Assurance-emploi (AE)

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Citation : AD c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1745

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : A. D.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (479390) datée du 31 mai 2022 rendue par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Normand Morin
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 15 novembre 2022
Personne présente à l’audience : L’appelante
Date de la décision : Le 30 décembre 2022
Numéro de dossier : GE-22-2459

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Décision

[1] L’appel est accueilli.

[2] Je conclus que la Commission de l’assurance-emploi du Canada (la Commission) n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire, en décidant de vérifier et de réexaminer la demande de prestations de l’appelanteNote de bas de page 1. La Commission ne pouvait donc pas déterminer, rétroactivement, que l’appelante n’était pas admissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[3] Je conclus que l’appelante ne démontre pas sa disponibilité à travailler au cours de la période du 14 décembre 2020 au 31 mai 2021 inclusivement, durant laquelle elle a suivi une formationNote de bas de page 2.

[4] Puisque la Commission ne pouvait déterminer, de façon rétroactive, que l’appelante n’était pas admissible au bénéfice des prestations, il n’y a donc pas lieu de déterminer si cette dernière doit rembourser celles qui lui ont été versées en trop (trop-payé)Note de bas de page 3.

Aperçu

[5] En octobre 2020, l’appelante entreprend une formation à temps plein au X, menant à l’obtention d’un diplôme d’études professionnelles (DEP) en aménagement paysager. Il s’agit d’une formation offerte dans le cadre du programme de formations de courte durée (COUD) du gouvernement du Québec et payée par l’employeur pour lequel elle a travaillé du 27 avril 2020 au 13 novembre 2020. L’appelante précise avoir suivi sa formation du 5 octobre 2020 au 31 mai 2021Note de bas de page 4, en incluant une période de congé de deux semaines, du 21 décembre 2020 au 3 janvier 2021.

[6] Le 20 novembre 2020, après avoir effectué une période d’emploi pour l’employeur X, du 27 avril 2020 au 13 novembre 2020 inclusivementNote de bas de page 5, l’appelante présente une demande initiale de prestations d’assurance-emploi (prestations régulières)Note de bas de page 6. Une période de prestations a été établie à compter du 13 décembre 2020Note de bas de page 7.

[7] Le 6 avril 2022, la Commission l’informe qu’elle ne peut pas lui verser de prestations d’assurance-emploi du 14 décembre 2020 au 31 mai 2021, car elle suivait un cours de formation de sa propre initiative et qu’elle n’a pas démontré qu’elle était disponible à travailler. La Commission lui indique que si elle doit de l’argent, elle recevra un avis de detteNote de bas de page 8.

[8] Le 31 mai 2022, à la suite d’une demande de révision, la Commission l’informe qu’elle maintient la décision rendue à son endroit en date du 6 avril 2022Note de bas de page 9.

[9] L’appelante explique qu’à l’été 2020, l’employeur pour lequel elle travaillait lui a proposé de suivre une formation en lien avec l’emploi qu’elle occupait. Elle déclare s’être renseignée auprès de la Commission pour savoir si elle pouvait recevoir des prestations en suivant la formation proposée. L’appelante précise avoir fourni tous les renseignements et documents requis à la Commission et que sa demande de prestations a été acceptée. Elle explique que durant sa formation elle était disponible à travailler les soirs et les fins de semaine. L’appelante indique avoir effectué des recherches d’emploi en fonction de ses disponibilités durant sa formation. Elle explique avoir communiqué à plusieurs reprises avec la Commission, durant sa période de prestations, pour savoir comment remplir ses déclarations et voir si tout était en ordre dans son dossier d’assurance-emploi. L’appelante fait valoir que ce n’est qu’un an et demi après avoir présenté sa demande de prestations, que la Commission a communiqué avec elle pour l’informer qu’elle n’était pas admissible au bénéfice des prestations, étant donné la formation qu’elle avait entreprise. Elle trouve injuste que la Commission revienne ainsi sur sa décision de lui accorder des prestations alors qu’elle était en possession des tous les renseignements nécessaires lorsqu’elle a accepté sa demande de prestations. Le 20 juillet 2022, l’appelante conteste la décision en révision de la Commission. Cette décision fait l’objet de son recours devant le Tribunal.

Questions préliminaires

[10] Dans le présent dossier, l’appelante conteste avant tout le fait qu’elle doive rembourser les prestations qui lui ont été versées en trop, alors qu’elle a déclaré qu’elle était aux études, qu’elle a fourni à la Commission tous les renseignements et documents à ce sujet et que sa demande de prestations a été acceptéeNote de bas de page 10. Elle souligne que personne ne l’a informée qu’elle ne pouvait pas recevoir de prestations durant sa formation. L’appelante précise que la Commission lui a communiqué cette information environ un an et demi après la présentation de sa demande de prestations et lui a demandé de rembourser les prestations qui lui ont été versées en tropNote de bas de page 11. L’appelante dit être confuse face à ce revirement de situation et demande que l’on comprenne sa détresse face à la décision rendue par la CommissionNote de bas de page 12.

[11] De son côté, la Commission explique avoir déterminé que l’appelante n’a pas démontré qu’elle était disponible à travailler au cours de la période du 14 décembre 2020 au 31 mai 2021 en vertu des articles 18 et 153.161 de la LoiNote de bas de page 13. Elle fait valoir que l’article 153.161(2) de la LoiNote de bas de page 14 lui permet de vérifier, à tout moment après le versement des prestations, qu’un prestataire est admissible aux prestations en exigeant la preuve qu’il était capable de travailler et disponible pour tout jour ouvrable de sa période de prestationsNote de bas de page 15.

[12] Je vais donc effectuer mon analyse et rendre ma décision en tenant compte de cette situation, tout en analysant la disponibilité de l’appelante à travailler durant sa formation.

Questions en litige

[13] Je dois déterminer si la Commission avait le pouvoir de décider, de façon rétroactive, si l’appelante était admissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi et le cas échéant, déterminer si elle a utilisé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire, en décidant de vérifier et de réexaminer la demande de prestations de ce dernierNote de bas de page 16.

[14] Je dois également déterminer si au cours de la période du 14 décembre 2020 au 31 mai 2021, pendant sa formation, l’appelante démontre qu’elle était disponible à travaillerNote de bas de page 17.

[15] Je dois aussi déterminer si les prestations versées à l’appelante, et qui lui sont réclamées par la Commission, doivent être rembourséesNote de bas de page 18.

Analyse

Exercice du pouvoir discrétionnaire de la Commission dans sa décision de vérifier et de réexaminer une demande de prestations

Question no 1 : La Commission avait-elle le pouvoir de vérifier et d’examiner rétroactivement la demande de prestations de l’appelante?

[16] Je considère que les dispositions prévues aux articles 52 et 153.161 de la Loi donnent à la Commission le pouvoir de vérifier et d’examiner rétroactivement la demande de prestations de l’appelante.

[17] Concernant le « nouvel examen » d’une demande de prestations, la Loi prévoit que la Commission dispose d’un délai de 36 mois pour réexaminer toute demande au sujet de prestations payées ou payables à un prestataire, et que ce délai est de 72 mois si elle estime qu’une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse a été faite relativement à une demande de prestationsNote de bas de page 19.

[18] Si la Commission décide qu’une personne a reçu une somme d’argent en prestations pour lesquelles elle ne remplissait pas les conditions requises ou au bénéfice desquelles elle n’était pas admissible, elle calcule la somme payée et notifie sa décision au prestataireNote de bas de page 20.

[19] En raison de la pandémie de COVID-19Note de bas de page 21, des modifications ont été apportées à la Loi afin d’atténuer les répercussions économiques découlant de cette situation et de faciliter l’accès aux prestations avec la mise en œuvre de « mesures temporaires ».

[20] L’article 153.161 de la partie VIII.5 de la Loi représente une de ces modifications. Cet article a été en vigueur du 27 septembre 2020 au 25 septembre 2021.

[21] Cet article permet à la Commission de vérifier, à tout moment, après le versement des prestations, que le prestataire y est admissible en exigeant la preuve qu’il était capable de travailler et disponible à cette fin pour tout jour ouvrable de sa période de prestationsNote de bas de page 22.

[22] Plusieurs décisions rendues par la Division d’appel du Tribunal (la Division d’appel) démontrent l’importance d’aborder la question de l’exercice du pouvoir discrétionnaire de la Commission relativement à l’application de l’article 153.161 de la LoiNote de bas de page 23.

[23] Dans l’une d’elles, la Division d’appel a déterminé que la Division générale du Tribunal (la Division générale) ne pouvait refuser d’exercer sa compétence afin de déterminer si la Commission avait le pouvoir de juger le prestataire inadmissible aux prestations de façon rétroactiveNote de bas de page 24.

[24] Dans une autre de ses décisions, la Division d’appel a conclu qu’il y avait lieu de retourner un dossier à la Division générale afin que celle-ci tranche la question visant à déterminer si la Commission avait le pouvoir de déclarer qu’une prestataire était inadmissible au bénéfice des prestations, de façon rétroactiveNote de bas de page 25. Dans cette décision, la Division d’appel a précisé que si la Division générale conclut que la Commission avait ce pouvoir, elle doit aussi déterminer si celle-ci l’a exercé de façon judiciaire lorsqu’elle a décidé de réexaminer la demande de prestations de la prestataireNote de bas de page 26.

[25] Dans un autre cas, la Division d’appel a conclu qu’il y avait lieu de rendre la décision que la Division générale aurait dû rendre, étant donné que celle-ci ne s’était pas prononcée sur l’exercice du pouvoir discrétionnaire de la CommissionNote de bas de page 27.

[26] Dans une autre de ses décisions, la Division d’appel indique également que la Commission a reconnu que la Division générale devait se prononcer sur la question relative à l’exercice de son pouvoir discrétionnaire après que l’appelant eut allégué, dans ce cas, qu’elle ne pouvait pas revenir sur sa décision de lui accorder des prestations, étant donné qu’il lui avait donné tous les renseignements sur sa formationNote de bas de page 28.

[27] J’estime que dans le présent dossier, l’avis d’appel présenté par l’appelante réfère à la question de l’exercice du pouvoir discrétionnaire de la Commission lorsque celle-ci a décidé de vérifier et d’examiner rétroactivement la demande de prestations de cette dernière, même si cette question n’est pas abordée en utilisant des termes juridiques s’y rapportant.

[28] Dans le cas présent, l’appelante a présenté une demande de prestations le 20 novembre 2020 et une période de prestations a été établie à compter du 13 décembre 2020Note de bas de page 29.

[29] La preuve au dossier indique que durant sa formation, l’appelante a reçu des prestations au cours de la semaine ayant commencé le 20 décembre 2020 jusqu’à celle ayant commencé le 5 décembre 2021Note de bas de page 30.

[30] Le 6 avril 2022, la Commission l’a informée de la décision rendue à son endroit sur la question de la disponibilité à travaillerNote de bas de page 31.

[31] Les éléments de preuve au dossier indiquent aussi que la Commission a communiqué avec l’appelante dans les semaines suivant l’établissement de sa période à compter du 13 décembre 2020, soit le 23 décembre 2020 et 13 janvier 2021, pour avoir des renseignements relativement à la formation qu’elle avait entrepriseNote de bas de page 32.

[32] Le 30 décembre 2020, la Commission a également communiqué avec l’employeur pour lequel l’appelante a travaillé du 27 avril 2020 au 13 novembre 2020 pour avoir des renseignements sur le type de formation suivie par l’appelanteNote de bas de page 33.

[33] La Commission fait valoir les éléments suivants :

  1. a) La Loi sur l’assurance-emploi a été modifiée avec l’ajout de l’article 153.161Note de bas de page 34 au moyen d’un arrêté provisoire (arrêté provisoire no 10). Cet article est entré en vigueur le 27 septembre 2020Note de bas de page 35 ;
  2. b) L’article 153.161(2) de la Loi permet à la Commission de vérifier, à tout moment après le versement des prestations, que le prestataire est admissible aux prestations en exigeant la preuve qu’il était capable de travailler et disponible à cette fin pour tout jour ouvrable de sa période de prestationsNote de bas de page 36 ;
  3. c) Une note explicative, jointe à l’arrêté provisoire no 10, prévoit que la nouvelle disposition de la Loi « permet une approche opérationnelle modifiée pour déterminer la disponibilité à travailler des prestataires qui sont en formation ». La modification fait en sorte que la disponibilité peut être vérifiée après le versement des prestations, alors qu’habituellement, la Commission effectuait cette vérification avant le versementNote de bas de page 37 ;
  4. d) Une inadmissibilité au bénéfice des prestations doit être imposée de façon rétroactive à un prestataire n’ayant pas démontré sa disponibilité à travailler pour tout jour ouvrable de sa période de prestationsNote de bas de page 38 ;
  5. e) La formation à temps plein de l’appelante a été signalée et « autorisée par le système » lors de sa demande initiale de prestations, et déclarée dans chacune de ses déclarationsNote de bas de page 39 ;
  6. f) Les mesures de transition temporaires en vigueur et les dispositions prévues à l’article 153.161 de la Loi ont permis de faciliter l’accès aux prestations pendant la pandémie de COVID-19. Toutefois, la Commission se réservait le droit de faire des vérifications antérieuresNote de bas de page 40 ;
  7. g) Les pouvoirs discrétionnaires doivent être exercés de façon judiciaire. Lorsque la Commission décide de réexaminer ou de vérifier une demande, elle doit éviter d’agir de mauvaise foi, ou dans un but ou pour un motif irrégulier, de tenir compte d’un facteur non pertinent ou d’ignorer un facteur pertinent, ou d’agir de façon discriminatoireNote de bas de page 41.

[34] Pour sa part, l’appelante explique qu’avant de présenter sa demande de prestations le 20 novembre 2020, elle s’est renseignée auprès de la Commission pour savoir si elle pouvait en recevoir, étant donné sa formation entreprise en octobre 2020Note de bas de page 42.

[35] Dans sa demande de prestations, elle déclare suivre une formation parrainée par son employeur en y consacrant 25 heures ou plus par semaineNote de bas de page 43.

[36] L’appelante affirme avoir fait d’autres appels à la Commission dans les semaines ayant suivi la présentation de sa demande de prestations, étant donné qu’elle n’avait pas eu de réponse de sa part. Elle précise qu’après plusieurs semaines d’attente, la Commission a accepté de lui verser des prestations après lui avoir confirmé qu’elle avait le droit d’en recevoirNote de bas de page 44. Elle mentionne avoir commencé à recevoir des prestations en janvier 2021.

[37] Dans sa déclaration du 23 décembre 2020 à la Commission, l’appelante explique suivre une formation dans le cadre d’un programme de formation du gouvernement du Québec (programme de formation de courte durée – COUD)Note de bas de page 45.

[38] Le 13 janvier 2021, dans une autre déclaration à la Commission, l’appelante indique qu’elle suit une formation du lundi au vendredi, de jour, en y consacrant environ 30 heures par semaineNote de bas de page 46. Elle précise alors qu’elle n’abandonnerait pas cette formation si celle-ci entrait en conflit avec un emploi à temps pleinNote de bas de page 47.

[39] L’appelante explique avoir fourni à la Commission tous les renseignements et les documents nécessaires concernant sa formation entreprise en octobre 2020Note de bas de page 48. Elle souligne que la Commission avait tous les renseignements nécessaires lorsque celle-ci a accepté sa demande de prestationsNote de bas de page 49.

[40] L’appelante affirme que lorsqu’elle a rempli ses déclarations du prestataire, elle a toujours déclaré qu’elle était aux études, de même que les sommes d’argent qu’elle avait reçues durant sa formation.

[41] Elle indique avoir aussi communiqué avec la Commission, durant sa période de prestations, pour savoir si ses déclarations étaient remplies correctement et si tout était en ordre dans son dossier d’assurance-emploi.

[42] Dans le cas présent, pour sa demande de prestations présentée le 20 novembre 2020, l’appelante était assujettie à la fois aux dispositions prévues à l’article 153.161(2) de la partie VIII.5 de la Loi, malgré la nature temporaire de cet article, de même qu’à celles de l’article 52 de la Loi.

[43] Je considère que la décision rendue par la Commission s’appuie sur les articles 52 et 153.161(2) de la Loi.

[44] Je considère que même si la Commission indique s’être appuyée sur l’article 153.161(2) de la Loi pour rendre sa décisionNote de bas de page 50, les dispositions prévues à l’article 52 de la Loi continuent tout de même de s’appliquer malgré celles prévues à l’article 153.161(2) de la Loi.

[45] J’estime que la Commission reconnaît devoir exercer son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire, qu’il s’agisse de l’application de l’article 52 ou de l’article 153.161 de la Loi.

[46] Sur ce point, je souligne que dans son argumentation, la Commission indique que les pouvoirs discrétionnaires doivent être exercés de façon judiciaire et qu’en conséquence, lorsqu’elle décide de réexaminer ou de vérifier une demande de prestations, elle doit éviter d’agir de mauvaise foi, ou dans un but ou pour un motif irrégulier, de tenir compte d’un facteur non pertinent ou d’ignorer un facteur pertinent, ou encore, d’agir de façon discriminatoireNote de bas de page 51.

[47] L’article 52 de la Loi démontre le pouvoir discrétionnaire que détient la Commission pour procéder au nouvel examen d’une demande de prestations.

[48] L’article 153.161(2) de la Loi donne à la Commission un pouvoir analogue à celui qu’elle détient en vertu de l’article 52(1) de la Loi. La seule différence entre ces deux articles est que selon les dispositions prévues à l’article 153.161(2) de la Loi, le pouvoir de la Commission n’est pas limité dans le temps, alors qu’il l’est dans le cas d’un réexamen en vertu de l’article 52(1) de la Loi.

[49] En effet, pour l’application de l’article 153.161(2) de la Loi, la Commission peut vérifier, à tout moment après le versement des prestations, que le prestataire y est admissibleNote de bas de page 52. Cet article démontre également le pouvoir discrétionnaire de la Commission de décider de vérifier une demande de prestations.

[50] Pour ce qui est de l’application de l’article 52 de la Loi, la Commission dispose dans ce cas d’un délai de 36 mois suivant le moment où des prestations ont été payées ou sont devenues payables, pour examiner de nouveau toute demande au sujet de ces prestations ou de 72 mois si elle estime qu’une affirmation fausse ou trompeuse a été faiteNote de bas de page 53.

[51] Même si l’article 153.161(2) a une portée plus étendue dans le temps que l’article 52 de la Loi, il faut quand même se demander si la Commission a utilisé son pouvoir discrétionnaire de réexamen de façon conforme à la norme judiciaire.

[52] Pour rendre sa décision, la Commission a utilisé les pouvoirs qui lui sont conférés en vertu de l’article 153.161(2) de la Loi. À la suite de sa vérification, la Commission a changé sa décision en déterminant que l’appelante n’était pas admissible au bénéfice des prestations. Elle a rendu une nouvelle décision conformément à la procédure prévue à l’article 52(2) de la Loi.

[53] Je souligne également que même si l’article 153.161(2) de la Loi prévoit que la Commission peut « vérifier à tout moment » après le versement des prestations, si un prestataire y est admissible, cet article précise qu’elle peut le faire, mais « en exigeant la preuve » que celui-ci était capable de travailler et disponible à cette fin pour tout jour ouvrable de sa période de prestationsNote de bas de page 54.

[54] J’estime que dans le cas de l’appelante, la Commission n’a pas vérifié l’admissibilité de cette dernière au bénéfice des prestations en fonction de l’article 153.161(2) de la Loi. La Commission n’a pas appliqué les dispositions de cet article à cet égard. La Commission n’a pas demandé à l’appelante de prouver son admissibilité à recevoir des prestations en fonction de l’article 153.161(2) de la Loi. Je souligne que la Commission a eu l’occasion de le faire à au moins deux reprises, dès le début de la période de prestations de cette dernière, lorsqu’elle a discuté avec l’appelante les 23 décembre 2020Note de bas de page 55 et le 13 janvier 2021Note de bas de page 56.

[55] Je considère qu’avant de rendre sa décision le 6 avril 2022Note de bas de page 57, soit plus d’un an après que l’appelante ait présenté sa demande de prestations, la Commission ne l’a pas informée des recherches qu’elle devait faire pour démontrer sa disponibilité à travailler ou des preuves qu’elle devait fournir à cet effet, avant de lui imposer une inadmissibilité au bénéfice des prestations, de façon rétroactive.

[56] Puisque j’ai établi que la Commission a fait le réexamen de la demande de prestations de l’appelante selon l’article 52 de la Loi, tout en s’étant prévalue des dispositions prévues à l’article 153.161(2) de la Loi, je dois maintenant déterminer si elle a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire, lorsqu’elle a décidé de vérifier rétroactivement cette demande, d’en faire le réexamen et de changer sa décision.

Question no 2 : La Commission a-t-elle exercé son pouvoir discrétionnaire, de façon judiciaire, lorsqu’elle a décidé de vérifier rétroactivement la demande de prestations de l’appelante, d’en faire le réexamen et de changer sa décision?

[57] J’estime que la Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire, de façon judiciaire, lorsqu’elle a décidé de vérifier rétroactivement la demande de prestations de l’appelante, d’en faire le réexamen et de changer sa décision.

[58] Je considère que la Commission a négligé de prendre en considération tous les facteurs pertinents portés à sa connaissance concernant la formation de l’appelante et sa disponibilité à travailler. J’estime également que la Commission a tenu compte d’un facteur non pertinent lorsqu’elle réfère au « comportement » de l’appelante qui aurait contrevenu, selon elle, aux « principes fondamentaux » du régime de l’assurance-emploiNote de bas de page 58.

[59] La Cour d’appel fédérale (la Cour) a établi que les décisions discrétionnaires de la Commission ne peuvent être modifiées à moins qu’il soit démontré que cette dernière a « exercé son pouvoir discrétionnaire de manière non conforme à la norme judiciaire ou qu’elle a agi de façon abusive ou arbitraire sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance »Note de bas de page 59.

[60] Il appartient à la Commission de démontrer qu’elle a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire. En d’autres termes, la Commission doit démontrer qu’elle a agi de bonne foi, tenu compte de tous les facteurs pertinents et laissé de côté ceux qui ne l’étaient pasNote de bas de page 60.

[61] Puisque le pouvoir de réexamen de la Commission est un pouvoir discrétionnaire, les décisions qu’elle rend ne peuvent être modifiées que si elle n’a pas exercé ce pouvoir d’une manière judiciaireNote de bas de page 61.

[62] La Cour a reconnu à diverses reprises que le fait pour la Commission de se doter de lignes directrices ou de guides en présence d’un pouvoir discrétionnaire permet de rendre ce pouvoir cohérentNote de bas de page 62.

[63] Le Guide de la détermination de l’admissibilité, un document produit par la Commission, énonce des conditions de réexamen permettant de déterminer si la Commission a pris en compte tous les facteurs pertinents dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire.

[64] Ce document prévoit que la Commission procédera au réexamen d’une demande de prestations dans les cas suivants :

  • Il y a un moins-payé de prestations ;
  • Des prestations ont été versées contrairement à la structure de la Loi ;
  • Des prestations ont été versées à la suite d’une déclaration fausse ou trompeuse ;
  • Le prestataire aurait dû savoir qu’il recevait des prestations auxquelles il n’avait pas droitNote de bas de page 63.

[65] Bien que le Guide de la détermination de l’admissibilité ait été élaboré avant que des modifications ne soient apportées à la Loi pour atténuer les répercussions économiques découlant de la pandémie de COVID-19, il demeure que ce document continue de représenter, pour la Commission, un guide lui permettant de rendre cohérent l’exercice de son pouvoir discrétionnaire. La pandémie et les modifications législatives qui en ont découlé n’ont pas fait en sorte d’annihiler la portée de ce document ni les conditions d’application de la « politique de réexamen » qu’il contientNote de bas de page 64. Cette « politique de réexamen » réfère à l’article 52 de la Loi. Cet article demeure toujours en vigueur, malgré les modifications apportées à la Loi en raison de la pandémie. La Commission n’a pas non plus apporté de modification à son Guide de la détermination de l’admissibilité avec la pandémie de COVID-19, quant à l’application de sa « politique de réexamen » et à l’exercice de son pouvoir discrétionnaire. Dans le cas contraire, un risque d’incohérence pourrait en découler dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire.

[66] La Commission soutient avoir exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaireNote de bas de page 65.

[67] Elle fait valoir qu’elle n’a pas agi de mauvaise foi, ni dans un but ni pour un motif irrégulier en décidant de réexaminer la disponibilité à travailler de l’appelante. Elle indique avoir vérifié le dossier de cette dernière après le versement des prestations, comme prévu par l’arrêté provisoire no 10Note de bas de page 66.

[68] La Commission explique avoir tenu compte du statut d’étudiante à temps plein de l’appelante, des détails de ses études, de sa volonté d’accepter un emploi incompatible avec son horaire de cours, des efforts déployés pour trouver un emploi et des restrictions à l’acceptation d’un emploiNote de bas de page 67. Elle précise ne pas avoir établi de distinction à l’endroit de l’appelante sur la base de facteurs personnels et que celle-ci n’a pas fait l’objet de discriminationNote de bas de page 68.

[69] La Commission soutient avoir tenu compte des facteurs pertinents, ne pas avoir tenu compte d’un facteur non pertinent et ne pas avoir agi de façon discriminatoireNote de bas de page 69.

Moins-payé de prestations

[70] Je considère que l’élément relatif au « moins-payé » de prestations ne s’applique pas au cas de l’appelante.

[71] En fonction des documents présentés par la Commission et des calculs qu’elle a effectués à la suite de la révision du dossier de l’appelante, celle-ci a reçu des prestations en trop pour une somme totale de 2 795,00 $ (trop-payé)Note de bas de page 70. Il n’est pas question d’un « moins-payé de prestations » dans le cas présent.

[72] Le Guide de la détermination de l’admissibilité précise que la Commission procède toujours au réexamen des demandes pour lesquelles le prestataire s’est vu refuser des prestations qui pourraient devenir payables à la suite d’un nouvel examenNote de bas de page 71.

[73] Dans le cas d’un trop-payé, la Commission peut réexaminer une demande de prestations, comme le prévoit la LoiNote de bas de page 72.

Des prestations ont été versées contrairement à la structure de la Loi

[74] Je considère que l’établissement d’une période de prestations au profit de l’appelante et le versement de prestations à cette dernière ont été faits en conformité avec la « structure de la Loi », soit en fonction des éléments essentiels de la Loi à cet égard.

[75] Bien que le Guide de la détermination de l’admissibilité indique qu’une « période de non-disponibilité » ne représente pas un élément faisant partie de la structure de la Loi, il précise que cet élément peut faire l’objet d’un nouvel examen, s’il respecte l’une des conditions énoncées dans la politique prévue à cet effet (politique de réexamen la Commission)Note de bas de page 73.

[76] Je considère que la Commission n’a pas rendu une décision contraire à la structure de la Loi.

Des prestations ont été versées à la suite d’une déclaration fausse ou trompeuse

[77] Lorsque des prestations ont été versées à la suite de déclarations fausses ou trompeuses, la Commission peut procéder à un nouvel examen de la demande de prestations.

[78] J’estime toutefois que le critère selon lequel des prestations ont été versées à la suite d’une déclaration fausse ou trompeuse n’est pas pertinent au cas de l’appelante.

[79] La Commission dispose d’un délai de 72 mois pour réexaminer une demande de prestations, suivant la date à laquelle les prestations ont été payées ou sont devenues payables à un prestataire, si elle estime qu’une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse a été faite relativement à cette demandeNote de bas de page 74. En regard de l’application de l’article 153.161(2) de la Loi, il n’y a pas de délai, car la Commission peut vérifier, à tout moment après le versement des prestations, que le prestataire y est admissibleNote de bas de page 75.

[80] La Commission ne présente pas d’argument pouvant démontrer que l’appelante a fait des déclarations ou des affirmations fausses ou trompeuses. Elle ne démontre pas non plus en quoi elle pouvait estimer que l’appelante pouvait avoir fait de telles déclarations ou affirmations.

[81] J’estime que la Commission n’était pas en présence de déclarations fausses ou trompeuses relativement à la demande de prestations de l’appelante.

Le prestataire aurait dû savoir qu’il recevait des prestations auxquelles il n’avait pas droit (conscient de l’inadmissibilité)

[82] Je considère que rien ne démontre que l’appelante aurait dû savoir qu’elle n’avait pas droit aux prestations qui lui ont été versées et qu’elle était ainsi « consciente » qu’elle n’y était pas admissible.

[83] La Commission fait valoir les éléments suivants :

  1. a) L’appelante ne peut être considérée comme étant disponible à travaillerNote de bas de page 76 ;
  2. b) Dans le cadre des mesures temporaires pour faciliter l’accès aux prestationsNote de bas de page 77, toute formation déclarée entre le 27 septembre 2020 et le 25 septembre 2021 a été « autorisée automatiquement par le système », et ce, pour s’assurer que les prestataires ne subissent pas de retard dans la réception de leurs paiements de prestationsNote de bas de page 78 ;
  3. c) La formation à temps plein de l’appelante a été signalée et « autorisée par le système » lors de sa demande initiale de prestations, et déclarée dans chacune de ses déclarationsNote de bas de page 79 ;
  4. d) Lors du dépôt d’une demande de prestations par internet, les prestataires sont automatiquement et systématiquement informés de leurs droits et responsabilités. Dans sa demande de prestations, l’appelante a indiqué qu’elle acceptait ses droits et responsabilités puisque sa demande a été enregistréeNote de bas de page 80. Elle a déclaré être une étudiante à temps plein et avoir une disponibilité restreinte à travailler. Elle a aussi indiqué avoir compris que les renseignements qu’elle avait fournis allaient servir à déterminer son admissibilité aux prestations. L’appelante ne satisfaisait pas les critères relatifs à sa disponibilité à travaillerNote de bas de page 81 ;
  5. e) L’appelante a affirmé à plus d’une reprise qu’elle donnait la priorité à sa formation plutôt qu’à son emploi et qu’elle n’était pas prête à l’abandonnerNote de bas de page 82. Le « comportement » de l’appelante contrevient aux principes fondamentaux du régime de l’assurance-emploi dans la mesure où un employé ne peut imposer le fardeau économique de sa décision aux personnes qui cotisent au fonds de l’assurance-emploiNote de bas de page 83 ;
  6. f) La disponibilité à travailler de l’appelante, en lien avec sa formation, a été vérifiée après le versement des prestations, en vertu de l’article 153.161 de la LoiNote de bas de page 84 ;
  7. g) En vertu de cet article, la Commission peut vérifier, à tout moment après le versement des prestations, que le prestataire est admissible aux prestations en exigeant la preuve qu’il était capable de travailler et disponible pour tout jour ouvrable de sa période de prestationsNote de bas de page 85 ;
  8. h) L’ajout de cet article, en vigueur à compter du 27 septembre 2020, s’est effectué au moyen de l’arrêté provisoire no 10, dont une note explicative indique que cette disposition de la Loi « permet une approche opérationnelle modifiée pour déterminer la disponibilité à travailler des prestataires qui sont en formation ». La modification fait en sorte que la disponibilité peut être vérifiée après le versement des prestations, alors qu’habituellement, la Commission effectuait cette vérification avant le versementNote de bas de page 86.

[84] Le témoignage et les déclarations de l’appelante indiquent les éléments suivants :

  1. a) Elle s’est renseignée auprès de la Commission, avant de présenter sa demande de prestations pour savoir si elle pouvait en recevoir, étant donné sa formationNote de bas de page 87 ;
  2. b) Elle a fourni à la Commission tous les renseignements et documents demandés concernant sa formationNote de bas de page 88 ;
  3. c) Dans sa demande de prestations, ses communications avec la Commission et ses déclarations du prestataire, elle a indiqué qu’elle suivait une formation. Elle affirme avoir toujours dit la vérité au sujet de sa formationNote de bas de page 89 ;
  4. d) Elle a communiqué avec la Commission pour savoir comment remplir ses déclarations et vérifier si son dossier d’assurance-emploi était en ordreNote de bas de page 90 ;
  5. e) En aucun moment, elle n’a été informée qu’elle pouvait être dans le tort relativement à sa demande de prestations jusqu’à ce qu’elle soit avisée, en avril 2021, qu’elle n’était pas admissible au bénéfice des prestationsNote de bas de page 91.

[85] J’estime que même si la Commission a conclu que l’appelante n’avait pas prouvé qu’elle était disponible à travailler pendant sa formation, elle ne démontre pas que cette dernière pouvait présumer qu’elle recevait des prestations auxquelles elle n’avait pas droit.

[86] Je suis d’avis que la Commission ne démontre pas que l’appelante aurait dû savoir qu’elle recevait des prestations auxquelles elle n’avait pas droit ou qu’elle aurait dû être « consciente » qu’elle n’y était pas admissible, une des règles prévues au Guide de la détermination de l’admissibilité démontrant qu’elle a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire.

[87] Je considère que l’appelante a fait preuve de transparence concernant sa formation et sa disponibilité à travailler. Elle a été constante dans ses déclarations à la Commission.

[88] Je suis d’avis que l’appelante pouvait raisonnablement croire que lorsqu’elle a fourni des renseignements à la Commission sur sa formation et que des prestations lui ont été versées, cela signifiait qu’elle y avait droit.

[89] J’estime que la Commission n’a pas respecté la « politique de réexamen » qu’elle a élaborée afin d’assurer une application uniforme et juste de l’article 52 de la Loi et d’empêcher la création de trop-payés lorsque le prestataire a touché des prestations en trop pour une raison indépendante de sa volonté, comme le précise cette politiqueNote de bas de page 92.

[90] Bien que la Commission explique s’être appuyée sur les dispositions prévues à l’article 153.161 de la Loi pour rendre sa décision, cela ne fait pas en sorte de l’exempter d’utiliser son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire, comme elle doit le faire dans l’application de l’article 52 de la Loi.

[91] Les modifications apportées à la Loi avec la mise en œuvre de mesures temporaires en raison de la pandémie de COVID-19 avaient pour but de faciliter l’accès aux prestations d’assurance-emploi.

[92] Je suis toutefois d’avis que ces modifications législatives n’avaient pas comme objectif de soustraire la Commission de son obligation d’exercer son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire pour récupérer des sommes d’argent représentant des prestations versées en trop à une catégorie spécifique de prestataires que sont les étudiants.

[93] Je suis d’avis que si le législateur avait eu une telle intention, il l’aurait spécifié en incluant une condition spécifique à cet égard dans les modifications qu’il a apportées à la Loi dans le cadre des mesures temporaires en question.

[94] Bien que la Commission fasse valoir que le libellé de l’arrêté provisoire no 10 représente une modification qui lui « permet une approche opérationnelle modifiée pour déterminer la disponibilité à travailler des prestataires qui sont en formation »Note de bas de page 93, cela ne fait pas en sorte de l’exempter de son obligation d’exercer son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire et de le faire en conformité avec ses propres règles et les dispositions prévues à la Loi, de même qu’en fonction des décisions rendues par la Cour sur l’exercice de ce pouvoirNote de bas de page 94. Je souligne que l’arrêté provisoire auquel la Commission réfère n’est pas une disposition de la Loi.

[95] Je suis d’avis qu’une telle approche opérationnelle ne vise pas à restreindre le droit d’une catégorie de prestataires, les étudiants en l’occurrence, de bénéficier d’un traitement leur garantissant que le pouvoir discrétionnaire de la Commission sera exercé à leur endroit, de façon discrétionnaire, comme cela doit être le cas pour toutes les autres catégories de prestataires, en tout temps.

[96] J’estime que l’intention du législateur n’était pas de permettre une telle distinction et d’exclure ainsi une catégorie de prestataires. Dans le cas contraire, il s’agirait d’un traitement discriminatoire à l’égard d’une catégorie de prestataires que sont les étudiants en formation.

[97] Je considère qu’en mettant en œuvre des mesures temporaires visant à faciliter l’accès aux prestations durant la pandémie, le législateur a certes voulu insister sur le pouvoir de la Commission de vérifier si un prestataire avait le droit d’en recevoir pendant qu’il suivait une formation, même après avoir commencé à lui en verser.

[98] Je considère toutefois que le législateur n’a établi aucun paramètre spécifique ni aucune condition faisant en sorte que la Commission pouvait le faire autrement qu’en exerçant son pouvoir discrétionnaire, de façon judiciaire, comme cela était le cas avant la mise en œuvre de ces mesures temporaires.

[99] Concernant la demande de prestations de l’appelante, je suis d’avis que la Commission était en présence de tous les éléments nécessaires pour établir cette demande et décider de lui verser des prestations.

[100] Bien que la Commission indique que la formation à temps plein de l’appelante a été signalée et « autorisée automatiquement par le système » lors de sa demande initiale de prestationsNote de bas de page 95, il demeure que cette dernière a fait plusieurs autres déclarations au sujet de sa formation après la présentation de sa demande.

[101] Je considère que la Commission a ignoré les renseignements que lui a fournis l’appelante, tant verbalement que par écrit, concernant sa formation et sa disponibilité à travailler, et ce, à plusieurs reprises, soit avant qu’elle ne présente sa demande de prestations, lors de la présentation de celle-ciNote de bas de page 96 et peu de temps après l’avoir présentéeNote de bas de page 97.

[102] Lorsque l’appelante a rempli sa demande de prestations, le 20 novembre 2020Note de bas de page 98, la Commission a été informée qu’elle était aux études et y consacrait 25 heures ou plus par semaineNote de bas de page 99.

[103] Les 23 décembre 2020 et 13 janvier 2021, l’appelante a parlé à des représentants de la Commission pour les informer qu’elle suivait une formationNote de bas de page 100.

[104] Le 13 janvier 2021, l’appelante a dit à un représentant de la Commission qu’elle suivait une formation depuis le 5 octobre 2020, du lundi au vendredi, de jour, en y consacrant une trentaine d’heures par semaineNote de bas de page 101.

[105] Le 30 décembre 2020, la Commission a communiqué avec l’employeur pour lequel l’appelante avait travaillé du 27 avril 2020 au 13 novembre 2020 afin d’obtenir des renseignements sur la formation entreprise par cette dernièreNote de bas de page 102.

[106] J’estime que la Commission a ignoré les renseignements qu’elle a elle-même recueillis auprès de cet employeur, et ce, moins de trois semaines après l’établissement de la période de prestations de l’appelanteNote de bas de page 103.

[107] L’appelante a indiqué dans ses déclarations du prestataire qu’elle suivait une formation. La Commission reconnaît que la formation de l’appelante a été déclarée dans chacune de ses déclarationsNote de bas de page 104.

[108] J’estime que ce n’est pas parce que la demande de prestations présentée par l’appelante a d’abord été « autorisée automatiquement par le système » que cette situation exempte la Commission de sa responsabilité de vérifier et de déterminer si cette dernière était disponible à travailler, après lui avoir parlé à plusieurs reprises, entre autres, les 23 décembre 2020Note de bas de page 105 et 13 janvier 2021Note de bas de page 106, soit peu de temps après l’établissement de sa période de prestations.

[109] La Commission a attendu plus d’un an avant de réagir aux renseignements que lui a donnés l’appelante, verbalement et par écrit, concernant sa formation, pour conclure que celle-ci n’était pas admissible au bénéfice des prestations et l’aviser qu’elle changeait ainsi sa décision.

[110] Je suis d’avis que la Commission ne peut imputer le traitement de tous les renseignements fournis par l’appelante concernant sa formation, à un système automatisé et se soustraire ainsi de la responsabilité qui lui incombe de traiter adéquatement cette demande.

[111] Je ne retiens donc pas l’argument de la Commission selon lequel elle a tenu compte du statut de l’appelante comme étudiante à temps plein, des détails de ses études, de sa volonté d’accepter un emploi incompatible avec son horaire de cours, des efforts déployés pour trouver un emploi et des restrictions à l’acceptation d’un emploiNote de bas de page 107. La Commission disposait de tous ces renseignements et a décidé de verser des prestations avant de revenir sur sa décision plus d’un an plus tard.

[112] En résumé, compte tenu des éléments de preuve présentés et des circonstances particulières au présent dossier, je considère que la Commission n’a pas utilisé son pouvoir discrétionnaire, de façon judiciaire, en décidant de vérifier la demande de prestations de l’appelante et en procédant à un nouvel examen de cette demande.

[113] J’estime que la Commission n’a pas pris en compte tous les facteurs pertinents pour le faire. Ces facteurs réfèrent à l’ensemble des renseignements fournis par l’appelante au sujet de sa formation dans sa demande de prestations, dans ses communications avec la Commission, entre autres au début de sa période de prestations, et dans les déclarations du prestataire qu’elle a remplies. Ces facteurs réfèrent aussi aux renseignements recueillis par la Commission auprès de l’employeur pour lequel l’appelante a travaillé du 27 avril 2020 au 13 novembre 2020 au sujet de la formation de cette dernière.

[114] Je suis d’avis que l’omission de la Commission de prendre en compte tous les facteurs pertinents s’apparente à de l’aveuglement volontaire de sa part et porte à croire qu’elle n’a pas agi de bonne foi dans le traitement du dossier de l’appelante.

[115] Je suis également d’avis que la Commission démontre avoir tenu compte d’un facteur non pertinent dans l’analyse du dossier de l’appelante en référant à son « comportement » qui aurait contrevenu, selon elle, aux principes fondamentaux du régime de l’assurance-emploi dans la mesure où un employé ne peut imposer le fardeau économique de sa décision aux personnes qui cotisent au fonds de l’assurance-emploiNote de bas de page 108.

[116] Sur ce point, Je considère que la Commission ne précise pas le comportement de l’appelante auquel elle fait référence et ne démontre pas en quoi ce comportement pourrait avoir contrevenu aux principes fondamentaux du régime de l’assurance-emploi.

[117] Je suis d’avis que la Commission a omis de mettre en pratique ses propres règles dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire. J’estime qu’elle a manqué de cohérence et a agi de façon abusive.

[118] Je considère que la Commission ne pouvait vérifier la demande de prestations de l’appelante en procédant à un nouvel examen de cette demande, car elle n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire, de façon judiciaire, pour le faire, après avoir rendu une décision ayant fait en sorte de lui accorder des prestations.

Disponibilité à travailler pendant une formation

[119] La Cour a établi qu’une personne qui est aux études à temps plein est présumée ne pas être disponible pour travaillerNote de bas de page 109. C’est ce qu’on appelle la « présomption de non-disponibilité ». Cela signifie que l’on considère que cette personne n’est probablement pas disponible pour travailler lorsque la preuve montre qu’elle suit une formation à temps plein.

[120] Toutefois cette présomption peut être renversée à certaines conditions. La Cour nous indique que des principes se rapportant aux cas de retour aux études peuvent permettre de renverser la présomption de non-disponibilité.Note de bas de page 110 Ces principes sont, entre autres :

  • Les exigences de présence au cours ;
  • Le consentement du prestataire à abandonner ses études pour accepter un emploi ;
  • Le fait que le prestataire ait déjà travaillé dans le passé à des heures irrégulières ;
  • L’existence de « circonstances exceptionnelles » qui permettraient au prestataire de travailler tout en suivant son coursNote de bas de page 111.

[121] Bien que cette présomption de non-disponibilité puisse être renversée, la personne qui suit une formation doit tout de même démontrer qu’elle est véritablement disponible à travailler.

[122] Deux articles de la Loi indiquent qu’un prestataire doit démontrer qu’il est disponible à travaillerNote de bas de page 112. Les articles en question traitent tous deux de la disponibilité, mais il s’agit de deux inadmissibilités distinctesNote de bas de page 113.

[123] D’une part, un prestataire n’est pas admissible au bénéfice des prestations pour tout jour ouvrable d’une période de prestations pour lequel il ne peut prouver qu’il était, ce jour-là, capable de travailler et disponible à cette fin, et incapable d’obtenir un emploi convenableNote de bas de page 114.

[124] D’autre part, pour démontrer la disponibilité à travailler, la Commission peut exiger du prestataire qu’il prouve qu’il fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi convenableNote de bas de page 115.

[125] Dans son argumentation, la Commission précise que sa décision porte essentiellement sur les articles 18 et 153.161 de la LoiNote de bas de page 116.

[126] Pour déterminer si un prestataire est disponible à travailler, je dois considérer les critères spécifiques énoncés dans la Loi permettant d’établir si ses démarches pour trouver un emploi convenable constituent des démarches habituelles et raisonnablesNote de bas de page 117. Selon ces critères, les démarches doivent être : 1) soutenues, 2) orientées vers l’obtention d’un emploi convenable et 3) compatibles avec neuf activités spécifiques qui peuvent être utilisées pour aider les prestataires à obtenir un emploi convenableNote de bas de page 118. Ces activités sont entre autres les suivantes : évaluer les possibilités d’emploi, s’inscrire à des outils de recherche d’emploi, des banques d’emploi en ligne ou auprès de bureaux de placement, communiquer avec des employeurs éventuels et présenter des demandes d’emploiNote de bas de page 119.

[127] La notion de « disponibilité » n’est pas définie dans la Loi. Des décisions rendues par la Cour ont établi des critères qui permettent d’établir la disponibilité d’une personne à travailler de même que son admissibilité ou non à recevoir des prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 120. Ces trois critères sont :

  • Le désir de retourner sur le marché du travail aussitôt qu’un emploi convenable est offert ;
  • La manifestation de ce désir par des efforts pour trouver cet emploi convenable ;
  • Le non-établissement ou l’absence de conditions personnelles pouvant limiter indûment les chances de retour sur le marché du travailNote de bas de page 121.

[128] La question de savoir si, oui ou non, une personne qui suit un cours à plein temps est disponible pour travailler est une question de fait qu’il faut régler à la lumière des circonstances particulières à chaque cas, mais en fonction des critères énoncés par la Cour. L’attitude et la conduite du prestataire doivent être prises en considérationNote de bas de page 122.

[129] Dans le présent dossier, l’appelante ne satisfait pas les critères énoncés plus haut pour démontrer sa disponibilité à travailler au cours de la période du 14 décembre 2020 au 31 mai 2021 inclusivement. Elle ne démontre pas que ses démarches pour trouver un emploi au cours de cette période étaient habituelles et raisonnables.

Question no 1 : Est-ce que l’appelante renverse la présomption selon laquelle elle n’était pas disponible à travailler?

[130] Je considère qu’au cours de la période du 14 décembre 2020 au 31 mai 2021, il n’y a aucun des principes se rapportant aux cas de retour aux études qui permettent à l’appelante de démontrer qu’elle renverse la présomption selon laquelle elle n’était pas disponible à travailler durant sa formation.

[131] L’appelante ne conteste pas le fait qu’elle a étudié à temps plein durant cette période.

[132] Elle indique avoir consacré environ 30 heures par semaine à ses études en incluant les travauxNote de bas de page 123.

[133] L’appelante déclare avoir suivi ses cours du lundi au vendredi, de 9 h 00 à 15 h 00Note de bas de page 124.

[134] Elle précise que ses cours ont été donnés en présentiel au cours des mois d’octobre 2020 à décembre 2020. L’appelante explique qu’à la suite du congé de la période des fêtes, lorsqu’elle a repris sa formation le 4 janvier 2021, les cours étaient donnés à distance en raison de la pandémie de COVID-19, et ce jusqu’à la fin du mois de janvier 2021. Elle indique que durant cette période, elle a suivi ses cours à partir de chez elle, à des moments précis (ex. : 9 h 00 le matin durant une demi-heure) ou à des moments qui lui convenaient. L’appelante précise que les cours ont à nouveau été donnés en présentiel à compter de février 2021.

[135] En ce qui concerne les « exigences de présence au cours », je considère que l’appelante ne démontre pas que sa situation d’étudiante était compatible avec l’établissement de sa disponibilité à travailler durant la période du 14 décembre 2020 au 31 mai 2021.

[136] Elle ne bénéficiait pas d’une latitude lui permettant de suivre sa formation au moment où cela lui convenait durant la très grande majorité de sa période de formation. La seule période où elle a pu bénéficier de cette latitude fut au cours du mois de janvier 2021.

[137] Je suis d’avis que pour la période du 14 décembre 2020 au 31 mai 2021, les exigences de présence au cours de l’appelante et le temps qu’elle a choisi d’y consacrer ont eu pour effet de compromettre sa disponibilité à travailler et sa recherche d’un emploi convenable.

[138] Au sujet de la question du consentement de l’appelante à abandonner ses études pour accepter un emploi, j’estime qu’elle ne démontre pas qu’elle était prête à le faire au cours de cette période.

[139] Plusieurs de ses déclarations à la Commission indiquent qu’elle n’abandonnerait pas sa formation si celle-ci entrait en conflit avec un emploi à temps pleinNote de bas de page 125.

[140] En ce qui concerne le fait qu’un prestataire ait déjà travaillé dans le passé à des heures irrégulières, je considère que l’appelante ne démontre pas qu’elle détient une expérience significative d’études et de travail en simultané (historique travail-études).

[141] L’appelante explique que durant sa période d’emploi chez X, le titre de son poste était paysagiste au cours de la période du 27 avril 2020 au 4 octobre 2020. Elle précise que du 5 octobre 2020 au 13 novembre 2020, elle était alors considérée comme une stagiaire et elle était payéeNote de bas de page 126. Elle spécifie suivre sa formation dans le cadre du Programme de formation de courte durée (programme COUD) du gouvernement du QuébecNote de bas de page 127.

[142] L’appelante précise que les obligations liées à sa formation ne se sont pas déroulées à l’extérieur des heures normales de son emploi habituelNote de bas de page 128.

[143] Dans une déclaration à la Commission, en date du 30 décembre 2020, l’employeur X explique que le programme de formation du gouvernement du Québec (programme COUD) est un programme permettant à un employé de suivre une formation et de travailler, en alternanceNote de bas de page 129.

[144] Je considère que l’appelante ne démontre pas qu’elle possède un historique travail-études lui permettant de renverser la présomption selon laquelle elle n’était pas disponible à travailler au cours de la période du 14 décembre 2020 au 31 mai 2021.

[145] Je retiens que ce n’est que du 5 octobre 2020 au 13 novembre 2020, que l’appelante démontre qu’elle a été en mesure de travailler tout en suivant une formation à temps plein.

[146] Je considère que l’appelante ne présente pas de circonstances exceptionnelles pouvant démontrer qu’au cours de cette période, elle est en mesure de renverser la présomption selon laquelle une personne suivant un cours de formation à temps plein, de sa propre initiative, n’est pas disponible à travailler.

[147] Jusqu’à maintenant, la Cour n’a pas établi de lien entre cette présomption et les articles de la Loi traitant la disponibilité à travailler. Puisque ce lien n’est pas établi de façon claire, je vais poursuivre mon examen des articles de la Loi traitant cette question, même si j’ai déjà conclu que l’appelante est présumée ne pas être disponible à travailler au cours de la période du 14 décembre 2020 au 31 mai 2021.

Question no 2 : Est-ce que l’appelante a manifesté le désir ou la volonté de retourner sur le marché du travail aussitôt qu’un emploi convenable lui aurait été offert?

[148] Je considère que l’appelante n’a pas démontré son désir de retourner sur le marché du travail dès qu’un emploi convenable lui aurait été offert au cours de la période du 14 décembre 2020 au 31 mai 2021. J’estime que durant cette période, l’intention de l’appelante était avant tout de suivre sa formation.

[149] La preuve au dossier indique que l’appelante a choisi d’entreprendre une formation d’un commun accord avec l’employeur pour lequel elle a travaillé du 27 avril 2020 au 13 novembre 2020Note de bas de page 130. Elle explique que c’est l’employeur qui lui a proposé de suivre cette formation entreprise en octobre 2020.

[150] L’appelante indique que pendant sa formation, elle était disponible à travailler à temps partiel, soit les soirs et les fins de semaineNote de bas de page 131.

[151] Elle précise qu’elle n’était pas disponible à travailler aux mêmes conditions qu’avant le début de sa formationNote de bas de page 132.

[152] Je considère que même si l’appelante exprime sa disponibilité à travailler et démontre avoir travaillé comme stagiaire durant une partie de sa période de formation, du 5 octobre 2020 au 13 novembre 2020, il demeure qu’elle a choisi d’entreprendre des études à temps plein, en y consacrant une trentaine d’heures par semaine.

[153] Je considère que ce choix a compromis sa disponibilité et sa volonté d’être sur le marché du travail pour occuper un emploi convenable durant la période du 14 décembre 2020 au 31 mai 2021, car elle a donné la priorité à sa formation.

Question no 3 : Est-ce que l’appelante a exprimé ce désir par des efforts ou des démarches pour trouver cet emploi convenable?

[154] Je considère que l’appelante n’a pas manifesté son désir de retourner sur le marché du travail par des efforts ou des démarches pour trouver un emploi convenable au cours de la période du 14 décembre 2020 au 31 mai 2021.

[155] L’appelante explique avoir fait des recherches pour occuper un emploi à temps partiel, soit le soir ou les fins de semaine afin de pouvoir poursuivre sa formation à temps pleinNote de bas de page 133.

[156] Elle précise qu’elle pouvait occuper un emploi dans d’autres domaines que celui l’aménagement paysager, son domaine de formation, soit dans la restauration ou dans les épiceries.

[157] Elle indique avoir commencé ses recherches en décembre 2020, en se rendant par exemple, dans des épiceries (ex. : IGA). L’appelante indique qu’en raison de la pandémie de COVID-19, les options étaient très limitées.

[158] Dans le cas présent, j’estime que l’appelante n’a pas effectué des « démarches habituelles et raisonnables » dans la « recherche d’un emploi convenable », des démarches soutenues, orientées vers l’obtention d’un emploi convenable et compatible avec neuf activités spécifiques pouvant être utilisées pour aider les prestataires à obtenir un emploi convenableNote de bas de page 134.

[159] Même si l’appelante a travaillé durant une partie de sa formation comme stagiaire, elle ne démontre pas qu’elle était disponible à le faire pour chaque jour ouvrable de sa période de prestations pour tout employeur potentiel, si l’horaire de travail proposé n’était pas compatible avec son horaire de cours.

[160] La Cour nous informe que la disponibilité d’une personne s’apprécie par jour ouvrable d’une période de prestations pour lequel elle peut prouver qu’elle était, ce jour-là, capable de travailler et disponible à cette fin et incapable d’obtenir un emploi convenableNote de bas de page 135.

[161] Je considère qu’au cours de sa période de formation, la disponibilité à travailler de l’appelante ne s’est pas traduite par des recherches d’emploi soutenues auprès d’employeurs potentiels, dans le but de trouver un emploi convenable.

[162] La Cour nous informe qu’il appartient au prestataire de prouver sa disponibilité à travailler. Afin d’obtenir des prestations d’assurance-emploi, un prestataire doit chercher activement un emploi convenable, même s’il lui semble raisonnable de ne pas le faireNote de bas de page 136.

[163] L’appelante avait la responsabilité de chercher activement un emploi convenable afin de pouvoir obtenir des prestations d’assurance-emploi.

[164] Je considère qu’elle ne s’est pas acquittée de cette responsabilité au cours de la période en cause.

Question no 4 : Est-ce que l’appelante a établi des conditions personnelles ayant pu limiter indûment ses chances de retour sur le marché du travail?

[165] J’estime que l’appelante a établi des « conditions personnelles » qui ont eu pour effet de limiter indûment ses chances de retour sur le marché du travail pour occuper un emploi convenable au cours de la période du 14 décembre 2020 au 31 mai 2021.

[166] Je considère que les conditions personnelles que l’appelante a imposées durant cette période sont liées à sa priorité de poursuivre sa formation au détriment de sa recherche d’un emploi convenable.

[167] J’estime que l’appelante démontre imposer de telles conditions, étant donné le nombre d’heures qu’elle déclare consacrer à sa formation, une trentaine d’heures par semaine, et l’horaire à partir duquel elle indique être disponible à travailler, soit les soirs et les fins de semaine.

[168] Les déclarations de l’appelante sont également constantes sur le fait qu’elle n’aurait pas abandonné sa formation si celle-ci était entrée en conflit avec un emploi à temps pleinNote de bas de page 137.

[169] J’estime que les explications de l’appelante sur sa disponibilité à travailler démontrent que sa formation a eu pour effet de compromettre sa recherche d’un emploi convenable.

[170] Je considère que le choix de l’appelante de suivre une formation à temps plein s’est fait au détriment de sa volonté et de ses efforts pour demeurer sur le marché du travail dans le but d’occuper un emploi convenable.

[171] Je considère que malgré ses disponibilités à travailler, l’appelante ne démontre pas qu’elle voulait offrir une disponibilité complète auprès d’employeurs potentiels, durant sa formation ni qu’elle aurait accepté un emploi dont l’horaire de travail aurait coïncidé avec celui de sa formation.

[172] La Cour nous indique qu’un prestataire qui restreint sa disponibilité au travail pour des heures ou des jours à l’extérieur de son horaire de cours n’a pas prouvé sa disponibilité au sens de la LoiNote de bas de page 138.

[173] Je considère qu’au cours de la période du 14 décembre 2020 au 31 mai 2021, pendant ses études, l’appelante a imposé des conditions personnelles ayant eu pour effet de limiter de manière excessive ses chances de réintégrer le marché du travail pour occuper un emploi convenable.

[174] En résumé, l’appelante ne démontre pas qu’elle était disponible à travailler du 14 décembre 2020 au 31 mai 2021.

Remboursement des prestations versées en trop

[175] Puisque j’ai déterminé que la Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire, de façon judiciaire, en décidant de vérifier la demande de prestations de l’appelante et en procédant à un nouvel examen de cette demande, il n’y a donc pas lieu de déterminer si celle-ci doit rembourser les prestations qui lui ont été versées en trop et qui lui sont réclamées par la CommissionNote de bas de page 139.

Conclusion

[176] Je conclus que la Commission n’a pas utilisé son pouvoir discrétionnaire, de façon judiciaire, en décidant de vérifier et de réexaminer la demande de prestations de l’appelante, même si cette dernière ne démontre pas sa disponibilité à travailler au cours de la période du 14 décembre 2020 au 31 mai 2021 inclusivement, durant laquelle elle a suivi une formation. La Commission ne pouvait pas déterminer, de façon rétroactive, que l’appelante n’était pas admissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[177] Puisque la Commission ne pouvait déterminer, de façon rétroactive, que l’appelante n’était pas admissible au bénéfice des prestations, il n’y a donc pas lieu de décider si cette dernière doit rembourser la somme d’argent qui lui est réclamée pour des prestations versées en trop.

[178] Par conséquent, l’appel est accueilli.

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