Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : CC c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1676

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Appelant : C. C.
Représentant : R. M., député
Intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance emploi du Canada (442714) datée du 17 décembre 2021 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Angela Ryan Bourgeois
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 29 mars 2022
Personnes présentes à l’audience : Appelant
Représentant de l’appelant
Date de la décision : Le 9 mai 2022
Numéro de dossier : GE-22-206

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal est en désaccord avec le prestataire.

[2] Le prestataire n’a pas démontré qu’il était disponible pour travailler pendant qu’il était aux études. Par conséquent, il ne peut pas recevoir de prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[3] Pour recevoir des prestations régulières d’assurance‑emploi, le prestataire doit être disponible pour travailler. Il s’agit d’une exigence continue. Cela signifie que le prestataire doit chercher un emploi.

[4] Le prestataire est originaire de l’Île-du-Prince-Édouard. Il a entamé sa première année de baccalauréat ès sciences à X en septembre 2021. Comme de nombreux étudiants, il avait des cours synchrones et asynchrones.

[5] La Commission de l’assurance-emploi du Canada (Commission) a décidé qu’elle ne pouvait pas verser de prestations d’assurance-emploi au prestataire parce qu’il ne répondait pas à l’exigence relative à la disponibilité. Elle a déclaré le prestataire inadmissible parce qu’il n’était pas disponible pour travailler à compter du 30 août 2021.

[6] Je dois décider si le prestataire a prouvé qu’il était disponible pour travailler. Le prestataire doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’il était disponible pour travailler.

[7] La Commission affirme que le prestataire n’était pas disponible parce qu’il était aux études à temps plein.

[8] Le prestataire n’est pas d’accord. Le prestataire affirme que ses cours universitaires n’ont pas indûment limité ses chances de retourner au travail. Il aurait pu facilement travailler à temps plein en dehors des quelques heures où il devait être en classe.

Question en litige

[9] Le prestataire était-il disponible pour travailler pendant ses études?

Analyse

[10] Selon la Loi sur l’assurance-emploi (Loi), le prestataire doit prouver qu’il est « capable de travailler et disponible à cette fin », mais qu’il est incapable d’obtenir un emploi convenableNote de bas de page 1. La jurisprudence énumère trois éléments que le prestataire doit prouver pour démontrer qu’il est « disponible » en ce sensNote de bas de page 2. Je vais examiner ces éléments plus loin.

[11] De plus, la Cour d’appel fédérale a affirmé que les prestataires qui suivent une formation à temps plein sont présumés ne pas être disponibles pour travaillerNote de bas de page 3. C’est ce qu’on appelle la « présomption de non‑disponibilité ». Autrement dit, nous pouvons supposer que les étudiants ne sont pas disponibles pour travailler lorsque la preuve démontre qu’ils sont aux études à temps plein.

[12] Je vais d’abord voir si je peux présumer que le prestataire n’était pas disponible pour travailler.

Présomption de non-disponibilité des étudiants à temps plein

[13] Le prestataire est étudiant à temps plein. Il l’a indiqué dans sa demande de prestations et, à l’audience, le prestataire a confirmé qu’il avait suivi au moins quatre cours par trimestre. Je conclus que cela correspond à des études à temps pleinNote de bas de page 4.

[14] Cependant, il est possible de réfuter la présomption selon laquelle les étudiants à temps plein ne sont pas disponibles pour travailler (c’est-à-dire de démontrer qu’elle ne s’applique pas). La présomption peut être réfutée en démontrant des circonstances exceptionnelles ou des antécédents de travail à temps plein pendant la poursuite des étudesNote de bas de page 5.

[15] Le prestataire n’a pas prouvé qu’il a déjà travaillé à temps plein pendant ses études. Il a fourni des éléments de preuve contradictoires concernant le nombre d’heures qu’il travaillait par semaine pendant ses études. Je préfère le témoignage qu’il a livré avant que je lui dise que celui-ci ne concordait pas avec ce qu’il avait indiqué dans sa demande de révision. Il a d’abord affirmé qu’il travaillait de 12 à 16 heures par semaine environ. Dans son formulaire de demande de révision, il a indiqué qu’il travaillait tous les jours et toutes les fins de semaine, jusqu’à 25 heures par semaine ou plus encore. Je préfère le témoignage original pour les raisons suivantes :

  • Il correspond à ce qu’il a déclaré dans son formulaire de demande.
  • Il a rempli le formulaire de demande à une date plus proche de la période où il travaillait. Par conséquent, son souvenir était probablement meilleur lorsqu’il a rempli le formulaire de demande qu’il ne l’était des mois plus tard lorsqu’il a fait la demande de révision.
  • Je n’ai pas trouvé convaincante son explication de la contradiction, soit qu’il avait mieux réfléchi aux heures pendant lesquelles il travaillait lorsqu’il a rempli la demande de révision.

[16] Mais le prestataire a réfuté la présomption parce qu’il existe des circonstances exceptionnelles. Ses cours asynchrones constituent une circonstance exceptionnelle. La présomption a commencé avant que les cours asynchrones soient aussi facilement accessibles qu’ils le sont aujourd’hui. Bien que le prestataire fréquente l’université à temps plein, la combinaison de cours synchrones et asynchrones ne correspond pas à un programme à temps plein typique. Il s’agit d’une circonstance exceptionnelle.

[17] La réfutation de la présomption signifie seulement qu’il n’est pas présumé que le prestataire n’est pas disponible. Je dois quand même déterminer si le prestataire a prouvé qu’il était capable de travailler et disponible à cette fin, et était incapable d’obtenir un emploi convenable.

Disponibilité à travailler

[18] Je dois décider si le prestataire était capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable d’obtenir un emploi convenableNote de bas de page 6. La jurisprudence énonce trois éléments dont je dois tenir compte pour trancher cette question. Le prestataire doit prouver les trois éléments suivantsNote de bas de page 7 :

  1. a)  Il désire retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui sera offert.
  2. b)  Il a fait des démarches pour trouver un emploi convenable.
  3. c)  Il n’a pas établi de conditions personnelles qui limiteraient indûment (c’est-à-dire trop) ses chances de retourner sur le marché du travail.

[19] Lorsque j’examine chacun de ces éléments, je dois tenir compte de l’attitude et de la conduite du prestataireNote de bas de page 8.

Désir de retourner sur le marché du travail

[20] Le prestataire n’a pas démontré qu’il désire retourner travailler dès qu’un emploi convenable lui serait offert.

[21] Le prestataire a déclaré qu’il cherchait n’importe quel emploi et qu’il travaillerait à n’importe quelle heure.

[22] Il cherchait du travail autour de X, où il va à l’université, et chez lui, à l’Île-du-Prince-Édouard. Il a fourni un historique de sa recherche d’emploi.

[23] Lors de l’examen de son historique de recherche d’emploi à l’audience, le prestataire a témoigné qu’il ne pouvait pas occuper un certain poste coopératif près de chez lui, à l’Île-du-Prince-Édouard en décembre 2021, parce que l’employeur cherchait une personne qui pourrait travailler tout l’hiver et qu’il n’y serait que pendant trois semaines pendant son congé de NoëlNote de bas de page 9. Il retournait à l’université à X pour le deuxième trimestre.

[24] Le fait qu’il n’a pas cherché d’emploi à l’Île-du-Prince-Édouard en décembre 2021 démontre qu’il ne voulait pas retourner au travail dès qu’un emploi convenable lui serait offert.

Efforts pour se trouver un emploi convenable

[25] Le prestataire a prouvé qu’il tentait de trouver un emploi convenable.

[26] Le prestataire a témoigné qu’il cherchait n’importe quel type de travail, y compris comme serveur et vendeur dans un magasin. Ses démarches de recherche d’emploi ont été les suivantes :

  • il a demandé à des entreprises si elles cherchaient des employés;
  • il a déposé son CV chez X, Joey’s (un restaurant local), au restaurant Big Stop, chez Dollarama et chez Foodland;
  • il a appelé environ 35 autres entreprises entre le 3 septembre 2021 et le 6 janvier 2022;
  • il a consulté des banques d’emplois en ligne quelques fois par semaine;
  • il a obtenu des courriels d’une banque d’emplois;
  • il a passé une entrevue chez Foodland.

[27] Ces démarches ne suffisent pas à satisfaire aux exigences de ce deuxième élément. Je suis convaincue que le prestataire a fait suffisamment de démarches pour trouver un emploi convenable. Sa recherche d’emploi démontre qu’il y avait peu d’emplois disponibles dans la région.

Conditions pouvant limiter indûment les chances de retourner au travail

[28] Le prestataire affirme que son horaire de cours ne limite pas sa disponibilité à travaillerNote de bas de page 10. Il affirme qu’au secondaire il a travaillé en fonction de son horaire de cours et qu’il pouvait faire de même pendant ses études universitaires. En fait, ses cours universitaires limitent moins sa disponibilité que le faisaient ses cours au secondaire.

[29] Au premier trimestre, le prestataire avait un cours en personne de 12 h 30 à 13 h 20, du lundi au vendredi, et les mardis, il avait un laboratoire en personne de 14 h 30 à 15 h 50. Il avait en plus cinq heures de cours qu’il suivait selon son propre horaire.

[30] Au deuxième trimestre, le prestataire a suivi quatre cours. Ses cours étaient enregistrés, mais il devait assister à trois laboratoires en personne les mardis et jeudis après-midi.

[31] Le prestataire a témoigné qu’il avait eu une entrevue chez Foodland. Lorsqu’ils lui ont demandé s’il pouvait travailler 36 heures par semaine, il a répondu oui – le vendredi, le samedi, le dimanche et le lundi. À l’audience, il a dit qu’il aurait pu travailler n’importe quand, sauf le mardi et le jeudi après-midi (lorsqu’il devait se présenter à ses laboratoires en personne).

[32] La Cour d’appel fédérale a statué que le fait de limiter la disponibilité à certaines heures de certains jours créait des conditions personnelles pouvant limiter indûment les chances de retourner sur le marché du travailNote de bas de page 11.

[33] Je conclus que le prestataire a limité sa disponibilité à certaines heures de certains jours. Le témoignage du prestataire au sujet de ce qu’il a dit lors de son entrevue chez Foodland est la preuve qu’il limitait sa disponibilité à certaines heures de certains jours. Si le prestataire avait été disponible tous les jours, il est plus probable qu’improbable qu’il l’aurait dit pendant l’entrevue.

[34] Le prestataire a dit qu’il quitterait son cours pour travailler à temps plein. Je trouve que cela est peu probable parce que l’université coûte cher. Il a investi près de 20 000 $ dans son cours cette année, en plus de ses dépenses pour vivre loin de chez lui. De plus, s’il avait l’intention de travailler à temps plein, il est probable qu’il aurait tenté d’obtenir un stage coopératif à l’Île-du-Prince-Édouard en décembre 2021, plutôt que de retourner à l’université à X.

[35] Pour ces motifs, je conclus que le prestataire a établi des conditions personnelles qui limitaient indûment ses chances de retourner sur le marché du travail. Bien qu’il ait été disponible le matin et certains après-midi, soirs et fins de semaine, aux fins de la Loi, il n’était pas disponible.

Ainsi, le prestataire est-il capable de travailler et disponible à cette fin?

[36] À la lumière de mes conclusions sur les trois éléments, je conclus que le prestataire n’a pas démontré qu’il est capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable de trouver un emploi convenable.

Conclusion

[37] Le prestataire n’a pas démontré qu’il était disponible pour travailler au sens de la loi. Il n’est donc pas admissible au bénéfice des prestations d’assurance‑emploi.

[38] L’appel est rejeté.

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