Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : KM c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 357

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : K. M.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (0) datée du 12 janvier 2023 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Marc St-Jules
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 6 mars 2023
Personne présente à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 20 mars 2023
Numéro de dossier : GE-23-275

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec l’appelante. Le Tribunal convient que l’appelante devrait avoir droit à la prolongation maximale possible de sa période de référence. Le problème, c’est qu’il n’y a pas d’heures assurables supplémentaires au cours de la période de référence prolongée maximale.

[2] Pour cette raison, l’appelante n’a pas démontré qu’elle a travaillé suffisamment d’heures pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[3] L’appelante a été blessée dans un accident de voiture en octobre 2019. L’accident était suffisamment grave pour qu’elle puisse retourner au travail seulement en août 2021. Pendant son absence du travail, elle a reçu des prestations d’invalidité de courte et de longue durée par l’entremise de son employeur.

[4] L’appelante a travaillé d’août 2021 à octobre 2021. Elle a demandé des prestations régulières d’assurance-emploi en février 2022. Son relevé d’emploi indiquait 376 heures d’emploi assurableNote de bas de page 1.

[5] La défenderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé que l’appelante avait besoin de 420 heures d’emploi assurable, mais qu’elle en avait accumulé seulement 376. La Commission a décidé que l’appelante ne satisfaisait pas aux conditions requises pour pouvoir recevoir des prestations.

[6] L’appelante a fait appel de cette décision auprès de la division générale du Tribunal. Celle-ci a conclu que l’appelante n’avait pas travaillé suffisamment d’heures pour satisfaire aux conditions requises pour pouvoir recevoir des prestations d’assurance-emploi. La division générale a également conclu que la période de référence de l’appelante ne pouvait pas être prolongée parce qu’elle recevait des indemnités pour perte de salaire, et ceci était considéré comme un emploi assurable.

[7] L’appelante a fait appel de cette décision auprès de la division d’appel, qui a conclu que la division générale avait commis une erreur de droit lorsqu’elle avait conclu que la période de référence de l’appelante ne pouvait pas être prolongée. La division d’appel a renvoyé l’affaire à la division générale pour que celle-ci examine si l’appelante était en congé payé par son employeur et, si ce n’était pas le cas, si elle avait accumulé suffisamment d’heures d’emploi assurable au cours d’une période de référence prolongée.

Question en litige

[8] L’appelante a-t-elle travaillé suffisamment d’heures pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi?

Analyse

Admissibilité aux prestations

[9] Chaque personne qui cesse de travailler ne reçoit pas nécessairement des prestations d’assurance-emploi. Il faut démontrer qu’on y est admissibleNote de bas de page 2. L’appelante doit le démontrer selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit prouver qu’il est plus probable qu’improbable qu’elle est admissible aux prestations.

[10] Pour être admissible, la personne doit avoir travaillé assez d’heures au cours d’une période établie. Cette période s’appelle la « période de référenceNote de bas de page 3 ».

[11] En général, le nombre d’heures dépend du taux de chômage dans la région de la personneNote de bas de page 4. Il y a des exceptions à cette règle. Le gouvernement a présenté un projet de loi modifiant cette disposition pour un temps limitéNote de bas de page 5. Sans cette modification temporaire, l’appelante aurait eu besoin de plus d’heures.

La période de référence de l’appelante

[12] Comme mentionné ci-dessus, les heures prises en compte sont celles travaillées pendant la période de référence de l’appelante. En général, la période de référence est la période de 52 semaines qui vient avant le début de la période de prestationsNote de bas de page 6.

[13] La période de prestations est différente de la période de référence. Il ne s’agit pas du même moment. La période de prestations est la période durant laquelle une personne peut recevoir des prestations d’assurance-emploi.

[14] La Commission a décidé que la période de référence de l’appelante ne peut pas être prolongée au-delà de 52 semaines parce qu’elle était en congé payé jugé assurable. La Commission a donc décidé que la période de référence de l’appelante allait du 7 février 2021 au 5 février 2022 et qu’elle ne pouvait pas se prolonger au-delà de ce délai.

Le Tribunal ne voit aucune raison pour laquelle la période de référence ne peut pas être prolongée

[15] Je ne vois aucune raison pour laquelle la période de référence ne peut pas être prolongée jusqu’au maximum de 104 semaines. Toutefois, cela ne permet pas le versement de prestations. Le problème, c’est qu’il n’y a pas d’heures supplémentaires dans cette période de référence prolongée.

[16] Il n’est pas contesté que l’appelante ne pouvait pas travailler à la suite de son accident de la route du 19 octobre 2019. L’appelante a d’abord été payée par l’employeur. L’employeur a ensuite produit un relevé d’emploi indiquant une maladie, le dernier jour payé étant le 4 février 2020. La prestataire a ensuite été payée par la Sunlife et elle a fourni un certificat médical pour appuyer son incapacité à travailler après un accident de la route en 2019Note de bas de page 7.

[17] Selon l’article 8(1) de la Loi sur l’assurance-emploi, la période de référence est la plus courte des périodes suivantes :

  1. a) la période de 52 semaines qui précède le début d’une période de prestations prévue au paragraphe 10(1);
  2. b) la période qui débute en même temps que la période de prestations précédente et se termine à la fin de la semaine précédant le début d’une période de prestations prévue au paragraphe 10(1).

[18] L’article 8(2) de la Loi sur l’assurance-emploi prévoit ce qui suit :

Lorsqu’une personne prouve, de la manière que la Commission peut ordonner, qu’au cours d’une période de référence visée à l’alinéa (1)a) elle n’a pas exercé, pendant une ou plusieurs semaines, un emploi assurable pour l’une ou l’autre des raisons ci-après, cette période de référence est prolongée d’un nombre équivalent de semaines :

  1. a) elle était incapable de travailler par suite d’une maladie, d’une blessure, d’une mise en quarantaine ou d’une grossesse prévue par règlement;
  2. b) elle était détenue dans une prison, un pénitencier ou une autre institution de même nature et n’a pas été déclarée coupable de l’infraction pour laquelle elle était détenue ni de toute autre infraction se rapportant à la même affaire;
  3. c) elle recevait de l’aide dans le cadre d’une mesure de soutien à l’emploi autre que celle prévue aux alinéas 59c) ou d);
  4. d) Elle touchait des indemnités en vertu d’une loi provinciale du fait qu’elle avait cessé de travailler parce que la continuation de son travail la mettait en danger ou mettait en danger son enfant à naître ou l’enfant qu’elle allaitait.

[19] L’appelante n’a pas prouvé qu’elle exerçait un emploi assurable, outre les 376 heures non contestées. L’appelante a démontré qu’elle était incapable de travailler en raison d’une blessure.

[20] L’article 8 ne mentionne pas qu’une période de référence ne peut pas être prolongée s’il n’y a pas d’heures à ajouter.

[21] L’article 8(7) ajoute une limite à la prolongation; il précise que la période de référence ne peut pas dépasser 104 semaines.

[22] Par conséquent, la période de référence prolongée maximale irait du 9 février 2020 au 5 février 2022. C’est ce que dit la loi. Le Tribunal n’a pas le pouvoir de la modifierNote de bas de page 8.

[23] La division d’appel a renvoyé l’affaire à la division générale pour que celle-ci vérifie si l’appelante était en congé payé et, si ce n’était pas le cas, si elle avait accumulé suffisamment d’heures d’emploi assurable au cours d’une période de référence prolongée.

[24] C’est pourquoi, avant la deuxième audience de la division générale, on a demandé à l’appelante de fournir tous les renseignements sur l’emploi assurable au cours de cette période de référence prolongée. On a reçu la réponse de l’appelante le 2 mars 2023Note de bas de page 9. Les renseignements fournis peuvent être résumés ainsi :

  • Elle a accumulé 1800 heures d’emploi assurable jusqu’au 28 juin 2019.
  • Elle a accumulé 1177 heures d’emploi assurable du 29 juin 2019 au 4 février 2020. Ce relevé d’emploi a été produit en raison d’une maladie.
  • Elle a accumulé 376 heures d’emploi assurable entre le 2 août 2021 et le 29 octobre 2021.

[25] L’appelante a accepté les dates au meilleur de ses capacitésNote de bas de page 10. Elle a déclaré qu’elle n’était au courant d’aucun autre emploi assurable. On a interrogé l’appelante concernant l’assurabilité des indemnités versées par la Sunlife du 5 février 2020 jusqu’à son retour progressif au travail le 2 août 2021.

[26] L’appelante a déclaré n’avoir aucune connaissance de l’assurabilité de ces versements. Elle affirme que la Commission et la division générale lui ont dit que les paiements étaient assurables.

[27] L’appelante a déclaré qu’on ne lui a remis aucun relevé d’emploi de la SunlifeNote de bas de page 11.

[28] Je ne peux pas ajouter des heures que la Sunlife a payées dans le cadre de ses prestations d’invalidité de longue durée. Je ne suis pas convaincu que ces heures soient assurables. J’ai la preuve initiale qui porte à croire que la Commission affirme que ces heures étaient assurables, mais elle a convenu depuis qu’il s’agissait d’une erreurNote de bas de page 12.

[29] L’assurabilité est déterminée par l’Agence du revenu du Canada (ARC)Note de bas de page 13. L’ARC rend une décision sur l’assurabilité lorsqu’une personne ou un employeur lui demande de le faire. Ni l’une ni l’autre des parties n’a fourni d’éléments de preuve montrant que les indemnités versées par la Sunlife dans le cadre des prestations d’invalidité de longue durée étaient effectivement assurables.

[30] L’appelante peut obtenir une décision sur l’assurabilité si elle le souhaite. Pour ce faire, je l’encouragerais à lire les renseignements du site Web Canada.ca. L’autre partie à l’appel, la Commission, peut également demander une décision sur l’assurabilité.

Donc, l’appelante a-t-elle travaillé suffisamment d’heures pour être admissible aux prestations?

[31] Je conclus que l’appelante n’a pas prouvé qu’elle a accumulé suffisamment d’heures pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi, car elle a besoin de 420 heures, mais en a travaillé 376.

[32] L’assurance-emploi est un régime d’assurance et, comme pour les autres régimes d’assurance, il faut satisfaire à certaines conditions pour pouvoir recevoir des prestations.

[33] Dans la présente affaire, l’appelante ne satisfait pas aux conditions. Elle n’est donc pas admissible aux prestations. Même si je suis sensible à sa situation, je ne peux pas modifier la loiNote de bas de page 14.

Le Tribunal n’a pas la compétence nécessaire pour instruire la demande d’antidatation de l’appelante

[34] L’appelante a assisté à l’audience en s’attendant à ce que le Tribunal se prononce sur sa demande d’antidatation, qui est une requête visant à examiner une demande comme si elle avait été déposée plus tôt. Une antidatation ferait en sorte que la période de référence prolongée chevaucherait un autre relevé d’emploiNote de bas de page 15.

[35] À l’audience de l’appelante à la division d’appel, il a été question d’une demande d’antidatation. La preuve dont je dispose montre que cette demande d’antidatation a été rejetée depuisNote de bas de page 16. L’appelante a reconnu que la demande avait été rejetée et croyait que la présente audience permettrait d’aborder cette question.

[36] L’appelante a déclaré qu’elle ne savait pas à quelle étape sa demande d’antidatation en était. Elle ignore si sa demande a fait l’objet d’une révision. J’ai consulté la base de données du Tribunal. La présente affaire est le seul appel en cours. Je n’ai vu aucun autre appel de la part de l’appelante concernant une demande d’antidatation ou toute autre question.

[37] Malheureusement, le Tribunal n’a pas la compétence nécessaire pour trancher la question de l’antidatationNote de bas de page 17. Sa compétence se limite à trancher les questions qui ont d’abord été réexaminées par la Commission de l’assurance-emploi du Canada.

[38] L’appelante a été avisée que le Tribunal ne pourrait pas rendre une décision sur la demande d’antidatation. Pour que le Tribunal ait compétence concernant la demande d’antidatation, trois choses doivent se produire.

  1. 1) La demande d’antidatation est présentée et rejetée par la Commission.
  2. 2) Une révision est demandée et la décision est maintenue par la Commission.
  3. 3) Une demande d’appel est présentée au Tribunal. Il faut inclure la lettre de refus de l’étape 2.

[39] L’appelante a déclaré qu’elle était très déçue et qu’elle va maintenant vérifier à quelle étape en est le traitement de la demande d’antidatation par la Commission. Si nécessaire, elle demandera une révision. Le Tribunal aura alors compétence si l’antidatation n’est pas accordée, pourvu qu’un appel soit déposé.

Conclusion

[40] L’appelante n’a pas accumulé suffisamment d’heures pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi.

[41] Le Tribunal ne voit aucune raison pour laquelle l’appelante ne serait pas admissible à la période de référence prolongée maximale de 104 semaines. Le problème, c’est qu’il n’y a pas d’heures assurables supplémentaires à ajouter dans cette période.

[42] L’appelante peut obtenir plus d’heures de deux façons. La première est une antidatation. L’appelante a fait part de son intention de faire un suivi auprès de la Commission au sujet de la demande d’antidatation. Si la demande est approuvée, la période de prestations pourrait commencer à une date antérieure. Cela permettrait peut-être alors l’utilisation de certaines des heures figurant sur le relevé d’emploi émis le 7 avril 2020 pour la détermination de l’admissibilité.Note de bas de page 18 Le relevé d’emploi a été produit à ce moment-là, mais le document indique que le dernier jour travaillé était le 4 février 2020.

[43] La deuxième façon pour l’appelante d’obtenir plus d’heures est de demander une décision sur l’assurabilité, ce qui peut être fait par l’appelante ou par la Commission. Initialement, la Commission a déclaré que les paiements de la Sunlife étaient assurables et maintenant, elle dit qu’ils ne le sont pas.Note de bas de page 19 La décision est rendue par l’ARC et le Tribunal ne peut pas en faire la demande. Cela ne relève pas de sa compétence.

[44] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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