Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : MM c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 509

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : M. M.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Amanda Pezzutto
Mode d’audience : Sur la foi du dossier
Date de la décision : Le 30 janvier 2023
Numéro de dossier : GE-22-3619

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Décision

[1] M. M. est le prestataire. Le Tribunal de la sécurité sociale a rendu une décision au sujet de son appel. Il demande maintenant au Tribunal de réexaminer et de modifier sa décision initiale. Comme je suis celle qui a rendu cette décision, je dois rendre une décision sur cette demande.

[2] Je rejette la demande du prestataire. Il n’a pas prouvé qu’il y avait une raison de réexaminer et de modifier ma décision initiale. En effet, il ne m’a présenté aucun fait nouveau. De plus, il n’a pas démontré que j’ai rendu la décision initiale sans connaître un fait essentiel, ou en me fondant sur une erreur relative à un fait essentiel.

[3] Par conséquent, ma décision initiale demeure en vigueur.

Aperçu

[4] Lorsque le Tribunal rend une décision qui vous concerne, vous êtes une partie à cette décision. Et si vous êtes une partie à une décision, vous pouvez demander au Tribunal de réviser et de modifier cette décisionNote de bas de page 1. La loi utilise l’expression « annuler ou modifier » lorsqu’elle parle de réviser et de modifier une décision. Le prestataire est celui qui a demandé au Tribunal de modifier sa décision.

[5] Je suis celle qui a rendu la décision initiale. J’ai d’abord décidé que le prestataire n’avait pas droit aux prestations d’assurance-emploi. En effet, j’ai conclu que son employeur l’avait suspendu en raison d’une inconduite. 

[6] Maintenant, le prestataire a présenté une demande de révision et de modification de la décision initiale. Il pense que je devrais modifier ma décision initiale parce qu’il dit qu’il y a des faits nouveaux. Il soutient également que j’ai commis des erreurs par rapport à des faits essentiels. Il pense que je devrais modifier ma décision et conclure qu’il n’a pas perdu son emploi en raison d’une inconduite. Il croit avoir droit aux prestations d’assurance-emploi.

Questions en litige

[7] Je dois décider si le prestataire a prouvé qu’il y a une raison de revenir sur ma décision initiale.

[8] Si je décide qu’il a démontré qu’il y a une raison de réviser la décision, je dois décider comment modifier la décision initiale.

Analyse

Motifs de révision d’une décision initiale

[9] Je ne peux pas simplement réexaminer une décision parce qu’on m’en fait la demande. La loi donne seulement deux motifs qui me permettraient de réexaminer et de modifier une décision. Il faut que l’une des deux situations suivantes se présente :

  • Il existe des faits nouveaux;
  • j’ai rendu la décision initiale sans connaître un fait essentiel (une preuve importante), ou j’ai fondé ma décision sur une erreur relative à un fait essentiel.

[10] Je dois donc décider si les nouveaux renseignements fournis par le prestataire suffisent à démontrer l’existence de l’une de ces deux situations. Je dois ensuite établir si ses nouveaux renseignements constituent un fait nouveau ou un fait essentiel. Si c’est le cas, je peux réexaminer ma décision initiale.

[11] Pour qu’il y ait un fait nouveau, la jurisprudence dit que je dois décider si les nouveaux renseignements sont déterminantsNote de bas de page 2. Cela signifie que je dois déterminer si les nouveaux renseignements modifieraient ma décision d’une façon ou d’une autre.

[12] Sinon, je dois décider si les nouveaux renseignements constituent un fait essentiel. Un fait essentiel est un élément de preuve important parce qu’il a une incidence sur l’issue de la décision. Je dois décider si j’étais au courant des nouveaux renseignements lorsque j’ai rendu ma décision, ou si j’ai fondé ma décision sur une erreur relative à un fait essentiel.

Quelle était la décision initiale?

[13] Dans la décision initiale, j’ai décidé que le prestataire avait cessé de travailler en raison d’une suspension. En effet, j’ai conclu qu’il n’avait pas cessé de travailler parce que son employeur l’avait mis à pied. J’ai également conclu qu’il n’avait pas volontairement pris congé.

[14] J’ai également conclu que la raison de la suspension du prestataire était une inconduite au sens de la loi. J’ai rendu cette décision parce que j’ai accepté les faits suivants comme étant véridiques :

  • Le prestataire savait que son employeur avait mis en place une politique de vaccination obligatoire. Il savait que la politique signifiait qu’il devait présenter une preuve de vaccination ou obtenir une exemption de son employeur.
  • Le prestataire connaissait la date limite pour se conformer à la politique de vaccination de l’employeur.
  • L’employeur du prestataire n’a pas accueilli sa demande d’exemption de la politique de vaccination. Le prestataire savait que son employeur n’avait pas approuvé sa demande d’exemption.
  • Le prestataire savait qu’il y avait des conséquences à ne pas suivre la politique de vaccination. Il savait aussi qu’il ne pouvait pas continuer à travailler tant qu’il ne respectait pas la politique de vaccination.
  • Même si le prestataire connaissait la politique de vaccination et les conséquences, il a délibérément choisi de ne pas la suivre. Il ne s’est pas fait vacciner contre la COVID-19 avant la date limite fixée par l’employeurNote de bas de page 3.

[15] Ni le prestataire ni la Commission de l’assurance-emploi du Canada n’étaient en désaccord avec les faits mentionnés ci-dessus. Voilà pourquoi j’ai accepté les faits comme étant véridiques.

[16] Cependant, en acceptant ces faits, j’ai dû conclure que le prestataire avait perdu son emploi en raison d’une inconduite. En effet, les faits ci-dessus m’ont montré que les gestes du prestataire étaient délibérés et intentionnels. Il savait qu’il risquait de perdre son emploi. Ses gestes sont la cause directe de sa perte d’emploiNote de bas de page 4.

[17] Maintenant, le prestataire dit que je devrais réexaminer et modifier ma décision.

Quels renseignements le prestataire a-t-il inclus dans sa demande?

[18] Le prestataire affirme qu’il a des faits nouveaux. Il dit aussi que j’ai commis des erreurs par rapport aux faits essentiels.

[19] Dans sa demande, il affirme qu’il conteste le refus de son employeur de lui accorder des mesures d’adaptation pour des motifs religieux. Il fait valoir qu’il devrait recevoir des prestations d’assurance-emploi, parce que son différend relatif à la demande de mesures d’adaptation doit passer par le processus de règlement des différends de son employeur.

[20] Le prestataire présente également des arguments au sujet d’une décision de la division généraleNote de bas de page 5. Il dit qu’il veut utiliser sa demande pour présenter des arguments plus détaillés au sujet de cette décision, et affirme que les conclusions que la membre du Tribunal tire dans cette décision s’appliquent à sa situation.

[21] Enfin, le prestataire présente des arguments pour expliquer pourquoi la décision Paradis ne s’applique pas à sa situationNote de bas de page 6. Il explique pourquoi il pense que les actions de son employeur et le caractère raisonnable de sa politique de vaccination sont des éléments dont j’aurais dû tenir compte lorsque j’ai rendu ma décision initiale.

[22] Pour que je rouvre et modifie ma décision initiale, le prestataire doit démontrer qu’il s’agit de faits nouveaux. Si ce n’est pas le cas, il doit démontrer que j’ai rendu ma décision initiale sans connaître un fait essentiel ou que j’ai commis une erreur par rapport à un fait essentiel.

Le prestataire m’a-t-il fourni des faits nouveaux?

[23] Le prestataire affirme que ses renseignements comprennent des faits nouveaux. Cependant, la Commission n’est pas d’accord. Celle-ci affirme que la demande du prestataire ne contient aucun fait nouveau.

[24] Je suis d’accord avec la Commission. Je ne crois pas que la demande du prestataire contienne de faits nouveaux.

[25] La jurisprudence définit ce qu’on entend par « faits nouveaux » comme suit :

  • un fait qui s’est produit après que j’ai rendu ma décision initiale;
  • quelque chose qui s’est passé avant que je rende ma décision initiale, mais que le prestataire n’aurait pas pu savoir même en faisant preuve de diligenceNote de bas de page 7.

[26] Dans sa demande, le prestataire ne parle pas de ce qui s’est passé après que j’ai rendu ma décision initiale. Je comprends qu’il dit qu’il conteste le refus de son employeur de lui fournir des mesures d’adaptation, mais cela ne s’est pas produit après que j’ai rendu ma décision initiale. Le prestataire a fourni à la Commission des éléments de preuve démontrant qu’il contestait le refus de son employeur de lui offrir des mesures d’adaptation. Il a également parlé du litige pendant l’audience. Il ne s’agit donc pas d’un fait nouveau.

[27] De plus, les arguments du prestataire au sujet de la jurisprudence ne sont pas des faits nouveaux. En effet, des arguments nouveaux ou plus détaillés ne sont pas des faits nouveaux.

[28] Je conclus donc que le prestataire n’a pas prouvé qu’il y avait des faits nouveaux.

Le prestataire a-t-il démontré que j’ai rendu la décision initiale sans connaître un fait essentiel, ou que j’ai commis une erreur relative à un fait essentiel?

[29] Même si je conclus qu’il n’y a pas de faits nouveaux, le prestataire peut quand même me demander de réexaminer et de modifier la décision s’il peut démontrer que la deuxième condition existe. Le prestataire doit démontrer que j’ai rendu la décision initiale sans connaître un fait essentiel, ou que j’ai commis une erreur relative à un fait essentiel.

[30] Le prestataire soutient que j’ai commis des erreurs au sujet de faits essentiels. Il explique pourquoi il pense que la jurisprudence sur laquelle je me suis fondée pour rendre ma décision n’est pas pertinente à sa situation. Il présente des arguments plus détaillés au sujet d’une décision du Tribunal qui, selon lui, porte sur une situation semblable à la sienne. Il explique pourquoi il pense qu’il devrait recevoir des prestations pendant que son différend avec son employeur concernant sa demande de mesures d’adaptation suit le processus de règlement des griefs.

[31] Je ne suis pas d’accord avec le prestataire. Je ne crois pas que les renseignements figurant dans sa demande portent sur des faits essentiels.

[32] Le prestataire ne m’a pas donné de nouveaux renseignements sur les faits de base sur lesquels je me suis fondée lorsque j’ai rendu ma décision initiale. Il n’a pas expliqué comment j’ai commis une erreur au sujet de ces faits ni démontré que j’ai rendu ma décision sans connaître un fait essentiel qui pourrait changer la façon dont j’ai examiné les faits de base.

[33] Les nouveaux arguments concernant la jurisprudence ne sont pas des faits essentiels. En fait, il ne s’agit pas de faits, mais bien d’arguments. Bref, le prestataire utilise sa demande pour réexaminer et modifier la décision pour expliquer pourquoi il pense que j’ai commis une erreur lorsque j’ai appliqué la loi aux faits de son affaire.

[34] Cependant, si le prestataire a un argument concernant la façon dont il pense que j’ai commis une erreur en appliquant la loi, il est préférable de porter ma décision en appel à la division d’appel du Tribunal. En effet, l’un des rôles de la division d’appel est d’examiner ma décision initiale pour déceler ce genre d’erreurs.

[35] Je ne crois donc pas que le prestataire a démontré que j’ai rendu ma décision initiale sans connaître un fait essentiel. Il n’a pas démontré que j’ai fondé ma décision initiale sur une erreur relative à un fait essentiel.

Puis-je réexaminer et modifier ma décision initiale?

[36] Je ne peux pas réexaminer et modifier ma décision initiale. Le prestataire n’a pas prouvé que l’une ou l’autre des deux conditions essentielles pour ce faire existe dans son cas. Je conclus qu’il n’a pas prouvé qu’il y a des faits nouveaux et qu’il n’a pas démontré que j’ai fondé ma décision initiale sur une erreur relative à un fait essentiel. Enfin, il n’a pas prouvé que j’ai rendu ma décision initiale sans connaître un fait essentiel.

Conclusion

[37] Je rejette la demande de réexamen et de modification de la décision initiale du prestataire. Par conséquent, ma décision initiale demeurera en vigueur.

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