Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Résumé :

Le demandeur s’est vu refuser des prestations d’assurance-emploi par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (la Commission), car il ne s’est pas conformé à la politique de vaccination contre la COVID-19 de son employeur. La Commission a conclu que le demandeur avait perdu son emploi en raison de sa propre inconduite. Ce dernier a demandé une révision, mais la Commission a maintenu sa décision.

Le demandeur a fait appel de la décision de la Commission en appel à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale. La division générale a rejeté l’appel. Elle a conclu que le demandeur avait perdu son emploi en raison d’une inconduite parce qu’il avait refusé de se conformer à la politique de vaccination de son employeur. La division d’appel a accordé la permission de faire appel de la décision de la division générale. Elle a établi que la division générale avait déformé la preuve du demandeur et qu’elle n’avait pas abordé plusieurs de ses arguments. En rendant la décision que la division générale aurait dû rendre, la division d’appel a jugé que la division générale n’avait pas commis d’erreur. La division d’appel a rejeté l’appel. Le demandeur a ensuite demandé à la Cour d’appel fédérale de réviser la décision de la division d’appel.

La Cour d’appel fédérale a conclu que la décision de la division d’appel était raisonnable. Plus particulièrement, elle a jugé que la division d’appel avait fait référence à la jurisprudence pertinente et qu’elle avait eu raison de refuser d’aborder certains arguments qui ne relevaient pas de sa compétence. La demande de contrôle judiciaire a été rejetée.

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : NZ c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 372

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Partie appelante : N. Z.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentante : Julie Villeneuve

Décision portée en appel : Décision rendue par la division générale le 17 octobre 2022
(GE-22-2135)

Membre du Tribunal : Janet Lew
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 27 février 2023
Personnes présentes à l’audience : Appelant
Représentante de l’intimée
Date de la décision : Le 22 mars 2023
Numéro de dossier : AD-22-833

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté. La division générale a déformé certains éléments de preuve et n’a pas abordé certaines des questions dont elle était saisie. Toutefois, cela ne change rien au résultat.

Aperçu

[2] L’appelant, N. Z. (prestataire), fait appel de la décision de la division générale. La division générale a conclu que le prestataire avait perdu son emploi en raison d’une inconduite. Autrement dit, elle a conclu qu’il avait fait quelque chose qui l’avait amené à perdre son emploi. Il n’a pas respecté la politique de vaccination contre la COVID-19 de son employeur. Comme la division générale a conclu qu’il y avait eu une inconduite, le prestataire a été exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[3] Le prestataire soutient que la division générale a commis plusieurs erreurs de droit et de fait. Il affirme principalement que la division générale n’a pas examiné si la politique de son employeur était légale, et il estime qu’elle était illégale. Pour cette raison, il dit qu’il n’avait pas à s’y conformer et que son refus de le faire n’est donc pas une inconduite.

[4] Le prestataire demande à la division d’appel de rendre la décision que, selon lui, la division générale aurait dû rendre. Il soutient que la division d’appel devrait ordonner à l’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, de lui présenter des excuses officielles et de lui verser des prestations d’assurance-emploi, ou de lui rembourser les cotisations qu’il a versées à l’assurance-emploi.

[5] La Commission reconnaît que la division générale n’a pas abordé la question de la légalité de la politique de vaccination de l’employeur. Malgré cela, la Commission affirme qu’elle n’aurait pas modifié le résultat. La Commission demande à la division d’appel de rejeter l’appel.

Questions en litige

[6] Voici les questions en litige dans le présent appel :

  1. a) La division générale a-t-elle commis une erreur de fait lorsqu’elle a conclu que le prestataire avait perdu son emploi parce qu’il n’avait pas respecté la politique de vaccination de son employeur?
    1. i. La division générale a-t-elle déformé la preuve du prestataire?
    2. ii. La lettre de congédiement de l’employeur était-elle déterminante pour la question d’inconduite?
  2. b) La division générale a-t-elle omis d’examiner si la politique de vaccination de l’employeur faisait partie du contrat de travail du prestataire?
  3. c) La division générale a-t-elle omis d’examiner la légalité de la politique de vaccination de l’employeur?

Analyse

[7] La division d’appel peut intervenir dans les décisions de la division générale en cas d’erreurs de compétence, de procédure ou de droit, ou de certains types d’erreurs de faitNote de bas de page 1.

[8] Pour ce qui est des erreurs de fait, la division générale doit avoir fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

La division générale a-t-elle commis une erreur de fait lorsqu’elle a conclu que le prestataire avait perdu son emploi parce qu’il n’avait pas respecté la politique de vaccination de son employeur?

[9] Le prestataire soutient que la division générale a commis une erreur de fait en concluant qu’il avait été congédié parce qu’il n’avait pas respecté la politique de vaccination de son employeur. Le prestataire nie qu’il y ait eu un lien entre son congédiement et la question de savoir s’il n’a pas respecté la politique de vaccination de son employeur.

[10] Le prestataire fait référence à la lettre de congédiement de son employeurNote de bas de page 2. Son employeur a écrit qu’il avait congédié le prestataire [traduction] « sans justification ». Autrement dit, le prestataire affirme que son employeur l’avait congédié pour aucune raison particulière.

[11] Cela est important parce que, comme la division générale l’a déclaré, pour qu’il y ait une inconduite, le prestataire devait avoir perdu son emploi en raison d’une chose qu’il a faite. Par conséquent, si l’employeur l’a congédié pour des raisons indépendantes de ce qu’il aurait pu faire, il serait impossible de dire qu’il y a eu une inconduite.

[12] Le prestataire soutient que si son employeur l’avait congédié parce qu’il n’avait pas respecté sa politique de vaccination, il aurait dû le préciser dans sa lettre de congédiement. Le prestataire soutient que la lettre de congédiement est un document juridique dont son employeur peut être tenu responsable.

[13] Le prestataire soutient que ni la Commission ni la division générale ne devraient pouvoir se fier à quelque chose que l’employeur a déclaré par la suite qui a expliqué pourquoi il l’avait congédié de son emploi. Le prestataire affirme que les allégations de l’employeur voulant qu’il l’ait congédié parce qu’il n’a pas respecté sa politique de vaccination sont contradictoires. Il affirme que les déclarations contredisent le fait que l’employeur a déclaré dans la lettre de congédiement qu’il n’avait aucune raison de congédier le prestataire.

[14] Le prestataire affirme également que les avocats ont probablement fourni des conseils à son employeur sur la façon de rédiger la lettre de congédiement, afin qu’il puisse se soustraire à toute responsabilité pour congédiement injustifiéNote de bas de page 3.

La décision de la division générale

[15] Au paragraphe 9 de sa décision, la division générale a écrit que « [l]e prestataire convient qu’il a été congédié parce qu’il n’a pas respecté le mandat de vaccination de son employeur ».

La division générale a déformé la preuve du prestataire

[16] Le prestataire nie avoir convenu que l’employeur l’avait congédié parce qu’il n’avait pas respecté sa politique de vaccination.

[17] En effet, le prestataire a toujours nié que son employeur l’avait congédié parce qu’il n’avait pas respecté sa politique de vaccination.

  • Dans sa demande de prestations d’assurance-emploi, le prestataire a déclaré avoir été congédié en raison d’un manque de travailNote de bas de page 4.
  • Lorsque le prestataire a parlé à la Commission le 13 janvier 2022, il a affirmé que son employeur l’avait congédié en raison d’un manque de travailNote de bas de page 5.
  • Lorsque le prestataire a parlé à la Commission le 15 mars 2022, il a nié que son employeur avait déclaré qu’il l’avait congédié parce qu’il avait refusé de se conformer à sa politique de vaccinationNote de bas de page 6.
  • Le prestataire a demandé à la Commission de réviser sa décision de lui refuser des prestations. Il a écrit qu’il avait été congédié sans motif. Il a souligné que son employeur a raconté une histoire contradictoire en disant à la Commission qu’il l’avait congédié pour ne pas avoir respecté sa politique de vaccinationNote de bas de page 7.
  • Lorsque le prestataire a parlé à la Commission le 18 mai 2022, il a déclaré qu’il avait été congédié sans motif. Il a affirmé que son employeur n’avait aucune raison de le congédier. Il ne se souvenait apparemment pas si son congédiement avait quelque chose à voir avec le non-respect de la politique de vaccination de l’employeur. Il s’est demandé pourquoi Service Canada n’accepterait pas que son employeur le congédie sans motif, comme l’indiquait sa lettre de congédiementNote de bas de page 8.
  • Il a nié que son employeur ait déclaré l’avoir congédié parce qu’il avait refusé de se conformer à sa politique de vaccinationNote de bas de page 9.
  • Dans son avis d’appel à la division générale, le prestataire a de nouveau souligné que la lettre de congédiement de son employeur n’offrait aucun motif de congédiement. Son employeur n’a pas mentionné son refus de se conformer à sa politique de vaccinationNote de bas de page 10.
  • À l’audience de la division générale, le prestataire a déclaré que son employeur ne lui avait jamais dit pourquoi il l’avait congédiéNote de bas de page 11. Ils l’ont congédié sans motif, ce qui veut dire selon lui que l’employeur a déclaré qu’il n’avait rien fait de mal. Il affirme que cela signifie que même son employeur est d’avis qu’il n’y a pas eu d’inconduite.

[18] Je ne vois aucune preuve démontrant que le prestataire a convenu que son employeur l’avait congédié parce qu’il n’avait pas respecté sa politique de vaccination. Il est clair que la division générale a mal interprété la preuve du prestataire lorsqu’elle a conclu qu’il avait convenu que son employeur l’avait congédié pour ne pas avoir respecté sa politique de vaccination.

[19] Même si la division générale a mal interprété la preuve du prestataire, cela signifie-t-il que la lettre de congédiement de l’employeur détermine la raison du congédiement du prestataire?

La lettre de congédiement de l’employeur n’est pas déterminante pour la question de l’inconduite

[20] Le prestataire soutient que la lettre de congédiement de son employeur est la preuve définitive qu’il l’a congédié sans motif, pour des raisons qui n’ont rien à voir avec sa politique de vaccination. La lettre précise que l’employeur l’a congédié sans motif. Le prestataire affirme que la Commission et la division générale auraient dû ignorer les autres raisons que l’employeur a données à la Commission pour expliquer son congédiement.

[21] Comme la division générale l’a souligné, la Cour d’appel fédérale a déclaré que toute entente ou tout autre document de l’employeur ne règle pas la question de savoir s’il y a eu une inconduite ou non. Il incombe plutôt à la division générale d’examiner tous les faits et de décider s’il y a eu une inconduite. La Cour a écrit :

[traduction]
Selon la jurisprudence de la Cour [...] la simple existence d’une entente de règlement ne permet pas de déterminer si un employé a été congédié pour inconduite : voir les décisions Canada (Procureur général) c Peruss (14 décembre 1981), A-309-81 (CAF) (non publiée), Canada (Procureur général) c Wile (30 novembre 1994), A-233-94 (non publiée)] et Canada (Procureur général) c Boulton (19) 208 N. R. 63 (CAF).

Il incombe au Conseil d’évaluer la preuve et d’en arriver à ses propres conclusions. Elle n’est pas liée par la façon dont l’employeur et l’employé ont caractérisé les motifs pour lesquels on a mis fin à l’emploi [...] Le fait que l’entente de règlement exigeait que l’employeur retire l’allégation de congédiement pour une raison professionnelle ne peut être considéré comme concluant quant à l’existence d’une inconduite au sens de la LoiNote de bas de page 12.

[22] La division générale a établi qu’elle n’était pas liée par la lettre de congédiement de l’employeur qui disait que le prestataire avait été congédié sans motif. Elle a examiné la preuve dont elle disposait et a tiré sa propre conclusion. Elle a conclu que le prestataire avait perdu son emploi parce qu’il n’avait pas été vacciné ni exempté de la politique de vaccination de son employeur.

[23] Il n’appartient pas à la division d’appel de réévaluer la preuve et de tirer sa propre conclusion, à moins que la division générale ait négligé ou mal interprété la preuve.

[24] La division générale n’a pas abordé directement les déclarations de l’employeur qu’elle a fournies à la CommissionNote de bas de page 13. Cependant, il est clair que la division générale a tenu compte des déclarations de l’employeur. Celui-ci a dit à la Commission qu’après six semaines, le prestataire continuait de ne pas se conformer à sa politique de vaccination. Elle l’a donc congédié pour cette raison. La division générale a accepté que c’était la raison du congédiement du prestataire.

[25] En résumé, la division générale a établi à juste titre qu’elle n’était pas liée par la lettre de congédiement de l’employeur pour expliquer le congédiement du prestataire et qu’elle était responsable d’évaluer la preuve pour voir ce qui a mené au congédiement.

La division générale a-t-elle omis d’examiner si la politique de vaccination de l’employeur faisait partie du contrat de travail du prestataire?

[26] Le prestataire soutient que la division générale n’a pas examiné si la politique de vaccination de son employeur faisait partie de son contrat de travail. Il fait valoir que, comme la vaccination n’était pas requise dans son contrat, il n’avait pas à se faire vacciner. De plus, s’il n’était pas tenu de se conformer à la politique, il affirme qu’il n’y a pas eu d’inconduite.

[27] Le prestataire a fait valoir ce point dans son avis d’appel à la division générale. Il a souligné que la Commission l’avait informé qu’il y avait une inconduite si sa conduite l’empêchait d’accomplir ses tâches habituelles pour lesquelles il avait été embauché. Il s’est demandé comment son refus de se faire vacciner l’empêchait d’accomplir ses tâches habituelles d’ingénieur, pour lesquelles il avait été embauchéNote de bas de page 14.

[28] Le prestataire a également fait valoir dans son avis d’appel qu’au titre de l’article 6.5.10 du Guide de la détermination de l’admissibilité, il pouvait s’attendre à ce que son employeur respecte les conditions du contrat de travailNote de bas de page 15.

[29] Il est clair que le prestataire a présenté ces arguments à la division générale. Celle-ci aurait dû se pencher sur les arguments du prestataire selon lesquels il n’avait pas à se conformer à la politique de vaccination parce qu’elle ne faisait pas partie de son contrat de travail.

La division générale a-t-elle omis d’examiner la légalité de la politique de vaccination de l’employeur?

[30] Le prestataire soutient que la division générale n’a pas examiné la légalité de la politique de vaccination de son employeur. Il fait valoir qu’il n’y a pas d’inconduite s’il n’a pas respecté une politique illégale. Il affirme que la politique de vaccination était illégale, car elle violait plusieurs lois.

[31] La Commission convient que la division générale n’a pas abordé l’argument du prestataire sur ce point. La division générale aurait dû se pencher sur l’argument du prestataire selon lequel la politique de vaccination de son employeur était illégale et qu’il n’y avait pas eu d’inconduite s’il ne s’était pas conformé à la politique.

Correction de l’erreur

[32] À moins que le résultat ne change, la division d’appel a deux options pour corriger les erreurs : elle peut renvoyer l’affaire à la division générale pour un réexamen, ou elle peut rendre la décision que la division générale aurait dû rendre.

[33] De façon générale, il serait approprié de substituer sa propre décision à la celle de la division générale si les faits sous-jacents ne sont pas contestés, si le dossier de preuve est complet, si les parties ont eu droit à une audience équitable devant la division générale et si elles ont eu une occasion pleine et équitable de présenter leurs arguments devant la division générale.

[34] Il n’y a eu aucun problème de procédure à la division générale. Chaque partie a eu une occasion pleine et équitable de présenter ses arguments respectifs à la division générale.

[35] Les parties s’entendent sur les faits fondamentaux sous-jacents. L’employeur du prestataire a mis en place une politique de vaccination qui ne faisait pas partie du contrat de travail initial du prestataire. L’employeur exigeait que les employés fournissent une preuve de vaccination ou se soumettent à des tests antigéniques hebdomadaires. Le non-respect des recommandations entraînerait un congé sans solde. Après six semaines, l’employeur prendrait des mesures disciplinaires pouvant aller jusqu’au congédiement. Le prestataire ne s’est pas conformé à la politique de vaccination de l’employeur.

[36] Pour ces raisons, j’estime qu’il convient de rendre la décision que la division générale aurait dû rendre. Autrement dit, je vais examiner les arguments du prestataire concernant la légalité de la politique de vaccination de l’employeur et la question de savoir si la politique de vaccination de son employeur faisait partie de son contrat de travail.

Légalité de la politique

[37] Le prestataire nie qu’il y a eu une inconduite. Il affirme que la politique de son employeur était illégale. Plus précisément, il soutient que la politique de vaccination de son employeur a enfreint plusieurs lois et principes juridiques, y compris la Charte canadienne des droits, la Charte canadienne des droits et libertés et le Code criminel du Canada. Il fait valoir que, comme la politique de vaccination était illégale, il n’avait pas à s’y conformer. Et il dit que s’il n’avait pas à s’y conformer, il n’y a pas eu d’inconduite.

[38] Dans l’affaire Cecchetto c Canada (Procureur général)Note de bas de page 16, la Cour fédérale s’est penchée sur cette question. M. Cecchetto a soutenu que les décisions de la division générale et de la division d’appel devraient être annulées parce qu’elles ne portaient pas sur :

[traduction]
[...] ses questions fondamentales sur la légalité d’exiger que les employés subissent des procédures médicales (c.-à-d. la vaccination et les tests) lorsque l’efficacité et la sécurité de telles procédures n’ont pas été établies. Il affirme qu’il a été congédié en raison de ses choix médicaux personnels et que les décideurs dans son cas n’ont pas vérifié si cela était légalNote de bas de page 17.

[39] La Cour a établi que ni la division générale ni la division d’appel n’ont le pouvoir d’évaluer le bien-fondé, la légitimité ou la légalité d’une politique de vaccination, ou de se prononcer à leur sujetNote de bas de page 18.

[40] La Cour a conclu que la division générale et la division d’appel avaient un [traduction] « rôle restreint et précis », qui consistait dans cette affaire à déterminer les raisons pour lesquelles M. Cecchetto avait été congédié de son emploi et à établir si ce motif constituait une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi.

[41] La Cour a conclu qu’il n’était pas déraisonnable que ni la division générale ni la division d’appel n’aient abordé les arguments juridiques de M. Cecchetto. Les arguments dépassaient simplement la portée de leur mandat ou de leur compétence.

[42] Le prestataire m’a demandé de ne pas tenir compte de la décision Cecchetto. Il a dit que cela mènerait à un résultat absurde. Il a fait valoir qu’un employeur ne peut pas demander à un employé de faire quelque chose qu’il n’a pas le droit de faire, comme  exiger qu’un employé accomplisse un acte sexuel. Il affirme que si un employé refusait, puis que l’employeur congédiait l’employé, ce ne serait sûrement pas une inconduite. La Commission convient que, pour cet exemple particulier du prestataire, il n’y aurait pas d’inconduite.

[43] Je dois trancher le présent appel en me fondant sur les faits portés à la connaissance de la division générale. De plus, compte tenu de ces faits, la Cour a clairement établi que je n’ai pas le pouvoir d’examiner le bien-fondé, la légitimité ou la légalité de la politique de vaccination de son employeur pour décider si le prestataire a perdu son emploi en raison d’une inconduite.

[44] La Cour a également précisé que, même si le prestataire n’est peut-être pas satisfait du régime d’assurance-emploi [traduction] « il y a des façons de faire avancer ses demandes comme il se doit au sein du système juridiqueNote de bas de page 19 ».

Le contrat de travail du prestataire l’obligeait à se conformer à la politique de vaccination de son employeur

[45] Le prestataire fait valoir que si son employeur n’avait pas déjà expressément inclus la politique de vaccination dans le contrat de travail initial, il ne pouvait pas plus tard présenter une nouvelle politique et l’obliger à s’y conformer.

[46] Le prestataire soutient qu’il n’y a pas eu inconduite parce qu’il a effectué toutes les tâches qu’il devait accomplir selon son contrat de travail. Il affirme que le non‑respect de la politique de vaccination ne l’a pas empêché d’accomplir ses tâches et n’a pas nui à sa capacité de le faire.

[47] Le prestataire et l’employeur ont conclu une relation d’emploi en mars 2021. Le prestataire fait remarquer qu’à ce moment-là, la pandémie était à son apogée. Les vaccins étaient sur le point d’être largement disponibles. Autrement dit, il affirme que son employeur aurait pu inclure la politique de vaccination dans le contrat de travail, mais qu’il ne l’a pas fait.

[48] Le contrat de travail du prestataire figure aux pages GD2-42 à GD2-46 du dossier d’audience de la division généraleNote de bas de page 20. Le document s’intitule « Confidential Offer of Employment » [offre d’emploi confidentielle].

[49] Sous la rubrique « Company Rules & Safety Procedures » [règles de l’entreprise et procédures de sécurité], l’entente se lit comme suit :

[traduction]
Vous convenez que vous respecterez toutes les politiques, les règles, les systèmes et les procédures de l’employeur décrits dans le Guide de l’employé et les procédures de santé et de sécurité en place pendant votre emploi. [L’employeur] exige un accusé de réception et l’acceptation du Manuel de l’employé et des politiques pertinentes au plus tard une semaine après le début de l’emploi. [L’employeur] se réserve le droit de modifier (ajouter ou supprimer) les dispositions de l’un ou l’autre de ces documents à tout moment.

[50] Bien que le contrat de travail ne mentionne pas expressément la vaccination, il donne à l’employeur une grande latitude pour modifier ses politiques, ses règles, ses systèmes et ses procédures. Comme le prestataire avait accepté de se conformer à toutes les politiques, cela s’étendait nécessairement à la politique de vaccination de l’employeur.

[51] L’employeur considérait la politique de vaccination comme faisant partie de ses procédures de santé et de sécurité. Comme l’énonce la politique de vaccination, l’employeur s’est [traduction] « engagé à offrir un milieu de travail sécuritaireNote de bas de page 21 ». Il s’attendait à ce que tous les membres du personnel soient vaccinés contre la COVID-19 et d’autres virus, [traduction] « comme l’a recommandé le ministère de la Santé de l’OntarioNote de bas de page 22 ». Il a également écrit qu’il s’attendait à ce que les [traduction] « mesures de santé et de sécurité applicables soient respectées afin de réduire le danger que représente le virus de la COVID-19Note de bas de page 23 ».

[52] Les dispositions générales du contrat de travail auxquelles le prestataire avait consenti exigeaient qu’il se conforme à la politique de vaccination de son employeur.

Conclusion

[53] L’appel est rejeté. La division générale a déformé la preuve du prestataire. Elle n’a pas non plus vérifié si la politique de vaccination de l’employeur faisait partie du contrat de travail du prestataire ou si elle était légale. Même si la division générale a mal évalué la preuve et n’a pas tenu compte de certains des arguments du prestataire, le résultat demeure le même.

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