Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : RL c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 471

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : R. L.
Représentante : C. A.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de révision (489253) rendue le 8 juillet 2022 par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Gerry McCarthy
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 17 janvier 2023
Personne présente à l’audience : Appelante (prestataire)
Date de la décision : Le 18 janvier 2023
Numéro de dossier : GE-22-3083

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Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a prouvé que la prestataire a été suspendue et qu’elle a perdu son emploi en raison d’une inconduite (autrement dit, parce qu’elle a fait quelque chose qui a entraîné la suspension et la perte de son emploi). Par conséquent, la prestataire n’est pas admissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi du 20 septembre 2021 au 13 octobre 2021 et elle est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi à partir du 10 octobre 2021Note de bas de page 1.

Aperçu

[3] La prestataire travaillait comme préposée aux bénéficiaires. Le 13 septembre 2021, elle a été placée en congé sans solde par son employeuse. Le 14 octobre 2021, elle a été congédiée. Son employeuse (X) a expliqué que la prestataire avait été placée en congé sans solde, puis renvoyée parce qu’elle ne s’était pas conformée à sa politique de vaccination obligatoire.

[4] La Commission a accepté la raison donnée par l’employeuse pour expliquer le congé sans solde de la prestataire et son renvoi. Elle a conclu que la prestataire avait été suspendue et avait perdu son emploi en raison d’une inconduite. Pour cette raison, elle a décidé que la prestataire n’était pas admissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi du 20 septembre 2021 au 13 octobre 2021 et qu’elle était exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi à compter du 10 octobre 2021.

[5] Selon la Commission, la prestataire savait que le non-respect de la politique de vaccination de l’employeuse pouvait avoir de graves conséquences de nature disciplinaire.

[6] Selon la prestataire, à la suite d’une entente de règlement, l’employeuse a modifié son relevé d’emploi et indiqué qu’il s’agissait d’une mise à pied. La prestataire ajoute que le refus de la Commission de lui verser des prestations était discriminatoire.

Questions que je dois examiner en premier

La personne qui représentait la prestataire n’était pas présente à l’audience

[7] Avant l’audience, la prestataire a expliqué que sa représentante n’assisterait pas à l’audience. La prestataire a dit qu’elle voulait que l’audience se déroule sans elle. Sur l’enregistrement de l’audience, elle a ensuite confirmé qu’elle souhaitait poursuivre en l’absence de sa représentante. L’audience a donc eu lieu, mais sans la représentante de la prestataire.

Question en litige

[8] La prestataire a‑t-elle été suspendue, puis congédiée en raison d’une inconduite?

Analyse

[9] Pour savoir si la prestataire a été suspendue et si elle a perdu son emploi en raison d’une inconduite, je dois décider deux choses. D’abord, je dois décider pour quelle raison elle a été suspendue puis renvoyée. Ensuite, je dois voir si la loi considère cette raison comme une inconduite.

Pourquoi la prestataire a‑t-elle été suspendue et congédiée?

[10] Je conclus que la prestataire a été suspendue et qu’elle a perdu son emploi parce qu’elle ne s’est pas conformée à la politique de vaccination de l’employeuse.

[11] Selon la Commission, la raison fournie par l’employeuse est la raison de la suspension et du congédiement de la prestataire. L’employeuse a dit à la Commission que la prestataire avait été placée en congé sans solde, puis congédiée parce qu’elle n’avait pas respecté sa politique de vaccination obligatoire.

[12] La prestataire affirme qu’en février 2022, l’employeuse a modifié son relevé d’emploi pour indiquer qu’elle avait été mise à pied.

[13] Je juge que la prestataire a été suspendue et congédiée parce qu’elle n’a pas respecté la politique de vaccination de l’employeuse. Je comprends que, comme la prestataire l’a expliqué, son relevé d’emploi a été modifié pour indiquer qu’elle a été mise à pied. Toutefois, le 14 octobre 2021, la raison pour laquelle la prestataire avait été mise en congé sans solde puis congédiée était qu’elle ne s’était pas conformée à la politique de vaccination de l’employeuse. Je suis d’accord avec la Commission sur ce point : la démarche du syndicat de la prestataire (qui a entraîné la modification du relevé d’emploi) ne m’oblige à rien.

La raison de la suspension et du congédiement est‑elle une inconduite au sens de la loi?

[14] La raison pour laquelle la prestataire a été suspendue et congédiée est effectivement une inconduite au sens de la loi.

[15] Pour qu’il y ait inconduite au sens de la loi, il faut que la conduite soit délibérée. En d’autres termes, elle doit être consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas de page 2. L’inconduite comprend aussi une conduite qui est si insouciante qu’elle est presque délibéréeNote de bas de page 3. Il n’est cependant pas nécessaire que la prestataire ait eu une intention coupable (c’est-à‑dire qu’elle ait voulu faire quelque chose de mal) pour que son comportement soit une inconduite au sens de la loiNote de bas de page 4.

[16] Il y a inconduite si la prestataire savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait l’empêcher de remplir ses obligations envers son employeuse et que la possibilité d’être suspendue et congédiée pour cette raison était bien réelleNote de bas de page 5.

[17] La Commission doit prouver que la prestataire a été suspendue et qu’elle a perdu son emploi en raison d’une inconduite. Elle doit en faire la preuve selon la prépondérance des probabilités. Cela veut dire qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable (il y a plus de chances) que la prestataire a été suspendue et congédiée en raison d’une inconduiteNote de bas de page 6.

[18] La Commission affirme qu’il y a eu inconduite parce que la prestataire savait que le refus de se conformer à la politique de vaccination de l’employeuse pouvait entraîner de graves conséquences de nature disciplinaire.

[19] La prestataire affirme qu’il n’y a pas eu d’inconduite parce qu’après l’entente de règlement, l’employeuse a modifié son relevé d’emploi pour indiquer qu’il y avait eu mise à pied. La prestataire ajoute que des collègues qui étaient dans la même situation qu’elle ont reçu des prestations d’assurance-emploi.

[20] Je conclus que la Commission a prouvé qu’il y a eu inconduite, car elle a démontré que la prestataire savait que l’employeuse avait une politique de vaccination et connaissait les conséquences du non-respect de la politique (voir la page GD3‑43 du dossier d’appel). De plus, la Commission a présenté une copie de la politique de vaccination, qui mentionnait que le non-respect de la politique entraînerait un congé sans solde ou un congédiement (voir la page GD3‑48). Je réalise que la prestataire a soutenu que refuser de ne pas [sic] recevoir un vaccin expérimental n’était pas une inconduite. Toutefois, je dois appliquer le critère juridique de l’inconduite tel qu’il a été établi par la jurisprudence. Autrement dit, je ne peux pas ignorer la loi, même quand les circonstances inspirent la plus grande sympathieNote de bas de page 7.

Autres déclarations faites par la prestataire

[21] Je sais que la prestataire a dit durant son témoignage que son syndicat avait conclu une entente de règlement avec l’employeuse et que son relevé d’emploi avait été modifié pour parler de mise à pied. Mais je suis d’accord avec la Commission sur un point : ce n’est pas la conclusion d’un règlement qui permet de savoir si la prestataire a été suspendue puis congédiée pour inconduite. Je suis aussi d’accord avec la Commission sur un autre point : l’énoncé précédent est particulièrement vrai quand il y a assez d’éléments de preuve documentaires pour justifier une conclusion d’inconduiteNote de bas de page 8.

[22] De plus, je reconnais que la prestataire n’était pas d’accord avec l’observation de la Commission voulant qu’il y aurait eu du travail pour elle en septembre 2021 si elle s’était fait vacciner. Malgré cela, je suis d’accord avec la Commission à ce sujet parce qu’elle a appuyé sa position par deux déclarations directes de l’employeuse. Elles figurent dans le dossier d’appel. Dans la première, l’employeuse (X) a dit à la Commission qu’il y avait assez de travail, mais qu’elle ne pouvait pas en offrir à la prestataire parce que celle‑ci n’était pas vaccinée (voir la page GD3‑33). Dans la deuxième, l’employeuse (X) a dit à la Commission qu’il y avait du travail à faire et que la prestataire aurait travaillé si elle avait respecté la politique de vaccination (voir la page GD3‑45).

[23] Je reconnais aussi que la prestataire a avancé qu’elle devrait remplir les conditions requises pour recevoir des prestations d’assurance-emploi parce que ses collègues qui étaient dans la même situation qu’elle les remplissaient. Je ne peux cependant pas m’exprimer sur d’autres affaires, car il se pourrait que les circonstances soient différentes sans que je le sache.

[24] La prestataire a aussi mentionné en référence une décision de la division générale du Tribunal de la sécurité sociale. Elle a expliqué que cette décision a annulé une conclusion d’inconduite tirée par la Commission dans un appel portant sur la vaccination. Toutefois, les décisions de la division générale ne sont pas des précédents juridiques et, par conséquent, je n’ai pas l’obligation de les suivre.

[25] Enfin, la prestataire a soutenu que le refus de recevoir un vaccin expérimental n’était pas une inconduite. Toutefois, la question de savoir si la politique de vaccination de l’employeuse était juste ou raisonnable dépassait ma compétence. Bref, la prestataire avait d’autres voies de recours pour faire valoir ces argumentsNote de bas de page 9.

Somme toute, la prestataire a‑t-elle été suspendue et congédiée en raison d’une inconduite?

[26] D’après les conclusions que je viens de tirer, je juge que la prestataire a été suspendue et qu’elle a perdu son emploi en raison d’une inconduite.

Conclusion

[27] La Commission a prouvé que la prestataire a été suspendue et qu’elle a perdu son emploi en raison d’une inconduite. En conséquence, la prestataire n’était pas admissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi du 20 septembre 2021 au 13 octobre 2021 et elle est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi à compter du 10 octobre 2021.

[28] L’appel est donc rejeté.

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