Assurance-emploi (AE)

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Citation : SP c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 344

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : S. P.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (428040) datée du 22 juillet 2021 rendue par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Manon Sauvé
Mode d’audience : En personne
Date de l’audience : Le 16 novembre 2022
Personne présente à l’audience : L’appelant
Date de la décision : Le 18 janvier 2023
Numéro de dossier : GE-21-1416

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Décision

[1] L’appel est accueilli. La Commission n’a pas démontré qu’elle pouvait se prévaloir du délai de réexamen dans un délai de plus de 36 mois et moins de 72 mois.

Aperçu

[2] Le prestataire travaille à titre de vendeur pour une entreprise de fabrication de fenêtres.

[3] Le 9 décembre 2016, il cesse de travailler en raison d’un manque de travail. Il présente une demande pour recevoir des prestations d’assurance-emploi à la Commission.

[4] Une période de prestation est établie à partir du 11 décembre 2016. Il reçoit des prestations pendant sa période d’admissibilité.

[5] Au mois de septembre 2019, la Commission procède à une enquête pour déterminer si le prestataire a déclaré correctement ses gains pendant sa période de prestations.  

[6] Le 8 juin 2021, la Commission transmet au prestataire une décision concernant sa demande du 11 décembre 2016. Elle en vient à la conclusion qu’il n’y a pas eu d’arrêt de rémunération, parce que le prestataire avait un contrat de travail valide jusqu’en 2019 et qu’il était un vendeur à commission.

[7] De plus, elle a informé le prestataire qu’elle pouvait réexaminer sa demande, puisqu’elle avait reçu de nouveaux renseignements.

[8] Le prestataire n’est pas d’accord avec la Commission. Elle ne pouvait pas réexaminer son dossier comme elle l’a fait. Également, il y a eu rupture du lien d’emploi dans les faits.

Question en litige

  1. Est-ce que la Commission pouvait se prévaloir du délai de réexamen de 72 mois prévu à la Loi ?
  2. Est-ce qu’il y a eu arrêt de rémunération pendant 7 jours consécutifs pour la période débutant le 11 décembre 2016 ?

Analyse

  1. 1.  Est-ce que la Commission pouvait se prévaloir du délai de réexamen de 72 mois prévu à la Loi ?

[9] La Loi permet à la Commission de réexaminer des décisionsNote de bas de page 1 dans un délai de 36 mois. Il s’agit d’un pouvoir discrétionnaire dont dispose la Commission.

[10] La Loi lui permet également de réexaminer des décisions dans un délai de 36 mois à 72 mois. Lorsqu’elle exerce son pouvoir, elle doit le faire de façon judiciaireNote de bas de page 2. C’est-à-dire qu’elle ne doit pas agir de façon abusive, arbitraire, et elle doit tenir compte des éléments au dossier.

[11] C’est la Commission qui doit démontrer qu’elle a exercé judiciairement son pouvoir discrétionnaire.

[12] Lorsque la Commission se prévaut du pouvoir discrétionnaire distinct que lui confère l’article 52 (5) de la Loi, elle a l’obligation de dire au prestataire pourquoi, précisément, pour les fins particulières de l’exercice auquel elle se livre en vertu de cet article, la déclaration lui paraît fausseNote de bas de page 3.

[13] Je retiens que le prestataire a présenté une demande pour recevoir des prestations d’assurance-emploi pour une période commençant le 11 décembre 2016. Le prestataire a reçu des prestations du 11 décembre 2016 au 8 avril 2017.

[14] La Commission recueille des informations auprès de l’employeur et des déclarations de la part du prestataire sur une période de près de 2 ans. Elle voulait vérifier les revenus de commissions du prestataire.

[15] Ce n’est que le 8 juin 2021 que la Commission rend une décision. La Commission ne rend pas une décision sur les commissions reçues par le prestataire. Elle conclut que le prestataire n’a pas le droit de recevoir des prestations d’assurance-emploi pendant toute la période, parce qu’il n’y a pas eu arrêt de rémunération.

[16] C’est lors de la prise de décision du 8 juin 2021 que le prestataire n’avait pas eu un arrêt de rémunération étant donné qu’il est un vendeur à commission.

[17] De plus, la Commission a établi que bien que le prestataire n’a pas fait de fausses déclarations de manière trompeuse ou sciemment, les déclarations étaient fausses : elle pouvait donc prolonger la période de révision à plus de 36 mois.

[18] Je suis d’avis que la Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire. En fait, la Commission devait aviser le prestataire avant de conclure qu’il n’était pas admissible à recevoir des prestations au motif qu’il n’y a pas eu d’arrêt de rémunération.

[19] Dans les faits, le 8 juin 2021, la Commission réexamine un réexamen amorcé en 2019. La Commission a effectué une enquête, en 2019, concernant les sommes reçues par le prestataire à titre de commission qui n’ont pas été déclarées correctement. Elle est d’avis que le prestataire n’a pas déclaré correctement ses revenus.

[20] D’ailleurs, la dernière communication du prestataire avec la Commission porte sur sa disponibilité et sa rémunération. À ce moment, la Commission explique au prestataire qu’elle va réajuster les prestations selon les commissions gagnées. Ainsi, certaines semaines seront à l’avantage du prestataire, alors que pour les autres il devra rembourser un trop payé. Il n’est pas question d’un arrêt de rémunération. Elle ne lui a pas transmis d’avis à ce sujet.

[21] Or, le 8 juin 2021, la Commission informe le prestataire qu’il n’a pas le droit de recevoir des prestations, parce qu’il n’y a pas eu arrêt de rémunération. Il n’a pas été discuté de cette question avant que le Commission décide que le prestataire aurait fait de fausses déclarations concernant son statut. Elle ne lui a pas donné d’avis à ce sujet. Elle rend une décision et conclut que le prestataire n’est pas admissible à recevoir des prestations pour la période du 11 décembre 2016 au 8 avril 2017.

[22] Dans ce contexte, j’estime que la Commission n’a pas respecté les règles prévues au paragraphe 52 (5) de la Loi pour la période de prestations commençant le 11 décembre 2016 au 8 avril 2017. En effet, je constate que la Commission n’a pas soumis de preuve indiquant qu’elle estimait que le prestataire avait fait une fausse déclaration.

[23] De plus, la Commission n’a pas informé le prestataire qu’elle estimait qu’il avait fait une fausse déclaration. En fait, elle rend sa décision à la fin du processus, alors que le prestataire n’a pas été informé que la Commission considérait qu’elle pouvait raisonnablement croire qu’il avait fait une fausse déclaration.

[24] Par conséquent, je n’ai pas à décider s’il y a eu un arrêt de rémunération pour déterminer que le prestataire est admissible à recevoir des prestations pour la période du 11 décembre 2016 au 8 avril 2017. En effet, la Commission n’a pas agi correctement, lorsqu’elle a procédé au réexamen.

Conclusion

[25] Je conclus que la Commission n’a pas démontré qu’elle pouvait réexaminer la période de prestations du 11 décembre 2016 au 8 avril 2017 en vertu du paragraphe 52 (5) de la Loi.

[26] L’appel est accueilli.

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