Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : VT c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 492

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : V. T.
Représentante ou représentant/témoin : M. P.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (468062) datée du 4 mai 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Linda Bell
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience  : Le 26 janvier 2023
Personnes présentes à l’audience : Appelante
Représentante/témoin de l’appelante
Interprète
Date de la décision : Le 30 janvier 2023
Numéro de dossier : GE-22-2372

Sur cette page

Décision

[1] J’accueille l’appel en partie.

[2] V. T. est l’appelante. Dans la présente décision, je ferai référence à elle en tant que prestataire.

[3] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a prouvé que la prestataire a été congédiée en raison d’une inconduite (autrement dit, parce qu’elle a fait quelque chose qui a entraîné son congédiement). Par conséquent, la prestataire est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi pour cette raisonNote de bas page 1.

[4] La prestataire répond aux exigences de disponibilité lui permettant de recevoir des prestations d’assurance-emploi du 15 novembre 2021 au 27 juin 2022. Par conséquent, elle n’est pas inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi avant le 28 juin 2022.

Aperçu

[5] La prestataire a été mise en congé sans solde (suspendue), puis congédiée de son emploi. L’employeur de la prestataire affirme qu’elle a été suspendue et congédiée parce qu’elle n’a pas respecté sa politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19. Elle a refusé de se faire vacciner. 

[6] La prestataire a demandé des prestations régulières d’assurance-emploi le 20 novembre 2021. Une période de prestations débutant le 14 novembre 2021 a été établie à son profit.

[7] La Commission a accepté la raison invoquée par l’employeur pour justifier la suspension et le congédiement. Elle a décidé que la prestataire avait été suspendue et congédiée en raison d’une inconduite. C’est pourquoi la Commission a décidé que la prestataire était exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi à compter du 14 novembre 2021Note de bas page 2.

[8] La Commission a également décidé que la prestataire ne satisfaisait pas aux exigences de disponibilité lui permettant de recevoir des prestations d’assurance-emploi. Pour cette raison, elle a décidé que la prestataire était inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi pour une période indéterminée, à compter du 15 novembre 2021Note de bas page 3.

[9] Même si la prestataire ne conteste pas ce qui s’est passé, elle affirme que ses gestes n’étaient pas de l’inconduite. Elle affirme aussi qu’elle est disponible pour travailler et qu’elle cherche activement un emploi depuis qu’elle a perdu son emploi. Elle dit que l’anglais est sa deuxième langue et qu’il y a donc eu des malentendus pendant ses conversations avec la Commission.

Questions que je dois examiner en premier

Partie mise en cause potentielle

[10] Parfois, le Tribunal envoie une lettre à l’ancien employeur de la partie prestataire pour lui demander s’il veut être mis en cause dans l’appel. Pour être mis en cause, l’employeur doit avoir un intérêt direct dans l’appel. J’ai décidé de ne pas mettre l’employeur en cause dans le présent appel. En effet, rien dans le dossier n’indique que ma décision lui imposerait des obligations juridiques.

Ajournement

[11] L’audience devait initialement avoir lieu le 6 décembre 2022. Mais il y a eu des problèmes logistiques. Le Tribunal a donc reporté l’audience au 26 janvier 2023.

Services d’interprétation

[12] Dans ses documents d’appel, la prestataire a indiqué qu’elle n’était pas à l’aise de s’exprimer en français ou en anglais à l’audience. Elle a demandé les services d’un interprète roumain. Le Tribunal a pris des dispositions pour qu’un interprète assiste à l’audience et fournisse des services d’interprétation à la prestataire.

[13] Pendant l’audience, la prestataire a présenté sa preuve avec l’aide de l’interprète. Elle a déclaré que l’anglais était sa langue seconde depuis qu’elle est arrivée au Canada en 2001. Elle a dit que sa compréhension de l’anglais était de [traduction] « niveau 4 ». Elle a expliqué que cela voulait dire qu’elle comprenait la plupart de ce qui était dit en anglais, et qu’elle pouvait aussi comprendre la majeure partie de ce qu’elle lisait en anglais, mais pas tout.

[14] Je suis d’avis que la prestataire a bien compris ce qui a été dit en anglais pendant l’audience. Elle répondait à ce que je disais en anglais à l’audience. À plusieurs reprises, elle a répondu à mes questions en anglais avant que l’interprète les traduise en roumain. Je suis donc convaincue qu’elle a la capacité de demander des éclaircissements si elle ne comprend pas quelque chose qu’on lui dit en anglais.

[15] La représentante/témoin de la prestataire dit qu’elle parle roumain et anglais. Elle a indiqué qu’elle comprenait parfaitement l’anglais. Elle souhaitait parler en anglais pendant l’audience. Elle a dit qu’elle expliquerait tout à la prestataire après l’audience. La prestataire a dit qu’elle était d’accord pour que sa représentante/témoin procède en anglais.

[16] Ainsi, lorsque la prestataire s’exprimait en roumain, l’interprète traduisait ce qu’elle disait en anglais. Puis, il traduisait tout ce que je disais directement à la prestataire, de l’anglais au roumain. La représentante/témoin n’a soulevé aucune objection à l’égard des traductions faites par l’interprète. Elle a présenté des éléments de preuve et des arguments en anglais. Je conclus donc que la prestataire a eu une occasion pleine et équitable de se faire entendre.

Questions en litige

[17] La Commission a-t-elle démontré que la prestataire a été congédiée en raison d’une inconduite?

[18] La prestataire a-t-elle démontré qu’elle répond aux exigences de disponibilité lui permettant de recevoir des prestations régulières d’assurance-emploi?

Analyse

Inconduite

[19] La loi prévoit qu’une partie prestataire ne peut pas obtenir des prestations d’assurance-emploi si elle perd son emploi en raison d’une inconduite. Cela s’applique si son employeur l’a congédiée ou suspendueNote de bas page 4.

[20] Pour décider si la prestataire a été congédiée en raison d’une inconduite, je dois examiner deux choses. D’abord, je dois décider pour quelle raison la prestataire a été congédiée. Ensuite, je dois décider si la loi considère cette raison comme une inconduite.

Pourquoi la prestataire a-t-elle perdu son emploi?

[21] Les deux parties conviennent que la prestataire a été mise en congé sans solde (suspendue), puis congédiée parce qu’elle a refusé de se faire vacciner dans les délais fixés par l’employeur, conformément à l’ordonnance provinciale sur la santé.

[22] Il n’y a rien dans le dossier qui me porte à croire le contraire. Je conclus donc que la prestataire a été suspendue, puis congédiée parce qu’elle a refusé de se faire vacciner contre la COVID-19.

La Commission a-t-elle démontré que la raison du congédiement de la prestataire était une inconduite au sens de la loi?

[23] Oui. J’estime que la Commission a prouvé qu’il y a eu inconduite. Voici ce dont j’ai tenu compte.

[24] Pour qu’il y ait inconduite, la conduite doit être délibérée. Cela signifie qu’elle est consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas page 5. Une inconduite comprend aussi une conduite qui est si insouciante qu’elle est presque délibéréeNote de bas page 6.

[25] Pour qu’il y ait inconduite au sens de la loi, il n’est pas nécessaire que la prestataire ait eu une intention coupable (c’est-à-dire qu’elle ait voulu faire quelque chose de mal)Note de bas page 7.

[26] Il y a inconduite si la prestataire savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait l’empêcher de remplir ses obligations envers son employeur et qu’il était réellement possible qu’elle soit congédiée pour cette raisonNote de bas page 8.

[27] La Commission doit prouver que la prestataire a perdu son emploi en raison de son inconduite. Elle doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que la prestataire a perdu son emploi en raison de son inconduiteNote de bas page 9.

[28] La Commission affirme qu’il y a eu inconduite parce que l’employeur de la prestataire l’a informée qu’elle devait se faire vacciner dans un délai établi en fonction de l’ordonnance provincial sur la santé. La Commission dit que la prestataire a été informée des conséquences. Plus précisément, on lui a dit qu’elle serait mise en congé sans solde (suspendue) à compter du 12 octobre 2021, puis congédiée à compter du 26 octobre 2021 si elle ne recevait pas la première dose du vaccin. Elle a été avisée, donc ses gestes étaient volontaires et délibérés lorsqu’elle a refusé de se faire vacciner, ce qui prouve qu’il y a eu inconduite.

[29] Je reconnais que la Commission a fourni des documents dans lesquels elle a consigné ses conversations téléphoniques avec la prestataireNote de bas page 10. Dans ces documents, la Commission a écrit que la prestataire avait dit qu’elle avait été informée à plusieurs reprises de la mise en œuvre d’une nouvelle politique exigeant que le personnel soit vacciné. Elle a demandé une exemption pour motif religieux, mais celle-ci a été refusée. Elle savait qu’elle devait être vaccinée au plus tard le 12 octobre pour pouvoir travailler avec les personnes âgées. Rien n’indique que la prestataire a informé la Commission qu’elle avait de la difficulté à comprendre les questions de l’agent ou ce qui se disait pendant ces conversations.

[30] La prestataire conteste avoir été informée des conséquences ou du fait qu’elle serait congédiée. Elle reconnait que l’employeur lui a remis des lettres indiquant qu’il était obligatoire de se faire vacciner. Mais elle affirme qu’on lui a aussi dit qu’elle pouvait demander une exemption pour motif religieux, ce qu’elle a fait. Elle a fait valoir qu’elle ne savait pas qu’elle serait congédiée ou, du moins, elle ne connaissait pas toutes les conséquences de ses gestes parce que l’employeur ne lui a jamais remis une copie de la politique.

[31] La prestataire affirme avoir soumis une lettre de son pasteur le 10 septembre 2021 pour demander une exemption pour motif religieux. L’employeur l’a mise en congé sans solde (suspendue) à compter du 12 octobre 2021. Puis, lors d’une conversation téléphonique le 26 octobre 2021, l’employeur lui a dit qu’elle serait congédiée avec effet immédiat.

[32] La représentante/témoin a soutenu que l’employeur n’avait pas informé la prestataire qu’elle serait congédiée si elle n’était pas vaccinée. En effet, elle affirme que la prestataire n’a pas reçu de copie de la politique.

[33] De plus, la représentante/témoin a déclaré que même si la prestataire peut lire un peu l’anglais, elle ne comprend pas bien l’anglais, surtout si c’est écrit en langage juridique. Cela est appuyé par le fait que quelqu’un l’a aidée à remplir sa demande de prestations d’assurance-emploi.

[34] J’estime que la prestataire a été avisée des conséquences qu’entraînerait le fait de ne pas se faire vacciner. Les deux parties ont déposé une copie de la lettre du 7 octobre 2021 émise par l’employeur. Voici ce que dit cette lettre, en partie :

  • Toute personne qui n’aura pas reçu la première dose au plus tard le 11 octobre ne sera pas autorisée à travailler à partir du 12 octobre 2021. Elle sera mise en congé sans solde pendant deux semaines à compter du 12 octobre 2021. Si elle n’a toujours pas reçu la première dose après cette période, elle sera congédiée à compter du 26 octobre 2021.

[35] Personne ne conteste le fait que la prestataire était au courant de l’ordonnance provincial sur la santé exigeant que toutes les personnes travaillant dans des établissements de soins soient vaccinées contre la COVID-19. En effet, elle a présenté la lettre de son pasteur en tant que demande d’exemption de cette ordonnance pour motif religieux.

[36] Les parties conviennent que l’employeur a écrit à la prestataire le 7 octobre 2021 pour lui faire part des exigences et des échéances relatives à la vaccination contre la COVID-19. Elle a été mise en congé sans solde (suspendue) à compter du 12 octobre 2021, comme l’indique la lettre. Elle aurait donc dû savoir qu’elle serait congédiée si elle ne se conformait pas à la politique de vaccination au plus tard le 26 octobre 2021.

[37] Il est important de souligner qu’il ne relève pas de ma compétence de décider si l’employeur aurait dû exempter la prestataire de l’obligation de se faire vacciner contre la COVID-19 en raison de sa foi ou de ses croyances religieuses. C’est l’employeur qui devait rendre une telle décision. Je ne peux pas modifier cette décision.

[38] La loi ne dit pas que je dois tenir compte du comportement de l’employeurNote de bas page 11. Je dois plutôt me concentrer sur ce que la prestataire a fait ou n’a pas fait et sur la question de savoir si cela constitue une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas page 12.

[39] La Cour fédérale et la Cour d’appel fédérale ont toutes deux déclaré que la question de savoir si un employeur a omis de fournir à une personne à son emploi des mesures d’adaptation prévues dans les lois relatives aux droits de la personne n’est pas pertinente à la question de l’inconduite aux termes de la Loi sur l’assurance-emploi. En effet, ce n’est pas la conduite de l’employeur qui est en cause. Ces questions peuvent être traitées par d’autres instancesNote de bas page 13.

[40] Il est également important de savoir que la Cour fédérale a récemment rendu une décision dans une affaire concernant un professionnel de la santé qui a refusé de se faire vacciner, comme l’exigeait sa directive provinciale sur la santéNote de bas page 14. La Cour a confirmé que je ne peux pas décider si la prestataire avait d’autres options en vertu d’autres lois. Mon rôle n’est pas de décider si la prestataire a été suspendue et congédiée injustement ou si l’employeur aurait dû lui offrir des mesures d’adaptation raisonnablesNote de bas page 15. Je peux seulement évaluer une chose : si ce que la prestataire a fait ou n’a pas fait est une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi.

[41] Je reconnais que la prestataire a le droit de décider de se faire vacciner ou de divulguer son statut vaccinal. Cependant, la lettre de l’employeur datée du 7 octobre 2021 énonce clairement les conséquences de son refus de se conformer à l’ordonnance provincial sur la santé, qui dans la présente affaire était une suspension suivie d’un congédiement.

[42] Comme je l’ai mentionné plus haut, je conclus que la prestataire savait ou aurait dû savoir que son congédiement était une réelle possibilité si elle ne se faisait pas vacciner contre la COVID-19. Je ne suis pas convaincue que le fait d’avoir l’anglais comme deuxième langue a empêché la prestataire de connaître les conséquences de son choix de ne pas se faire vacciner contre la COVID-19. Je ne suis pas non plus convaincue que le fait de ne pas avoir reçu une copie de la politique de l’employeur l’a empêchée de comprendre les conséquences du non-respect de l’ordonnance provincial sur la santé. Elle était clairement au courant de l’ordonnance puisqu’elle a soumis la lettre de son pasteur en septembre 2021 en guise de demande d’exemption pour motif religieux. De plus, l’employeur a énoncé les exigences et les échéances dans sa lettre du 7 octobre 2021.

[43] Comme je l’ai mentionné plus haut, la prestataire a déclaré que ses capacités en anglais étaient de [traduction] « niveau 4 ». L’anglais est devenu sa deuxième langue depuis son arrivée au Canada en 2001, il y a près de 22 ans. Même si elle ne comprend peut-être pas tout ce qu’elle lit dans un document juridique, elle a certainement démontré la capacité de demander de l’aide lorsqu’il y a quelque chose qu’elle ne comprend pas.

[44] De plus, je ne suis pas convaincue que la prestataire n’ait pas compris ce qui a été dit pendant les conversations qu’elle a eues avec l’agent de la Commission. La Commission a fourni des copies du document intitulé Renseignements supplémentaires concernant la demande de prestations dans lequel l’agent a consigné les questions posées à la prestataire. Ces questions sont claires et concises. Les réponses de la prestataire, telles que documentées, étaient claires et pertinentes. Rien au dossier n’indique que les agentes et les agents de la Commission ont eu de la difficulté à communiquer avec la prestataire. Rien n’indique non plus que la prestataire a dit qu’elle avait de la difficulté à comprendre ces conversations.

[45] Après avoir examiné attentivement mes conclusions ci-dessus, je suis d’avis que la Commission a prouvé qu’il y a eu inconduite. En effet, le refus de la prestataire de se faire vacciner était délibéré ou intentionnel. Il y avait un lien de cause à effet entre son refus de se faire vacciner et sa suspension et son congédiement. Par conséquent, je conclus que la prestataire a été suspendue puis congédiée en raison d’une inconduite.

[46] La période de prestations de la prestataire commençait le 14 novembre 2021. Par conséquent, la prestataire est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi à compter du 14 novembre 2021, parce qu’elle a été congédiée en raison d’une inconduite.

Disponibilité

[47] Je conclus que la prestataire répond aux exigences de disponibilité lui permettant de recevoir des prestations d’assurance-emploi à compter du 25 mars 2022.

[48] Différents articles de loi exigent que la partie prestataire démontre qu’elle est disponible pour travaillerNote de bas page 16. La Commission affirme que la prestataire était inadmissible selon deux articles de loi parce qu’elle n’a pas démontré qu’elle était capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenable.

[49] J’ai établi que la prestataire n’est pas inadmissible au titre de l’article 50(8) de la Loi sur l’assurance-emploi. En effet, la prestataire affirme que la Commission ne lui a jamais demandé de soumettre un dossier de recherche d’emploi détaillé pour prouver sa disponibilité. La Commission ne lui a pas non plus expliqué quels renseignements son dossier de recherche d’emploi devait contenir. Il n’y a rien dans le dossier d’appel qui montre le contraire. Je conclus donc que la prestataire n’est pas inadmissible au titre de l’article 50(8) de la Loi sur l’assurance-emploi.

[50] Pour décider si la prestataire était disponible au titre de l’article 18(1)(a) de la Loi sur l’assurance-emploi, je dois examiner si elle a démontré qu’elle était capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenableNote de bas page 17. Pour démontrer qu’elle était disponible au titre de cet article, la prestataire doit prouver les trois éléments suivants :

  1. a) qu’elle voulait retourner sur le marché du travail aussitôt qu’un emploi convenable lui serait offert;
  2. b) qu’elle a exprimé ce désir en déployant des efforts pour trouver un emploi convenable;
  3. c) qu’aucune condition personnelle pouvant limiter indûment ses chances de retourner sur le marché du travail n’a été établieNote de bas page 18.

[51] La Commission affirme que la prestataire lui a dit qu’elle n’avait postulé pour aucun emploi. Elle n’a pas cherché du travail parce qu’elle a besoin d’être vaccinée pour pouvoir reprendre son emploi ou pour travailler dans les hôpitaux. La Commission soutient que même les déclarations de la prestataire montrent qu’elle n’a pas prouvé qu’elle était disponible pour travailler.

[52] La prestataire conteste les arguments de la Commission. Elle dit que la Commission n’a pas compris ce qu’elle disait et qu’elle n’a donc pas consigné correctement leurs conversations. Elle a soutenu que la Commission n’a pas tenu compte du fait que l’anglais est sa deuxième langue et que, par conséquent, la Commission ne lui a pas donné la chance de bien comprendre ses questions ou de bien expliquer sa situation.

Désir de retourner travailler

[53] Je juge que la prestataire a manifesté le désir de retourner travailler. Elle a déclaré qu’elle voulait travailler parce qu’elle avait besoin d’argent pour subvenir à ses besoins. La Commission a noté que la prestataire lui avait dit qu’elle était disponible pour travailler à tout moment. Je conclus donc qu’elle répond à ce critère.

Démarches pour trouver un emploi convenable

[54] Je juge que la prestataire a démontré qu’elle a fait des démarches suffisantes pour trouver un emploi convenable à compter du 4 mai 2022. C’est la date à laquelle la Commission l’a informée qu’elle maintenait sa décision selon laquelle elle ne pouvait pas lui verser de prestations d’assurance-emploi parce qu’elle limitait sa disponibilité. Voici ce dont j’ai tenu compte.

[55] Le Règlement sur l’assurance-emploi dresse la liste de neuf activités de recherche d’emploi dont je dois tenir compte. Voici quelques exemples de ces activités :

  • faire du réseautage;
  • effectuer une recherche d’emploi en ligne;
  • mettre son curriculum vitae à jour;
  • postuler pour un emploiNote de bas page 19.

[56] Je reconnais qu’il n’existe pas de formule permettant de déterminer la période raisonnable à allouer à une partie prestataire pour qu’elle explore ses possibilités d’emploi. Cela signifie que je dois examiner les circonstances particulières de chaque casNote de bas page 20.

[57] Dans la présente affaire, les effets économiques causés par la pandémie mondiale de COVID-19 et les ordonnances de santé publique dans la région de la prestataire sont deux circonstances dont il faut tenir compte pour déterminer la période raisonnable pour explorer les possibilités d’emploi convenables.

[58] J’ai également examiné les conséquences qu’il y a à avoir l’anglais comme langue seconde. Dans la présente affaire, je conclus que le fait d’avoir l’anglais comme deuxième langue n’a pas limité sa capacité à chercher et à obtenir un emploi convenable. Elle reconnait qu’elle a commencé à parler à des amis et à des membres de son église qui l’ont aidée à trouver du travail. Cela est confirmé par le fait qu’elle a été en mesure d’obtenir un emploi à temps plein chez X le 12 mai 2022.

[59] Je reconnais que la Commission a écrit que le 1er mars 2022, la prestataire a dit qu’elle n’avait pas encore essayé de postuler pour un emploi parce qu’elle ne savait pas où postuler. Elle a dit qu’elle aimerait reprendre son poste d’aide-diététicienne, mais qu’on lui avait dit qu’elle devait se faire vacciner pour retourner au travail.

[60] Au cours de leur conversation du 4 mai 2022, la Commission a noté que la prestataire avait dit qu’elle continuait de chercher du travail comme aide-diététicienne ou comme aide-ménagère, mais qu’elle devait se faire vacciner pour occuper ces types d’emplois. Elle a confirmé qu’elle n’avait pas cherché de travail dernièrement parce qu’elle n’était pas vaccinée et que personne ne l’embaucherait.

[61] J’estime qu’il est plus probable qu’improbable que la prestataire n’a pas commencé à chercher du travail avant le 4 mai 2022, date à laquelle la Commission lui a dit qu’elle maintenait sa décision selon laquelle la prestataire n’avait pas prouvé qu’elle était disponible. Je reconnais que la prestataire a déclaré à l’audience qu’elle avait fait des démarches pour trouver un emploi convenable après avoir appris qu’elle avait été congédiée. Plus précisément, elle a commencé à parler à des amis et à des personnes de son église pour trouver un autre emploi. Toutefois, la preuve appuie le fait qu’elle n’a pas commencé à chercher un autre emploi dès qu’elle a été congédiée. Sur la base des déclarations qu’elle a faites à la Commission le 1er mars 2022 et le 4 mai 2022, je conclus selon la prépondérance des probabilités qu’elle a plutôt commencé à chercher un autre emploi le 4 mai 2022, après sa dernière conversation avec la Commission.

[62] La prestataire a déclaré qu’elle n’avait pas de problème de santé ou d’obligation familiale qui l’empêchait de travailler. Elle a déjà travaillé au Canada comme aide-ménagère et aide-diététicienne. Elle a suivi avec succès un cours sur la salubrité des aliments. Elle dit qu’elle postulait pour tout emploi convenable en fonction de son expérience et de son éducation au Canada.

[63] Elle a expliqué en détail qu’elle était seule et qu’elle devait subvenir à ses besoins financiers. Elle avait donc besoin de travailler. Ses amis l’ont aidée à mettre son curriculum vitae à jour, lui ont envoyé des offres d’emploi auxquelles elle a postulé et ont fait du réseautage avec leur employeur. Elle postulait pour des emplois convenables en fonction de son expérience et de ses études.

[64] La prestataire affirme que ses efforts ont été couronnés de succès. Elle a commencé à travailler pour X le 12 mai 2022. Elle a travaillé pour cet employeur à temps plein, 40 heures par semaine, jusqu’au 3 juin 2022. Elle dit avoir quitté cet emploi parce que le trajet était trop compliqué. Comme elle ne conduit pas, elle devait prendre les transports en commun pour se rendre dans une ville voisine pour travailler là-bas. Elle devait faire trois heures de route pour se rendre au travail. Elle se levait donc à 4 h du matin pour se rendre au travail et ne rentrait chez elle qu’après 20 h tous les jours. Elle a démissionné et a continué de chercher un autre emploi plus près de chez elle.

[65] La prestataire a déclaré qu’elle a commencé à travailler dans une usine de transformation de la viande le 28 juin 2022. Elle travaille là à temps partiel et à temps plein. Elle a dit que son horaire varie. Elle travaille parfois à temps partiel, parfois à temps plein, et elle fait parfois des heures supplémentaires.

[66] La prestataire affirme avoir cessé de chercher un autre emploi après avoir commencé à travailler à l’usine de transformation de la viande. Elle dit qu’elle peut continuer à travailler à cet endroit et qu’elle est disponible chaque fois que son employeur l’appelle pour travailler.

[67] Après avoir examiné la preuve présentée ci-dessus, je conclus que du 4 mai 2022 au 27 juin 2022, les démarches de la prestataire étaient suffisantes pour satisfaire aux exigences de disponibilité liées à ce deuxième élément.

Conditions qui pourraient limiter indûment ses chances de retourner travailler

[68] Je conclus que du 4 mai 2022 au 27 juin 2022, la prestataire n’a pas établi de conditions qui limiteraient indûment ses chances de retourner travailler.

[69] La Commission affirme que le fait de ne pas se faire vacciner est une condition qui limite indûment les chances de la prestataire de retourner travailler chez son ancien employeur.

[70] La prestataire a dit qu’elle sait maintenant qu’elle devra être vaccinée pour travailler comme aide-diététicienne pour son ancien employeur. Elle reconnait avoir dit à la Commission qu’elle voulait retourner travailler pour son ancien employeur. Cependant, elle affirme qu’elle n’a jamais dit qu’elle limitait sa disponibilité auprès de cet employeur ou qu’elle ne cherchait pas un autre emploi.

[71] Au contraire, elle affirme qu’elle cherchait du travail. Elle a fourni des éléments de preuve crédibles de la façon dont elle faisait du réseautage avec des amis et des gens de son église. Elle a présenté plusieurs demandes d’emploi depuis qu’elle a perdu son emploi. Ses efforts pour trouver un emploi ont été couronnés de succès puisqu’elle a commencé à travailler pour X le 12 mai 2022. Lorsque cet emploi s’est avéré trop éloigné, elle en a obtenu un autre à l’usine de transformation de la viande le 28 juin 2022. Cependant, comme je l’ai mentionné plus haut, la preuve appuie la conclusion selon laquelle elle n’a pas commencé à chercher un autre emploi avant le 4 mai 2022.

[72] La prestataire reconnait volontiers qu’elle a cessé d’être disponible pour un autre emploi à compter du 28 juin 2022, date à laquelle elle a commencé à travailler à l’usine de transformation de la viande. En effet, elle dit que son emploi à l’usine de transformation de la viande est suffisant.

[73] Compte tenu de ce qui précède, je conclus que du 4 mai 2022 au 27 juin 2022, la prestataire satisfaisait aux exigences liées à ce troisième élément. Par conséquent, elle n’est pas inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi pendant cette période.

[74] Dans l’ensemble, je juge que la prestataire n’a pas prouvé qu’elle était disponible en vue de recevoir des prestations d’assurance-emploi du 14 novembre 2021 au 3 mai 2022 et à partir du 28 juin 2022. La prestataire reconnait volontiers qu’elle limite sa disponibilité auprès de son employeur actuel à l’usine de viande. Elle a commencé cet emploi le 28 juin 2022. Par conséquent, elle est inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi du 15 novembre 2021 au 3 mai 2022, et à compter du 28 juin 2022.

Conclusion

[75] La Commission a démontré que la prestataire a été congédiée en raison d’une inconduite. Par conséquent, la prestataire est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi à compter du 14 novembre 2021.

[76] La prestataire répond aux exigences de disponibilité du 4 mai 2022 au 27 juin 2022. Par conséquent, elle est inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi du 15 novembre 2021 au 3 mai 2022, et à compter du 28 juin 2022Note de bas page 21.

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