Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : GS c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 531

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à la permission de faire
appel

Partie demanderesse : G. S.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision rendue par la division générale le 25 janvier 2023 (GE-22-3109)

Membre du Tribunal : Pierre Lafontaine
Date de la décision : Le 28 avril 2023
Numéro de dossier : AD-23-236

Sur cette page

Décision

[1] La permission de faire appel est refusée. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] Le demandeur (prestataire) a perdu son emploi parce qu’il n’a pas respecté les politiques de vaccination obligatoire des clients de l’employeur. On ne lui a pas accordé d’exemption. Le prestataire a ensuite demandé des prestations régulières d’assurance-emploi.

[3] La défenderesse (Commission) a conclu que le prestataire avait perdu son emploi en raison d’une inconduite et qu’elle ne pouvait donc pas lui verser de prestations. Après une révision infructueuse, le prestataire a fait appel à la division générale.

[4] La division générale a conclu que le prestataire avait perdu son emploi après avoir refusé de se conformer aux politiques de vaccination obligatoire des clients de l’employeur. Elle a conclu que le prestataire savait que l’employeur était susceptible de le congédier dans ces circonstances. La division générale a conclu que le prestataire avait été congédié en raison d’une inconduite.

[5] Le prestataire demande la permission de faire appel de la décision de la division générale auprès de la division d’appel.Le prestataire soutient qu’il avait le droit légal de refuser la vaccination. Il n’est pas un criminel. Il n’a pas enfreint la loi. Il soutient que sa décision de ne pas accepter un vaccin expérimental n’est pas une conduite inappropriée ou indésirable qui mérite une sanction et une exclusion du bénéfice des prestations d’assurance-emploi. Le prestataire soutient qu’il n’a jamais reçu de réprimande concernant sa conduite ni de plainte concernant son rendement.

[6] Je dois décider si le prestataire a soulevé une erreur révisable que la division générale aurait commise qui pourrait conférer à l’appel une chance de succès.

[7] Je refuse la permission de faire appel parce que l’appel du prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Question en litige

[8] Le prestataire soulève-t-il une erreur révisable que la division générale aurait commise qui pourrait conférer à l’appel une chance de succès? 

Analyse

[9] L’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social prévoit les seuls moyens d’appel d’une décision de la division générale. Ces erreurs révisables sont les suivantes :

  1. Le processus d’audience de la division générale n’était pas équitable d’une façon ou d’une autre.
  2. La division générale n’a pas tranché une question qu’elle aurait dû trancher. Ou bien, elle a tranché une question sans avoir le pouvoir de le faire.
  3. La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.
  4. La division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droit.

[10] La demande de permission de faire appel est une étape préliminaire à une audience sur le fond. Il s’agit d’une première étape que le prestataire doit franchir, mais où le fardeau est inférieur à celui dont il devra s’acquitter à l’audience de l’appel sur le fond. À l’étape de la demande permission de faire appel, le prestataire n’a pas à prouver ses prétentions. Il doit plutôt établir que l’appel a une chance raisonnable de succès en raison d’une erreur révisable. Autrement dit, on peut soutenir qu’il y a eu erreur révisable qui pourrait conférer à l’appel une chance de succès.

[11] Par conséquent, avant d’accorder la permission de faire appel, je dois être convaincu que les motifs de l’appel correspondent à l’un ou l’autre des moyens d’appel susmentionnés et qu’au moins un des motifs a une chance raisonnable de succès. 

Le prestataire soulève-t-il une erreur révisable que la division générale aurait commise qui pourrait conférer à l’appel une chance de succès?

[12] Le prestataire soutient qu’il avait le droit légal de refuser la vaccination. Il n’est pas un criminel. Il n’a pas enfreint la loi. Il soutient que sa décision de ne pas accepter un vaccin expérimental n’est pas une conduite inappropriée ou indésirable qui mérite une sanction et une exclusion du bénéfice des prestations d’assurance-emploi. Le prestataire soutient qu’il n’a jamais reçu de réprimande concernant sa conduite ni de plainte concernant son rendement.

[13] La division générale devait décider si le prestataire avait perdu son emploi en raison d’une inconduite.

[14] La notion d’inconduite n’implique pas qu’il est nécessaire que le comportement reproché résulte d’une intention coupable; il suffit que l’inconduite soit consciente, voulue ou intentionnelle. Autrement dit, pour constituer une inconduite, l’acte reproché doit avoir été volontaire ou du moins d’une telle insouciance ou négligence que l’on pourrait dire que l’employé a volontairement décidé de ne pas tenir compte des répercussions que ses actes auraient sur son rendement.

[15] Le rôle de la division générale n’est pas de juger de la sévérité de la sanction de l’employeur ni de savoir si l’employeur s’est rendu coupable d’inconduite en congédiant le prestataire de telle sorte que son congédiement était injustifié. Son rôle est plutôt de décider si le prestataire s’est rendu coupable d’inconduite et si celle-ci a entraîné son congédiement. Note de bas de page 1

[16] À la lumière de la preuve, la division générale a conclu que le prestataire avait été congédié parce qu’il avait refusé de se conformer aux politiques de vaccination obligatoire des clients de l’employeur. Il avait été informé de leurs politiques et avait eu le temps de s’y conformer. On ne lui a pas accordé d’exemption. Le prestataire a refusé intentionnellement, ce qui était délibéré. Il s’agissait de la cause directe de son congédiement.

[17] La division générale a conclu que le prestataire savait que son refus de se conformer aux politiques pouvait entraîner son congédiement.

[18] La division générale a conclu à partir de la preuve prépondérante que le comportement du prestataire constituait une inconduite.

[19] Il est bien établi qu’une violation délibérée de la politique de l’employeur est considérée comme une inconduite aux termes de la Loi sur l’assurance-emploi.Note de bas de page 2 On considère également comme une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi le fait de ne pas observer une politique dûment approuvée par un gouvernement ou une entreprise.Note de bas de page 3

[20] La division générale n’a pas compétence pour trancher les questions concernant l’efficacité du vaccin ou le caractère raisonnable des politiques des clients.

[21] La question de savoir si l’employeur a porté atteinte à ses droits humains et constitutionnels relève d’une autre instance. Le Tribunal n’est pas l’instance par laquelle le prestataire peut obtenir le redressement qu’il recherche.Note de bas de page 4

[22] La Cour fédérale a rendu récemment une décision dans l’affaire Cecchetto concernant l’inconduite et le refus d’une partie prestataire de suivre la politique de vaccination contre la COVID-19 de l’employeur. Le prestataire a fait valoir que le refus de se conformer à une politique de vaccination imposée unilatéralement par un employeur n’est pas une inconduite. Il a fait valoir que rien ne prouvait que le vaccin était sûr et efficace. Le prestataire estimait qu’il faisait l’objet de discrimination en raison de son choix médical personnel. Le prestataire a affirmé qu’il avait le droit de préserver son intégrité physique et que ses droits avaient été violés selon la loi canadienne et internationale.Note de bas de page 5

[23] La Cour fédérale a confirmé la décision de la division d’appel selon laquelle le Tribunal n’est pas légalement autorisé à traiter ce genre de questions. La Cour a convenu qu’en faisant un choix personnel et délibéré de ne pas suivre la politique de vaccination de l’employeur, le prestataire avait manqué à ses obligations envers l’employeur et avait perdu son emploi en raison d’une inconduite aux termes de la Loi sur l’assurance-emploi.Note de bas de page 6 La Cour a précisé qu’il existe d’autres façons de faire avancer adéquatement les revendications du prestataire dans le cadre du système juridique.

[24] Dans l’affaire Paradis qui a été tranchée auparavant, le prestataire s’est vu refuser des prestations d’assurance-emploi en raison d’une inconduite. Il a soutenu qu’il n’y avait pas eu d’inconduite parce que la politique de son employeur violait ses droits garantis par l’Alberta Human Rights Act. La Cour fédérale a établi que cette question relevait d’une autre instance.

[25] La Cour fédérale a déclaré qu’il existe d’autres moyens de sanctionner le comportement d’un employeur, qui permettent d’éviter que le programme d’assurance-emploi fasse les frais du comportement incriminé.

[26] Comme je l’ai mentionné plus haut, le rôle de la division générale n’est pas de décider si l’employeur s’est rendu coupable d’inconduite en congédiant le prestataire de sorte que son congédiement était injustifié. Son rôle s’agit plutôt de décider si le prestataire s’est rendu coupable d’inconduite et si celle-ci a entraîné son congédiement.

[27] La preuve prépondérante dont disposait la division générale montre que le prestataire a fait un choix personnel et délibéré de ne pas suivre les politiques de vaccination obligatoire des clients de l’employeur en réponse aux circonstances exceptionnelles créées par la pandémie. C’est ce qui a entraîné son congédiement.

[28] La division générale ne semble avoir commis aucune erreur révisable lorsqu’elle a tranché la question de l’inconduite uniquement d’après les paramètres établis par la Cour d’appel fédérale, qui a défini l’inconduite conformément à la Loi sur l’assurance-emploi.Note de bas de page 7

[29] Je suis pleinement conscient que le prestataire peut demander réparation devant une autre instance si une violation est établie. Cela ne change rien au fait qu’aux termes de la Loi sur l’assurance-emploi, la Commission a prouvé selon la prépondérance des probabilités que le prestataire a été congédié en raison d’une inconduite.

[30] Après avoir examiné le dossier d’appel, la décision de la division générale et les arguments du prestataire à l’appui de sa demande de permission de faire appel, je conclus que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[31] La permission de faire appel est refusée. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.