Après que le prestataire a demandé une révision, la Commission a annulé sa décision initiale et a conclu que le prestataire avait quitté volontairement son emploi pour un motif valable, de sorte qu’elle pouvait donc lui verser des prestations.

[5] L’employeur fait maintenant appel de la décision découlant de la révision de la Commission, car il affirme que le prestataire est parti soudainement sans raison.

[6] Je dois décider si le prestataire était fondé à quitter son emploi.

Question que je dois examiner en premier

L’employeur et le prestataire n’étaient pas présents à l’audience

[7] L’employeur et le prestataire ne se sont pas présentés à l’audience. Elle pouvait avoir lieu sans eux s’ils avaient reçu l’avis d’audienceNote de bas de page 1.

[8] J’estime que l’employeur et le prestataire ont reçu l’avis d’audience parce qu’ils ont tous deux fourni au Tribunal une adresse courriel les 6 et 25 mai 2022 respectivement et qu’ils ont consenti à la communication par courriel. Le Tribunal a envoyé les documents d’audience, y compris l’avis d’audience, à ces adresses courriel.

[9] Comme je sais que l’employeur et le prestataire ont reçu l’avis d’audience et comme je ne vois rien qui indique que l’envoi a posé problème, l’audience a eu lieu au moment prévu, mais sans l’employeur ni le prestataire.

Questions en litige

[10] Le prestataire a-t-il été congédié ou a-t-il démissionné?

[11] Le prestataire a-t-il droit à des prestations?

[12] Pour répondre à ces questions, je dois d’abord savoir pourquoi le prestataire a quitté son emploi. Si j’établis que le prestataire a démissionné, je dois alors voir s’il a droit à des prestations en décidant s’il était fondé à quitter son emploi.

Analyse

Les parties ne s’entendent pas sur le départ volontaire du prestataire

[13] L’employeur affirme que le prestataire a quitté son emploi sans donner de raison après seulement trois jours de travail. L’employeur dit avoir reçu un texto du prestataire disant qu’il démissionnait, mais il ne l’a pas fourni comme preuveNote de bas de page 2. Le relevé d’emploi produit par l’employeur indique également que le prestataire a démissionnéNote de bas de page 3.

[14] Le prestataire n’est pas d’accord et affirme qu’il a été congédié parce qu’il n’avait pas la bonne formation pour l’emploi. Le prestataire dit qu’il est soudeur et qu’il y a eu un malentendu lorsqu’il a été embauché. Il explique qu’il croyait être embauché comme soudeur alors que l’employeur voulait en fait un ouvrier. Il ajoute que l’employeur et lui ont convenu qu’il partirait après trois joursNote de bas de page 4.

[15] La Commission a décidé que le prestataire avait quitté son emploi et qu’il l’avait fait volontairement, sans toutefois donner de raison précise justifiant sa décisionNote de bas de page 5.

[16] Je conclus que le prestataire a quitté volontairement son emploi. Autrement dit, c’était son choix. Il aurait pu continuer à travailler.

[17] Pour décider si le prestataire a quitté volontairement son emploi, il faut savoir s’il avait le choix de rester ou de partirNote de bas de page 6. En cas de malentendu entre une personne et son employeur au sujet de la raison d’un départ, on ne peut pas présumer automatiquement que la personne a quitté volontairement son emploiNote de bas de page 7.

[18] Bien que le prestataire affirme avoir été congédié, il précise que son départ a eu lieu seulement après que l’employeur lui a offert l’option de partir. Il dit avoir choisi cette option parce que l’employeur n’approuvait pas ses heures d’apprenti comme il l’avait pourtant fait pour les personnes en apprentissage avant lui. L’employeur et lui ont convenu qu’il ne perdrait pas ses deux années de formation en soudage pour être ouvrier avant d’avoir terminé sa troisième annéeNote de bas de page 8.

[19] Même si le prestataire soutient que l’employeur ne voulait pas approuver ses heures d’apprenti et qu’ils ont convenu qu’il ne perdrait pas ses deux années de formation en soudage pour devenir ouvrier, ce qui l’a amené à accepter l’offre de départ, on ne peut pas en déduire qu’il n’avait d’autre choix que de partir.

[20] Je remarque que le prestataire ne dit pas que l’employeur l’a obligé à accepter l’offre de départ ou qu’il allait être congédié. Je ne vois rien non plus qui dit que le prestataire n’aurait pas pu continuer à travailler s’il avait refusé l’offre.

[21] Je note que la version de l’employeur et celle du prestataire indiquent toutes deux que ce dernier avait le choix de rester ou de partir. Selon ce que chacun dit, le prestataire a choisi de quitter son emploi. Il aurait pu ne pas partir ou ne pas accepter l’offre de quitter son emploi.

[22] Je conclus donc que, selon la prépondérance des probabilités, le prestataire avait le choix de rester ou de partir, ce qui signifie que son départ était volontaire.

[23] Puisque j’ai établi que le prestataire a quitté volontairement son emploi, je dois maintenant voir s’il était fondé à le faire.

Les parties ne s’entendent pas sur la justification du départ

[24] Les parties ne s’entendent pas pour dire que le prestataire était fondé à quitter volontairement son emploi au moment de son départ.

[25] La loi prévoit que le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il a quitté volontairement son emploi et qu’il n’était pas fondé à le faireNote de bas de page 9. Il ne suffit pas d’avoir une bonne raison de quitter un emploi pour prouver que le départ était justifié.

[26] La loi explique ce que veut dire « être fondé à faire quelque chose ». Elle prévoit qu’une personne est fondée à quitter son emploi si son départ est la seule solution raisonnable à ce moment-làNote de bas de page 10.

[27] Le prestataire est responsable de prouver que son départ était justifiéNote de bas de page 11. Il doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Autrement dit, il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que quitter son emploi était la seule solution raisonnable. Pour rendre ma décision, je dois examiner toutes les circonstances entourant le départ du prestataire.

[28] L’employeur soutient que le prestataire a quitté soudainement son emploi en l’avisant par texto après seulement trois jours de travail. Selon l’employeur, la Commission a fait erreur lorsqu’elle a décidé que le prestataire était fondé à quitter son emploiNote de bas de page 12.

[29] Le prestataire affirme qu’il a quitté son emploi parce que ses compétences ne correspondaient pas à l’emploi. Il dit que l’employeur et lui se sont mal entendus sur le type d’emploi pour lequel il avait été embauchéNote de bas de page 13.

[30] Le prestataire explique qu’il est soudeur et croyait avoir été embauché pour faire ce type d’emploi, mais en fait, l’employeur voulait un ouvrier. Il précise que l’employeur et lui se sont rencontrés pour discuter de la situation après sa troisième journée de travail. Il ajoute que l’employeur ne voulait pas approuver ses heures d’apprenti soudeur et qu’il ne voulait pas perdre ses deux années de formation en soudage pour être ouvrier. L’employeur lui a alors offert de partir. Il dit avoir accepté cette offreNote de bas de page 14.

[31] La Commission affirme que le prestataire était fondé à quitter son emploi. Elle dit que l’explication qu’il a donnée est crédible. Le prestataire a expliqué qu’après une période d’essai, il s’est rendu compte que ses compétences ne correspondaient pas à l’emploiNote de bas de page 15.

[32] Pour ma part, je considère que le prestataire n’était pas fondé à quitter son emploi parce qu’il avait deux solutions raisonnables dont il n’a pas tenu compte.

[33] Premièrement, j’estime que le prestataire aurait pu continuer à travailler pour l’employeur tout en cherchant un autre emploi jusqu’à en trouver un.

[34] Je comprends que le prestataire affirme qu’il n’était pas la bonne personne pour l’emploi. Cependant, comme je l’ai déjà dit, la preuve montre que le prestataire avait le choix de continuer à travailler pour l’employeur. Il aurait donc pu rester à cet emploi tout en cherchant un autre travail jusqu’à en trouver un qui lui plaisait davantage.

[35] Je comprends aussi que la prestataire dit que l’employeur ne voulait pas approuver ses heures d’apprenti soudeur et qu’il ne voulait pas les perdre. Cependant, je juge que rien ne prouve que l’employeur lui a expressément dit ou a même laissé entendre qu’il perdrait ces heures s’il n’acceptait pas l’offre de départ.

[36] Il n’y a donc pas assez d’éléments de preuve pour démontrer que le prestataire aurait perdu ses heures de soudage s’il avait continué à travailler pour l’employeur tout en cherchant un autre emploi jusqu’à en trouver un.

[37] Deuxièmement, j’estime que le prestataire aurait pu demander à l’employeur s’il pouvait faire d’autres tâches.

[38] Je remarque que ni l’employeur ni le prestataire n’ont prouvé qu’ils avaient discuté ensemble de la possibilité d’autres tâches avant que le prestataire ne décide de partir volontairement. Même s’il est bien possible que l’employeur n’ait pas eu d’autre travail à offrir, c’était tout de même une option raisonnable que le prestataire n’a pas explorée avant de partir volontairement.

[39] Pour les raisons que je viens de mentionner, le départ volontaire du prestataire n’était pas la seule solution raisonnable compte tenu des circonstances à ce moment-là.

[40] Par conséquent, je considère que le prestataire n’était pas fondé à quitter son emploi.

Conclusion

[41] Je conclus que le prestataire est exclu du bénéfice des prestations.

[42] L’appel est donc accueilli.

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